Mémoires et thèses – Décembre 2005 URL : http://religion.info/pdf/2005_12_moos_

Mémoires et thèses – Décembre 2005 URL : http://religion.info/pdf/2005_12_moos_nd.pdf © 2005 Olivier Moos Olivier Moos Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion Histoire et idéologie d'un antichristianisme de droite (1968-2001) Mémoire présenté à l'Université de Fribourg (Suisse) en 2003 (revu en 2005) Olivier Moos – Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion - 2005 2 Table des matières Introduction p.3 La Femme et l'Occident p.9 La « condition féminine », une dialectique Orient-Europe p.12 Avortement, ou les repères d'une anthropologie gréciste p.18 La question « sexuelle » et l’Occident p.23 Quelques réflexions sur le « féminisme » néo-droitier et la place de l’image dans la revue Eléments p.35 Christianisme et totalitarisme p.43 Christianisme et national-socialisme p.49 Du « christianisme » au « communisme », histoire d’une filiation p.57 Quelques points de convergence : la cité et la sphère p.62 Le catholicisme post-conciliaire : vers un « néo-christianisme p.66 Les survivances du paganisme p.72 L’ « Occident chrétien », un phénomène hybride p.72 Les « hérésies », une géographie identitaire p.79 Une pratique « culturante » ou cultuelle ? p.89 Le GRECE et l’histoire p.93 Une instrumentation de l’histoire p.94 Entre histoire et mémoire p.102 Clovis et Jeanne d’Arc : entre refus et récupération p.106 Conclusion p.111 Bibliographie p.115 Olivier Moos – Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion - 2005 3 Introduction L’analyse du discours antichrétien de la « Nouvelle Droite » peut s’engager sur deux voies complémentaires : la première, conformément à l’histoire des intellectuels, rationalise les réseaux d’appartenance, circonscrit les groupements et associations, et cherche les échos au sein des milieux sensibilisés par ce discours. La seconde voie repère la genèse et le parcours de l’idée antichrétienne dans la littérature néo-droitière, décortique les différents corps argumentatifs qu’elle revêt et dévoile ses articulations avec les exigences idéologiques et stratégiques du mouvement gréciste. C’est ce deuxième chemin que nous avons emprunté. D’abord en raison des travaux précédents menés par Anne-Marie Duranton-Crabol1 et par Pierre-André Taguieff2, qui ont mis en lumière les réseaux, déterminé les lieux d’expression, analysé les personnages clés du mouvement et dégagé les origines de la pensée néo-droitière. Ensuite, parce que si aucun des auteurs cités n’a bien sûr négligé l’importance de l’antichristianisme, nul n’a encore pris soin d’analyser plus attentivement ses modes d’expression et sa fonction dans le corpus idéologique de la « Nouvelle Droite ». Le terme de « Nouvelle Droite »3 présente un caractère essentiellement polémique. Forgé par le milieu journalistique à partir de 1978, puis reprise par les intellectuels concernés, cette expression ne désigne pas une référence précise mais caractérise plus strictement le Groupement de Recherche et d’Etudes pour la Civilisation Européenne (G.R.E.C.E.) et sa mouvance.4 Le GRECE est une association d’intellectuels issus de divers milieux nationalistes5, apparue entre 1Visages de la Nouvelle Droite. Le G.R.E.C.E. et son histoire, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 1988. 2 P.-A. Taguieff, « La stratégie culturelle de la “Nouvelle Droite” en France (1968-1983) », in R. Badinter (sld), Vous avez dit Fascismes?, Paris, Montalba, 1984 ; Sur la Nouvelle Droite. Jalons d’une analyse critique, Paris, Descartes & Cie, 1994. 3 Suivant en cela la prudence de Pierre-André Taguieff, nous aurons recours aux guillemets pour l’expression « Nouvelle Droite » afin de souligner le caractère construit du phénomène. (Sur la Nouvelle Droite, op. cit., p.III). 4 Ibid., p.10. Dans le cadre de notre étude, nous utiliserons indifféremment les adjectifs « gréciste » et « néo-droitier » pour qualifier des auteurs dont le degré d’engagement peut varier considérablement. Le critère de sélection des articles est double : le parcours de l’auteur et la nature de ses rapports avec le GRECE. Cependant, le caractère relativement figé de l’antichristianisme néo-droitier et sa fonction de relais identitaire nous autorisent à intégrer certains écrits périphériques au mouvement gréciste, malgré le fait que leurs auteurs ne soient pas membres du mouvement. 5 Jeune Nation, groupe ultranationaliste fondé en novembre 1954 autour de Pierre Sidos ; Fédération des Etudiants Nationalistes, groupuscule estudiantin d’extrême-droite fondé en mai 1960 ; Mouvement Nationaliste du Progrès, parti « légaliste » fondé en janvier 1966 par les dirigeants d’Europe Action, de la F.E.N. et certains éléments du Comité Tixier Vignancour et constituant la première tentative de réorganisation politique des activistes nationalistes de Olivier Moos – Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion - 2005 4 1968 et 1969. Véritable laboratoire d’idées représentant « l’intelligente réadaptation » aux nouvelles conditions idéologico-politiques de l’extrême-droite en France6, le mouvement gréciste réactualisa une pensée éclipsée depuis les années trente en la modernisant et en la rendant assimilable par une intelligentsia française, celle-là même que le GRECE entendait influencer et finalement conquérir.7 Cette subjugation des élites, accompagnée de la volonté d’incarner le monopole du ressourcement doctrinal de la droite,8 devait s’organiser selon une stratégie dite « métapolitique » de conquête du pouvoir culturel – par le biais d’une contre-culture de droite – en vue de s’emparer, à terme, du pouvoir politique. Le combat culturel du GRECE consiste à progressivement pénétrer les milieux médiatiques et universitaires, à mener une offensive de séduction dans les lieux de production de savoir en s'appuyant sur les réseaux du mouvement, distillant une pensée qui vise à réformer intellectuellement et de l’intérieur les partis de droite.9 Nous pouvons définir trois idées-forces qui structurent le discours des intellectuels néo-droitiers : la première repose sur le rejet des valeurs « judéo-chrétiennes », dont les plus subversives demeurent les deux idées monothéiste et égalitaire. Cet antichristianisme représente le passage obligé vers une réorganisation organique de la société, liant le peuple et l’élite, et basée sur l’authenticité fondamentale du modèle tripartite indo-européen. La deuxième idée-force implique le renouement avec une Europe préchrétienne et un paganisme réactualisé. Ces retrouvailles avec un passé pagano-européen doivent favoriser la résurgence d’un nouveau cycle historique qui verra l’extinction des valeurs subversives au profit d’une nouvelle européanité. La troisième idée- force met en évidence la valeur suprême de la « différence », qui se décline diversement depuis la pluralité essentielle des valeurs et des hommes jusqu’à l’irréductible singularité des cultures et des « mentalités ».10 L’objectif de ce travail est de circonscrire thématiquement l’antichristianisme néo-droitier et de souligner les différentes formes et mutations qu'il a adoptées durant les trois dernières décennies. Notre analyse ne prétend pas à l’exhaustivité ; notre propos est de démontrer qu'il existe bien un cadre symbolique et thématique structurant l'apparent éclatement idéologique des écrits dont la tendance raciste ; Rassemblement Européen de la Liberté, organisation fondée par Dominique Venner en 1966 en vue des législative de mars 1967. (P.-A. Taguieff, art. cité, in R. Badinter (sld), op. cit., pp.25-26). 6 Ibid., p.21. 7 Anne-Marie Duranton-Crabol, « Les néo-païens de la Nouvelle Droite », in Les collections de L’Histoire, n°14, janvier 2002, p.94. 8 P.-A. Taguieff, Sur la Nouvelle Droite, op. cit., p.10. 9 Ibid., pp.17-18. 10 Cf. A.-M. Duranton-Crabol, art. cité, in Les collections de L’Histoire, n°14, p.94. Olivier Moos – Les intellectuels de la Nouvelle Droite et la religion - 2005 5 diversité dissimule en réalité une sorte de mythe fondateur, moteur premier de l’antichristianisme néo-droitier. Les publications de la « Nouvelle Droite » ont fait débat et certaines personnalités, notamment de confessions chrétiennes, se sont efforcées de répondre aux critiques formulées par les intellectuels grécistes.11 Toutefois, compte tenu des jalons déjà posés par A.-M. Duranton-Crabol et P.-A. Taguieff, et en raison de l’inexistence de réponses institutionnelles explicitement adressées au GRECE qui permettraient de dresser une cartographie représentative, nous ne traiterons pas de l’écho de l’antichristianisme néo-droitier dans les milieux chrétiens. Il convient, en premier lieu, de souligner que l’antichristianisme désigne au moins deux réalités. La première est d’ordre idéologique : il s’agit du rejet argumenté des valeurs philosophiques ou politiques jugées héritées du judéo-christianisme. Le second aspect désigne la fonction de ce corpus, c’est-à-dire son articulation entre des exigences internes au mouvement gréciste – une construction identitaire – et des préoccupations dirigées vers les pôles culturels de la société – l’impératif « métapolitique ». Ces deux réalités sont complémentaires. Le corpus antichrétien abrite un ensemble composite d’arguments qui s'organisent selon une cohérence que nous mettrons en évidence à chacune des étapes de notre analyse. Le terme « christianisme » demeure donc polysémique ; il trace des frontières symboliques et désigne une subversion avant de caractériser une structure religieuse particulière. En effet, 11 Notons que c’est des milieux catholiques qu’est venue la dénonciation initiale du GRECE (A.-M. Duranton- Crabol, Visages de la Nouvelle Droite, op. cit. , p.176). Nous signalons ici quelques auteurs de confessions chrétiennes ayant répondu à la critique de la « Nouvelle Droite » : Débat entre Jean-Luc Marion et Alain de Benoist : Avec ou sans Dieu – L’avenir des valeurs chrétiennes, Paris, Beauchesne, 1970 ; Jean Madiran, « Nouvelle droite et délit d’opinion », Itinéraires, n°spécial hors série, octobre-novembre 1979 ; Paul Valadier, « A fond(s) perdu(s) ? Sur quelques thèses de la nouvelle droite intellectuelle », in Etudes, n°350, mars 1979 ; Etienne Borne, « Les visionnaires en délire uploads/S4/ 2005-12-moos-nd.pdf

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  • Publié le Jan 01, 2022
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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