1 Cours Stratégies Industrielles (semestre 6 parcours Gestion) Mme Sakhraoui Ba

1 Cours Stratégies Industrielles (semestre 6 parcours Gestion) Mme Sakhraoui Bahija Thème I : Les théories de la firme La firme représente l’unité de base de toute économie. Quand on étudie la performance d’un tissu productif d’une économie, on se pose la question : comment ce tissu se transforme-t-il sous l’effet des stratégies des firmes. Il importe donc de comprendre les principaux déterminants de leurs comportements stratégiques : quelle est la rationalité du décideur, quels objectifs vise-t-il ? Qui prend les décisions dans l’entreprise ? La théorie économique de la firme qui se développe à partir des années 1970 se pose essentiellement une question : qu'est ce qu'une firme ? Cette question, qui semble pourtant d'une grande simplicité, n'est pas encore complètement résolue aujourd'hui, tant du point de vue théorique qu'empirique. Alors que l'entreprise est un agent économique central, elle n'a occupé qu'une place marginale en sciences économiques jusque dans les années 1970 et la redécouverte de l'article de R. Coase de 1937. L'entreprise est assimilée à une «boîte noire» ou un «point». En effet, la théorie économique néoclassique a pour objet l'étude des marchés et des mécanismes de prix. La firme, pour les néoclassiques, ne joue pas un rôle central dans ce cadre-là, seules importent la quantité de ressources qui «entre» dans la firme, les inputs (capital, travail, matières premières...) et la quantité de biens qui en «sort», les outputs, directement vendus sur le marché (d'où le terme de «boite noire» pour qualifier l'entreprise). Cette conception de la firme néoclassique repose sur des hypothèses fortes. (i) L'entreprise est assimilée à un agent économique individuel. Rien n'est dit sur le fonctionnement interne de l'entreprise et en particulier sur les conflits d'intérêt. (ii) Le comportement de l'entreprise est assimilé à celui de l'entrepreneur. Celui-ci, comme tout agent économique, a un comportement parfaitement rationnel (il a une information parfaite et des capacités d'analyse infinies). (iii) L'objectif poursuivi est unique : la maximisation du profit. C'est l'irréalisme de ces hypothèses qui va justifier la remise en cause de cette vision de la firme et le développement de conceptions alternatives de l'entreprise. Mais au final, on retiendra aussi que la firme néoclassique est avant tout un acteur des échanges sur les marchés et qu'elle n'a pas vocation à être elle-même sujet de l'analyse néoclassique. L’ouvrage A. Berle et G. Means de 1932 est le point de départ de ce que l'on a appelé la « révolutionmanagériale ». L'idée centrale de ces auteurs est de montrer que le développement de la grande société par actions, et la dispersion de la propriété entre un grand nombre d'actionnaires, tend à entraîner la séparation de la propriété et du contrôle de l'entreprise. Le 2 pouvoir de décision appartient aux managers et la propriété aux actionnaires. Cette approche inspirera par la suite la théorie de l'agence dans sa représentation de l'entreprise. La deuxième approche est l'approche dite «behavioriste» de Cyert et March. Leur ouvrage de 1963 présente l'entreprise comme une organisation complexe, constituée de groupes aux intérêts divers et caractérisée par des rapports simultanés de conflits et coopération. Les auteurs précisent que la firme est aussi le lieu d'apprentissages collectifs, thème qui sera repris par les approches évolutionnistes de la firme. Enfin l'analyse d'A. Chandler à la fois dynamique et historique, va initier l'approche de R. Coase en présentant la firme comme une institution complexe, fondée sur un système de coordination administrative et hiérarchique. 1. L'approche contractuelle de la firme L'approche contractuelle de la firme a pour objectif de définir la forme d'organisation la plus efficiente compte tenu du contexte, en particulier informationnel. Trois approches contractuelles différentes sont présentées dans cette première partie : la théorie des coûts de transaction, la théorie des incitations (ou théorie de l'agence) et la théorie des contrats incomplets. Les approches contractuelles présentées diffèrent en fonction de leur analyse des comportements des agents et de leurs interactions (rationalité limitée ou parfaite) et en fonction des hypothèses sur l'information dont les agents disposent (information parfaite ou pas).Mais l'unité entre ces travaux vient d'une conception commune des rapports économiques : ce sont des rapports contractuels entre des individus libres. Dans cette perspective, la firme s'analyse comme un «noeud de contrats» entre individus. La théorie des contrats se développe avec la volonté de dépasser certaines limites de l'approche néoclassique de la firme, sans pour autant la remettre radicalement en question. Elle a pour objectif de proposer une représentation plus réaliste de la firme. La théorie des incitations est celle qui reste le plus proche de la théorie standard, en particulier parce qu'elle ne rompt pas avec l'hypothèse de rationalité parfaite. 1.1. La théorie des coûts de transaction 1.1.1. R. COASE et la question de l'existence de la firme Dans son article de 1937 "The nature of the firm", R. Coase est le premier économiste à poser la question de savoir pourquoi les firmes existent et plus largement la question de la nature de la firme. Pour Coase, la firme est un mode de coordination des transactions alternatif au marché. Si le marché n'est pas l'unique moyen de coordonner l'activité économique, c'est qu'il existe des coûts à recourir au système de prix, des coûts de transaction. Ces coûts de transaction correspondent aux coûts de recherche d'information, de négociation des contrats, de contractualisation répétée... Williamson proposera par la suite une définition précise de ces coûts. La différence fondamentale entre marché et firme, est que sur un marché, la coordination se fait par le système des prix, alors que la firme propose une coordination administrative qui passe par l'autorité et la hiérarchie. Pour Coase, c'est l'autorité qui caractérise fondamentalement une firme. 3 Une fois posée l'existence de deux modes de coordination alternatifs, Coase s'interroge sur le fait de savoir pourquoi les deux modes de coordination coexistent. En fait, si la coordination marchande génère des coûts de transaction, la gestion internalisée des transactions entraîne des coûts de coordination, en particulier parce que les rendements des activités managériales sont décroissants. Ainsi, tant que les coûts de coordination interne sont inférieurs aux coûts de transaction, la coordination se passe à l'intérieur de la firme, à partir du moment où ils deviennent supérieurs, la coordination marchande est préférable. 1.1.2. O. WILLIAMSON et la définition des coûts de transaction Les travaux de Williamson se situent explicitement dans le prolongement de ceux de R. Coase. Ces travaux vont permettre d'expliciter le concept de coût de transaction et préciser certaines hypothèses-clés pour comprendre en particulier dans quels cas la firme s'impose comme mode de coordination, c'est-à-dire dans quelles conditions l'intégration d'une activité dans la firme sera préférée au recours au marché. Williamson pose deux hypothèses relatives aux comportements des agents. (1) La rationalité limitée : les agents ont des capacités cognitives limitées. Lorsque l'environnement est complexe, ils ne peuvent pas envisager tous les événements possibles et calculer parfaitement les conséquences de leurs décisions. (2) L'opportunisme des agents : c'est une conséquence de la rationalité limitée. Comme le contrat ne peut pas prévoir toutes les alternatives possibles, un agent peut être tenté d'adopter un comportement opportuniste pour favoriser ses intérêts au détriment de ceux des autres. Rationalité limitée et opportunisme augmentent les coûts de transaction, en particulier de conception des contrats et de contrôle. Williamson pose aussi des hypothèses sur les caractéristiques des transactions : (3) La spécificité des actifs : un actif est dit spécifique s'il nécessite des investissements spécifiques. Ce sont des investissements durables, effectués pour réaliser une transaction particulière, et qui ne sont pas redéployables sans coûts vers d'autres usages. (4) L'incertitude sur les conditions de réalisation de la transaction risque d'augmenter son coût (incertitude liée à des perturbations exogènes à la transaction par exemple). (5) La fréquence de la transaction : plus une transaction est répétée, plus les contractants ont des occasions d'être opportunistes, ce qui augmente d'autant les coûts de transaction. Compte tenu de ces caractéristiques des comportements et des transactions, il s'agit pour Williamson de trouver la forme organisationnelle la plus adaptée, au sens où elle limite les coûts de transaction. Ainsi pour Williamson, la firme est un système contractuel particulier, un «arrangement institutionnel» caractérisé par un principe hiérarchique qui permet à la direction de l'entreprise de prendre les décisions en cas d'événements non prévus par les contrats, et qui permet de limiter les risques liés à l'opportunisme. 1.2. La théorie des incitations 4 Cette approche contractuelle s'inscrit dans le cadre de la nouvelle microéconomie et plus précisément dans le cadre de l'économie de l'information. Elle se distingue de la théorie des coûts de transaction dans la mesure où elle préserve l'hypothèse néoclassique de rationalité parfaite des agents. Elle place la détention de l'information et son partage entre contractants au coeur de son analyse de la firme. A l'origine de cette approche, on trouve l'analyse de Berle et Means (1932) et celle de Michael Jensen et William Meckling (1976). La théorie des incitations repose sur la notion de relation d'agence. Une relation d'agence a deux caractéristiques principales : c'est une relation de délégation et elle suppose une asymétrie d'information. Une relation d'agence uploads/Finance/ cours-s6-strategies-industrielles-pr-sakhraoui-themes-1-et-2-pdf.pdf

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  • Publié le Aoû 09, 2022
  • Catégorie Business / Finance
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