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HAL Id: hal-01312708 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01312708 Submitted on 8 May 2016 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Les musiques mixtes temps réel : pour une interprétation du son électronique en concert Laurent Pottier To cite this version: Laurent Pottier. Les musiques mixtes temps réel : pour une interprétation du son électronique en concert . Soixante ans de musiques mixtes, Marc Battier - OMF MINT, Nov 2012, Paris, France. ￿hal-01312708￿ 1 Laurent Pottier CIEREC - EA3068 Université Jean Monnet – Saint-Etienne LES MUSIQUES MIXTES TEMPS REEL : POUR UNE INTERPRETATION DU SON ELECTRONIQUE EN CONCERT Le sujet de notre étude porte sur la possibilité et l’intérêt d’interpréter les parties électroniques dans les musiques mixtes. Longtemps synonymes de musiques fixées (figées), les parties électroniques des musiques mixtes peuvent bénéficier aujourd’hui de technologies et de savoir-faire qui permettent de les rendre plus flexibles, de les interpréter et même d’envisager l’improvisation. A propos de l’appellation « Musique mixte » Instruments acoustiques et bande L’appellation « Musique mixte » peut être utilisée sous des acceptations différentes et elle a nécessairement évolué en fonction des technologies disponibles à différentes époques. A l’origine, à partir des années cinquante, elle était employée pour désigner des musiques faisant se côtoyer sur scène des instruments acoustiques traditionnels et des musiques électroacoustiques fixées sur un support1. Déjà sur cette définition s’installe un premier doute. S’agit-il exclusivement de musiques pour le concert2, ou peut-on parler de musique mixte lorsqu’il n’en existe qu’un enregistrement ? Dans ce dernier cas, s’agit-il d’opposer deux types de sons, sons reconnaissables d’instruments acoustiques, et sons électroniques obtenus par synthèse ou par traitement3 ? Que dire alors d’œuvres mixtes dont la partie électronique n’est formée que d’un assemblage de sons d’instruments acoustiques. Par ailleurs, on trouve aussi parfois sous le 1 Jazz et Jazz (1951 – André Hodeir), pour le Jazz Groupe de Paris et bande magnétique, pièce réalisée au GRM. 2 Imaginary Landscape No. 1 (1939 – John Cage), pour piano préparé, percussions et sons électroniques enregistrés sur disques et joués en direct. 3 Gesang der Jünglige (1956 – Karlheinz Stockhausen), pièce électroacoustique, mélange de sons synthétiques et de voix d’adolescents enregistrées, traitées ou non. 2 terme « musique mixte » des musiques instrumentales dont certaines parties sont simplement là pour remplacer des musiciens par manque de moyens. Instruments acoustiques et instruments électroniques Avec l’apparition des synthétiseurs au milieu des années soixante et de nombreux appareils pour le traitement du son, il est devenu plus facile de produire des sons électroniques en direct, et ainsi de permettre une certaine interprétation de la partie électronique. La dénomination musique mixte en apparaît alors modifiée. On peut notamment distinguer le cas où des instruments acoustiques dialoguent avec des instruments électroniques, de celui pour lequel l’instrument acoustique sert de source à des transformations électroniques. Dans ce deuxième exemple, certains cas peuvent être sujets à des interrogations. La guitare électrique, omniprésente dans les productions de musiques commerciales actuelles, est bien un instrument électronique, notamment avec les modules d’effets qui l’accompagnent systématiquement. Les musiques commerciales méritent-elles pour autant l’appellation musique mixte ? Ce terme ne s’applique généralement qu’aux musiques d’une certaine esthétique, mais les frontières des genres ne sont pas étanches et il est donc clair qu’il n’existe pas une définition unique des musiques mixtes Nous placerons sous la dénomination « musiques mixtes », sans nous préoccuper de questions esthétiques, les musiques qui font se côtoyer en concert des instruments acoustiques et des sons électroniques, ces derniers pouvant être enregistrés au préalable et fixés sur support, synthétisés en direct, ou obtenus par transformation du son produit en temps réel par les instruments acoustiques. Nous pouvons alors intégrer sous cette dénomination des œuvres intégrant des theremins que des ondes Martenot, voire des dispositifs électroniques encore plus anciens.4 4 En 2012, le musicologue Jean-Christophe Branger a découvert une partition du poème symphonique Visions (1891) de Jules Massenet, comportant des portées destinées à être jouées par un Electrophon accompagnant un orchestre symphonique, ce qui pourrait en faire la première pièce mixte jamais écrite, près de soixante ans avant la naissance de la 3 Instruments acoustiques et dispositifs numériques Dans les années quatre-vingt, les pratiques électroacoustiques ont changé, suite à une évolution technologique majeure, le passage des outils analogiques vers des outils numériques, avec en particulier l’apparition de la norme MIDI. D’un côté on a vu disparaitre des façades des synthétiseurs numériques commerciaux tous les dispositifs de contrôles temps réel qui équipaient les appareils analogiques, d’autre part le développement des échantillonneurs a généralisé l’utilisation des sons enregistrés, au détriment des techniques de synthèse. Par rapport aux pratiques issues des deux grandes écoles de musiques électroacoustiques, musiques concrètes de Pierre Schaeffer et musiques électroniques de Karlheinz Stockhausen, cette évolution a favorisé les pratiques concrètes, résolvant notamment le problème de la synchronisation entre instruments acoustiques et sons fixés, puisque ceux-ci pouvaient être fractionnés en petits éléments à déclencher indépendamment. Le travail d’interprétation s’est ainsi souvent limité à des déclenchements d’évènements, associés aussi, dans la tradition électroacoustique, à un travail d’interprétation concernant la diffusion du son et sa spatialisation. Les musiques mixtes interactives numériques ont commencé à se développer à la fin des années soixante-dix, avec la construction des premières stations audionumériques, dans des centres qui avaient anticipé l’utilisation de l’informatique pour la musique, comme l’Ircam avec la 4X5 (1978) ou le GRM avec SYTER6 (1978). Ce type de dispositifs a permis des contrôles calculés avec précision, réalisés en temps réel, sur la synthèse ou le traitement du son. musique concrète ! Cette pièce n’avait jamais été jouée en concert avec ce dispositif, probablement en raison d’une trop forte instabilité du dispositif technique à l’époque. Une version mixte interactive de la pièce a été créée par l’orchestre symphonique Loire-Saint- Etienne le 4 décembre 2012 (réalisation L. Pottier). 5 Repons (1981 – Pierre Boulez) ou Jupiter (1987 – Philippe Manoury). 6 Assolutamente (1990 – Jean Schwartz) pour basson et électronique temps réel SYTER. 4 Figure 1 : différentes catégories de musiques mixtes. Les possibilités expressives des instruments électroniques Le rock électronique allemand Dans les années soixante-dix, en Allemagne de l’ouest, des musiciens ont formé des groupes se produisant en concert et réalisant des disques avec des instruments électroniques. Plusieurs de ces musiciens furent des élèves de Karlheinz Stockhausen, comme Edgar Froese, fondateur du groupe Tangerine Dream7, Holeger Czukay et Irmin Schmidt, fondateurs du groupe Can ou Ralf Hutter et Florian Schneider les leaders de Kraftwerk. Les synthétiseurs sont devenus des instruments à part entière qu’il était possible d’utiliser sur scène, et les productions qu’ils ont permis de réaliser ont rencontré un succès international dans le monde des musiques commerciales. Dans ces musiques électroniques, tout était joué en direct, même si les premiers séquenceurs permettaient de faire tourner en boucle des phrases jouées en direct. Ces instruments permettaient l’improvisation, dans le processus même de construction du son, même si la richesse des sons produits pouvait difficilement rivaliser avec celle des instruments acoustiques. La diversité des sons n’était obtenue qu’en s’entourant d’une grande quantité de matériel. 7 COPE, Julian, Krautrock-Sampler, (éd. or. 2005, Kargo), trad. O. Berthe, Mercuès, Kargo & l’Eclat, 2008, p.13. Musiques mixtes Electronique Interprète Contrôle synthèse temps réel traitements temps réel instrumentiste sur instrument acoustique instrumentiste sur instrument électronique déclenchement sons fxés sur support contrôle automatique contrôle gestuel 5 Figure 2 : Klaus Schulze en concert (Paris, mai 1977) © L. Pottier. Les interfaces pour le contrôle des sons étaient le plus souvent des claviers, des pads de percussions, des pédales, des interrupteurs, des curseurs et des boutons rotatifs. Les paramètres contrôlés étaient bien sûr en premier lieu la hauteur des sons, leur intensité, mais aussi des paramètres de filtres ou de modulations. L’exemple de Turenas Live (2011) En mai 2011, lors des JIM8, la pièce Turenas (1972) de John Chowning a été jouée pour la première fois par des interprètes, sans aucun son enregistré, en synthèse directe contrôlée par des interprètes9. Lors de la création de cette version live de Turenas, John Chowning n’a pas caché sa satisfaction de découvrir une version vivante de sa pièce, qu’il n’aurait jamais osé imaginer lorsqu’il l’avait créée, quarante ans auparavant. Sans parler de la réalisation technique d’une telle opération, cette nouvelle création d’une pièce du répertoire a montré ce que peuvent apporter des interprètes à une œuvre électronique. En dehors de l’intérêt manifeste qu’a suscité chez des interprètes non spécialistes10 des 8 Journées d’informatique musicale. 9 POTTIER Laurent, « La "régénération" des sons de Turenas de John Chowning », Préserver - Archiver - Re-produire : musique et technologie, jeux vidéo, dir. E. Gayou, coll. Portraits Polychromes, Hors-série thématique, INA-GRM, 2013. uploads/s3/ texte-lp7.pdf

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