1 L’initiative privée, l’entreprenariat, et le commerce dans l’enseignement de

1 L’initiative privée, l’entreprenariat, et le commerce dans l’enseignement de Pie XII Article Orignal en anglais Anthony G. Percy. Archidiocèse de Canberra-Gouldburn Australie Les études de la doctrine sociale catholique moderne présentent généralement l’enseignement magistral de Jean-Paul II, spécialement celui contenu dans l’encyclique Centesimus Annus (1991), comme ayant exprimé la réflexion la plus significative sur la nature et la finalité de l’initiative privée, l’entreprenariat et le commerce. Cet article illustre le fait qu’un bon nombre de discours de Pie XII contiennent des idées positives sur la libre entreprise, le commerce et le processus de l’échange. Cet article vise à attirer l’attention du public contemporain sur ces écrits, dont la plupart sont restés relativement inconnus depuis les années 1960. Introduction Le 2 mars 1939, le cardinal Eugenio Pacelli était élu successeur de Saint Pierre par le Collège des cardinaux. Il choisit le nom de Pie XII, et entame un pontificat dominé par un contexte de guerre : d’abord la Seconde Guerre mondiale durant laquelle l’Église catholique Romaine se voit défiée par l’idéologie païenne, raciste et antichrétienne du nazisme, et ensuite la guerre froide durant laquelle l’Eglise affronte le spectre du marxisme-léninisme. Pour de nombreux Catholiques et chrétiens, ces années étaient des années de persécution et, dans certains cas, de martyre du fait des communistes, nazis et fascistes. Les grands drames de cette période de l’Église catholique expliquent peut-être le fait que les contributions de Pie XII au développement de l’enseignement social de l’Église n’aient pas retenu l’attention des historiens et des théologiens. Cette absence est quelque peu étrange, notamment parce que les enseignements magistériels de ses successeurs immédiats—sans oublier le Concile Vatican II—regorgent de citations et annotations provenant des nombreux discours de Pie XII. C’est dans ses écrits, par exemple, que l’on constate des développements cruciaux de l’enseignement magistral sur le sujet de la démocratie et le discours émergent sur les droits de l’homme.1 Encore moins reconnus sont les enseignements de Pie XII sur des sujets spécifiquement économiques, y compris sur les origines et la nature de l’initiative privée et du business, et les droits et responsabilités de l’entrepreneur.2 Les textes spécifiques dans lesquels Pie XII examine ces questions en détail sont :3 2 * Le cinquantième anniversaire de Rerum Novarum, 1er juin 1941 * La fonction sociale de la banque, 25 avril 1950 ; * La vocation d’hommes d’affaires, 27 avril 1950 ; * La fonction bancaire, 24 octobre 1951 ; * L’employeur catholique, 5 juin 1955 ;4 * Le chef de petite entreprise, 20 janvier 1956 ;5 * Le commerce et le bien commun, 17 février 1956 ; * L’économie et l’homme, 9 septembre 1956 ; * La petite entreprise dans l’économie d’aujourd’hui, 8 octobre 1956 A travers ces textes on trouve les commentaires les plus formels jamais exprimés par le magistère romain sur la nature de l’initiative privée, l’esprit d’entreprise et les affaires. Le but premier de cet article est d’attirer l’attention sur des passages clés de ces discours, dont la plupart sont relativement peu connues des audiences contemporaines. En ce sens, cet article questionne de façon indirecte le consensus général qui veut que la lettre encyclique de Jean-Paul II Centesimus Annus (1991) exprime le point de vue le plus favorable de l‘entreprise privée à ce jour. Le cinquantième anniversaire de Rerum Novarum (1 juin 1941) Le premier juin 1941, Pie XII diffuse un message radio pour commémorer l’anniversaire de la lettre encyclique de Léon XIII, Rerum Novarum (1891). Le contexte immédiat du message radio de Pie XII était une Italie dominée par le fascisme, une économie dirigée (tout au moins officiellement) selon des principes corporatistes, et une Europe dans laquelle l’Allemagne nazie régnait temporairement. Son public immédiat, cependant, était constitué de milliers de travailleurs italiens, rassemblés Place Saint-Pierre. Pie XII débute ce message en plaçant l’enseignement de l’Église sur le droit à la propriété privée dans le contexte de l’utilisation des biens matériels. Il fait référence tout d’abord au droit fondamental d’user des biens matériels de la terre. Ce n’est qu’alors (comme dans le Concile Vatican II)6 que Pie XII parle du droit à la propriété privée. Le droit à la propriété privée se fonde donc sur ce droit ultérieur et le sert. Selon ses propres termes : « Tout homme, en tant qu’être vivant doué de raison, tient en fait de la nature le droit fondamental d’user des biens matériels de la terre, quoiqu’il soit laissé à la volonté humaine et aux formes juridiques des peuples de régler plus en détail la réalisation pratique de ce droit. »7 C’est de ce droit fondamental d’user des biens matériels de la terre que découle le droit de l’homme à la propriété privée. Comme il le dit, il « requiert aussi la propriété privée »8, mais le droit, maintient Pie XII, doit en être 3 régulé par l’homme lui-même précisément parce que les biens matériels de la terre appartiennent à tous.9 Significativement, c’est dans le cadre de ce droit fondamental d’user des biens matériels de la terre que Pie XII parle du besoin pour « la propriété privée et la liberté du commerce réciproque des biens par échanges et donations »10. C’est important dans la mesure où cela illustre le fait que le libre-échange découle directement, tout comme la propriété privée, de la réalisation prudentielle du droit fondamental qu’ont tous les peuples d’user des biens matériels de la terre. Significativement Pie XII considère comme fondamental ce droit de libre-échange parce que l’homme est appelé à conserver et à perfectionner « sa propre vie matérielle et spirituelle. »11 La doctrine morale catholique orthodoxe nous dit que l’une des façons dont l’homme peut accomplir cela, c’est en étant capable faire des choix librement et de les actualiser. On constate ainsi que les mots de Pie XII sur la propriété privée et le libre-échange ont moins à avoir avec l’efficience économique et plus avec l’insistance catholique de toujours sur la nécessité pour l’homme d’agir et de développer des vertus morales et spirituelles. La fonction sociale de la banque (25 avril 1950) et La vocation d’hommes d’affaires (27 avril 1950) C’est une insistance sur le besoin de l’homme de devenir « la personne qu’il devrait être » qui sous-tend deux discours de Pie XII sur des thèmes économiques en 1950. Le contexte de ces déclarations est plutôt différent du discours de Pie XII de 1941. D’une part le fascisme avait été vaincu, mais en Italie comme dans beaucoup de pays d’Europe de l’Ouest, le Parti communiste était une force politique dont il fallait tenir compte. Au même moment, l’Italie et d’autres pays d’Europe de l’Ouest commençaient à voir une période de croissance économique et une hausse du niveau de vie considérables. Le discours de Pie XII du 25 avril 1950 aux banquiers italiens est remarquable pour son explication de la signification spirituelle profonde du travail professionnel. Pie XII enseigne que le travail professionnel est un moyen de servir Dieu et un moyen de sanctification de la personne. Selon Pie XII, le travail est à la fois social et nécessaire.12 En ce qui concerne la dimension sociale du travail, Pie XII nous dit que « le travail doit, en outre, servir au bien général : il doit attester le sens de la responsabilité de chacun pour le bien de tous. »13 Pie XII lie de façon intime le travail en tant que service à Dieu, et le travail qui est aussi le service du bien commun, un lien qui attire particulièrement l’attention. « Conscience, honnêteté, exactitude », écrit-il, sont des qualités de travail qui sont d’autant « plus inséparables du travail compris comme service de Dieu et deviennent, ainsi, profitables 4 au bien-être de la communauté. »14 Avec ces mots, Pie XII semble développer une vision du travail ou l’on sent une unité profonde entre la vertu personnelle, le service de Dieu et l’amour du prochain. La dimension humaine (personnelle et sociale) et la dimension divine sont en effet indissociables dans son esprit. Commentant encore sur la dimension sociale du travail, Pie XII anticipe certaines idées de Jean-Paul II. Dans Laborem Exercens et Centesimus Annus, Jean-Paul II reconnait l'établissement de la communion des personnes comme une caractéristique fondamentale du travail.15 Même si Pie XII écrivait il y a 41 ans « Comment une administration comme la vôtre pourrait-elle être une véritable communauté, et non seulement une simple existence en commun, sinon parce que tous, du premier au dernier, vous êtes conscients de travailler avec loyauté chrétienne, au bien de tous ? »16, Pie XII parle de loyauté chrétienne comme moyen de réaliser cette véritable communauté. Jean-Paul II, en revanche, fait référence au don de soi. Dans le même discours, il fait une distinction importante entre l’avarice et l’acquisition légitime de richesse. Il se sert de la parabole des talents de l’évangile de Luc (Luc 19:11-27) pour établir cette distinction. Opposant le serviteur bon et fidèle au serviteur paresseux, Pie XII tire quelques conclusions pour son auditoire de banquiers sur la nature de l'acquisition des richesses, d'une manière qui reflète sa conscience aigüe de la uploads/Finance/ anthony-percy-l-x27-initiative-privee-l-x27-entreprenariat-et-le-commerce-dans-rev-sr-ap 1 .pdf

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  • Publié le Nov 26, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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