Droit international privé : Partie II (Stéphanie Franck) Partie II : Les Obliga

Droit international privé : Partie II (Stéphanie Franck) Partie II : Les Obligations en Droit International Privé Nous allons faire envisager le droit dans sa dimension relative. Il n’y a plus de nécessité prédéterminée. On est dans une dimension et un questionnement préalable à ce que l’on a fait jusqu’à maintenant (c'est-à-dire examiner le droit dans deux dimensions), on est dans la dimension substantielle du droit. Les gens ont l’art de se mettre dans des situations extrêmement compliquées, et à plus forte raison dans les situations internationales. TITRE 1 : LES CONTRATS : REGLES GENERALES CASUS GENERAL : L’OKTOBERFEST DU CERCLE DE DROIT Le cercle de droit organise une « semaine allemande » au mois d’octobre : l’idée est de s’inspirer de l’Oktoberfest bavaroise ! Le président du cercle de droit se charge de la commande des fûts de bière : il repère sur internet un classement des brasseries allemandes et choisit la meilleure d’entre elles. A la suite d’une longue conversation téléphonique avec le directeur de cette brasserie durant laquelle le nombre de fûts et le prix sont déterminés, le président du cercle envoie un message électronique de confirmation de commande (« Comme convenu par téléphone, je vous confirme la commande de 28 fûts de telle bière au prix de XXX euros à livrer au plus tard le 1er octobre prochain à 10h du matin à LLN à l’adresse XXX »). En vue de la préparation de la semaine allemande, le cercle commande également un stock important de saucisses allemandes, loue des costumes bavarois, engage un chanteur tyrolien et un accordéoniste pour animer les soirées. Les fûts n’arrivent pas. Et sans bière allemande, pas d’Oktoberfest à Louvain-la-Neuve… La semaine allemande tourne au fiasco. Le chanteur tyrolien casse les oreilles des membres du cercle qui se sentent ridicules dans leur costume bavarois. Le 2/10, la trésorière du cercle envoie un fax à la Brasserie allemande en la sommant de s’exécuter dans la journée. La Brasserie répond par fax le jour même. Elle considère qu’aucun contrat n’a été conclu avec le cercle de droit car elle n’a pas reçu de confirmation à la suite de la conversation téléphonique avec le président du cercle, conversation qui par ailleurs n’aurait pas donné lieu à la conclusion d’un contrat oral tant elle serait restée générale. Le 3/10, le cercle organise une réunion de crise. Il s’agit de dresser un plan de bataille pour obtenir réparation du dommage subi à la suite du fiasco de la semaine allemande… Droit international privé : Partie II (Stéphanie Franck) 2 On analysera d’abord les règles générales, telles que celles relatives au contrat de vente. Plus tard, on analysera les règles spéciales, spécifiques à certains contrats (ex. : contrat de consommation). Le Cercle de Droit demandera des dommages et intérêts pour inexécution du contrat car ils ont engagé beaucoup de frais pour l’organisation de l’événement. INTRODUCTION : QUELQUES RAPPELS AVANT DE COMMENCER Section 1 : Déroulement du litige selon la méthode de simulation 1. Il faut commencer par la simulation : il faut simuler le litige, pour dégager l’option la plus favorable. 2. Il faut commencer par identifier le juge compétent – selon les règles de conflit de juridiction. Le fait que le juge soit belge ou allemand aura une influence sur l’ensemble du litige. 3. En second lieu, il faut identifier la loi applicable, en vertu de la règle de conflit de loi. Cette loi ne sera pas nécessairement la même selon que l’on est en Belgique ou en Allemagne. 4. En troisième lieu, la règle de conflit de loi nous permettra de trouver le droit applicable (probablement le droit allemand ou le droit belge). 5. Le droit applicable ensuite doit être appliqué. Si le droit applicable est le droit étranger, le maniement d’un droit qui n’est pas le nôtre pose cependant parfois des questions spécifiques. Cela peut donner lieu à des difficultés caractéristiques en droit international privé, comme le soulèvement de l’exception d’ordre public en cas d’incompatibilité grave. 6. L’on aboutit enfin à une solution : le cercle de droit peut recevoir des dommages et intérêts ou non. La décision judiciaire, en fonction de là où on a agit, a été obtenue en Belgique ou en Allemagne. Si on l’a obtenue en Belgique, et qu’elle condamne la brasserie à verser des dommages et intérêts, la brasserie ne va pas nécessairement payer (après que l’on ait envoyé le jugement à l’étranger selon une procédure spécifique). Si la brasserie n’obtempère pas, il faudra faire exécuter le jugement pour pouvoir saisir un compte en banque ou d’autres biens meubles. C’est à nouveau une question de nature spécifique en droit international privé : quand on doit faire exécuter une décision étrangère en Allemagne, l’huissier belge ne connait pas le juge allemand, et inversement. L’Allemagne est un autre système juridique, les décisions Droit international privé : Partie II (Stéphanie Franck) 3 étrangères n’ont pas de force obligatoires. Il faudra à nouveau remplir des conditions spécifiques pour obtenir l’exécution du jugement. L’on va tenir ce raisonnement pour les contrats en général, ainsi que pour les contrats spéciaux (contrat de travail, de consommation, relatifs à la représentation commerciale). Pour les contrats spéciaux, on trouvera des règles spéciales. Avant de se demander ce que l’on fait, il faut évaluer ce qui nous est le plus favorable entre agir en Belgique et en Allemagne. Il peut être plus facile d’agir en Belgique, mais l’on obtient alors une décision belge. Cela vaut la peine si le droit est plus favorable. Mais si la règle de conflit de loi allemande désigne un droit plus favorable, cela vaut la peine d’agir en Allemagne – si l’on en a la possibilité. Pour chacune de ces questions, l’idée est d’identifier la règle. Section 2 : Les sources Rappel du principe : La règle internationale a priorité sur la règle nationale. Il faut chercher s’il y a une règle internationale dans la matière qui nous concerne, et s’il n’y en a pas, l’on retombe sur la règle nationale. Dans cette matière, les sources internationales sont extrêmement nombreuses : Ø Convention de Bruxelles du 27 sept. 1968 : première convention multilatérale sur la question de la compétence internationale et sur la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale. Cette convention porte sur quasi l’ensemble des litiges, à l’exclusion de ceux en matière familiale. Ø et la Convention de Lugano du 16 sept. 1988 : il s’agit d’un copier-coller de la Convention de Bruxelles avec les Etats de l’AELE (Suisse, Norvège, Finlande...) Ø Règlement 44/2001, dit « Bruxelles I » (applicable aux actions introduites après le 1er mars 2002, art. 66 et 76) : les institutions européennes ont reçu une nouvelle compétence en matière de droit international privé. Elles ont donc repris la Convention de Bruxelles pour leur compte, l’ont modernisé et en ont fait un règlement, avec une appellation tirée de la Convention de Bruxelles : cela a donné la règlement dit Bruxelles I. Bruxelles II est le pendant de Bruxelles I en matière familiale. Ø et Convention de Lugano bis du 30 oct. 2007 (applicable aux actions introduites après le 1 janv. 2010) : comme les institutions européennes ont revu la Convention de Bruxelles, elles ont également revu la Convention de Lugano. Ø Règlement 1215/2012, dit « Bruxelles I bis » (la refonte): applicable aux actions introduites après le 10 janv. 2015 (art. 66 et 81) : Les institutions européennes ont entrepris une réforme de Bruxelles I. Ce nouveau règlement est appelé le règlement Bruxelles Ibis. On l’appelle également « la refonte » ou « the Recast » en anglais. Il a été adopté en décembre 2012 et est applicable aux actions introduites après le 10 janvier 2015. Remarques : Ø Nous étudierons essentiellement le règlement Bruxelles Ibis car c’est celui qui sera applicable à la sortie de nos études. Ø Les EM ont donné la compétence à la CJUE d’interpréter la Convention de Bruxelles, via un protocole additionnel. Les arrêts que nous étudierons seront parfois très anciens Droit international privé : Partie II (Stéphanie Franck) 4 et porteront sur la Convention de Bruxelles ou sur le règlement Bxl I mais, comme la formulation du règlement Bxl 1bis est souvent identique, ces arrêts restent valables pour ce règlement (considérant 34). En l’espèce : Dans le cadre de notre exemple, c’est le règlement Bruxelles 1 qui nous intéresse puisque l’action est introduite en octobre 2013 (postérieur au 1er mars 2002 et antérieur au 10 janvier 2015). Qu’on agisse en Allemagne ou en Belgique, le texte de référence sera le même (norme internationale > norme nationale). Section 3 : La compétence internationale et la compétence interne Dans les sources internationales, puisque l’on commence par s’interroger sur la saisine du juge, la question de la compétence n’est pas tout à fait la même s’agissant du litige international ou du litige purement belge. Ainsi, la notion de compétence internationale se distingue bien de la notion de compétence interne. Ø En matière de compétence internationale : on s’interroge sur la possibilité pour les juridictions uploads/S4/ 001-dipe-2014-2015-partie-ii-sf-done.pdf

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  • Publié le Sep 13, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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