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Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Érudit offre des services d'édition numérique de documents scientifiques depuis 1998. Pour communiquer avec les responsables d'Érudit : erudit@umontreal.ca Article Armand-Denis Schor L'Actualité économique, vol. 76, n° 4, 2000, p. 545-576. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/602337ar DOI: 10.7202/602337ar Note : les règles d'écriture des références bibliographiques peuvent varier selon les différents domaines du savoir. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter à l'URI http://www.erudit.org/apropos/utilisation.html Document téléchargé le 25 March 2013 09:11 « La théorie des zones monétaires optimales : l’optimum, le praticable, le crédible et le réel » L'Actualité économique, Revue d'analyse économique, vol. 76, n° 4, décembre 2000 La théorie des zones monétaires optimales : Voptimum, le praticable, le crédible et le réel Armand-Denis SCHOR CA.D.R.R, Université de Lille 2 RÉSUMÉ - La théorie des zones monétaires optimales est, depuis quarante ans, un cadre d'analyse incontournable en matière de choix du régime de change. D'inspiration keyné- sienne, elle s'inscrit initialement en complément du plaidoyer friedmanien en faveur du flottement généralisé. Enrichie, puis profondément renouvelée par la prise en compte de la cohérence temporelle et de la théorie de la crédibilité - la nouvelle théorie des zones moné- taires optimales -, la construction de Mundell est toujours aussi robuste et actuelle. Elle conserve toute sa pertinence à l'heure de la montée en puissance des unions régionales, elle est aujourd'hui utilisée pour aider le Canada à déterminer le régime de change optimal face à la monnaie des États-Unis - flottement, dollarisation, union monétaire -, ou les pays asiatiques tentés par l'ancrage et les solutions régionales. ABSTRACT - The theory of the optimum currency areas -OCA- has been, for forty years, an unavoidable framework regarding the choice of the exchange's mode. Of Keynesian inspiration, it initially suppléments the friedmanian plea in favor of the generalized float- ing exchange rate mode. Improved, then deeply renewed by taking into account time inconsistency and the theory of credibility -the new theory of the optimal currency areas-, Mundell's construction is still robust and topical. The OCA theory maintains ail its rele- vance at a time of rising régional unions, it is currently being used to help Canada déter- mine the optimal mode of exchange vis-a-vis the currency of the United States -float, dollarization, monetary union-, or to help the Asian countries tempted by the peg and by régional solutions. INTRODUCTION La théorie des zones monétaires optimales (ZMO) est née en Amérique du Nord, au Canada. Le contexte historique de son développement n'est pas anodin puisque précisément l'analyse de Mundell (1961) vise d'abord à tracer les fron- tières optimales des zones monétaires, à définir les circonstances qui justifient le choix des changes fixes, par un pays spécifique. Mundell ne remet pas en cause la supériorité globale du régime des changes flottants, thèse défendue par Friedman (1953), alors même que le bon fonctionnement des changes fixes de Bretton 546 L'ACTUALITÉ ÉCONOMIQUE Woods était très largement reconnu1, il apporte un complément à l'analyse de son prédécesseur. Son analyse montre qu'il n'existe pas de régime de change uni- versellement optimal. Conclusion que retrouve et développe Jeffrey A. Frankel (1999) : no single currency régime is rightfor ail countries or at ail times, alors que les positions des experts montrent une tendance à la radicalisation : comme si un mouvement généralisé en faveur des changes fixes ou des changes flottants était la solution aux problèmes actuels du système monétaire international. Com- ment, en quelque sorte, s'interroge Mundell, faire le départ entre l'intérieur et l'extérieur. La question se posait alors au Canada, petite économie engagée dans l'interdépendance avec la première puissance mondiale, elle se posait en Europe dont les projets d'union économique prenaient corps. En l'an 2000, l'Europe a choisi l'union monétaire, la fixité absolue et le Canada s'interroge de plus en plus clairement sur l'opportunité de l'union monétaire avec son principal partenaire. La théorie des ZMO est également appliquée à l'Asie, à l'intégration des pays d'Europe continentale et orientale (PECO), à l'Afrique sub-saharienne. La ques- tion de la frontière monétaire, de la taille de la zone monétaire optimale est plus actuelle que jamais, parce que la tentation de l'union monétaire régionale touche tous les continents. 1. ZONES MONÉTAIRE OPTIMALES OU ZONES MONÉTAIRES PRATICABLES Mundell dégage un socle théorique du choix du régime de change par chaque économie : (i) avec l'extérieur la flexibilité est optimale, (ii) à l'intérieur la fixité, l'identité d'unité monétaire est optimale. Mundell met brièvement en avant le principal critère d'optimalité de la fixité du change : la mobilité factorielle qui permet l'ajustement aux chocs asymétriques sans variation de change. Une vaste littérature s'attache ensuite à compléter la liste des critères : degré d'ouverture économique, degré de diversification de la production, intégration financière, ... î.l Loptimum : la théorie de la zone monétaire optimale et son évolution La théorie de la zone monétaire optimale s'est progressivement enrichie de nouveaux critères. À la mobilité du travail mise en exergue par Mundell (1961), MacKinnon (1963) ajoute le degré d'ouverture, Kenen (1969), le degré de diver- sification, Ingram (1969), la dimension financière, Cooper (1977) et Kindleberger (1986), l'homogénéité des préférences2. 1.1.1 La mobilité des facteurs de production Mundell définit la zone monétaire optimale comme celle à l'intérieur de laquelle l'ajustement optimal se réalise avec des taux de changes fixes, alors que dans les 1. Les critiques françaises, notamment celles de Jacques Rueff, mettaient en cause l'hégé- monie du dollar et ses conséquences, non les changes fixes. 2. Pour un survey récent, voir également Narassiguin (1993). LA THÉORIE DES ZONES MONÉTAIRES OPTIMALES 547 relations avec les autres zones, rajustement optimal se fait à taux variables. Le critère d'optimalité est, pour lui, la mobilité des facteurs de production et la symétrie des réactions aux chocs externes. Il prend l'exemple d'un pays composé de deux régions, l'Est et l'Ouest, entre lesquelles le travail est mobile. La pre- mière produit des voitures et la seconde du vin. Supposons que les consomma- teurs réduisent leurs achats d'automobiles et augmentent leur consommation de vin, l'Est enregistre un déficit de sa balance des échanges et un excédent d'offre de travail, et l'Ouest l'inverse. Le déplacement de la main-d'œuvre de la province déprimée vers la province prospère équilibre les deux marchés du travail. Les sol- des des balances des échanges s'ajustent également. En effet, la demande de vin à l'Ouest augmente avec l'afflux de main-d'œuvre de l'Est, réduisant le surplus exportable de l'Ouest, tandis que les importations d'automobiles en provenance de l'Est équilibrent sa balance. La mobilité du travail protège ainsi la fixité du change entre les monnaies des deux provinces et permet leur union monétaire. Ces deux régions constituent une zone monétaire optimale au sens de Mundell. Il en va différemment lorsque les facteurs de production ne sont pas suffisam- ment mobiles. L'ajustement doit alors se faire autrement. L'Est ne peut vendre plus de voitures que si leur prix réel, leur prix relatif en terme de vin, diminue. Autrement dit, la dégradation des termes de l'échange pour la province déprimée (l'Est) doit être suffisante pour stimuler la demande de voitures de l'Ouest et équilibrer les deux marchés du travail. Si les salaires sont rigides, l'alternative est la dépréciation de la monnaie de l'Est. Si la fixité des changes l'interdit, l'ajuste- ment passe par le recul de la production et le sous-emploi. En l'absence de mobi- lité du travail, le pays n'est pas une zone monétaire optimale parce que l'ajustement suppose soit la variation du taux de change, soit celle du niveau d'acti- vité et d'emploi. C'est l'alternative entre la dépréciation et la déflation. Dans le cas de chocs asymétriques, si le travail est peu mobile et le taux de change fixe, la récession d'une région peut se transmettre à l'autre puisque l'ajustement par le change est exclu. Au contraire, dans le cas de chocs symétriques, les prix relatifs ne sont pas en cause et les deux régions peuvent choisir une monnaie unique. Le caractère symétrique ou asymétrique (c'est-à-dire spécifique à un pays) des chocs affectant les deux régions ou pays est donc déterminant et la propension d'une union à en être victime conditionne sa viabilité. 1.1.2 Le degré d'ouverture économique MacKinnon (1963) complète cette analyse en ajoutant le degré d'ouverture de l'économie comme critère d'optimalité. Il le mesure par le rapport des biens échangeables et des biens non échangeables. Plus une économie produit de biens échangeables, plus elle est ouverte sur l'extérieur et plus les prix intérieurs sont sensibles aux variations de change. Les fluctuations du change se transmettent rapidement et largement aux prix internes : la baisse des revenus réels devient apparente et les agents économiques exigent la révision de leurs revenus nominaux. Dans une économie ouverte, les politiques de stabilisation affectent simultané- 548 L'ACTUALITÉ ÉCONOMIQUE ment uploads/Finance/ la-theorie-des-zones-monetaires-optimales 1 .pdf
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- Publié le Jui 21, 2022
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