propriété intellectuelle livre blanc 20 A D I / I L A ANS/YEARS coordinateur Ni
propriété intellectuelle livre blanc 20 A D I / I L A ANS/YEARS coordinateur Nicolas Binctin Professeur (droit privé), Université de Poitiers assistant / rapporteur Anas Fourka Doctorant, Université de Poitiers comité de pilotage (par ordre alphabétique) Tsukasa Aso Professeur adjoint, Faculté de design, Université de Kyushu, Fukuoka, Japon Virginie Dessimiroff Directeur juridique, Société Relais & Châteaux Shujie Feng Professeur, Université Tsinghua, Pékin, Chine Natalia Kapyrina Juriste, Cour de la propriété intellectuelle, Moscou, Russie Pierre-Emmanuel Moyse Professeur, Université McGill, Montréal, Québec Pilar Montero Professeur, Université d’Alicante, Espagne Joëlle Nwabueze Senior Lecturer, Vice-Doyen, Faculté de Droit, Enugu State University of Science and Technology informations auteurs 0 sommaire page 7 page 49 page 83 page 101 1. état des lieux • 1 - De la réciprocité à l’assimilation • 2 - L’harmonisation substantielle • 3 - L’harmonisation procédurale • 4 – Méthodes et espaces • 5 – Interdisciplinarité 2. les défis • Défis environnementaux et technologiques • Défis économiques et financiers • Défis sociaux, juridiques et géopolitiques 3. les questions • 1 - Le devenir de l’approche territoriale/nationale de la propriété intellectuelle • 2 - Evolution du domaine public et de la durée de la propriété intellectuelle • 3 - La collectivisation de la création et de l’exploitation de la propriété intellectuelle • 4 - Quelles évolutions pour l’application coercitive de la propriété intellectuelle • 5 - Cohérence des sources internationales de droit de la propriété intellectuelle annexe 1. état des lieux propriété intellectuelle | livre blanc 20 1 état des lieux page 8 page 9 1 - De la réciprocité à l’assimilation La reconnaissance des droits des étrangers dans les ordres nationaux permet de comprendre l’évolution du droit interna- tional de la propriété intellectuelle. Cette évolution s’est faite dans un cadre géopolitique et historique en mouvement et alterne entre ouverture et protectionnisme, selon le stade de développement économique du pays concerné. Les pays im- portateurs de technologie et de culture, dont ont fait partie des économies aujourd’hui dites à fort capital intellectuel, tels que les États-Unis, étaient à l’origine peu portés à reconnaître les droits des étrangers. Ce cadre géopolitique s’explique aussi par le passage d’une économie coloniale à une économie libérale et, aujourd’hui, à une économie de la donnée et à une société numérique. Lors du centenaire de la Convention de Berne en 1986, Georges Koumantos faisait la prédiction suivante : « the next period of the history of mankind will be a period where the two great sources of power will be information and communication »1. La notion d’étranger permet de saisir la dimension territoriale des droits de la propriété intellectuelle qui sont des droits principalement nationaux attachés à une personne juridique. Le statut d’étranger, variablement donné aux non-résidents ou, plus objectivement, à ceux qui ne répondent pas à certains critères de domiciliation, supprime la possibilité d’être titulaire de droit. Pour dépasser ces restrictions qui devenaient un frein aux échanges, il est devenu nécessaire de reconnaître les droits des étrangers par assimilation aux nationaux. Ce mécanisme d’assimilation des étrangers aux nationaux a d’abord été un produit de réciprocités accordées par des lois spéciales trans- posant des accords bilatéraux. Il a ensuite été généralisé par le principe du traitement national. Cette appréhension des droits de la propriété intellectuelle à partir de la notion d’étranger permet de saisir les premiers développements du droit international de la propriété intellec- tuelle. Nous présentons brièvement l’extension de l’empreinte Note 1 https://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/copyright/120/wipo_pub_120_1987_02.pdf propriété intellectuelle | livre blanc 20 1 état des lieux page 10 page 11 géographique des droits par la colonisation (1), pour voir ensuite le principe de la réciprocité conventionnelle et celui, plus mo- derne, de l’assimilation (2). L’extension du droit national par la colonisation L’impérialisme et l’occupation de nouveaux territoires (terra nulla) a été la première idée de l’internationalisation de la pro- priété intellectuelle. Même si elle n’a pas été pensée en ces termes, la prise de possession de territoire emportait la ques- tion de la continuation des droits des colonisateurs dans les nouveaux territoires. La question n’est pas simple, car le main- tien de l’ordre dans les territoires nouvellement acquis imposait souvent des concessions menant à une certaine autonomie des peuples conquis. L’ordre international de la propriété intel- lectuelle s’est donc organisé en réponse à l’expansion coloniale. C’est ici le droit de la propriété littéraire et artistique qui va être le lieu des premiers développements car, comme l’écrit Sam Ricketson, « words, sounds and pictures, like birds, fly over frontiers with the greatest ease ». Mais ces mots et ces images étaient également agents de changements culturels et de censure notamment par le contrôle qu’opère le droit d’auteur indirectement sur la dissémination des langues et sur l’éducation. L’histoire du droit anglais est assez représentative des problé- matiques auxquelles étaient confrontées toutes les puissances coloniales de l’époque. La Loi d’Anne de 1709, célébrée comme première loi moderne du droit d’auteur dans les traditions occidentales, n’avait pas anticipé l’élargissement des frontières de l’Empire et ne comportait aucune disposition visant les co- lonies (dominion). La question ne tardera pas à venir avec l’ex- pansion de l’Empire britannique aux XVIIIe et XIXe siècles : les auteurs et imprimeurs des capitales réclamaient l’application de leur droit, mutatis mutandis, sur la totalité du territoire sou- mis aux lois impériales. Les auteurs et éditeurs des colonies, souvent soumis à un régime dérogatoire ou concurrent des lois impériales, revendiquaient la possibilité d’imprimer, éventuel- lement de traduire localement et à leur compte ou d’importer des reproductions des livres mises en vente ailleurs dans des pays où le droit d’auteur étranger n’était pas reconnu. Le com- merce international du livre découvrait l’interpénétration des opérations de reproduction, d’importation et de traduction et leur géopolitique : une reproduction faite sans droit, une im- portation ou une traduction non réglementée soustrayait le marché aux imprimeurs des capitales. Ce pourquoi, le législateur impérial sera dans l’obligation de préciser expressément le champ d’application territorial des nouvelles lois. La Loi anglaise sur le droit d’auteur de 1842 tentera de purger les incertitudes propriété intellectuelle | livre blanc 20 1 état des lieux page 12 page 13 laissées par la Loi d’Anne en précisant qu’elle s’applique à « all Parts of the United Kingdom of Great Britain and Ireland, the Islands of Jersey and Guernsey, all Parts of the East and West Indies, and all the Colonies, Settlements, and Possessions of the Crown which now are or hereafter may be acquired ». Naturellement, cette histoire d’impérialisme juridique laisse aussi largement irrésolue la question du maintien des ordres juridiques des Premiers Peuples qui existaient antérieurement aux contacts européens. Il faut en prendre note car, sous cet angle, la question n’est plus seulement historique et elle est surtout loin d’être anodine. Dans cette logique coloniale des premiers temps, les territoires demeurés hors juridiction, des lieux désignés comme des lieux de piraterie (alors que le terme est mal choisi puisque généra- lement il désigne une situation de non-reconnaissance par la loi applicable des droits des étrangers) deviennent des cibles pour une annexion politique ou pour des sanctions écono- miques. La concurrence menée par les imprimeries belges, flamandes, irlandaises aux imprimeurs des grandes capitales jusqu’au XIXe siècle est bien documentée. Les États-Unis se distinguent aussi pour leur résistance à toute reconnaissance des droits des étrangers2. Dans une vue expansionniste et bien que les droits de propriété intellectuelle n’aient bien entendu pas motivé les guerres coloniales, l’expansion territoriale a permis d’étendre le marché des titulaires de droits des métro- poles. C’est aussi en pensant la portée des lois impériales que la question de divisibilité des droits de propriété intellectuelle (la possibilité d’accorder des cessions territorialement définies) s’est posée. La propriété industrielle dans ses développements historiques est soumise aux mêmes velléités de contrôle territorial que la propriété littéraire et artistique, mais plus tardivement, lors de la révolution industrielle. Dans le cas du Royaume-Uni, le mé- canisme d’extension extraterritoriale des droits acquis au Royaume-Uni était également prévu par le biais d’une recon- naissance du certificat d’enregistrement au Royaume-Uni dans le pays où la protection était recherchée. Les inventions et les produits sous marques dont la clientèle demeure souvent locale se copient ou s’exportent moins faci- lement. De même, le dépôt de brevet, pour lequel des lois Note 2 Charles Dickens se donnera d’ailleurs comme mission de dénoncer la reproduction sans compensation des oeuvres anglaises en Amériques propriété intellectuelle | livre blanc 20 1 état des lieux page 14 page 15 modernes sont adoptées au début du XIXe siècle, nécessite déjà d’importants capitaux et une grande expertise, à la fois juridique et technique, sans compter également de nombreuses initiatives de nationaliser certains types d’inventions. Les enjeux économiques des premières grandes industries dictent pro- gressivement le façonnement de l’ordre international au rythme des innovations et du développement de l’économie de marché. Pour l’essentiel, le débat s’organise autour de la question des formalités, car le brevet est tout de suite perçu comme un élément important de l’économie nationale et fait ressortir dès l’origine le rôle et l’intérêt de l’État, non uploads/S4/ propriete-intellectuelle-vhd-fr.pdf
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- Publié le Jul 12, 2022
- Catégorie Law / Droit
- Langue French
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