Première partie Le fonctionnement du système éducatif français Le fonctionnemen

Première partie Le fonctionnement du système éducatif français Le fonctionnement du système éducatif français 12 Chapitre 1 Les réformes sous la Ve République Dans le monde éducatif, le terme de « réforme » a deux significations : d’une part, des réformes institutionnelles importantes, ainsi les lois, d’autre part, des modifications administratives et pédagogique plus modestes (arrêtés, circulaires et notes de services) qui sont rendues quasi obligatoires pour la gestion d’une organisation affectant quinze millions d’élèves et plus d’un million de personnels. De Jean Berthoin à Luc Chatel, le système éducatif a évolué au rythme des transformations sociétales et des volontés politiques. 1.1 1959 : Jean Berthoin redessine les contours du système scolaire Pour répondre aux nouveaux besoins liés à la croissance entre 1956 et 19621, le gouvernement du général de Gaulle mène une politique de modernisation et de démocratisation du système éducatif. Le ministre de l’Éducation nationale Jean Berthoin, prolonge la scolarité obligatoire de quatorze à seize ans et réforme l’organisation du système éducatif. Les centres d’apprentissage deviennent des collèges d’enseignement technique (CET), les cours complémentaires de l’enseignement primaire supérieur se transforment en collèges d’enseignement général (CEG). Un cycle d’observation de deux ans (6e, 5e) commun à toutes les sections est mis en place dans le but d’orienter les élèves vers l’enseignement le mieux adapté, selon leur mérite et non selon leur origine sociale. C’est vraisemblablement sur cette problématique de l’orientation que cette réforme échouera : le cycle d’observation entraîne peu de redistribution en classe de 4e des élèves qui continuent leur scolarité dans le type d’établissement au sein duquel ils l’ont commencée. Il n’en demeure pas moins qu’il existe alors quatre possibilités de poursuite d’études : deux filières générales, courtes ou longues, et deux filières techniques, courtes ou longues. 1  1 000 ingénieurs ou scientifiques étaient alors nécessaires mais n’étaient prévus que 24 000 diplômés de l’enseignement (source : MEN - ministère de l’Éducation nationale). Les réformes sous la Ve République 13 À partir de cette période, les effectifs du premier cycle vont progresser très rapidement : dans les CEG, on passe de 474 500 élèves en 1959- 1960, à 789 300 en 1963-19642. Il faut ajouter qu’une autre réforme se « calera » à la suite de la politique menée par Jean Berthoin : celle conduite par le ministre de l’Éducation nationale Christian Fouchet et le recteur Jean Capelle. Les collèges d’enseignement secondaire (CES) sont alors mis en place avec une logique de filière3 : – l’enseignement général long aboutissant aux lycées, et sanctionné par le baccalauréat ; – l’enseignement général court adjoint d’une classe complémentaire ou conduisant à l’enseignement professionnel en deux ans (CET) ; – un cycle de transition (6e et 5e) suivi d’un cycle terminal pratique. 1.2 1975 : René Haby instaure le collège unique Cette réforme constitue l’aboutissement d’un processus d’unification et de démocratisation. René Haby unifie les structures du premier cycle, qui deviennent des « collèges ». Les sections deviennent « indifférenciées » et l’organisation de la scolarité en filières disparaît, dans une volonté de brassage permettant l’accès de tous à une culture commune. La répartition des élèves dans les classes s’effectue sans distinction, des actions de soutien et des activités d’approfondissement sont organisées, le diplôme national du brevet des collèges sanctionne la formation acquise4. Le principe de la réforme était d’orienter les élèves en fonction de leurs aptitudes, en fin de 3e, vers l’enseignement général, technique ou professionnel. Cependant, il subsistait, en fin de 5e une orientation, notamment vers des classes de préparation au CAP5, permettant au système éducatif de trouver une place aux élèves en « non-réussite » ou désireux d’apprendre un métier. Pour de multiples raisons, la réforme n’a été mise en application qu’à la rentrée scolaire de septembre 1977. 2 Source : www.vie.publique.fr. 3 Source : La Documentation française. 4 Il remplace le brevet d’études du premier cycle du second degré (BEPC) créé en 1947. 5 Certificat d’aptitude professionnelle. Le fonctionnement du système éducatif français 14 Le « collège unique » est très vite confronté à des difficultés persistantes, en particulier les conséquences de la massification de l’enseignement depuis les années soixante, les pesanteurs sociologiques et l’hétérogénéité des publics. En outre, les procédures d’orientation ne sont pas satisfaisantes et une ambigüité persiste : le collège doit accueillir tous les enfants jusqu’à seize ans, tout en préparant une partie d’entre eux à des études longues. La réforme Haby n’a pas réussi à créer un véritable parcours unique : le jeu des options a très vite joué, à l’entrée en classe de 4e, un rôle de filtre. 1.3 1982 : Alain Savary rénove le collège unique En décembre 1982, Louis Legrand, ancien directeur de l’Institut national de la recherche pédagogique, remet au ministre de l’Éducation nationale, Alain Savary, un rapport intitulé : « Pour un collège démocratique ». Le projet est accueilli comme une nouvelle grande réforme. Il propose : – d’aménager dans les classes de 6e et de 5e des temps de travail en groupes d’élèves de niveau hétérogène et des temps en groupes de même niveau ; – d’adapter les programmes nationaux à la diversité des publics et des situations locales ; – de favoriser les activités d’expression et de production technique ; – de renforcer les liens entre l’élémentaire et le secondaire, pour faciliter le passage en classe de 6e ; – de favoriser l’autonomie des établissements, pour prendre en compte la diversité des situations locales, et de transformer la vie des collèges, en donnant des pouvoirs et des responsabilités aux partenaires (collectivités locales, associations, entreprises) ; – de mettre en place un tutorat destiné à aider les élèves dans leur travail et leur vie scolaire ; – de transformer les fonctions et les services des enseignants qui effectueraient seize heures d’enseignement, trois heures de concertation en équipe pédagogique et trois heures de tutorat. Cependant, l’application de la réforme s’est faite sur la base du volontariat des établissements, ce qui en a réduit la diffusion. Les réformes sous la Ve République 15 1.4 1989 : Lionel Jospin et la « loi d’orientation sur l’éducation » Sous la présidence de François Mitterrand et le gouvernement de Michel Rocard, cette loi, qui propose un projet global d’éducation, synthétise et consacre des solutions mises en œuvre de longue date par voie réglementaire ou administrative. En effet, elle confirme nombre de dispositions déjà décidées et en cours d’application, comme la notion d’équipe pédagogique, le projet d’établissement et le rôle des personnels administratifs. « La loi de 1989 marque une rupture. Mais elle ne fait que confirmer des transformations enclenchées depuis longtemps au sein du système éducatif », confirme Claude Lelièvre, historien de l’éducation. Article premier (extraits) « L’éducation est la première priorité nationale. Le service public de l’éducation est conçu et organisé en fonction des élèves et des étudiants. Il contribue à l’égalité des chances. […]. Pour garantir ce droit, la répartition des moyens du service public de l’éducation tient compte des différences de situations objectives, notamment en matière économique et sociale. Elle a pour objet de renforcer l’encadrement des élèves dans les écoles et établissements d’enseignement situés dans des zones d’environnement social défavorisé et des zones d’habitat dispersé, et de permettre de façon générale aux élèves en difficulté de bénéficier d’actions de soutien individualisé. […] Dans chaque école, collège ou lycée, la communauté éducative rassemble les élèves et tous ceux qui, dans l’établissement scolaire ou en relation avec lui, participent à la formation des élèves… » Cette loi est accompagnée d’un rapport d’orientation dont une grande partie est destinée à rappeler ou à instaurer des principes généraux et objectifs. L’article 1er a valeur de programme pour le système éducatif tout entier et souligne que l’élève ou l’étudiant doit être un acteur de sa propre orientation et non la subir. La loi rappelle l’existence d’une « communauté éducative » déjà affirmée par la loi Haby, et insiste sur la nécessité d’intégration des élèves et étudiants handicapés. La scolarité est organisée en cycles : trois pour le primaire, trois pour le collège, et des cycles différenciés, nombreux au lycée selon les filières. Le fonctionnement du système éducatif français 16 La formation des enseignants est repensée à travers les Instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM). Ces établissements publics à caractère administratif doivent assurer une formation et une culture professionnelle qui se veut commune à tous les enseignants du primaire et du secondaire. Le Conseil supérieur de l’Éducation nationale et le Conseil de l’enseignement général et technique fusionnent en une instance unique qui prend le nom de Conseil supérieur de l’éducation. Cette instance perd toutefois son rôle contentieux et disciplinaire à l’égard de l’enseignement supérieur, qui est confié au CNESER6. Les écoles, collèges et lycées sont tenus d’élaborer et d’appliquer un projet d’établissement qui détaille la mise en œuvre des objectifs nationaux et les adapte à la situation locale, tant géographique qu’humaine. Le projet d’établissement marque la particularité d’un lieu enregistrant les manques, les besoins et les demandes des élèves. La loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989, dite « loi Jospin uploads/s3/ le-systeme-educatif-francais.pdf

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