§ 2 – Les usages du commerce international I – Le développement des usages du c
§ 2 – Les usages du commerce international I – Le développement des usages du commerce international • Ils ont une importance croissante dans le commerce international en raison de la pratique contractuelle internationale. Il convient de distinguer les usages du commerce international des usages conventionnels. Ces derniers ne sont envisagés que sous l’angle des relations d’affaires entre les parties et sont donc assez relatifs alors que les premiers ont une portée plus vaste qui dépasse largement le seul cadre des contractants et correspondent à une répétition de pratiques dans un milieu professionnel particulier. On peut alors parler « d’usage-règle » dans la mesure où ils ont une aptitude à la généralisation. De tels usages peuvent être relatifs à une branche ou une place d’activités. Par conséquent, le seul fait d’en faire partie a pour effet que l’on est obligé de les respecter. • Leur développement est en partie dû aux défaillances étatiques, en particulier les carences législatives et à la multiplicité des règles nationales d’ailleurs souvent précédées par la pratique. Ainsi, la lettre de change et la compensation internationale sont nées de la pratique. De même, le crédit documentaire a d’abord été une création de la pratique. Aujourd’hui, une codification des usages est envisagée par de nombreux organismes professionnels dont un qui a un rôle fondamental, la chambre de commerce internationale. Parmi ses réalisations les plus connues, les International Commercial Terms (v. ➜) ou encore les « Règles et usances uniformes relatives aux crédits documentaires » (v. ➜). Cette codification peut être relative à un contrat (par exemple la vente internationale ou la franchise), prendre en considération un type de produits (par exemple les céréales) et aboutir à un contrat type ou à des conditions générales de vente. • Le rôle des usages est reconnu par la plupart des droits nationaux. II – Applicabilité des usages du commerce international Plusieurs textes sont relatifs à l’applicabilité des usages : • Texte général : En France, aux termes de l’article 1194 nouveau du Code civil (ex. art. 1135) « les conventions obligent, non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage et la loi donnent à l’obligation d’après sa nature ». • Textes dans le domaine de la vente : – la Convention de La Haye du 1er juillet 1964 (LUVI) prévoit dans son article 9 « les parties sont liées par les usages auxquels elles se sont référées expressément ou tacitement et par les habitudes qui se sont établies entre elles ; elles sont également liées par les usages que des personnes raisonnables de même qualité, placées dans leur situation, considèrent comme normalement applicables à leur contrat » ; – la Convention de Vienne du 11 avril 1980 prévoit une règle similaire, également à son article 9 : « les parties sont liées par les usages auxquels elles ont consenti et par les habitudes qui se sont établies entre elles. Sauf convention contraire des parties, celles-ci sont réputées s’être tacitement référées dans le contrat et pour sa formation à tout usage dont elles avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance et qui, dans le commerce international, est largement connu et régulièrement observé par les parties à des contrats de même type dans la branche commerciale considérée ». • Textes dans le domaine de l’arbitrage : – la Convention européenne sur l’arbitrage commercial international du 21 avril 1961 prévoit à son article 7 que quel que soit le droit applicable, « les arbitres tiendront compte des stipulations du contrat et des usages du commerce » ; – l’article 1511 du Code de procédure civile d’après lequel l’arbitre doit tenir compte dans tous les cas des usages du commerce ; – la loi type de la CNUDCI sur l’arbitrage commercial international prévoit à l’article 28 alinéa 4 « dans tous les cas, le tribunal arbitral décidconformément aux stipulations du contrat et tient compte des usages du commerce applicable à la transaction ». Malgré ces références, la valeur juridique des usages du commerce international est controversée. Au préalable, la question se pose de savoir si cette codification des usages change la nature de ces dernières. La réponse n’est pas aisée. Les usages codifiés demeurent sans doute des usages lorsque la codification n’est que la reprise d’un usage à laquelle elle n’apporte pas de modifications. Que penser lorsque la codification ne correspond pas à un usage révélé ? Par exemple, les Incoterms de la CCI constituent-ils tous des usages ? (v. ➜). Il convient d’ajouter ici que pour certains, les usages sont des normes coutumières alors que pour d’autres, ils ne peuvent avoir une telle qualification. Pour d’autres enfin, ils sont à mi-chemin entre la règle conventionnelle et la règle du droit. Il est difficile d’admettre que les usages du commerce international sont des règles de droit. Ils ont toutefois une valeur supérieure aux simples stipulations contractuelles. § 3 – Les principes généraux du droit du commerce international Les principes généraux du droit du commerce international : – sont des principes dont l’application se fait en dehors du cadre d’une loi nationale ; – peuvent émaner du système juridique international, par exemple les principes généraux du droit international public ; ces derniers peuvent s’appliquer directement dans les contrats conclus entre un État et une personne privée. L’article 42 de la Convention CIRDI fait référence aux « principes de droit international » ; – peuvent être issus de la convergence des droits nationaux ; – peuvent être issus des conventions internationales ; – peuvent découler du « droit savant », par exemple les Principes Unidroit relatifs aux contrats du commerce international ou les Principes du droit européen du contrat ; – sont assez généraux sans être exhaustifs ; – sont évolutifs. Ils permettent aux arbitres de fournir une solution satisfaisante aux litiges. • Certains ont été dégagés par la jurisprudence arbitrale notamment : – le principe pacta sunt servanda : respect de la parole donnée ou force obligatoire du contrat ; – le principe de bonne foi ou la nécessité de mener la négociation contractuelle, d’interpréter et d’exécuter le contrat de bonne foi ; – le principe rebus sic stantibus qui autorise les arbitres à réviser le contrat ou les parties à le renégocier de bonne foi en cas de bouleversement de l’environnement économique existant lors de la formation du contrat ; – le principe de mitigation of damages d’après lequel le créancier d’une obligation inexécutée doit s’efforcer de modérer son dommage (ou de minimiser les pertes). Ce principe est consacré par l’article 77 de la Convention de Vienne de 1980 sur la vente internationale de marchandises, l’article 7.4.8 des Principes Unidroit et l’article 9 : 505 des Principes de droit européen du contrat ; – le principe de l’estoppel : interdiction de se contredire au détriment d’autrui (v., visant l’estoppel, Civ. 1re, 6 juill. 2005, Rev. arb. 2005, p. 993, note Ph. Pinsolle, D. 2005. 3059, obs. T. Clay, JDI 2006, p. 608, note M. BéharTouchais, RTD com. 2006. 309, obs. E. Loquin ; Com. 20 sept. 2011, n° 10-22.888). – la limitation de la réparation aux dommages prévisibles ; – le principe exceptio non adimpleti contractus. Certains de ces principes sont communs au droit interne et au droit international. • D’autres ont été élaborés par la doctrine : c’est le cas des « principes relatifs aux contrats du commerce international » qui sont l’œuvre de l’institut international pour l’unification du droit privé (Unidroit). § 4 – La question de la lex mercatoria L’importance des usages et des principes du droit du commerce international pose une difficulté : appartiennent- ils à un ordre juridique distinct ? La coexistence entre les lois étatiques, rares et insuffisantes et un système de normes spécifiques au commerce international, qui compléteraient le système étatique et dont les arbitres constitueraient les principaux interprètes, entraîne-t-il d’accepter l’existence d’un ordre juridique détaché des règles étatiques ? C’est la question de la lex mercatoria. Cette idée que peut exister un droit détaché de tout droit étatique a été différemment appréciée par deux camps, les « mercatoristes » et les « antimercatoristes ». Pour les premiers, les lois étatiques ont été créées pour les rapports internes et ne tiennent pas compte des exigences du commerce international. Seul un régime propre au commerce international serait acceptable. Sa spécificité exigerait donc des normes détachées des droits nationaux. Pour les seconds, la lex mercatoria serait simplement une construction idéologique, vague qui pour certains n’existerait pas car il n’y a pas de véritable société des opérateurs du commerce international. La lex mercatoria ne formerait pas un ordre juridique à part entière. Le débat n’est pas que théorique. Dans cette seconde tendance, il serait impossible pour les parties de la désigner comme droit applicable au contrat, par exemple dans une clause d’electio juris, alors que dans la première tendance, il l’est. Pour trancher le débat, il faut au préalable adopter une conception claire de la lex mercatoria. Deux conceptions sont possibles : – la lex mercatoria est envisagée comme un ordre uploads/S4/ i-le-developpement-des-usages-du-commerce-international.pdf
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- Publié le Apv 06, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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