1 Bâle II et le traitement du risque de crédit PME [Auteurs : Said LOTFI (Docto
1 Bâle II et le traitement du risque de crédit PME [Auteurs : Said LOTFI (Doctorant) & Tarik QUAMAR (Professeur)] Introduction : La problématique de financement des PME porte souvent sur l’étude des différents aspects de leur financement bancaire, une source dont ces entreprises dépendent significativement. Toutefois, l’analyse du financement bancaire ne peut être appréhendée en dehors du contexte réglementaire dans lequel les crédits à l’économie sont opérés. À vrai dire, les banques connaissent, aujourd’hui, une profonde évolution de leur environnement réglementaire. Depuis 1988, une réglementation élaborée par le Comité de Bâle visant à garantir la solidité du système bancaire, oblige les banques à couvrir les risques qu’elles prennent dans leur activité de crédit par des fonds propres bancaires. Dans ce premier accord de Bâle (1988), le contrôle bancaire s’articule autour d’un ratio de solvabilité, fixé à 8%. L’intérêt stratégique de ce ratio est de considérer que le capital bancaire est le pivot essentiel de la réglementation prudentielle. Selon Figuet (2003)1, ce capital est l’ultime moyen pour couvrir les pertes, il permet de limiter les défaillances bancaires, et par conséquent, les coûts de restructuration et de sauvetage. Cependant, cette réglementation a fait l’objet d’une profonde rénovation. La réforme Bâle II, en vigueur depuis début 2008, a pour but premier d’améliorer le contrôle bancaire. Elle consiste à mieux prendre en compte la complexité accrue de l’activité bancaire, des nouvelles techniques de gestion des risques et de faire dépendre les exigences en fonds propres plus étroitement des risques économiques. L’accord bancaire Bâle II, devrait permettre la prévention du risque de défaillance bancaire sans pour autant compromettre les possibilités de financement des entreprises, plus particulièrement des PME, fortement dépendantes des concours bancaires. En effet, la politique de crédit appliquée par les banques, à l’égard de cette catégorie d’entreprises, est un sujet qui défraie régulièrement la chronique politico-économique selon les aléas de la conjoncture. Les banques sont parfois accusées de se montrer trop restrictives dans l’octroi de crédits et d’appliquer des taux d’intérêt prohibitifs qui mettent les PME en situation financière périlleuse. Ces inquiétudes se posent encore avec plus d’acuité dès qu’il s’agit d’aborder l’avenir du financement des PME des pays émergents dans le nouveau contexte réglementaire. L’objectif de ce travail est d’évaluer les effets potentiels de Bâle II sur les PME marocaines. 1 Figuet, J.M. (2003), « Le traitement du risque de crédit dans l’accord de Bâle II : Une évaluation. », Revue d’Économie Financière, n°71, pp. 271-293. 2 Pour y parvenir, une première partie portera sur l’exploration du traitement prudentiel accordé par le régulateur à l’endroit des PME. L’idée fédératrice sera donc d’interroger les différentes approches prudentielles quant à leurs degrés de sophistication et d’appréhension du risque de crédit PME. La deuxième partie, quant à elle, a pour objectif d’analyser empiriquement les répercussions potentielles de Bâle II sur les PME. Ceci consistera à mesurer l’ampleur des fluctuations des fonds réglementaires sous les différentes approches bâloises. La troisième et dernière partie s’intéressera à déduire les conséquences de l’application des directives de Bâle II sur la tarification des crédits susceptible d’être appliquée à cette population d’entreprises. I- De Bâle I à Bâle II : Qu’en est il du traitement du risque PME ? Afin d’approcher les enjeux de la refonte du ratio de capital dans le financement des PME, nous jugeons important de répondre à la question suivante : quelles sont les propositions concrètes du Comite de Bâle concernant le traitement du risque de crédit des PME. Pour ce faire, nous consacrons cette partie à l’exploration de l’approche standard à travers les règles affectant les PME dans le premier accord de Bâle, puis, dans sa refonte dite Bâle II. 1- Bâle I : Le ratio Cooke Durant les années 80, la finance mondiale a connu une montée du risque de crédit. En effet, cette période a été marquée par une forte croissance des engagements interbancaires qui ont développé un risque systématique considérable. C’était aussi une période caractérisée par l’ascension des risques pays avec les premiers problèmes de remboursement de la dette publique des pays en voie de développement. Tout de même, elle s’était distinguée par l’essor des taux de mortalité des entreprises qui ont suivi les deux chocs pétroliers et par l’exacerbation de la concurrence bancaire après la levée de l’encadrement du crédit. Pour contrecarrer les effets de telles menaces aux répercussions potentiellement très dangereuses sur la stabilité du système financier2, une coordination internationale entre autorités chargées de la supervision des activités bancaires et financières a été jugée 2 On peut citer les faillites des caisses d'épargne et des banques aux Etats-Unis dans les années 1980. C’est le cas notamment de la Continental Illinois en 1984, des banques texanes à partir de 1985, sans oublier les graves perturbations des marchés financiers qui se sont produites suite au krach boursier de 1987. 3 importante. Dans cette perspective, Les gouverneurs des banques centrales des pays du Groupe des Dix (G-10) ont créé en décembre 1974 le Comité sur les règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires, plus connu sous le nom de Comité de Bâle (Basel committee on Banking Supervision3). Ses préoccupations majeures sont au nombre de deux : l’amélioration du contrôle de l’activité bancaire internationale et la fixation des normes prudentielles minimales. Pour ce faire, les travaux du Comité de Bâle ont mis en place un système de mesure du capital en 1988. Ainsi naquit le premier accord de Bâle communément appelé « ratio Cooke » du nom du président de la Banque des Règlements Internationaux du moment. Ce ratio a été introduit non seulement dans les pays membres, mais aussi avec succès dans tous les pays possédant des banques internationales. Notant, que cette norme prudentielle n’a pas une force de loi, mais se présente en tant que standard international en matière de la réglementation bancaire. Elle prévoit, en effet, l’articulation du contrôle bancaire autour d’un ratio minimum de 8% de fonds propres réglementaires. La fixation de ce taux a été choisie à partir de l’observation historique du risque de crédit, et non sur des bases analytiques. Ce ratio est considéré comme un dispositif à double portée : il est destiné à assurer dans la durée la stabilité du système bancaire international, mais aussi à réduire les inégalités concurrentielles des conditions d’exercices de l’activité bancaire dans les différents pays. Le ratio Cooke, comme toute autre réglementation, présente un certain nombre d’insuffisances conceptuelles et pratiques qui peuvent lui faire défaut. Parmi ces limites, le champ des risques couverts par le premier accord de Bâle était limité au seul risque de crédit. Et si l’amendement adopté en 1996 a inclut le risque de marché dans l’accord initial, les autres risques supportés par les banques y demeuraient sans couverture. Un autre point négatif est que le ratio Cooke ne pouvait permettre qu’une estimation fruste et statique du risque de crédit. Cela se justifie par l’absence d’un fondement économique des pondérations de risque desquelles dépendent les exigences de fonds propres. Ces pondérations forfaitaires sont uniquement fondées sur une logique institutionnelle recouvrant un nombre trop limité de catégories de risque insuffisamment différenciées entre elles. C’est le cas notamment de la pondération attribuée aux crédits destinés aux entreprises privées. En effet, un crédit à une 3 Le Comité de Bâle est composé de hauts représentants des autorités prudentielles d’Allemagne, de Belgique, du Canada, des Etats-Unis, de France, d’Italie, du Japon, du Luxembourg, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de Suède et de Suisse. Ses réunions ont habituellement pour cadre la banque des Règlements Internationaux, à Bâle, siège de son secrétariat permanent. Les documents du comité fournissent de grandes orientations que les autorités de contrôle de chaque pays peuvent utiliser pour définir les politiques prudentielles qu’elles appliquent. Les orientations publiées dans certains documents, comme l’accord sur les fonds propres et les principes fondamentaux, sont libellées de manière à pouvoir être appliquées plus étroitement par les autorités de contrôle du monde entier. 4 petite ou moyenne entreprise risquée bénéficie du même coefficient de pondération qu’une grande entreprise ou une firme multinationale. Par exemple, un crédit octroyé à IBM est pondéré à 100%, est considéré, par ce fait, comme aussi risqué qu’un crédit à une PME marocaine. De même, quelle que soit la qualité du crédit de l’entreprise notée triple A ou triple C, il lui sera affecté le même coefficient de pondération (100%), c'est-à-dire, elle subira le même coût de fonds propres. Cette situation est susceptible de conduire les banques à privilégier le financement d’actifs risqués dans la mesure où le coût prudentiel sera largement compensé par la rémunération attendue des risques. Cette incitation vers la recherche de la rentabilité au détriment du risque a été soulignée par Butsch (1990)4 pour qui « les banques vont être désormais incitées, plus qu’auparavant, à privilégier la rentabilité de leurs interventions, (…) à veiller à ce que chaque opération supporte le coût de sa propre couverture ». 2- Les approches prescrites par Bâle II : quel traitement du risque de crédit des PME ? Dans le cadre de la réglementation Bâle II, les banques ont le choix uploads/Finance/ communication-bale-ii-et-le-traiment-du-risque-de-credit-pme-pdf.pdf
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- Publié le Sep 28, 2022
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