ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUI
ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE Du même auteur, chez le même éditeur : Le roman « ISLAM BLUES », illustré par des lithographies de Léon Carré L’adaptation au théâtre de « L’ANE D’OR » d’Apulée, illustrée par Ian Styka et les peintres de Biskra. ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE Abdenour DZANOUNI ELOGE DE L’ETRANGER «Nous sommes tous des émigrés sur terre… » (Tag) QUARANTE-DEUX CHRONIQUES ET RECITS POUR FLETRIR LES HAINES RACIALES ET RELIGIEUSES Et cinq textes des journalistes et conteurs Mustapha KAOUAH, Houria CHAKIB, Nadir BACHA, Youcef REZZOUG et Fodil OURABAH Editions de La Belle Feuille ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE EN GUISE DE PREAMBULE : LE JOURNALISTE ET LE BLOGGEUR Tous les apprentissages de toutes les écoles de journalisme concourent à cela près : écrire pour ne rien dire qui puisse déplaire aux publicitaires, contrarier les carrières, décevoir les commanditaires, irriter les gens en place, instruire le lecteur… Bref, écrire pour ne rien dire ! De cela, Marivaux a tout dit ou presque. Qui aspire au métier de journaliste est dressé comme un chien de chasse à cours : il frétille au départ, se fraye une place dans la meute, flaire, lève, débusque, poursuit, voltige, traque, cerne le gibier, aboie fort, plus fort, mord au jarret, frémit à l’hallali, salive au coup de grâce, savoure la curée… À la fin, les seigneurs de la presse se découvrent et font sonner la corne éditoriale, essuient le canon de leur fusil encore fumant et retournent au chenil, eux, leurs chiens et leurs trophées sanglants. Dans le péril renouvelé où se trouvent des journaux de ne plus paraître_ faute, nous dit-on, de ressources publicitaires _ des journalistes, craignant famine, se sont inquiétés de la concurrence altruiste des blogueurs et sont montés illico au créneau pour nous prévenir. Ils profèrent sentencieux que « Les blogueurs ne vérifient pas leurs informations, ne savent pas les hiérarchiser, ne connaissent pas le métier… » Si ces propos nous renseignent sur la qualité du dressage dispensé par les grandes écoles du genre ou prodigué au sein des rédactions, la prétention des journalistes à « hiérarchiser les informations » mérite une petite correction. Le journaliste n’a pas une once de pouvoir pour hiérarchiser quoi que ce soit dans le journal où il pond son article car la hiérarchie de l’information est définie par le propriétaire du journal et mise en œuvre sous son contrôle. Cela s’appelle une ligne éditoriale. Où est donc la supériorité du journaliste professionnel sur le blogueur amateur ? S’il classe les dépêches, il le fait selon la ligne en vigueur et sur laquelle il n’a aucune influence. Rien en tout cas qui justifie sa morgue et son mépris affiché pour le bloggeur ! L’improvisation ou la fantaisie éditoriale n’est pas de mise. Le journaliste peut, grâce à Internet, créer son blog ! Il a ainsi le loisir de vérifier ses informations et de les recouper, le pouvoir de les hiérarchiser à sa guise et la liberté de définir sa ligne éditoriale à l’envie et qui sait, s’il a une idée plus noble du journalisme que celle de ses confrères de la meute et de la curée, il pourra espérer un jour vivre dignement de sa plume. En attendant, il se dédoublera pour écrire, selon la ligne du propriétaire, dans le journal et, selon son point de vue, dans son blog avec cette précaution désormais d’usage qu’il devra le faire de préférence sous pseudonyme. Entrant au journal, le stagiaire doit, sans plainte ni soupir, épouser la ligne éditoriale en place, s’y mouler, s’y liquéfier, la servir, l’alimenter pour trouver gîte et couvert à la table de la rédaction ! Pour espérer garder sa place, le journaliste devra se ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE blottir sous l’aile d’un protecteur généralement un patron du monde de l’industrie, de la politique ou de la sécurité. Par l’entremise du directeur de journal, ou sous son œil bienveillant, le protecteur le choisit dans le vivier des rédactions pour en faire son scribe et l’élever comme un chapon*. Cette entremise s’appelle dans le jargon « spécialisation » et peut, si affinités, mener à l’« accréditation ». Le directeur du journal n’a plus à missionner au quotidien des journalistes auprès du commanditaire, ni à subir en retour ses récriminations au cas où l’article déplairait. Le protecteur est plus rassuré s’il a la main sur le journaliste qui lui soumet, le plus souvent au téléphone, les articles avant leur publication. Celui-ci mérite alors de l’appellation labellisée de « poule de luxe ». Dans les salles de rédaction, par nature si bruyantes, on reconnaît la conversation téléphonique de la poule de luxe avec son prote**, au silence qui se fait quand le journaliste appelle son interlocuteur par son prénom, le tutoie et glousse au compliment, susurré au creux de l’oreille, sur l’article publié le matin même. On reconnait par recoupement, tel député, tel ministre, voire le président à l’autre bout du fil. Alors, un ange passe et les oreilles traînent pour capter une confidence bonne à raconter au dîner ce soir. Elle donnera alors au journaliste qui la raconte l’air et le sentiment d’exercer son fabuleux métier dans le giron des puissants de ce monde. Que ceux qui ne rêvent pas spécialement de tutoyer ceux-là se rassurent. Le talent n’est pas toujours un critère pour être accrédité. C’est même souvent mal venu d’en avoir. Il peut-être un facteur dangereux d’indépendance. A l’opposé, l’accréditation auprès d’une institution, ou même d’un gouvernement ami, formate le journaliste à en faire un rédacteur de communiqués, un porte parole, un prêcheur… n’importe quoi sauf un journaliste. Avoir seulement du talent n’est pas non plus garant d’indépendance d’esprit. Que de journalistes qui en étaient gorgés ont mis leur plume éhontée au service d’intérêts qu’ils dénonçaient la veille et embrassé une carrière de larbins tristes et veules. Il en faut, dit-on, pour que le système continue de fonctionner, avec cette réserve toutefois que le lecteur soit averti. La proximité de la source n’est pas garante de l’exactitude de l’information et, si celle- ci n’est pas d’emblée mensongère, elle l’est souvent par omission. La charge revient alors au lecteur de deviner ce qu’il ne sait pas et d’imaginer ce qu’on lui cache. Face à ses détracteurs, le bloggeur doit savoir comment ces imposteurs saccagent et déshonorent le métier ! Le respect de l’éthique et des règles de déontologie leur est étranger et tout rappel à ce propos insupportable. C’est en effet trop exiger d’eux de faire leur métier, et seulement leur métier ! Vous brimeriez leur zèle enthousiaste à être, tour à tour, collaborateur de la police, supplétifs de la justice, conseiller politique et si, par malheur, la guillotine était encore debout, assistant du bourreau ! Ils ne se privent pas, à l’occasion, de dresser les potences à Baghdad ou Tripoli. À croire ELOGE DE L’ETRANGER LA BELLE FEUILLE SOMMAIRE que le journalisme est le tonneau des Danaïdes de toutes les vocations dévoyées. Les bloggeurs ne vérifient pas leurs informations ! disent-ils. Ils ne seraient pas les seuls dans ce cas. Les gardiens du temple la jouent à l’esbroufe, au toupet, pariant sur l’amnésie chronique du lecteur ! Aussi, face à de tels procédés, il y a salubrité publique à rappeler, sans être exhaustif, quelques parties de chasse mémorables organisées par de vénérables rédactions. Qui ne se souvient de la furia de ces journalistes français sonnant la charge contre le « bagagiste d’Orly », massacrant le présumé terroriste Abderezak Besseghir ; puis contre les présumés « pédophiles d’Outreau », détruisant la vie et l'honneur d'une dizaine de familles ; ou encore contre Dominique Baudis, dans «l’affaire Allègre », entachant avec une rare violence l'honneur du Président du Conseil Supérieur de l’Audio-visuel. Ils inventaient avec jubilation des traces de poudre dans le casier du dit « terroriste », dénonçaient l’indifférence complice des habitants de la cité du Renard et pressaient Dominique Baudis de démissionner… au nom de la morale ! Quel carnage ! Pour les innocents accusés, les séquelles furent irrémédiables, les conséquences terribles et parfois funestes ! Côté tueurs, après avoir pris toute leur part dans la curée, les journalistes ont continué à sévir sans vergogne sur les écrans de télé, les ondes radios et les feuilles de choux ! Aujourd’hui encore, ils jouissent de leur carte de presse et les confrères qui la délivrent n’ont jamais cru utile de les entendre sur ces « bavures » ni d’envisager un moment de réviser les critères d’octroi et de retrait de ces permis de calomnier et de tuer. Pardi, pourquoi se priver du plaisir de flinguer en toute immunité ! Pur divertissement et privilège des seigneurs : la chasse à « l’homme sans droits » est ouverte en toute saison, sans répit ni mercy. 30 mai 2014 *Un chapon est un poulet châtré et engraissé. Dans une rédaction, il est désigné sous l’appellation contrôlée de « poule de luxe ». **Le prote_ diminutif de protecteur_ est, dans uploads/Finance/ eloge-de-etranger-01092015.pdf
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- Publié le Jui 29, 2021
- Catégorie Business / Finance
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