Maroc Houria TAZI SADEQ Professeur de droit de l’environnement I- EVOLUTION DU
Maroc Houria TAZI SADEQ Professeur de droit de l’environnement I- EVOLUTION DU DROIT DE L’ENVIRONNEMENT DEPUIS 1992 Analyse critique du cadre législatif et réglementaire marocain destiné à la protection de l’environnement Constats Si la prise de conscience est nette par rapport à la dimension environnementale, elle ne se traduit pas par une évolution des outils juridiques - qui reste trop lente - pour prendre en compte et réguler les évolutions technologiques, économiques et sociales, En effet, les textes législatifs et réglementaires, éparpillés, ont pratiquement tous vieillis. Ils sont incomplets, obsolètes ou inadaptés et n’ont pas suivi l’évolution socio-économique et technologique. L’articulation entre les rouages économiques, les pratiques sociales, la protection de l’environnement et les règles juridiques font défaut. L’arsenal juridique s’est laissé distancier par les faits. Il faut cependant noter que la préoccupation environnementale est présente et fait l’objet d’études et de projets. La législation en vigueur en la matière présente les caractéristiques suivantes : • Elle a vieilli puisqu’elle date du protectorat et n’a pas suivi les changements auxquels a pris part dans les faits le Maroc, • Elle n’était pas destinée à protéger l’environnement, néanmoins certaines de ses dispositions ont contribué à sa protection, • Elle se caractérise par une fragmentation et un éparpillement des textes ce qui rend l’analyse systématique et globale difficile, • Le droit moderne coexiste avec les droits coutumiers influencés à leur tour par plusieurs facteurs dont l’Islam et la situation écologique, On assiste à une évolution progressive du droit coutumier vers le droit moderne sous l’influence de l’organisation de l’Etat . Les droits Houria TAZI SADEQ 466 coutumiers sont intégrés à la culture et à la société locales. Ils ont évolué et ont su suivre les modifications et passer l’épreuve du temps. En l’absence d’une approche qui vise la compréhension de l’évolution de ces systèmes, il est difficile de mesurer la nature et la portée des ruptures qui ont pu entraîner leur marginalisation, • L’absence d’un Code de l’environnement nous laisse en manque de repères, de références et de principes quant à la protection de l’environnement en général. Il apparaît urgent de stimuler juridiquement une réglementation appropriée, • Une politique basée sur la production agricole intensive, • La complexité des textes de lois et les enjeux commerciaux au plan international rendent difficile la tâche des agents chargés de l’élaboration des réglementations et des agents chargés de leur application, • Les niveaux de sanctions ne sont pas dissuasifs et exemplaires. Les sanctions sont de nature répressive et se caractérisent par leur faiblesse. L’approche répressive classique (les voies de recours et les sanctions en cas de non respect des dispositions sont de nature répressive) n’est pas assortie d’une approche préventive, • Les mécanismes du système judiciaire marocain se caractérisent par la lenteur des procédures et favorisent le développement d’un sentiment d’impunité ce qui pose la question de l’effectivité des lois et de leur contrôle à travers des procédures contentieuses adaptées, • Des modes de réajustement et de règlement innovants et efficaces en cas de conflits ou d’empiètement sont à désigner. La prise de conscience de la dimension environnementale a conduit à l’élaboration de nombreux projets sectoriels de protection de l’environnement qui attendent d’être adoptés. Des mesures à caractère sectoriel ont vu le jour (eau, agriculture, pesticides..). On constate que : • Les conditions et les délais d’adoption de nouveaux textes législatifs et/ou réglementaires manquent de visibilité, • Les questions pouvant faire l’objet d’une révision ne sont pas retenues selon une approche globale ni intégrée et non plus transversale, • Les moyens d’accompagnement, s’ils existent, sont insuffisants. Les mesures de police ont des sources éclatées : code pénal, infractions définies et sanctionnées par les textes sectoriels, Dahir des Obligations et Contrats, dahir portant procédure civile et dahir portant procédure pénale. Les sanctions se caractérisent par leur inadéquation et leur incapacité à protéger l’environnement. Des questions restent posées en la matière : éléments constitutifs de l’infraction ; la mise en œuvre de la responsabilité, la question relative aux personnes pouvant faire l’objet de poursuites la nature des sanctions, l’intérêt Maroc 467 à agir et le refus aux ONG du droit d’accès aux juridictions, le contrôle par le juge de l’application des lois, la nature des décisions judiciaires. Le contexte institutionnel ne favorise pas toujours la nécessaire approche globale, participative et intégrée de l’environnement. Une nouvelle gouvernance en faveur de l’environnement est ressentie comme nécessaire par un grand nombre d’intervenants afin que la gestion verticale et techniciste cède la place à l’approche horizontale et transversale et que la décentralisation et l’articulation entre le central et le local soit définies en tenant compte de l’action internationale. Plusieurs analyses concluent à la nécessité de renforcer les capacités organisationnelles de l’administration en la matière et au renforcement de l’outil juridique et du contrôle. L’effort d’actualisation et d’adaptation du cadre juridique et sa mise en œuvre effective contribuerait largement à crédibiliser la filière, le contrôle, à motiver les agents exécutant ce contrôle et à installer un climat de confiance à l’égard des bénéficiaires, des consommateurs et des investisseurs potentiels. Une autorité de régulation jouissant d’un degré d’autonomie et d’indépendance par rapport aux départements ministériels sectoriels est une condition dans le contexte actuel pour ’offrir l’environnement stable et transparent. Propositions Le progrès en matière de renforcement du cadre juridique et institutionnel doit être soucieux de : • L’association entre l’ancien et le nouveau, • La sécurité alimentaire et les flux financiers issus de la production agricole et la maîtrise voire la protection de ‘environnement, • la gestion transversale de l’environnement dans une perspective de développement durable, • La continuation du processus de modernisation, la recherche d’une croissance et la promotion du développement durable, • La nécessité de respecter les lois physiques et s’assurer un bon niveau de gouvernance dans le cadre d’une politique d’aménagement du territoire soucieuse des dynamiques de population et d’une articulation entre le local et le national, • L’équilibre entre protection des ressources naturelles et l’environnement en général et la démographie, • La difficulté de résoudre le handicap des statuts fonciers dans la mise en place et la pérennité des projets, • L’insuffisance et les incertitudes des évaluations scientifiques indépendantes et des connaissances , • L’anticipation, • L’accès aux informations capitalisées, • La citoyenneté, la démocratie et la responsabilité de tous vis à vis de l’environnement, Houria TAZI SADEQ 468 • L’acceptabilité sociale des mesures y compris des mesures financières, • La régulation. • L’accompagnement des privatisations et des internationalisations par une action contentieuse depuis l’information, la procédure, et l’application, • La capacité à garantir l’effectivité des lois. II- THÈMES SECTORIELS Les sols L'appauvrissement des sols causé par des phénomènes naturels constitue un sujet de vive préoccupation pour le Maroc car d'importantes régions agricoles sont perdues chaque année en raison de projets d'urbanisation. Le débat national sur l’aménagement du Territoire mené de manière participative a été soldé par une Charte et un projet de Loi qui est en préparation et qui devrait aborder ces question et organiser ce secteur dans une perspective d’aménagement du Territoire. Commerce international, environnement et biodiversité Le cadre législatif et réglementaire marocain aborde ces questions par le biais des dispositions destinées à l’agriculture qu’il met au centre de sa politique économique. Il a clairement favorisé voire encouragé l’intensification de la production agricole. Le législateur marocain a adopté en la matière des normes (dahirs, décrets, arrêtés ministériels) selon une approche principalement orientée vers la réglementation des usages et des ressources (réglementations techniques de la production, de contrôle, de certification des semences et des plants, protection phytosanitaire). La Convention sur la diversité biologique a été signée en 1992 et ratifiée en 1995. La Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction a été ratifiée. La protection recherchée est marquée par l’importance accordée à la protection sanitaire des végétaux et la certification et multiplication des semences. Une attention particulière est portée à la santé publique. La législation marocaine (dont le Code relatif aux investissements agricoles de 1969 est la référence en la matière) fait actuellement l'objet d'un remaniement en faveur de la promotion du développement agricole et rural durable. Des amendements portent sur la création d'un Fonds de développement agricole et sur la nouvelle Loi No 33-94 relative au périmètre de mise en valeur en bour qui vise la création d'un cadre légal de promotion du développement agricole et rural durable dans les zones d'agriculture pluviales. La mise en œuvre de cette loi s'appuie sur les approches Maroc 469 participative, contractuelle, décentralisée et sur l'intégration d'une large gamme d'actions de développement tant agricole que rural. Les nouvelles orientations de la politique du pays retiennent également le renforcement du contrôle de la qualité des intrants en vue d’augmenter, d’améliorer et de valoriser la production agricole mais aussi d’ouvrir progressivement son marché. Il existe une prise de conscience de la nécessité pour les producteurs marocains de disposer d’intrants de qualité répondant aux normes et garanties en respect de la santé des consommateurs et de l’environnement qui ensemble risquent d’être affectés via les résidus ou uploads/S4/ droit-environnement-maroc.pdf
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- Publié le Sep 08, 2021
- Catégorie Law / Droit
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