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Monnaie Monnaies ! Ensemble de monnaies gauloises et romaines découvertes sur l

Monnaie Monnaies ! Ensemble de monnaies gauloises et romaines découvertes sur le site de Bibracte. © Bibracte, Antoine Maillier D e métal, de papier et même virtuelle, la monnaie est l’instrument devenu indis- pensable pour les échanges marchands qui rythment notre quotidien. Mais quelle est son origine ? Comment l’exemple des monnayages celtiques nous permet-il de décrypter les usages monétaires à travers les siècles et les cultures ? Place commerciale de premier plan il y a deux mille ans, l’oppidum de Bibracte est embléma- tique de l’intégration des Celtes dans une « éco- nomie-monde » en plein essor : le développement des usages monétaires y apparaît indissociable de l’évolution vers une société complexe et urbaine, où la monnaie sert à acquérir les produits de l’agri- culture, de l’artisanat ou du grand commerce mais aussi à rémunérer des services, des travailleurs ou des soldats, ou encore à honorer les dieux. Fait social majeur dans l’Europe de la fin de l’âge du Fer, elle constitue une source d’informations ex- ceptionnelle sur les sociétés de cette époque. En mobilisant les collections monétaires issues de 150 ans de fouilles archéologiques sur le Mont Beuvray, en cherchant à les replacer dans une perspective historique longue, depuis les premières écritures comptables de Mésopotamie jusqu’aux monnaies virtuelles de l’Internet, l’expo- sition « Monnaie, monnaies ! » invite à s’interroger sur une réalité à la fois multiforme et nuancée. L’exposition bénéficie pleinement du dynamisme des réseaux européens dans lesquels Bibracte EPCC déploie son activité et des ressources scientifiques mobilisées par le programme de re- cherche sur le Mont Beuvray. Elle est ainsi le ré- sultat d’un partenariat fructueux avec les musées de Lausanne, étoffé par les prêts consentis par une quinzaine de prêteurs français et suisses ; elle s’est aussi nourrie des contributions essentielles de Mme Katherine Gruel, spécialiste des monnaies de Bibracte et d’ailleurs depuis plus de 30 ans, et de M. Eneko Hiriart, lauréat du prix européen d’ar- chéologie Joseph Déchelette 2016, dont Bibracte est l’un des fondateurs. En associant l’expertise de ses partenaires à l’excellence de ses presta- taires – qu’ils en soient tous vivement remerciés –, l’équipe de Bibracte est heureuse de proposer ce nouvel opus, à la croisée de questionnements sur les sociétés d’hier et d’aujourd’hui. Wanda Diebolt Présidente de Bibracte EPCC Monnaie, Monnaies ! / 3 / Sommaire Monnaie, monnaies Objets de valeur De la mine à la bourse Gros et petits sous, miroirs des sociétés Tout un symbole Réalisme et surréalisme Contributions Orientations bibliographiques p.5 p.6 p.12 p.16 p.22 p.26 p.30 p.31 Monnaie, Monnaies ! / 4 / La monnaie est avant tout un instrument pour mesurer la valeur des biens et des services. La pièce de monnaie, inventée au VIIe siècle avant notre ère, introduit la notion de garantie par un pouvoir émetteur. Elle est adoptée par les Celtes au IIIe siècle avant notre ère. P endant des millénaires, les sociétés humaines n’ont pas eu besoin de monnaie pour leurs échanges. L’anthropologie montre qu’elles ont pourtant, depuis toujours, contracté des dettes morales ou en nature et ont trouvé de nombreuses façons de les enregistrer et de les rembourser. La monnaie ne constitue que l’un de ces moyens. La monnaie joue un rôle d’intermédiaire capable de mesurer la valeur des biens et des services. Instrument de paiement et réserve de richesse, elle passe de main en main et doit se conserver dans le temps. Elle revêt des formes multiples et, grâce à l’écriture, elle peut se réduire à un signe sur un papier, à l’image de nos billets ou de nos chèques, ou même se dématérialiser, comme sur nos comptes en banque. Lorsque vers 300 avant notre ère, les Celtes se mettent à battre monnaie, ils sont impliqués depuis des siècles dans des systèmes d’échanges économiques complexes, à courte et longue distance. Pourquoi adoptent-ils cet objet nouveau ? Qu’est-ce que les usages monétaires des Celtes ont à nous dire de la monnaie et du regard que nous portons, à travers elle, sur les sociétés d’hier et d’aujourd’hui ? Monnaie Monnaies ! Dessin d’une pièce de monnaie au nom de Vercingétorix (Dessin © E. Hiriart) Cette pièce partage les caractéristiques de nombreuses monnaies frappées gauloises : l’image est souvent incomplète voire décen- trée, car le flan (disque de métal sur lequel on imprime les images monétaires) est plus petit que les coins, et il est parfois décalé entre eux au moment de la frappe. De plus, il arrive souvent que les images du droit et du revers ne soient pas dans le même sens. / 5 / Monnaie, Monnaies ! / 6 / Torque et monnaies (droits et revers) en or du dépôt de Tayac (copies) IIIe - Ier siècles avant notre ère (Second âge du Fer) Découvert en 1893, le dépôt de Tayac (Gironde) rassemblait presque 4 kg d’or dans deux récipients. Chacun contenait la moitié́ d’un même torque, en- viron 200 monnaies et des lingots. La masse du torque (762 g) équivaut exactement à celle de cent monnaies d’or et autant de lingots. Cette équivalence de poids et la fréquente asso- ciation de torque et de monnaies dans d’autres dépôts de la même époque sont le signe du rôle monétaire qu’ont pu jouer ces colliers. © Bibracte, Antoine Maillier (collections du musée de Bibracte, originaux conservés au musée d’Aqui- taine, Ville de Bordeaux) / 7 / La fonction monétaire n’impose pas de forme unique à l’objet qui la sert. L’essentiel est que l’objet « monnaie » soit facile à transporter, qu’il se conserve dans la durée et que son rôle d’étalon de valeur soit accepté par la communauté. 1/ Hache miniature Cuivre, 1500-1300 avant notre ère (âge du Bronze moyen) Cette hache miniature fait partie d’un dé- pôt volontairement enfoui dans une fosse sur le littoral aquitain. Sa taille et son alliage la rendent inutilisable. Associée à d’autres haches complètes, à des fragments de haches et de bracelets, tous d’un poids si- milaire, elles constituaient sans doute une réserve de richesses ou un dépôt votif. © Musée d’Aquitaine, Ville de Bordeaux 2/ Currency bar et lingots bi-pyramidaux V e-Ier siècles avant notre ère Découverts au fond de la Saône, ces lin- gots de fer sont une matière première utile au forgeron. Leur forme sert à démontrer la qualité du métal, en ébauchant la forme d’une épée, et à marquer sa provenance (dans d’autres régions, ils sont en forme de losange ou de soc de charrue). Leur poids pourrait être le signe d’un système pondéral calibré (une livre celtique de 309 g), à usage monétaire. © Bibracte, Antoine Maillier (col- lections du musée Denon, Ville de Chalon- sur-Saône). 3/ Cauris élimés Burkina Faso, XXe siècle Ces coquillages de type Cypraea monata, communément appelés cauri, ont servi de monnaies d’échange dès le IIe millénaire avant notre ère, et pendant plus de 4000 ans, en Afrique, en Asie du Sud et de l’Est et en Océanie. Ils étaient montés en « collier » ou empaquetés dans des paniers pour former des unités à plus forte valeur. © L. Simporé 4/ Lopin Fer forgé, Afrique de l’Ouest, XXe siècle Ce type de lopin a servi de monnaie dans toute l’Afrique de l’Ouest. En Guinée, on les connaît sous le nom de «guinzé», au Libéria anglophone sous le nom de «kissi Penny». Acceptées jusqu’en 1925 pour payer l’impôt colonial, ces monnaies finissent par dispa- raître au profit des devises européennes. © Bibracte, Antoine Maillier Objets de valeur 1/ 3/ 2/ 4/ L ’anthropologie a révélé, au sein de sociétés réputées jusqu’alors « sans monnaie », le rôle essentiel d’objets particuliers dans les transactions économiques comme dans certaines relations sociales structurantes telles que le paiement du prix du sang, le ver- sement d’une dot, l’acquittement d’une amende, la prodigalité envers des obligés, l’exécution de rituels… Ces objets revêtent des formes variées : coquillages, barres de métal, parures, sacs de céréales ou encore têtes de bétail. Les peuples de l’Europe tempérée ont aussi vraisemblablement connu cet état improprement qualifié de « pré-monétaire », pendant lequel des objets jouent le rôle de monnaie avant l’apparition de la pièce. Ainsi, en va-t-il de ces objets qui, à l’âge du Bronze et au début de l’âge du Fer, sont détournés de leur usage d’origine pour signifier une valeur. L’archéologie les connaît sous la forme de barres, de broches à rôtir ou de haches assimilables à des lingots de bronze ou de fer, mais aussi sous la forme de parures en bronze et de torques en or : mis en terre par sécurité ou au profit des dieux ou des défunts, ils constituent des réserves de richesses, l’une des fonctions premières de la monnaie. Monnaie, Monnaies ! / 8 / Pour devenir un moyen de paiement généralisé, la monnaie doit obéir à quelques principes universels : - la convertibilité universelle : un objet est monnaie quand il est reconnu par le plus grand nombre comme moyen d’échange qui permet de convertir presque tout en presque tout ; - la confiance partagée en sa capa- cité à mesurer la valeur de tous uploads/Finance/ 163210-bibracte-catalogue-expo-monnaie-2018-pdf.pdf