La Revue des droits de l’homme Revue du Centre de recherches et d’études sur le
La Revue des droits de l’homme Revue du Centre de recherches et d’études sur les droits fondamentaux 6 | 2014 Revue des droits de l'homme - N° 5 Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats autour de certains droits et libertés Omar Bendourou Electronic version URL: http://journals.openedition.org/revdh/907 DOI: 10.4000/revdh.907 ISSN: 2264-119X Publisher Centre de recherches et d’études sur les droits fondamentaux Electronic reference Omar Bendourou, « Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats autour de certains droits et libertés », La Revue des droits de l’homme [Online], 6 | 2014, Online since 28 October 2014, connection on 21 December 2020. URL : http://journals.openedition.org/revdh/907 ; DOI : https://doi.org/10.4000/revdh.907 This text was automatically generated on 21 December 2020. Tous droits réservés Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats autour de certains droits et libertés Omar Bendourou 1 L’avènement de la constitution du 29 juillet 2011 qui se situe dans le sillage du printemps arabe peut paraître révolutionnaire si l’on se limite à une lecture partielle du texte. On constate d’une part la proclamation d’une longue liste des droits et les libertés et d’autre part l’engagement de l’Etat à les garantir. La Constitution paraît en outre répondre aux revendications du Mouvement du 20 février et des associations de défense des droits de l’homme, qui demandaient le renforcement et la protection des droits humains, l’établissement de la monarchie parlementaire, la fin de l’impunité, la reddition des comptes, etc. La constitution semble en somme faire la synthèse de différentes revendications de la société civile et des partis politiques. Mais, ce qui est frappant dans le domaine des libertés, c’est la contradiction entre la proclamation des droits et les restrictions qui les accompagnent à tel point que leur exercice paraît entièrement compromis. 2 Dans cette étude, nous estimons plus judicieux de dresser, dans un premier temps, un bref état des lieux des droits de l’homme au Maroc avant l’adoption de la constitution de 2011 (I), pour analyser, dans un deuxième temps les innovations de la constitution de 2011 (II) et, enfin, leur traduction sur le terrain (III). I. Les droits de l’homme avant l’adoption de la constitution de 2011 3 Le respect des droits de l’homme s’est toujours posé avec acuité dans le régime politique marocain. Les associations de défense des droits de l’homme aussi bien nationales qu’internationales ont toujours soulevé les questions relatives à la torture, à Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats autour d... La Revue des droits de l’homme, 6 | 2014 1 la détention arbitraire, à la disparition des opposants politiques… Grace à Amnesty international et aux militants nationaux des droits de l’homme, l’opinion internationale apprenait vers la fin des années 1980 l’existence d’un camp secret de détention arbitraire sous le nom de « Tazmamart » dans lequel étaient détenus les militaires ayant participé aux deux tentatives de coup d’état contre le roi Hassan II en 1971 et 1972. 4 Dès la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’union soviétique, le roi Hassan II prenait des initiatives pour attester de sa volonté de respecter les droits de l’homme en faisant adopter en 1992 un nouveau texte constitutionnel qui reconnaissait l’attachement du Maroc aux droits de l’homme tels qu’ils sont universellement reconnus1. Il s’agit en fait d’un message adressé à la communauté internationale. Le roi Hassan II a affirmé lors de la préparation du texte de 1992 que "Le Maroc ne pouvait demeurer indifférent aux profondes mutations qui surviennent partout dans le monde"2. La nouvelle réforme devrait, selon le Roi, conférer, au Maroc "le passeport pour faire (son) entrée sur la scène mondiale". Plusieurs initiatives du roi ont précédé ou accompagné la nouvelle constitution dont notamment l’installation du Conseil consultatif des droits de l’homme et la Commission d’indemnisation des victimes des violations des droits de l’homme, l’objectif étant de tourner la page du passé et de donner un signal fort à la communauté internationale. 5 Le roi Mohammed VI, dès son accession au trône, va suivre les pas de son père. Les deux premières années de son règne ont été caractérisées par un certain nombre d’actes encourageants. Ainsi, le nouveau roi reconnaît l’existence de la détention arbitraire ainsi que des disparitions forcées et ordonne la création d’une commission chargée de statuer sur l’indemnisation des victimes3 Il présente un nouveau concept d’autorité, fondé entre autres, sur la protection des libertés individuelles et collectives4 et sur l’État de droit. Il rétabli M. Abraham Serfaty (ancien détenu politique et l’un des fondateurs de l’organisation marxiste-léniniste « Ila Al Amam », partisane de l’autodétermination de la population du Sahara), dans ses droits en tant que citoyen marocain à part entière, après avoir été déchu de sa nationalité par l’ancien régime et expulsé à l’étranger. M. Serfaty a même été nommé conseiller auprès de l’Office national de recherches et d’exploitation pétrolière (ONAREP). Il crée les conditions favorables au retour de la famille du disparu Mehdi Ben Barka et de plusieurs exilés politiques etc. Par ailleurs, il insiste, à plusieurs reprises, sur son attachement à la monarchie constitutionnelle, à la démocratie, aux droits de l’Homme et à l’État de droit, etc5. Or, ce libéralisme sera de courte durée et un retour à des pratiques anciennes a été enregistré après les attentats de New York du 11 septembre 2001 et surtout après ceux de Casablanca du 16 mai 2003. 6 L’acte toutefois le plus important, qui a suscité toutefois un débat controversé, est la création de l’Instance Equité et réconciliation (IER) en janvier 2004 qui avait pour tâche d’enquêter sur les violations graves des droits de l’homme de l’indépendance du Maroc en 1956 à la mort du roi Hassan II en 1999, de dresser un inventaire sur ces violations et de procéder à l’indemnisation des victimes. 7 Si cette instance a accompli un travail non négligeable, adopté un rapport sur ses activités et adressé des recommandations, sa mission était néanmoins restée limitée. Il s’agit en effet d’une institution royale dont les activités étaient contrôlées par le roi. Il en est de même de son rapport qui a été soumis à l’approbation royale avant sa publication. Il en résulte que sa mission n’a pas entièrement répondu aux attentes de Les droits de l’homme dans la constitution marocaine de 2011: débats autour d... La Revue des droits de l’homme, 6 | 2014 2 l’opinion publique. C’est la raison pour laquelle tous les problèmes liés à la monarchie n’ont pas été élucidés comme les enlèvements de Mehdi Ben Barka en 1965 à Paris et Houcine El Manouzi en Tunisie en 1972 ainsi que les révoltes du Rif marocain (1958-1959) réprimées dans le sang par le prince héritier Moulay Hassan (devenu roi Hassan II en 1961). Autrement-dit, les cas non élucidés ont été en relation directe avec le roi Hassan II. Parallèlement à l’installation de l’IER, les violations des droits de l’homme ont persisté comme l’indiquent les associations marocaines de défenses des droits de l’homme. C’est la raison pour laquelle l’IER paraissait plutôt comme une opération de marketing politique que comme une démarche consistant à tourner la page du passé et à renforcer les droits de l’homme. 8 Il en résulte qu’à la veille du printemps arabe, la question des droits de l’homme demeurait poser comme d’ailleurs le problème lié à la nature du régime politique marocain qui restait foncièrement autoritaire. Des voix s’élevaient ainsi pour demander l’établissement de la monarchie parlementaire ainsi que le respect et le renforcement des droits de l’homme, comme le Mouvement du 20 février, certaines associations de défense des droits humains et les partis de gauche non gouvernementaux. II. Les droits de l’homme dans la nouvelle Constitution du 29 juillet 2011 9 Avant la nouvelle constitution du 29 juillet 2011, le statut juridique des libertés trouvait son fondement dans la constitution de 1996 qui proclamait un certain nombre de libertés dont la liste restait pour l’essentiel limitée. En outre, le préambule de la constitution qui affirmait l’attachement du Maroc aux droits de l’homme tels qu’ils sont universellement reconnus ne s’est jamais traduit dans les faits par des mesures concrètes, ce qui laissait cette affirmation à l’état de déclaration. La nouvelle constitution marque-t-elle une rupture avec les anciens textes constitutionnels ? La nouvelle constitution énonce une longue liste des droits et libertés dont la portée recèle toutefois des ambigüités quant à leur effectivité. A. La nature des droits et libertés proclamés 10 Dans ses dispositions, la Constitution du 29 juillet 2011 réserve une place importante aux droits et libertés des citoyens à tel point qu’elle paraîtrait comme étant une constitution des droits de l’homme, si l’on se réfère aux commentateurs proches du pouvoir 6. On distingue les droits politiques et civils, des droits économiques et sociaux. 1. La Gouvernance, les droits et libertés politiques 11 La constitution affirme dans plusieurs de ses dispositions l’attachement du Maroc au principe de participation, de pluralisme et de bonne gouvernance. Elle précise que le Maroc est une monarchie constitutionnelle, démocratique, parlementaire et sociale. Elle souligne uploads/S4/ bendourou-les-droits-de-l-x27-homme-dans-la-constitution-marocaine-de-2011.pdf
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- Publié le Nov 02, 2022
- Catégorie Law / Droit
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