Vendredi 13 novembre 2009 Conférence n°6 : Le droit patrimonial de la famille L
Vendredi 13 novembre 2009 Conférence n°6 : Le droit patrimonial de la famille Les régimes matrimoniaux Le régime impératif de base Historique 1. Le mariage, institution de notre droit, puisque fondement de la famille, fait naître un grand nombre de relations entre les époux et entre les époux et les tiers. Il s’agit de créer une nouvelle famille, de faire naître et grandir des enfants, de s’astreindre à une communauté de vie qui implique des droits et des devoirs réciproques, tant moraux que matériels. L’article 212 du Code civil prévoit ainsi que “ Les époux se doivent fidélité secours et assistance ”, l’article 203 précise que “ les époux contractent ensemble, par le seul fait du mariage, l‟obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants ”. 2. La question se pose donc naturellement de savoir comment va s’organiser un nécessaire droit patrimonial de la famille, et surtout quelles vont en être les sources. Le régime matrimonial, entendu dans son sens le plus large, est “ l‟ensemble des règles d‟ordre patrimonial qui régissent, au cours et à la dissolution du mariage les biens des époux (quant à la propriété, la disposition, l‟administration et la jouissance) et toutes les questions pécuniaires du ménage, tant dans les rapports entre époux que dans les relations de ceux-ci avec des tiers, y compris les règles du régime matrimonial primaire ”. On peut en effet concevoir deux grands types de systèmes : d’une part un système exclusivement légal, dans lequel la loi établirait un régime matrimonial unique qui s’appliquerait à toutes les familles de façon impérative. On peut également concevoir que seuls les époux sont à même d’organiser et de prévoir le type de relations économiques qu’ils entendent avoir entre eux, et considérer que le système doit exclusivement être conventionnel. Ces deux types de visions ont existé à des époques différentes et dans des lieux différents : le droit comparé et l’histoire du droit permettent d’en rendre compte. 3. En droit romain, il fallait distinguer suivant le type de mariage, la liberté conventionnelle n’ayant aucune application en la matière. Dans le mariage cum manu, l’épouse était placée sous l’autorité du mari, dans la même situation que sa fille : les biens de l’épouse devenaient la propriété du mari. En revanche, dans le mariage sine manu, l’épouse conservait la propriété et la gestion de ses biens. L’usage voulait que l’épouse apporte une dot afin de contribuer aux charges du mariage. Le mari devenait propriétaire des biens dotaux, mais cette règle évolua et on instaura une obligation de restitution des biens dotaux à la dissolution du mariage. Ensuite, le mari perdit la possibilité de céder les biens dotaux, sans que l’accord de l’épouse puisse lever l’interdiction. Enfin Justinien institua une hypothèque générale sur les biens du mari pour que l’épouse soit assurée de voir sa dot restituée à la dissolution du mariage. Cette hypothèque primait sur celle que le mari avait pu consentir à des tiers. 4. Ce régime appelé « régime dotal » fit celui pratiqué en France dans les pays de droit écrit. Dans ce régime, chacun des époux conserve la propriété de tous ses biens, mais ceux de la femme sont divisés en deux groupes : les biens dotaux dont le mari à la jouissance et l’administration et dont les revenus contribuent aux charges du mariage et les biens paraphernaux, qui restent soumis à l’administration et à la jouissance de la femme, mais qu’elle ne peut aliéner sans autorisation maritale. Aucun des deux époux ne pouvait en revanche disposer des immeubles dotaux considérés comme inaliénables. Ce régime fut définitivement supprimé en 1965. 5. Aujourd’hui, le système français est mixte. D’une part, certaines règles s’appliquent impérativement, comme un effet du mariage, on parle souvent de régime matrimonial primaire. D’autre part, pour le reste du régime matrimonial le principe est celui de la liberté des conventions matrimoniales. Dès lors que les époux passent un contrat de mariage devant notaire, ils peuvent l’aménager comme ils l’entendent. Cependant, même pour cette partie conventionnelle, la loi propose des modèles, si bien que la liberté des parties consiste essentiellement à choisir entre ces régimes-types. En outre, la loi prévoit un régime matrimonial complet (régime légal) qui s’applique à défaut de contrat de mariage. 6. Les régimes matrimoniaux font une large place au principe de l’autonomie de la volonté, qui se traduit par le principe de la liberté des conventions matrimoniales. Le Code civil a longtemps été inspiré par une conception hiérarchisée du mariage, dans lequel le mari était le chef : il existait alors une incapacité de la femme mariée, et un régime matrimonial légal conférant de très larges pouvoirs au mari. Le contrat de mariage était alors un pacte de famille et le régime légal lui-même présentait le même aspect des intérêts patrimoniaux concernant les familles des deux époux. Ceci explique le principe d’immutabilité des régimes matrimoniaux et des conventions matrimoniales, considéré en outre comme nécessaire à la protection des tiers. 7. L’évolution des moeurs, les changements économiques ont conduit à d’inévitables modifications législatives. En 1938, le législateur rendit aux femmes mariées leur capacité civile. Cette réforme n’eut pas eu une grande effectivité pratique, car dans le régime matrimonial légal, tous les pouvoirs continuaient à être concentrés dans les mains du mari. Ce n’est qu’avec la loi du 13 juillet 1965 que le droit des régimes matrimoniaux fit l’objet d’une réforme d’ensemble. L’objet principal de cette réforme était d’assurer une plus grande égalité entre le mari et l’épouse, mais à l’époque, il n’avait pas paru souhaitable de promouvoir une égalité complète. Cette loi très importante consacrait en fait un compromis entre les principes anciens et les nouvelles orientations de la société. 8. La loi de 1965 a conservé le principe de la liberté des conventions matrimoniales, mais le législateur a privilégié les dispositions impératives et il a développé le régime primaire, constitué de règles impératives qui s’imposent à tous les époux, quel que soit le régime matrimonial choisi. En revanche, la loi de 1965 a permis une plus grande souplesse avec l’atténuation de l’ancienne règle de fixité des régimes matrimoniaux. Mais la loi de 1965 a entraîné une évolution des moeurs en permettant de nouvelles pratiques. Un grand nombre de réformes dans le droit de la famille ont modifié l’environnement juridique du droit des régimes matrimoniaux. L’aspiration des époux à une égalité totale s’est renforcée, et une révision d’ensemble est intervenue avec la loi du 23 décembre 1985 qui porte le titre de loi “ relative à l‟égalité des époux dans les régimes matrimoniaux ”. Cette loi ne concerne que les couples mariés, et ne règle pas le statut patrimonial des couples de concubins. L’évolution de la société a conduit à une forte revendication de la part des personnes non mariées pour obtenir un statut, si bien qu’après différents projets c’est le PACS qui est aujourd’hui en discussion. La loi du 13 juillet 1965 a été déclarée applicable à tous les époux contractant mariage après le 1er février 1966. Les personnes mariées sous le régime précédent et qui n’ont pas profité des dispositions transitoires qui permettaient de choisir le nouveau régime sont demeurées régies par le droit antérieur. 9. La loi du 23 décembre 1985 en revanche a été déclaré applicable à tous les époux à partir du 1er juillet 1986, sans que l’on ait à distinguer selon la date du mariage. Cette loi contient des dispositions qui tendent à la suppression du régime antérieur à celui de la loi de 1965. Pour étudier les régime matrimoniaux, il faut commencer par voir d’abord les règles constituant le régime primaire et qui s’appliquent à tous les époux sans exceptions, quel que soit le régime matrimonial choisi (Titre 1er) . Ensuite, il faudra envisager les différents régimes possibles, du régime légal aux régimes conventionnels (Titre 2). TITRE PREMIER : LES REGLES IMPERATIVES S’APPLIQUANT QUEL QUE SOIT LE REGIME MATRIMONIAL CHOISI 10. Que l’on parle par commodité de régime primaire ou de statut impératif de base, on désigne toujours un ensemble de règles à caractère impératif, qui s’appliquent obligatoirement quel que soit le régime matrimonial choisi. Ces règles sont énoncées par les articles 214 à 226 du Code civil. C’est de l’article 226 que découle le caractère impératif de ces dispositions : “ Les dispositions du présent chapitre, en tous les points où elles ne réservent pas l‟application des conventions matrimoniales, sont applicables, par le seul effet du mariage, quel que soit le régime matrimonial des époux ” . Ces règles se situent dans le chapitre VI du Titre 5 consacré au mariage. Ce chapitre VI est intitulé “ des devoirs et des droits respectifs des époux ”. Il commence par les articles dont on donne lecture lors de la cérémonie du mariage. Article 212 “ Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance ”. Art. 213 “ Les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l‟éducation des enfants et préparent leur avenir ”. 11. Les règles énoncées dans ce statut de base sont impératives, mais uploads/S4/ conference-n06.pdf
Documents similaires
-
19
-
0
-
0
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Mar 31, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
- Taille du fichier 0.3929MB