Fiches d’arrêts 05/11/2009 Séance 5 . CE Sect. , 5 mai 1944, Dame Veuve TROMPIE

Fiches d’arrêts 05/11/2009 Séance 5 . CE Sect. , 5 mai 1944, Dame Veuve TROMPIER GRAVIER ; (Par cet arrêt, le Conseil d’État affirme l’existence d’un principe général de respect des droits de la défense dès lors qu’une décision administrative revêt, à l’encontre de la personne concernée, le caractère d’une sanction.) Faits : Mme Trompier-Gravier, qui était titulaire d’une autorisation de vendre des journaux dans un kiosque du boulevard Saint-Denis à Paris, s’était vu retirer cette autorisation au motif qu’elle aurait voulu extorquer des fonds à son gérant Problème Juridique : En quoi cet arrêt consacre-t-il une évolution des droits de la défense ? Comment cet arrêt consacre-t-il les décisions prisent lors de l’arrêt Téry ? Solution : Le Conseil d’État, saisi d’un recours de l’intéressée contre cette décision de retrait, donna raison à la requérante en jugeant que "eu égard à la gravité de cette sanction, une telle mesure ne pouvait légalement intervenir sans que la dame veuve Trompier-Gravier eût été mise à même de discuter les griefs formulés contre elle". Le Conseil d’État ne prenait pas partie sur le fond de l’affaire en cause, il se bornait à relever que l’administration n’avait pas respecté le principe du respect des droits de la défense en ne permettant pas à l’intéressée de s’expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés. L’arrêt Dame Veuve Trompier-Gravier consacre une évolution jurisprudentielle ancienne qui avait déjà eu l’occasion d’affirmer l’existence d’un principe de respect des droits de la défense dans la procédure juridictionnelle (20 juin 1913, Téry, p. 736) ou, en se fondant sur l’article 65 de la loi du 22 avril 1905, s’agissant des mesures relatives à un fonctionnaire prises en considération de sa personne. L’arrêt du 5 mai 1944 étend cette garantie procédurale à toutes les mesures prises par l’administration à condition que soient réunies deux conditions : la mesure doit prendre, pour la personne visée, le caractère d’une sanction ; elle doit être, pour l’intéressé, suffisamment grave. C’est le cas, par exemple, pour une décision administrative entravant l’exercice d’une activité professionnelle (Sect. 8 janvier 1960, Ministre de l’intérieur c. Rohmer et Faist , p. 12), pour le retrait de l’agrément d’une association (Ass. 31 octobre 1952, Ligue pour la protection des mères abandonnées , p. 480), pour le retrait d’un agrément fiscal accordé à une entreprise (Sect. 25 octobre 1985, Société des plastiques d’Alsace , p. 300), pour la résiliation d’un contrat (Sect. 19 mars 1976, Ministre de l’économie et des finances c. Bonnebaigt , p. 167), pour le déclassement d’un vin d’appellation (Sect. 9 mai 1980, Société des établissements Cruse , p. 217), le rejet d’une demande d’exercice d’une profession réglementée dès lors que ce rejet repose sur des faits non mentionnés dans la demande de l’intéressé (25 novembre 1994, Palem , p. 753). Le décret du 28 novembre 1983 a étendu le champ du principe de respect des droits de la défense dans des matières qui n’étaient initialement pas concernées, notamment les mesures de police, même si demeurent hors champ les mesures prises sous l’empire de l’urgence, en cas de circonstances exceptionnelles ou les mesures prises en vertu d’une nécessité d’ordre public (13 juin 1990, S.A.R.L. Pub 90 , p. 162). Ainsi, doivent être prises en respectant les droits de la défense les mesures suivantes : dissolution d’une association (26 juin 1987, Fédération d’action nationale et européenne, p. 235) ; interdiction de la vente aux mineurs d’une revue (19 janvier 1990, Société française des revues, p. 553). Par ailleurs, le Conseil d’État a admis que des mesures qui ne revêtent pas le caractère de sanction mais qui sont prises en considération de la personne et présentent pour elle une gravité suffisante soient soumises au respect du principe des droits de la défense (ex., pour les décisions par lesquelles les caisses de sécurité sociale décident le reversement de sommes par les médecins : 30 avril 1997, Assocation nationale pour l’éthique de la médecine libérale et autres, p. 174). Le respect des droits de la défense comporte deux exigences essentielles : l’intéressé doit être informé suffisamment tôt de ce qu’une mesure va être prise à son encontre et des faits retenus contre lui, de manière à être en mesure de préparer sa défense (20 janvier 1956, Nègre , p. 24) ; lorsque les textes prévoient la communication à l’intéressé de son dossier, celle-ci doit être intégrale. En outre, en matière disciplinaire, l’intéressé peut se faire assister d’un avocat, sauf si les textes en disposent expressément autrement. . CE ass. , 17 février 1950, (Ministre de l’agriculture c.) Dame Lamotte (Par la décision Ministre de l’agriculture c/ Dame Lamotte, le Conseil d’État juge qu’il existe un principe général du droit selon lequel toute décision administrative peut faire l’objet, même sans texte, d’un recours pour excès de pouvoir.) Faits : La loi du 17 août 1940 avait donné aux préfets le pouvoir de concéder à des tiers les exploitations abandonnées ou incultes depuis plus de deux ans aux fins de mise en culture immédiate. C’est en application de cette loi que, par deux fois sans compter un arrêté de réquisition, les terres de la dame Lamotte avaient fait l’objet d’un arrêté préfectoral de concession. Le Conseil d’État avait annulé à chaque fois ces décisions. Par un arrêté du 10 août 1944, le préfet de l’Ain avait de nouveau concédé les terres en cause. Mais une loi du 23 mai 1943, dont le but manifeste était de contourner la résistance des juges à l’application de la loi de 1940, avait prévu que l’octroi de la concession ne pouvait "faire l’objet d’aucun recours administratif ou judiciaire". Sur le fondement de cette disposition, le juge administratif aurait dû déclarer le quatrième recours de la dame Lamotte irrecevable. Problème Juridique : Comment le CE peut il attaquer un acte administratif lorsque celui- ci ne fait l’objet d’aucun recours administratif ou judiciaire ? Solution : Le Conseil d’État ne retint pas cette solution en estimant, aux termes d’un raisonnement très audacieux mais incontestablement indispensable pour protéger les administrés contre l’arbitraire de l’État, qu’il existe un principe général du droit selon lequel toute décision administrative peut faire l’objet, même sans texte, d’un recours pour excès de pouvoir et que la disposition de la loi du 23 mai 1943, faute de l’avoir précisé expressément, n’avait pas pu avoir pour effet d’exclure ce recours. Le même raisonnement prévaut s’agissant du droit au recours en cassation (CE, Ass., 7 février 1947, d’Aillières). En application de cette jurisprudence, confirmée à plusieurs reprises, le pouvoir réglementaire ne peut jamais interdire le recours pour excès de pouvoir contre les décisions qu’il prend. Certes, en principe, le législateur, s’il le précisait, pourrait interdire le recours pour excès de pouvoir contre certaines décisions. Mais, dans le contexte normatif actuel, une telle disposition se heurterait sans doute aux stipulations du droit international relatives aux droits des individus à exercer un recours effectif contre les décisions administratives. La Cour de justice des communautés européennes en a fait un principe général du droit communautaire (15 mai 1986, Johnston, p. 1651) et l’article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales prévoit le droit à un recours effectif pour toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la Convention auraient été méconnus. Elle serait également et surtout contraire aux normes et principes de valeur constitutionnelle puisque, dans une décision du 21 janvier 1994 (93-335 DC, p. 40), confirmée par une décision du 9 avril 1996 (96-373 DC), le Conseil constitutionnel a rattaché le droit des individus à un recours effectif devant une juridiction en cas d’atteintes substantielles à leurs droits à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui fait partie du bloc de constitutionnalité. . CE sect. , 9 mars 1951 SOCIETE DES CONCERTS DU CONSERVATOIRE (Cet arrêt et les conclusions dans lesquelles il a été rendu consacre la théorie des «principes généraux de droit », dont la jurisprudence antérieure s’était souvent inspirée sans la nommer.) Faits : Deux membres de l'orchestre formé par la société requérante ont été sanctionnés par celle-ci pour avoir participé à des concerts radiophoniques. Par rétorsion, la Radiodiffusion française interdit temporairement d'antenne la Société des concerts du Conservatoire. Problème Juridique : Quel apport cet arrêt consacre-t-il dans le fonctionnement des services publics ? Comment le Conseil d’Etat va-t-il sanctionner l’acte d’interdiction donné par la Radiodiffusion Française ? Solution : le Conseil d'État va estimer qu'aucune raison d'intérêt général ne pouvait la justifier, qu'ainsi a été méconnu « le principe d'égalité qui régit le fonctionnement des services publics ». Le principe d’égalité implique que toutes les personnes se trouvant placées dans une situation identique à l’égard du service public doivent être régies par les mêmes règles. Le principe d’égalité n’interdit cependant pas à l’administration de traiter différemment des personnes à la condition que la différence de traitement soit en rapport avec la différence de situation ou quel tienne à des considérations d’intérêt général liées au fonctionnement même du service public. . CE Ass. uploads/S4/ administratif-seance-5.pdf

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  • Publié le Mai 02, 2022
  • Catégorie Law / Droit
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