COURS Emmanuel Dreyer Olivier Mouysset collection COURS Procédure pénale • Cour

COURS Emmanuel Dreyer Olivier Mouysset collection COURS Procédure pénale • Cours • Thèmes de travaux dirigés 2e édition Collection dirigée par Bernard Beignier LMD 2e exercice Commentaire d’arrêt : La notification des droits à une personne gardée à vue de nationalité étrangère Olivier Mouysset Commentaire d’un arrêt rendu le 10 mai 2006 par la première chambre civile de la Cour de cassation, nº 04-50172 Juris Data nº 2006-033395 ; Bull. civ. I, nº 231. nº 05-87230 ; AJ pén. 2006, p. 414, obs. H. Gacon LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : Sur le moyen unique : Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel (Pau, 7 novembre 2004), et les pièces de la procédure, que M. X..., ressortissant angolais en possession d’un passeport dont le visa Schengen était expiré, a été contrôlé au poste frontière franco-espagnol de Biriatou à bord d’un autocar assurant la liaison Bruxelles- Porto, et placé en garde à vue pour infraction à la législation sur les étrangers ; que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la fron- tière et une décision de maintien en rétention dans un local ne relevant pas de l’adminis- tration pénitentiaire ; qu’accueillant l’exception de nullité de la procédure soulevée par l’étranger, le juge des libertés et de la détention a rejeté la requête du préfet aux fins de prolongation du maintien en rétention ; Attendu que M. X... fait grief à l’ordonnance attaquée, qui a statué sur l’appel interjeté par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bayonne, d’avoir infirmé cette décision et ordonné la prolongation de sa rétention administrative, alors, selon le moyen, qu’en violation de l’article 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et de l’article 63-1 du Code de procédure pénale, il n’a pas été immédiatement informé de la nature de l’infraction sur laquelle portait l’enquête nécessitant son place- ment en garde à vue ; que la notification des droits doit être immédiate et régulière, une éventuelle irrégularité ne pouvant être couverte par une notification postérieure ; que le juge du fond a validé la procédure sans relever quelles étaient les circonstances insur- montables qui avaient empêché l’officier de police judiciaire de contacter et trouver un interprète en langue portugaise, langue qui ne peut être considérée, du moins dans le ressort de la cour d’appel de Pau, comme une langue rare ; qu’admettre que la notification des droits de la personne gardée à vue effectuée par le biais d’un document rédigé dans une langue comprise par l’intéressé est régulière, alors qu’un tel mode de notification des droits ne permet pas à l’intéressé de les exercer, reviendrait à vider de toute substance les dispositions des articles 63-2 à 63-4 du Code de procédure pénale ; qu’une atteinte aux droits de M. X... a donc été commise lors de son placement en garde à vue qu’aucune circonstance insurmontable ne permet de justifier ; Mais attendu que, selon l’article 63-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature 496 de l’infraction sur laquelle porte l’enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l’article 63 ; que, selon l’alinéa 3 de ce texte, ces informations doivent être communiquées dans une langue que la personne gardée à vue comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits ; Et attendu que pour déclarer la procédure régulière, l’ordonnance retient que l’intéressé a été placé en garde à vue le 4 novembre 2004 à 0 heure 45, que le procès-verbal mentionne que les services de police ont aussitôt pris attache avec un interprète en langue portu- gaise, sans résultat, et que dans l’attente, il lui a été remis un exemplaire de ses droits de gardé à vue en langue portugaise, et que, dès lors, il a reçu notification de ses droits dès qu’il a été placé en garde à vue, par cette note ; Qu’il résulte, en outre, du dossier que l’officier de police judiciaire, qui avait placé M. X... en garde à vue pour des faits d’infraction à la législation sur les étrangers, a, par une mention de « carence », relaté les diligences infructueuses qu’il avait immédiatement effectuées auprès de deux interprètes en langue portugaise nommément désignés, qu’au moyen d’un formulaire écrit en cette langue comprise par l’étranger qui a signé ce docu- ment, il lui a communiqué les informations exigées relatives à ses droits en garde à vue et à la durée de celle-ci, et qu’à 9 heures 30, il a à nouveau, par le truchement d’un des interprètes en langue portugaise arrivé au service de police, notifié par un procès-verbal signé de l’intéressé, son placement en garde à vue pour les nécessités de l’enquête en raison d’une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’il avait commis une infrac- tion à la législation sur les étrangers, en lui rappelant les droits y afférents ; D’où il suit qu’en raison de ces informations données au moyen d’un formulaire écrit dans une langue comprise par l’étranger, ainsi que de l’impossibilité, du fait de ces circons- tances insurmontables, de faire appel immédiatement à un interprète en langue portu- gaise lors du placement en garde à vue de l’intéressé, le moyen n’est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille six. Proposition de corrigé La garde à vue constitue une réelle atteinte à la liberté individuelle, même si elle condi- tionne directement l’efficacité de l’enquête policière. Cette mesure ne faisant l’objet d’une réglementation que depuis l’entrée en vigueur du Code de procédure pénale en 1958, les différentes réformes successives qui sont intervenues au cours de ces dernières années témoignent, de manière significative, du recul du caractère inquisito- rial de la procédure d’enquête, au regard des garanties qui sont aujourd’hui accordées à l’individu qui subit cette mesure privative de liberté avant jugement. L’époque récente démontre également le contrôle strict auquel les juridictions se livrent en la matière, comme le souligne l’arrêt rendu le 10 mai 2006 par la première chambre civile de la Cour de cassation. Travaux dirigés 497 Placé en garde à vue du chef de violation de la législation française sur les étrangers, un ressortissant angolais a, par la suite, fait l’objet d’une procédure tendant à l’éloigner du territoire national. À l’occasion de cette procédure, le juge des libertés et de la déten- tion a accueilli favorablement une requête en annulation de la procédure pénale dirigée contre lui. Mais l’appel interjeté par le préfet contre cette décision a abouti à une déci- sion du premier président de la cour d’appel compétente, qui a rejeté l’exception de nullité soulevée et ordonné corrélativement la prolongation du maintien en rétention administrative du prévenu. Sur le pourvoi formé contre cette ordonnance, la première chambre civile de la Cour de cassation approuve pleinement le premier président d’avoir conclu à la régularité de la procédure judiciaire de garde à vue dont avait fait l’objet l’intéressé. En l’occurrence, elle juge qu’il était parfaitement concevable qu’un officier de policier judiciaire recoure à un formulaire pré-imprimé, à défaut de pouvoir obtenir dans les plus brefs délais l’assistance d’un interprète, pour notifier au prévenu ses droits de personne gardée à vue dans une langue qu’il soit en mesure de comprendre. De plus, elle ajoute que l’impossibilité de faire appel immédiatement à un interprète doit être analysée comme une circonstance insurmontable justifiant le report de la notification de certains de ses droits par l’intermédiaire d’un interprète de langue portugaise, qui a bien eu lieu ultérieurement à son placement en garde à vue. En statuant ainsi, la Cour de cassation approuve le principe du recours temporaire à l’utilisation d’une notice pré-imprimée pour procéder, à l’égard d’une personne d’origine étrangère, à la notification des droits imposée par l’article 63-1 du Code de procédure pénale dans une langue compréhensible (I), et son arrêt fournit une nouvelle illustration de la jurisprudence relative aux circonstances insurmontables, selon laquelle la notifica- tion orale, destinée à faire connaître à une personne gardée à vue l’étendue exacte de ses droits, peut être différée par rapport au moment de son placement effectif en garde à vue (II). I. Les modalités d’exécution de la notification des droits à une personne de nationalité étrangère Il résulte de l’article 63-1 du Code de procédure pénale que l’officier de police judiciaire, ou l’agent de police judiciaire placé sous son contrôle, a le devoir de notifier immédiate- ment à l’individu placé en garde à vue les droits attachés à la mise en œuvre de cette mesure de contrainte. Par ailleurs, cette disposition prévoit expressément que le place- uploads/S4/ partiels-blancs-semestre-2-2019-procedure-penale-cours.pdf

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  • Publié le Oct 13, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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