2 0 1 9 ANNALES CORRIGÉES ET COMMENTÉES Sous la direction d’Aurélien Baudu PRIN
2 0 1 9 ANNALES CORRIGÉES ET COMMENTÉES Sous la direction d’Aurélien Baudu PRINCIPES FONDAMENTAUX DE DROIT CONSTITUTIONNEL LICENCE 1 avec des conseils de méthodologie 20 SUJETS Dont un dossier de 3 COPIES RÉELLES D’ÉTUDIANTS Dissertations Commentaires Cas pratiques 47 Vous traiterez le sujet suivant : « État fédéral et État décentralisé » Dissertation juridique Aucun document n’est autorisé Durée de l’épreuve : 3 heures Sujet 5 Il est vrai que le point commun entre ces deux notions est le terme d’État. Débuter par cette formule de Raymond Carré de Malberg sur la définition classique de l’État est une bonne idée. La forme de l’État est ici le cœur du sujet. Vous êtes sur la bonne voie. Bien ! Le travail de définition est ici très important pour démontrer que l’État décentralisé est une forme d’État unitaire. Introduction Pour Raymond Carré de Malberg, dans sa Théorie générale de l’État, publiée en 1920, l’État est « une communauté d’hommes, fixée sur un territoire et possédant une organisation d’où résulte pour le groupe envisagé dans ses rapports avec ses membres une puissance supérieure d’action, de commandement, de coerci- tion ». Ainsi, dans sa définition classique, l’État est une entité juridique formée de la réunion de trois éléments constitutifs (population, territoire, autorité politique) et à laquelle est reconnue la qualité de sujet de droit international. L’État existe donc dès lors que sont réunis ces trois éléments. La notion d’État étant désormais éclaircie, il convient de s’intéresser à sa forme, car les États se différencient selon leur organisation interne. Il existe près de 200 États dans le monde, qui ne possèdent pas tous la même forme d’organisation. Tradi- tionnellement, le droit constitutionnel distingue deux formes d’organisation : l’État unitaire et l’État fédéral. Elles varient en fonction du degré d’unification juridique de l’État. L’État unitaire se caractérise par l’existence d’un seul ordre juridique. En principe, il présente une structure constitutionnelle unique régissant l’ensemble du pays à partir d’un seul centre de décision politique édictant un droit que la population, où qu’elle se trouve sur le territoire de l’État, doit obéir. L’État unitaire connaît plusieurs degrés d’organisation puisqu’il peut être concentré, déconcentré, décentralisé, ré- gionalisé. C’est un sujet très classique en droit constitutionnel. Le principal piège à éviter est de traiter ce sujet de manière descriptive, avec une première partie sur l’État fédéral et une seconde sur l’État décentralisé. Il est important de construire une problématique pertinente pour dégager un plan autour des différences et similitudes entre ces deux notions juri- diques essentielles, qu’il est important de bien définir. OBSERVATIONS DU CORRECTEUR (A. Baudu) 48 Il aurait été judicieux de citer un ou deux auteurs au sein de la doctrine (ex. F . Hamon et M. Troper). Il manque des exemples. Très bien. Ce paragraphe est mieux construit, car il y a de nombreux exemples pour illustrer le travail de définition de l’État fédéral. La doctrine considère qu’il y a concentration lorsque le pouvoir central concentre toutes les compétences dans ses mains, sans qu’il ne soit représenté au niveau local par un fonctionnaire qui assure le relais et prend, au besoin, les décisions nécessaires localement à l’application de la règle de droit nationale. D’un point de vue pratique, la concentration est difficile à mettre en œuvre sur un territoire vaste avec une population étendue. Le territoire de l’État doit être découpé en circonscriptions administratives, afin de rapprocher le pouvoir central du citoyen, et d’assurer une bonne application du droit sur l’ensemble du territoire. On parle alors de déconcentration. Les compétences appartiennent toujours à l’État, mais elles sont exercées sur le territoire par ses représentants (préfet, recteur, procureur, etc.), lesquels sont soumis au pouvoir hiérarchique. « C’est toujours le même marteau qui frappe mais dont on a raccourci le manche » disait le député Odilon Barrot en 1848. Ces représentants ne bénéficient d’aucune autonomie, principale différence avec la décentralisa- tion. On parle de décentralisation lorsque l’État transfère certaines compétences à des collectivités qui peuvent les exercer de manière autonome. Elles sont instal- lées sur une portion du territoire de l’État, mais elles s’administrent librement. Elles bénéficient de la personnalité morale, elles sont gérées par des organes propres et disposent pour l’exercice de leurs compétences de ressources propres (autonomie financière). Elles doivent cependant respecter les lois de l’État. À l’inverse, de nombreux États ont fait le choix d’une structure fédérale (Allemagne, Autriche, Belgique, États-Unis, Suisse). Les raisons d’être du fédéralisme sont variées. Elles peuvent être géographiques. Les États très vastes sont fédéraux afin de préser- ver la démocratie (exemple des États-Unis ; contre exemple de la Chine). Mais ce n’est pas le seul argument, car de petits États ont adopté cette forme (exemple de la Belgique). Elles peuvent être d’ordre économique, avec une volonté de renforcer leur puissance, leur richesse. Elles peuvent être d’ordre politique, puisque généra- lement, est recherché dans le fédéralisme, le moyen de garantir une société plus démocratique et de permettre, au sein d’un État, la coexistence de différentes com- munautés (ethniques, religieuses, etc.), sans remettre en cause l’existence même de l’État. Généralement, l’État fédéral naît de l’entrée en vigueur de la Constitution fédérale élaborée par une assemblée constituante au sein de laquelle sont représentés les États désireux de se fédérer. Souvent ce processus est lent : soit il s’agit du rappro- chement d’États indépendants (fédéralisme par association), soit il s’agit de l’écla- tement d’un État unitaire (fédéralisme par dissociation). L’État fédéral est donc une association ou une dissociation d’États, superposés pour former une structure éta- tique à double étage. C’est un système de libre gouvernement au profit d’États fédérés disposant de larges compétences normatives, maintenus dans un cadre étatique fédéral. L’État fédéral repose sur trois principes dégagés par Georges Scelle (Précis de droit des gens, 1932), à savoir la superposition, l’autonomie et la participation. Deux ca- ractéristiques sont au cœur de la définition de l’État fédéral : d’une part, l’existence d’une constitution fédérale qui fonde l’union des États fédérés et, d’autre part, la juxtaposition de deux niveaux de collectivités étatiques, avec d’un côté le niveau fédéral et de l’autre le niveau des États membres de la Fédération, peu importe la dénomination utilisée (États américains, cantons suisses, länder allemands et autrichiens, communautés belges, etc.). Il s’oppose traditionnellement à l’État unitaire,en ce sens qu’il présente une structure constitutionnelle multiple répartie entre un État fédéral et les États fédérés. 49 Attention, désormais, c’est un « conseil départemental ». La loi n° 2013-403 d 17 mai 2013 prévoit que l’assemblée qui dirige le département prend le nom de « Conseil départemental » en remplacement de la précédente appellation de « Conseil général ». Le travail de problématisation du sujet est bien amené. Cette problématique devrait permettre d’éviter un travail descriptif et plat au niveau de l’élaboration du plan. Plan très convenable. On décèle bien la volonté de l’étudiant de répondre à la problématique posée plus haut. L’intitulé est un peu imprécis. À compléter. Très bien. En France, l’État a été pendant longtemps ultra-centralisé. Les révolutionnaires ont souhaité renforcer la centralisation héritée de l’Ancien Régime, en consacrant le principe de la République « une et indivisible », symbole de la tradition jacobine (Const. 1791, art. 1), contre toute tentation fédéraliste. Depuis quelques années, la France est désormais décentralisée, suite à l’acte I de la décentralisation en 1982, et l’acte II en 2003. Désormais, les collectivités territoriales (régions, départements, communes) s’administrent librement, grâce à des organes élus (conseil régional, général et municipal) exerçant les compétences transférées par l’État. Certains États unitaires sont allés plus loin (Italie, Espagne), en laissant une autonomie administrative, financière et même législative à leurs collectivités territoriales, qui, selon les États, sont des « régions », des « provinces », des « communautés autonomes », au point qu’ils se rapprochent de plus en plus de la structure fédérale. À l’appui de ces définitions, il est possible de constater que la décentralisation et le fédéralisme sont des notions qui semblent être proches. Cependant, ces deux formes d’organisation de l’État ne recouvrent-elles pas des réalités juridiques diffé- rentes ? La différence entre un État fédéral et un État décentralisé est-elle de nature et/ou de degré ? En théorie, il ne faut pas confondre fédéralisme et décentralisa- tion, même si certains États pratiquent une décentralisation poussée menant à un fonctionnement proche de celui d’une fédération. Le constitutionnaliste Pierre Pactet parlait de catégories « non étanches ». Si la différence n’est que de degré, alors des caractéristiques peuvent être communes entre le fédéralisme et la dé- centralisation (1). Si la différence est de nature, alors il faut pouvoir opposer toutes les caractéristiques attachées à chaque forme d’État (2). 1 • Une différence de degré entre le fédéralisme et la décentralisation de l’État On distingue principalement deux types d’État selon leur degré d’unification : l’État fédéral et l’État unitaire. L’État unitaire décentralisé, et d’autant plus lorsqu’il est régionalisé, apparaît ainsi à la frontière de l’État fédéral. Cette question conduit à observer que la structure étatique du fédéralisme et celle de la décentralisation, souvent très proche (A) et certains principes de fonctionnement uploads/S4/ l1-droit-constitutionnel-corrige.pdf
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Gratuit pour un usage personnel Attribution requise- Détails
- Publié le Apv 20, 2021
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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