1 Le droit fiscal au secours du contribuable : (p. 145-160) Auteur : GRÉGOIRE L
1 Le droit fiscal au secours du contribuable : (p. 145-160) Auteur : GRÉGOIRE LOUSTALET Le droit fiscal au secours de contribuable, oui ! Mais au secours du contribuable citoyen ! Il peut paraître, de prime abord surprenant, de voir le droit fiscal, droit par nature régalien et perçu comme attentatoire au patrimoine, venir en aide au contribuable. Il est vrai que le contribuable a toujours eu une attitude de méfiance à l’égard de l’administration fiscale. “Il ne faut surtout pas marcher sur la queue du tigre qui dort” disait-on. Cependant, depuis plus d’une vingtaine d’année, cette relation évolue mettant progressivement en place une véritable collaboration entre l’administration et le contribuable. Cette évolution a été initiée par la loi du 8 juillet 1987 dite “loi Aicardi”1. Depuis lors, le législateur n’a jamais cessé d’améliorer ce rapport. De grandes avancées ont encore été faite dernièrement par la mise en œuvre du Rapport Fouquet de 20082. Dans ce contexte, le droit fiscal tient de plus en plus compte de la situation personnelle du contribuable. Ce dernier n’est plus accablé par l’administration mais soutenu surtout lorsqu’il est en situation de crise. Mais dès lors comment aider efficacement le contribuable qui se trouve en situation de crise ? Une situation de crise entraîne un changement brutal et imprévisible des circonstances dans lesquels se trouvent un ensemble de personnes nécessitant pour chacun une réadaptation rapide. Cependant, toute la difficulté, ici, est d’opérer cette réadaptation rapidement pour ne pas prolonger inutilement les difficultés dans lesquelles se trouvent les personnes considérées. Ainsi, se trouve-t-on dans une situation d’urgence. De plus, une situation de crise imprévisible dans sa survenance entraîne non seulement des effets connus mais également des effets inconnus. Il n’est pas possible de réagir de la même manière face à ces deux types d’effets puisqu’il est n’est possible d’anticiper que les premiers. Aussi, chacun de ces effets suit un traitement différent. Pour faire face au premier, le législateur met en place des dispositifs légaux spécifiques et pour les seconds il met en place des procédures d’assistance dont le but est de caractériser les difficultés, d’en déterminer l’ampleur et de trouver les moyens pour y faire face. Mais la crise 1 Loi 87-502 du 8 juillet 1987. 2 Rapport au Président de la république, Améliorer la sécurité juridique des relations entre l’administration fiscale et les contribuables : une nouvelle approche, Juin 2008, Dr. Fisc. 2008, no 27, 403. Voir sur ce thème : Les concepts émergents en droit des affaires, Ss. La dire. d’E. Le Dolley, LGDJ, 2010, Coll. Droit & Économie : E. Le Dolley, L’hypothèse du concept structurant – Essai en droit fiscal : la relation fiscale partenariale, p. 13 s. ; Ph. Neau-Leduc, Partenariat entre contribuables et administrations fiscales, p. 353 s. 2 économique et financière a donné de nouvelles perspectives sur la question et les différents acteurs de la fiscalité l’ont traitée de deux manières différentes. L’administration a commencé par détendre les délais habituels et accélérer les remboursements de ses dettes vis-à-vis des entreprises de telle sorte qu’elle a été plus tolérante dans l’application du droit ; et par la suite, le législateur est intervenu pour prendre des dispositifs particuliers ayant pour but de faire face aux principales difficultés engendrées par la crise. La modulation devient alors un facteur fondamental de traitement de la crise dont le but est d’adapter exactement les mesures aux besoins du contribuable. Dans ces situations de crise le fisc ne peut offrir qu’une aide financière. La législation fiscale prévoit dans ce cas d’une part des dispositifs légaux et d’autre part des procédures de médiation. La logique suivie par chacun d’eux est différente, les premières correspondent à des situations de crises bien connues qui présentent l’avantage de la rapidité, alors que les secondes sont plus adaptées aux situations nouvelles et permettent de mettre en place une aide ajustée à la crise rencontrée. Nous verrons donc dans un premier temps les dispositifs légaux outils de rapidité (I) et dans un second temps les dispositifs légaux outils de flexibilité (II). I. LES DISPOSITIFS LÉGAUX OUTILS DE RAPIDITÉ Les dispositifs légaux permettent de traiter les situations de crises connues dans leur survenance et dans leurs effets. L’automaticité de la loi permet une application rapide et efficace de ces situations. Cependant, la survenance d’une situation de crise peut rendre extrêmement éprouvant l’application du droit commun, l’administration intervient alors pour moduler cette application par la mise en place de tolérance. Ainsi, dans un premier temps, nous étudierons les dispositifs légaux de faveur (A) et dans un second temps les modulations apportées à l’application de la loi (B). A. Les dispositifs légaux de faveur Le droit fiscal connaît depuis quelques années différents dispositifs visant à traiter les situations de crises (1) mais la crise économique et financière actuelle a été l’occasion de mettre en place des dispositifs circonstancié en vue d’aider les contribuables (2). 1. Les dispositifs généraux de traitement des crises Le droit fiscal connaît tout d’abord un certain nombre de mécanismes qui n’ont pas été prévu pour faire face précisément à une situation de crise mais qui s’avèrent efficaces dans ces moments-là. Ainsi, l’exonération des indemnités de licenciement prévue par l’article 80 duodecies du CGI constitue une aide 3 particulièrement bienvenue dans le contexte du licenciement3. Il est également prévu en matière de licenciement que si le contribuable effectue un rachat sur son contrat d’assurance-vie les produits perçus à ce moment-là sont exonérés d’impôt sur le revenu. Cette disposition permet ainsi de ne pas aggraver la situation du contribuable qui utilise son capital pour subvenir à ses besoins à la suite d’un licenciement ou d’une mise à la retraite anticipée qui sont des situations caractérisées par une baisse importante de revenus. La même exonération est accordée au cas où le contribuable serait devenu à la suite d’un accident handicapé. De plus, dans le cas d’une disparition soudaine du chef de famille le fractionnement ou le différé de paiement des droits de succession s’avèrent très utiles lorsque la succession ne dispose pas des liquidités suffisantes pour payer ses droits4. À proprement parler ces mécanismes n’ont pas été mis en place pour faire face précisément à des situations de crises mais constituent tout de même une aide indéniable pour les contribuables en situation de crise pouvant bénéficier de ces régimes de faveur. Le droit fiscal prévoit également, en matière agricole, un dispositif de déduction pour aléas destinés à inciter les agriculteurs soumis à un régime réel à mettre de l’argent de côté afin d’anticiper sur certains risques que celui-ci pourrait rencontrer dans le cadre de son activité. Précisons toutefois qu’il ne s’agit là que d’une aide à l’anticipation d’une situation de crise que pourrait rencontrer l’agriculteur. Ainsi, les agriculteurs ne sont pas imposés sur les sommes qu’ils mettent de côté en vue de faire face aux aléas climatiques et naturels, sanitaires, familiaux ou encore économique qui se produiront au cours des sept exercices suivants celui du dépôt des sommes sur le compte spécifique5. Pour les autres entreprises, l’article 1756 I du CGI prévoit dans le cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire la remise des “frais de poursuite et les pénalités fiscales encourues en matière d’impôts directs et taxes assimilées, de taxes sur le chiffre d’affaires et taxes assimilées, de droits d’enregistrement, taxe de publicité foncière, droits de timbre et autres droits et taxes assimilés, dus à la date du jugement d’ouverture”. Cependant, il n’y a pas de remise des majorations et amendes exigées en cas de comportements graves du contribuable. Ainsi, l’administration ne remettra ni la majoration de 40 % due lorsque la déclaration ou l’acte n’a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai, ou de manquement délibéré ; ni la majoration de 80 % due en cas d’activités occultes, ou d’abus de droit ; ni 3 Les indemnités de licenciement sont exonérées dès lors qu’elles ne dépassent pas le plus élevés de ses trois montants : Le montant de l’indemnité de licenciement prévu par la convention collective de branche, par l’accord professionnel ou interprofessionnel ou, à défaut par la loi ; La moitié de l’indemnité de licenciement perçue dans la limite de six fois le plafond annuel de la sécurité sociale (soit 207 720 € pour les indemnités perçues en 2010) ; Deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de six fois le plafond annuel de la sécurité sociale. 4 Article 1717 I du CGI 5 Cf. M.-P. Madignier, Fiscalité agricole et viticole approfondie, Litec Fiscal, 2008, 2e édition, no 1014 s., p. 303 s. 4 la majoration de 100 % due en cas de mise en œuvre de la procédure d’évaluation d’office ; ni de l’amende de 50 % applicable en cas de non facturation, de fausses factures ou de facturation volontairement erronée. Il ressort de cette disposition une uploads/Finance/ le-droit-fiscal-au-secours-du-contribuable.pdf
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- Publié le Apv 11, 2022
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