L e r é v o l u t i o – m ’ ê t r e D a v i d P a v ó n C u é l l a r L e r é v

L e r é v o l u t i o – m ’ ê t r e D a v i d P a v ó n C u é l l a r L e r é v o l u t i o – m ’ ê t r e Notions lacaniennes a p p l i q u é e s à l’analyse de discours en psychologie sociale  P s y c h o p h o r e s P a r i s , 2 0 0 6 Cet ouvrage reprend et développe des conférences données par l’auteur, entre 2003 et 2004, dans le laboratoire de Psychologie Sociale de l’EHESS, dans le Groupe Multidisciplinaire du CAD et dans le Département de Psychanalyse de l’Université de Paris VIII. I S B N : 2 – 9 5 2 2 9 0 5 – 0 – 4 © D a v i d P a v ó n C u é l l a r , 0 9 . 2 0 0 6 © P s y c h o p h o r e s , 1 0 . 2 0 0 6 Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. I N T R O D U C T I O N Suite à la sanglante révolution de 1910-1921, le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) prend le pouvoir au Mexique. Il instaure un régime corrompu, antidémocratique et hautement répressif, lequel dirige le pays, sans interruption, jusqu’à l’an 2000 — au moment du triomphe d’un parti opposant de droite. Pendant soixante-dix ans, les protestations collectives contre le gouvernement du PRI se succèdent à droite et à gauche. Quelques-unes sont pacifiques, d’autres sont violentes. Les chefs de la guérilla deviennent souvent des figures légendaires : Rubén Jaramillo, Arturo Gámiz, Genaro Vásquez, Lucio Cabañas et plus récemment le subcomandante Marcos — de l’Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), révoltée contre le gouvernement en 1994. Le 28 juin 1995, quelque part dans les montagnes du sud du Mexique, 17 paysans sont massacrés par la police. Dans le même lieu, mais un an plus tard, pendant la commémoration de ce carnage, l’Armée Populaire Révolutionnaire (EPR) fait sa première apparition. Ce sont plusieurs combattants avec le visage couvert et armés de mitraillettes AK- 2 47. Ils annoncent qu’ils viennent pour venger les victimes du gouvernement du PRI et pour faire la révolution, une deuxième révolution, cette fois-ci la définitive : prolétaire, socialiste et marxiste- léniniste. Dans les trois ans qui suivent leur première apparition, les membres du EPR, les eperristes, s’affrontent plusieurs fois à l’armée mexicaine. Il y a un nombre indéterminé de morts. Les deux armées, celle qui prétend défendre une révolution institutionnelle et celle qui veut une autre révolution populaire, cachent apparemment leurs pertes. En 1997, pendant que les deux armées révolutionnaires se livrent à des combats sporadiques, je rencontre au Mexique un membre du EPR pour connaître et faire connaître sa position à l’égard du EZLN1. Un an plus tard, avec la collaboration de María Luisa Vega, je commence en Espagne une longue interview électronique avec l’organisation révolutionnaire. Cette interview se poursuivra au Portugal et aboutira en 1999, dans un refuge clandestin proche de Mexico, à une rencontre face à face avec plusieurs eperristes encagoulés. De l’ensemble de notre interview avec l’EPR, dont nombreuses parties furent déjà publiées2, j’ai choisi pour vous un passage de notre communication électronique, en guise d’exemple concret pour illustrer mon application de Lacan à la psychologie sociale, c’est-à-dire, plus précisément, l’application3 des notions4 lacaniennes5 à l’analyse de 1 López Albertos, M. et Pavón Cuéllar, D. 1998. Zapatismo y contrazapatismo : cronología de un enfrentamiento. Buenos Aires, Turalia, 1998. 2 Vega, M. L. et Pavón Cuéllar D. 1999-2003. « O EPR cercado polo siléncio », in Outrasvozes, N°11, Coruña, 11.98. « Aproximación al Ejército Popular Revolucionario », in Resumen Latinoamericano, N°39,Madrid, 01.99. « EPR, EZLN, ERPI, sem espaços de participaçom política », in Abrente, N°13, Santiago de Compostela, 07.99. « Ciberentrevista a periodistas europeos », in El Insurgente (journal clandestin du EPR), N°21, México, 05.99. « Aproximaciones al EPR », in La Hora, N°490, Oaxaca, 2003. 3Application au sens d’une simple utilisation pour telle ou telle chose, comme on applique un traitement à une maladie, afin de la guérir, ou comme on applique un outil à un problème, afin de le résoudre. 4 L’application que je prévois porte strictement sur le plan notionnel. Cependant, l’enracinement épistémologique, la substance théorique, l’outil méthodologique et l’action pratique seront imbriqués dans chaque notion. L’enracinement épistémologique supposera la conception qui est le fondement de toutes les notions. La substance théorique participera de la 3 discours6 en psychologie sociale7. Il s’agit du fragment d’une réponse, donnée par un nommé Francisco Javier, à une question de María Luisa Vega qui portait sur l’éventuelle harmonisation, dans la vie d’un eperriste, entre ses obligations familiales et ses activités révolutionnaires. Voici le fragment en question : conceptualisation qui se trouve au fond de la notion. L’outil méthodologique remplira la fonction dans laquelle réside l’utilité de la notion. Quant à l’action pratique, elle montrera un fonctionnement possible dans l’utilisation de la notion. 5 Pour appliquer les notions lacaniennes, il faudra leur faire une place entre les autres notions qui se disputent le terrain où elles seront appliquées : des notions phénoménologiques, herméneutiques, sémiologiques, psychanalytiques, marxistes, cognitivistes, constructivistes et déconstructivistes. Pour cela, je devrais m’affronter à quelques-uns des classiques les plus influents dans les sciences sociales actuelles : Barthes, Ricœur, Berger et Luckmann, Derrida, Searle, etc. 6 L’analyse de discours ne sera pas envisagée seulement comme une perspective théorique, mais aussi comme un champ méthodologique où convergent différentes perspectives : celle des attitudes, celle des catégories, celle des représentations ou celle de la construction. Puisque ces perspectives se rapportent au discours, l’analyse de discours — et non pas seulement celle de contenu — les concerne directement. Or, mon travail, orienté vers la psychologie sociale en général, ne s’occupe sérieusement d’aucune de ces perspectives — bien qu’il ait été conçu en fonction de ce que les notions lacaniennes pouvaient apporter à l’analyse de discours dans chacune de ces perspectives. 7 Je ne suis pas le premier qui s’intéresse à Lacan dans l’analyse de discours en psychologie sociale. Je suis précédé notamment par des psychologues sociaux anglo- saxons. Avec eux, je pense qu’il faut s’intéresser à la conception lacanienne, et la prendre au sérieux, si ce n’est en raison de l’originalité, la richesse et la valeur intrinsèque de son approche au discours, au moins en considération de son influence dans l’ensemble des sciences humaines et sociales. Curieusement, la psychologie, dans cet ensemble de sciences humaines et sociales, est celle qui s’intéresse le moins à Lacan, certainement à cause des « incompatibilités » insurmontables entre la psychologie et le « psychologue barré » qu’est Lacan (Parker, I. 2003. « Jacques Lacan, Barred Psychologist », in Theory & Psychology, 13), mais aussi à cause de certains préjugés que vous connaissez trop bien. À mon avis, on devrait se débarrasser de tels préjugés à l’égard de la psychanalyse en général, ce qui n’oblige pas pour autant à ignorer les incompatibilités entre la psychologie et la psychanalyse, et encore moins à devenir un psychologue social d’orientation psychanalytique ou à faire partie de ces psychanalystes que Moscovici désignait, à tort ou à raison, comme des « prêtres prosternés devant l’image du créateur de leur doctrine » (Moscovici, S. 1981. L’âge des foules, Bruxelles, Complexe, 1985, p. 291). 4 La famille est l’un des piliers fondamentaux pour la construction de la nouvelle société et de l’homme nouveau... De là l’importance et la transcendance que le mariage revêt pour les révolutionnaires, comme point de départ pour l’établissement de la famille, et, à travers elle, pour la constitution de la société. La relation de couple, dans notre perspective révolutionnaire, doit se fonder sur l’amour..., l’amour sexuel individuel, l’amour sur la base duquel se fonde la famille monogame, lequel mène à un respect mutuel et à une fidélité par conviction, ou bien à la dissolution du couple, au moment où cesse d’exister ce sentiment. Nous ne serions pas des révolutionnaires conséquents si nos conceptions du mariage et du couple n’étaient pas fondées sur l’amour, sur le respect et sur la fidélité. Il est possible, dans ce fragment, de distinguer clairement cinq éléments enchaînés : 1. L’amour, qui mène au respect et à la fidélité, en même temps qu’il est un des fondements du couple et du mariage. 2. Ce à quoi mène l’amour : le respect et la fidélité, comme fondements du couple et du mariage. 3. Ce qui se fonde sur l’amour, sur le respect et sur la fidélité : le couple ou uploads/S4/ pavon-cuellar-d-le-revolutio-m-x27-etre-notions-lacaniennes-appliquees-a-l-x27-analyse-de-discours-en-psychologie-sociale.pdf

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  • Publié le Fev 12, 2021
  • Catégorie Law / Droit
  • Langue French
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