A Monsieur le Premier Président De la cour d’appel de RENNES Parquet n° 10/263-

A Monsieur le Premier Président De la cour d’appel de RENNES Parquet n° 10/263-257 Non-lieu n°2014/00505 REQUÊTE EN RÉCUSATION POUR : 1. Monsieur Thierry LEMETAYER 2. Madame Hélène Anne-Cécile LEMETAYER épouse TILLE Ayant pour Avocat : Dominique TRICAUD TRICAUD-TRAYNARD, Avocats Associés 4, place Denfert-Rochereau – 75014 PARIS Tél. : 01 40 64 00 25 Fax. : 01 42 79 84 14 Elisant domicile en son cabinet PLAISE A MONSIEUR LE PREMIER PRESIDENT I. FAITS ET PROCEDURE Le 15 janvier 2004, le chalutier BUGALED BREIZH a sombré au large du cap Lizard. Les magistrats instructeurs ont conclu, comme toutes les expertises indépendantes, à la culpabilité d’un sous-marin et en ont officiellement informé les victimes (D2696). Les précédents arrêts de la chambre de l’instruction ont eu pour seul objectif de rechercher quel était le sous-marin responsable du naufrage. Après plus de dix années d’investigations, de nouveaux magistrats instructeurs ont, par ordonnance conforme en date du 26 mai 2014, prononcé un non-lieu. Les parties civiles ont interjeté appel de cette ordonnance. Leur recours sera examiné le mardi 3 mars 2015 par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de RENNES. Cette juridiction est présidée par Monsieur Jean-Louis LESAINT, dont il vous est ici demandé d’ordonner la récusation. II. DISCUSSION La procédure de récusation vise à garantir l’impartialité des magistrats, conformément à l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. L’article 668, 5° du code de procédure pénale prévoit, à cet égard, la récusation du juge qui a déjà « connu du procès comme magistrat, arbitre ou conseil, ou s'il a déposé comme témoin sur les faits du procès ». Au terme d’une jurisprudence constante, la récusation s’impose sur ce fondement dès lors que le magistrat a déjà été saisi de l’affaire (1) et qu’il a, à cette occasion, porté un jugement sur le fond du litige (2). Tel est le cas en l’espèce. 1. Sur la connaissance de l’affaire Par ordonnance en date du 18 octobre 2013, les juges d’instruction du tribunal de grande instance de NANTES ont refusé d’accueillir les demandes d’actes formulées par les parties civiles, qui ont immédiatement interjeté appel de cette décision (pièce numéro 1). Par ordonnance en date du 16 décembre 2013, le Président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, Jean-Louis LESAINT, a dit n’y avoir lieu à saisir la chambre de l’instruction de cet appel, conformément aux pouvoirs qu’il tire de l’article 186-1 du code de procédure pénale (pièce numéro 2). Il est donc indiscutable que Jean-Louis LESAINT, qui présidera l’audience du mardi 3 mars 2015 à 9h30, a déjà connu de l’affaire en sa qualité de magistrat. 2. Sur l’expression d’un préjugé sur le fond de l’affaire L’objectif de l’article 668, 5° du code de procédure pénale est d’empêcher qu’un juge ait à connaître d’une affaire dont il a déjà une opinion préconçue. La récusation est donc possible dès lors que le magistrat a, lors de sa première intervention dans l’affaire, exprimé un parti pris susceptible de fausser sa lecture du dossier. Une telle situation porterait en effet atteinte au principe d’impartialité qui dépend, au terme de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, « de la conviction et du comportement personnels du juge en telle occasion » mais qui impose également de « rechercher si le tribunal offrait objectivement des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime » (CEDH, Thomann c. Suisse, 10 juin 1996, Req. N°17602/91). La Cour de cassation a ainsi pu juger qu’un conseiller ayant participé à l'arrêt de la chambre d'accusation confirmant une ordonnance de refus d'informer ne peut, après cassation de cet arrêt, faire partie de la chambre d'accusation saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu rendue dans la même procédure (Crim. 6 janv. 2000, no 99-80.846, Bull. crim. no 5). En l’espèce, Jean-Louis LESAINT a refusé de transmettre à la chambre de l’instruction l’appel de l’ordonnance de refus de demande d’acte aux motifs que : « Les juges ont développé les raisons pour lesquelles ils estimaient qu’il n’y avait pas lieu de donner suite aux demandes actes dont ils étaient saisis ; que cette motivation, particulièrement détaillée et argumentée, parfaitement adaptée aux faits de l’espèce, n’appel pas de critiques et ne pourrait qu’être reprises par la cour ; qu’il y sera seulement ajouté que les investigations n’ayant nullement mis en exergue la possibilité de l’intervention d’un sous-marin, une nouvelle interrogation des autorités américaines sur d’autres bâtiments que ceux appartenant à l’US NAVY, en particulier les sous-marins nucléaires d’attaque, à supposer qu’elle obtienne une réponse, ne servirait à rien la manifestation de la vérité » On rappellera que la juridiction d’instruction de premier ou de second degré n’est pas saisie in personam mais in rem. L’information avait donc vocation à déterminer les charges pouvant exister contre toute personne suspectée de l’homicide involontaire des marins du BUGALED BREIZH. Or, il est constant que seul un sous-marin, à ce jour partiellement identifié, est encore suspecté. En excluant une telle responsabilité, le Président Jean-Louis LESAINT a donc prématurément jugé qu’il n’existait aucune charge contre quiconque et s’est aventureusement avancé sur le fond de l’affaire. Cette appréciation quant à l’issue de l’information est d’autant plus grave que l’appel de l’ordonnance de non-lieu formé par les parties civiles tend précisément à démontrer que la responsabilité d’un bâtiment submersible est acquise au dossier et qu’il convient, dès lors, de poursuivre les investigations. La prise de position du Président de la chambre est donc de nature à remettre en cause son impartialité dans l’appréciation des moyens soulevés par les appelants. Elle permet, à tout le moins, de nourrir des doutes légitimes sur l’impartialité de la juridiction qu’il préside, ce qui porte atteinte au principe d’impartialité objective. Sa récusation s’impose. PAR CES MOTIFS Vu l’article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales Vu les articles préliminaire, 668 et 669 du code de procédure pénale, Il est demandé à Monsieur le Premier Président : RÉCUSER Monsieur Jean-Louis LESAINT, Président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Rennes, dans le cadre de la présente instance afin qu'il n'en connaisse, DÉSIGNER en lieu et place tel autre magistrat qu'il lui plaira de nommer. Dominique TRICAUD Avocat à la Cour Liste des pièces communiquées : 1. Ordonnance du 18 octobre 2013 2. Ordonnance du 16 décembre 2013 3. Pouvoir spécial uploads/S4/ bugaled-demande-de-recusation.pdf

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  • Publié le Oct 18, 2021
  • Catégorie Law / Droit
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