i L’impact de l’aide publique sur la croissance économique et la réduction de l
i L’impact de l’aide publique sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso Jean Pierre Lamoussa KOUDOUGOU, Economiste, Gestionnaire-Financier, Direction Générale de l’Economie et de la Planification, Ministère de l’Economie et des Finances, Burkina Faso, Tél : +226 70 75 76 30 E-mail : lamoussajeanpierre@gmail.com ii Résumé Depuis les années 2000, l’aide publique connaît une croissance forte au Burkina Faso. Elle constitue une source importante du financement de la mise en œuvre de politiques économiques au Burkina Faso. Des Programmes d’ajustements structurels à la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable en cours, en passant par les Cadres stratégiques de lutte contre la pauvreté, elle a permis de mobiliser environ 790 millions de dollars US en moyenne par an (RCD). Les signatures de conventions de financement sont fréquentes et bien médiatisées par la presse. L’on vante le fait que le Burkina Faso jouisse de la confiance des Partenaires au développement. Cependant, force est de constater que beaucoup de domaines ciblés par l’aide ne connaissent pas une évolution favorable. La pauvreté persiste et prend de l’ampleur. Cette situation laisse plus d’un burkinabé à s’interroger sur la contribution réelle de l’aide au développement du pays. Le présent article s’est fixé pour objectif de mesurer économétriquement l’impact de l’aide publique sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso. L’étude arrive à la conclusion que l’aide influence négativement la croissance économique mais, elle contribue à réduire significativement la pauvreté au Burkina Faso. iii Sigles et abréviations ADF : Augmented Dickey-Fuller APD : Aide Publique au Développement BAD : Banque Africaine de Développement BCEAO : Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest BID : Banque Islamique de Développement BOAD : Banque Ouest Africaine de Développement CAD : Comité d’Aide au Développement DGCOOP : Direction Générale de la Coopération DGEP : Direction Générale de l’Economie et de la Planification DGTCP : Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique Eau et ass. : Eau et assainissement FAD : Fonds Africain de Développement FAFPA : Fonds d’Appui à la Formation Professionnelle et à l’Apprentissage FAIJ : Fonds d’Appui aux Initiatives des Jeunes FAPE : Fonds d’Appui à la Promotion de l’Emploi FASI : Fonds d’Appui au Secteur Informel FCFA : Franc de la Communauté Financière d’Afrique FMI : Fonds Monétaire International IAP : Instrument Automatisé de Prévision IDA : International Development Assistance IDH : Indice de Développement Humain INSD : Institut National de la Statistique et de la Démographie MCO : Méthode des Moindres Carrés Ordinaires MEF : Ministère de l’Economie et des Finances OCDE : Organisation de Coopération pour le Développement Economique OMD : Objectif du Millénaire pour le Développement ONG : Organisation Non Gouvernementale PIB : Produit Intérieur Brut iv PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement RCD : Rapport sur la Coopération pour le Développement SCADD : Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable USA : United States of America VIH : Virus de l’Immunodéficience Humaine 1 Introduction L’Aide Publique au Développement (APD) se définit comme l’ensemble des apports de ressources fournies aux pays en développement et aux institutions multilatérales. Selon le Comité d’Aide au Développement (CAD) de l‘OCDE, elle doit répondre aux caractéristiques suivantes : - provenir d’organismes publics y compris les Etats et les autorités locales ou de leurs agences d’exécution ou d’organismes agissant pour le compte d’organismes publics ; - être acheminée vers des pays ou territoires en développement ou à défaut à une institution multilatérale qui sera chargée d’acheminer cette aide vers de tels pays, en leur octroyant des prêts à des conditions très préférentielles ; - avoir pour but essentiel de favoriser le développement économique et l’amélioration du niveau de vie des populations dans les pays bénéficiaires ; - comporter un élément de libéralité (élément don) d’au moins 35 %. D’après cette définition, l’aide publique englobe les projets de développement, l’aide alimentaire, les secours d’urgences, les efforts de maintien de la paix, la coopération technique, les contributions aux institutions multilatérales et les fonds accordés aux banques multilatérales de développement à des conditions de faveur. Elle exclut l’aide militaire et les flux non concessionnels provenant de créanciers publics. Le Burkina Faso, pays enclavé sans accès à la mer, situé au cœur de l’Afrique Occidentale, fait partie des pays qui bénéficient de l’aide extérieure. Il reçoit depuis 1990, 790 millions de dollars US d’aide en moyenne par an (RCD). Jouissant d’une bonne note auprès de la Communauté Internationale, le Burkina Faso compte de nos jours près de 40 partenaires au développement, multilatéraux et bilatéraux, qui l’accompagnent dans ses objectifs de croissance économiques et de réduction de la pauvreté. Entre 2001 et 2012, le volume de l’aide a plus que doublé, passant de 447 millions de dollars US en 2001 à 1 155 millions en 2012 (RCD 2013). Sur la période 2011-2015, elle couvre 34,5% des besoins de la Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (MEF, SCADD). Avec une prévisibilité1 de l’aide estimée à 8% (enquête 2010, OCDE), si cette tendance à la hausse se maintient, l’aide reçue par le Burkina Faso va franchir la barre de 2 000 millions de dollars US par an dans les cinq prochaines années. En dépit de ce qui précède, force est de constater que beaucoup d’indicateurs socio- économiques que cible l’aide ne connaissent pas une évolution favorable et significative au Burkina Faso. 1 La prévisibilité est calculée en faisant le rapport entre les décaissements et les engagements de financement, multiplié par cent (méthode de calcul de l’OCDE). 2 En effet, 43,90% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, évalué à 108.374 FCFA en 20092. La mortalité infantile reste élevée et est estimée à 307 décès pour cent mille naissances (Annuaire statistique 2012 du Ministère de la santé). Le taux d’accès à l’assainissement est de 3,10 % (enquête nationale 2011 sur l’accès à l’assainissement). Celui d’accès à l’eau potable en milieu rural est estimé à 58,50%. Le taux brut de scolarisation au secondaire est évalué à 11,30% entre 2011 et 2013 (Rapport de performance 2012 de la SCADD). La croissance démographique de 3,10% a pour conséquence une augmentation de la demande sociale en éducation et en santé, de plus en plus non satisfaite. Les maladies invalidantes (polio, VIH, méningites, choléra, etc.) sont toujours légions. L’insécurité alimentaire touche une bonne partie de la population. Face à cette situation, il est important de s’interroger sur la contribution réelle de l’aide publique au développement du Burkina Faso de la façon suivante : « L’aide publique a- t-elle un impact positif et significatif sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso ? » Le présent article se propose d’apporter des éléments de réponse à cette question, autour du thème : « l’impact de l’aide publique sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso ». L’objectif principal de l’article est de mesurer l’impact de l’aide publique au développement sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso. Pour ce faire, les hypothèses suivantes ont été émises : - Hypothèse 1 : l’aide a un impact positif sur la croissance économique et la réduction de la pauvreté au Burkina Faso, avec un rendement marginal décroissant ; - Hypothèse 2 : la qualité des politiques économiques est un canal de transmission de cet impact. Pour vérifier ces hypothèses, l’étude adopte une démarche économétrique et s’articule autour de cinq parties. La première traite de l’aide publique au développement en général et la deuxième ses spécificités au Burkina Faso. La troisième partie est consacrée au cadre théorique et opératoire des modèles économétriques et la quatrième à l’analyse des résultats. La dernière partie présente les éléments de conclusions. I. L’Aide Publique au Développement L’objectif de cette partie est de faire une revue des débats sur l’efficacité de l’aide, mais avant, il importe de situer sa place et son rôle dans l’économie selon la théorie économique. 2 INSD 3 1. La place et le rôle de l’aide extérieure dans le développement selon la théorie économique 1.1. L’aide pour le financement de l’industrialisation. La thèse de l’industrialisation comme condition indispensable pour la croissance économique a dominé la réflexion économique de 1950 à 1970. Selon cette thèse, la faible industrialisation des pays était à la base de leur sous-développement. Pour développer l’industrialisation, ces pays devaient investir massivement. L’investissement apparut donc comme une variable clé de la croissance économique. Dans la majorité des cas, les auteurs affirmaient que la croissance était proportionnelle à l’investissement (David Dollar et William Easterly, 1999). Par conséquent, pour atteindre un certain objectif de croissance, il était fortement recommandé aux pays d’agir sur l’investissement. Cependant, la mise en œuvre de ces stratégies dans les pays en développement se heurtait à l’insuffisance de ressources. C’est alors qu’intervient la théorie de l’aide destinée au financement de l’investissement à travers deux modèles d’analyse : celui d’Harrod-Domar sur la période 1950-1960 et du modèle de Chenery et Strout (1966), encore appelé modèle des deux déficits uploads/Finance/ impact-apd-bf-pdf.pdf
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- Publié le Dec 12, 2022
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