Sous la direction de Karine Bannelier Olivier Corten Théodore Christakis Barbar
Sous la direction de Karine Bannelier Olivier Corten Théodore Christakis Barbara Delcourt LE DROIT INTERNATIONAL FACE AU TERRORISME Après le 11 septembre 2001 Préface de S.E. Gilbert Guillaume CEDIN-Paris I Cahiers internationaux N°17 ISBN : 2-233-00411-6 Préface Le 11 septembre 2001, les tours jumelles du World Trade Center, éventrées peu- deux avions de ligne détournés par des commandos-suicide, s'effondraient sous les yeux des téléspectateurs, témoins de la mort en direct de plusieurs milliers de personnes. Ces attentats et celui commis le même jour contre le Pentagone suscitèrent une indignation profonde et entraînèrent des réactions immédiates dirigées contre leurs auteurs et commanditaires et, plus généralement, contre le terrorisme international. Dès janvier 2002, le Centre de droit international (CEDIN) de l'Université de Paris 1 (Panthéon-Sorbonne) et le Centre de droit international et de sociologie appliquée au droit international de ['Université libre de Bruxelles organisaient à Paris un colloque sur le droit international face au terrorisme. Ce colloque a fait très heureusement le point sur la question et la publication de ses actes permettra à tous de prendre connaissance des communications variées et enrichissantes qui ont été présentées à cette occasion. Ces communications ont porté en premier lieu sur un problème difficile et important : faut-il définir le terrorisme et dans l'affirmative comment ? Dans une première étape, le droit international s’ était bien gardé d'user de ce terme et d'en fournir une définition. Les auteurs des premières conventions destinées à prévenir et à réprimer les actes de terrorisme avaient préféré organiser cette prévention et cette répression en visant des actions déterminées telles que les détournements d'avion, les actes de violence dirigés contre les aéronefs, les aéroports, les navires et les plates-formes pétrolières, les attentats contre les diplomates ou les prises d'otages. Les rédacteurs de ces diverses conventions conclues dans les années 1970 et 1980 avaient sciemment évité d'user du mot « terrorisme » afin de n'avoir pas à le définir. Les discussions tant au sein du Conseil de l'Europe que des Nations Unies avaient en effet montré à l'époque la difficulté de parvenir à une telle définition. C'est que le terrorisme prend des formes extrêmement diverses dans le temps comme dans l'espace. Les définitions proposées par la doctrine ont par suite été -II- nombreuses, que l’ on considère les objectifs poursuivis, les méthodes employées ou les effets recherchés par les délinquants. Bien plus, le terme « terrorisme » évoque, dans le langage courant, une violence extrême, des victimes innocentes, un climat d’ angoisse. Il renvoie au fanatisme et à la barbarie. Dès lors, il est fréquemment utilisé pour disqualifier l'adversaire et mobiliser l'opinion publique à son encontre, ainsi que l’ observe Denis Duez dans sa communication. De ce fait il est difficile de le définir sans condamner ou absoudre, comme en portent témoignage les débats concernant les mouvements de libération nationale et de sécession relatés par Madjid Benchikh ou les discussions sur le terrorisme d'Etat rapportées par Marcelo Kohen. La sagesse des rédacteurs des premières conventions destinées à lutter contre le terrorisme sans en prononcer le nom n'eut cependant qu'un temps. Dans les années 1990, le terme «terrorisme» fit son apparition en droit conventionnel sous la pression des politiques, des médias et des organisations non gouvernementales. A vrai dire, le mot avait déjà été employé en 1937 sous le coup de l'émotion à la suite de l'assassinat du roi Alexandre de Yougoslavie dans une convention conclue dans le cadre de la Société des Nations qui ne devait jamais entrer en vigueur. Il réapparut en 1977 dans une convention du Conseil de l'Europe qui se garda bien d'en fournir une définition. Vingt ans plus tard, une nouvelle convention était conclue dans le cadre des Nations Unies pour la répression des attentats terroristes à l'explosif, le terme n'y étant pas davantage défini. Enfin, en 1999 était signée à New York la convention des Nations Unies en vue de la répression du financement du terrorisme, le terme couvrant une série d'actes énumérés au texte. Par un paradoxe qui n'était qu'apparent, la société internationale s'attaquait au terrorisme sans réussir à en cerner vraiment les contours. Les événements du 11 septembre 2001 ne marquèrent pas une rupture sur ce point. Le Conseil de sécurité, dans sa résolution 1368 du 12 septembre 2001, appela la communauté internationale à redoubler d'efforts pour prévenir et éliminer les actes terroristes. Puis, par résolution 1373 du 28 septembre 2001, il décida d'un certain nombre de mesures s'imposant aux Etats en ce domaine. Mais il ne fournit aucune précision sur ce qu'il fallait entendre par terrorisme. Par ailleurs, le projet de convention générale sur le terrorisme international avancé par l'Inde, analysé par Pierre d'Argent au cours du colloque, ne put aboutir au sein de l'Assemblée générale, faute notamment d’ accord sur la définition du terrorisme. C’ est seulement dans les projets de l’ Union européenne rapportés par Anne Weyembergh qu'une telle définition sera tentée. - I I I - Lutter contre le terrorisme sans le définir était possible tant que le mot n'était pas prononcé. User de ce terme sans en déterminer la portée n'est en revanche pas sans inconvénient aujourd’hui, ainsi que plusieurs des participants au colloque l'ont souligné. Procéder de la sorte est en effet créer l’ incertitude et laisser aux Etats la possibilité d'interprétations unilatérales orientées dans le sens de leurs intérêts. Aussi, et comme Jean-Marc Sorel l'a souligné dans son rapport général sur le sujet, n’ est-il pas inutile de rechercher une telle définition en espérant qu'elle sera utile au législateur et au juge. Dans cette perspective, il ne saurait être question de distinguer entre « bon » et « mauvais » terrorisme, comme entre « guerre juste » et « guerre injuste ». Le terrorisme doit être défini objectivement, indépendamment des motivations de ses auteurs. Ainsi que je le suggérais en 1989 dans mon cours à l’ Académie de droit international, il couvre, me semble-t- il, tout usage de la violence dans des conditions de nature à porter atteinte à la vie des personnes ou à leur intégrité physique dans le cadre d'une entreprise ayant pour but de provoquer la terreur en vue de parvenir à certaines fins. Si ces fins sont politiques, le terrorisme peut être qualifié de politique. Ainsi défini, il doit le plus souvent, selon l'analyse de Yann Jurovic, être regardé comme un crime de droit commun, mais peut parfois constituer un crime de guerre et peut-être dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, un crime contre l’ humanité. Si la société internationale n'a pas été capable, ni avant, ni après le 11 septembre, de parvenir à un accord sur ce qu'il convient d'entendre par terrorisme, elle a en revanche fait quelques progrès dans la prévention de ce type de criminalité. A cet égard, il importe dès l'abord de relever que le Conseil de sécurité, agissant en vertu du chapitre Vil de la Charte, a dès les 28 septembre et 12 novembre 2001, pris diverses décisions de principe s'imposant aux Etats par application de l'article 25. Ces décisions touchent à la répression des actes de terrorisme et au financement de tels actes. En procédant de la sorte, le Conseil, ainsi que l'observe Olivier Corten, en est venu « à rendre certaines règles juridiques particulières opposables à tous les Etats Membres des Nations Unies ». Il s'est posé « en véritable législateur international ». Ce faisant, il a notamment imposé aux Etats des obligations reprises de la convention de 1999 pour la répression du financement du terrorisme, à l'époquë non encore entrée en vigueur, tout en procédant, comme le remarque Nicolas Angelet, à un tri parmi ces obligations. Bien plus, en créant un comité chargé de la lutte contre le terrorisme, il a entendu contrôler la mise en œuvre de ses résolutions par les Etats membres. Par une interprétation nouvelle de son mandat, il se reconnaît désormais non seulement -IV- un pouvoir de police, mais un pouvoir normatif au service de la paix et de la sécurité internationales. Par ailleurs, l'Assemblée générale des Nations Unies, par résolution 56/88 du 12 décembre 2001, demandait «une fois de plus à tous les Etats d'adopter de nouvelles mesures en vue de prévenir le terrorisme » et notamment de renforcer la coopération internationale. A cet effet, elle se référait à diverses résolutions qu'elle avait antérieurement adoptées concernant les obligations de vigilance (en anglais « due diligence > > ) dont les Etats sont tenus en ce domaine, ainsi que le rappelle François Dubuisson. Mais, comme l'observe à juste titre Kalliopi Koufa, les actions ainsi recommandées ne marquent pas une évolution sensible par rapport à la situation antérieure. Les événements du 11 septembre, puis l'alerte à l'anthrax qui a suivi de peu ont en outre attiré l'attention sur les risques du terrorisme biologique et chimique abordés dans l'étude de Théodore Christakis, comme sur ceux du terrorisme nucléaire étudiés par Karine Bannelier. Ces études montrent que si certains instruments existent en ces domaines, ils demeurent lacunaires et les contrôles restent insuffisants. En effet, si la convention de 1993 sur les armes chimiques uploads/S4/ droit-international-face-au-terrorisme-pdf.pdf
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- Publié le Jul 16, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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