13 OCTOBRE 2011_#01 Quels nouveaux enjeux pour le marketing bancaire ? L’été 20
13 OCTOBRE 2011_#01 Quels nouveaux enjeux pour le marketing bancaire ? L’été 2011 aura été très mouvementé pour les banques françaises. Le 15 juillet celles-ci passaient avec succès les « stress tests » imposés par l’Autorité Bancaire Européenne pour vérifier leur capacité de résistance à des scénarios de crise. Pourtant deux mois plus tard, Moody’s dégradait la note du Crédit Agricole et de la Société Générale, en raison d’une exposition jugée trop importante à la dette grecque et au ralentissement de l’économie américaine, entraînant une chute des valeurs bancaires sur les marchés financiers (jusqu’à près de 64% de chute pour la Société Générale). Ce paradoxe illustre bien la situation de crise et d’instabilité que traverse actuellement l’industrie bancaire. Une crise de liquidités tout d’abord. La méfiance et la frilosité dominent les marchés et les relations interbancaires. Les banques, doutant de la capacité des unes et des autres à surmonter la crise, rechignent à se prêter entre elles. Ainsi en août 2011, les dépôts à la BCE ont parfois atteint près de 200 milliards d’euros par jour, soit le niveau de 2008, les banques préférant y placer leurs surplus malgré une faible rémunération (0,75%). Cette situation impacte ainsi directement l’octroi de crédit et l’image auprès des consommateurs. Elle débouche inévitablement sur une seconde crise, de confiance des clients cette fois. L’injection de fonds publics dans les banques et l’effondrement du mythe du « too big to fail », associés au resserrement du marché du crédit ont considérablement écorné l’image des banques. Seulement 15% des Français recommanderaient leur banque à un proche, et 43% font encore confiance aux banques, un des plus bas taux d’Europe. Cette double crise intervient au moment où l’industrie bancaire est confrontée à trois grands bouleversements amenés à impacter durablement leur relation client. Un bouleversement réglementaire tout d’abord avec la mise en place à l’horizon 2019 de la convention Bâle III qui, en rehaussant le ratio de liquidité imposé aux banques et le risque de certains types de dépôts, va redessiner la gamme des produits d’épargne que les banques proposent à leurs clients et modifier la politique commerciale de celles-ci. Un bouleversement technologique ensuite, avec l’essor des EME (Etablissements de Monnaie Electronique) qui, profitant des évolutions technologiques et législatives, vont s’imposer comme des acteurs incontournables du paiement par internet et mobile, faisant craindre aux banques une désintermédiation inédite et préjudiciable. Un bouleversement sociétal enfin, issu des nouveaux comportements des utilisateurs pour lesquels les réseaux sociaux et le partage en ligne sont omniprésents au quotidien. Il en découle une attente envers leur banque d’une relation et de produits moins formels incluant une dimension communautaire, dynamique et participative. Comment intégrer ces bouleversements dans la stratégie commerciale et marketing des acteurs bancaires ? Anticiper et comprendre les nouveaux enjeux de l’industrie bancaire permettra de dessiner les contours de la « banque de demain » et rétablir la confiance du client, mais également des marchés. Avec i/ la fin du mythe de l’infaillibilité des banques, ii/ le besoin croissant de liquidités, notamment par la banque de détail, iii/ les mutations de l’environnement concurrentiel, en particulier les Etablissements de Monnaie Electronique, et iv/ les évolutions comportementales et sociétales, au travers du communautaire en premier lieu, les banques ne peuvent plus faire abstraction d’une stratégie marketing et commerciale orientée client, tant sur les produits financiers eux-mêmes que sur l’offre de services associée. PAGE 2 13 OCTOBRE 2011_#01 Priorité à la chasse aux dépôts – et à certains types de dépôts pour honorer Bâle III : « Pour parler franchement votre argent nous intéresse » Un contexte réglementaire nécessitant une nouvelle stratégie commerciale Prenant acte des enseignements de la crise financière, le Comité de Bâle a décidé fin 2010 de mettre en place de nouvelles propositions de règlementation bancaire avec l’objectif affiché d’un « plus jamais ça ! » : plus de faillites bancaires, plus de renflouement étatiques, et plus de crises de liquidité, tant les derniers évènements ont eu un d’impact sur l’ensemble de l’économie « réelle ». Ainsi à horizon 2019 la convention Bâle III, plus stricte que la précédente, prévoit de plus grandes contraintes pour considérer un titre comme « fonds propres » (rentrant ainsi dans le calcul des ratios), ainsi qu’un ratio de fonds propres « de qualité » passant de 2% à 4,5%. En termes commerciaux pour les banques, ces mesures les obligeront à privilégier désormais certains types de dépôt faits par la clientèle, et donc à prendre un virage stratégique vis-à- vis de l’épargne de leurs clients. Les produits aujourd’hui plébiscités par les Français comme l’assurance vie, les livrets A, les OPCVM (dont l’encours a baissé de 15% en 2010) ne rentrent plus qu’en partie dans le calcul des ratios de liquidités, et pourraient donc ne plus s’intégrer dans la stratégie marketing des acteurs bancaires. Justement, quelle stratégie adopter, à l’heure où les français sont de plus en plus inquiets pour leurs placements ? Est-il possible de proposer à ses clients à la recherche d’un investissement sûr, de long terme et défiscalisé, un dépôt à terme plutôt qu’une assurance vie ? Bien que démentie par les acteurs bancaires, la chasse aux dépôts par les banques est déjà en marche et prend deux formes conventionnelles : renvoyer les clients vers l’épargne « bilancielle » ou insister sur des produits d’appel très orientés « marketing »… Favoriser les produits bilanciels ? Les banques ont tout intérêt à orienter l’épargne de leurs clients vers les produits d’épargne bilanciels – i.e. dont les fonds sont conservés dans leur bilan - et qui rentrent donc dans le calcul de Bâle III. Et ce, en s’appuyant sur certaines attentes des clients, quitte à enrober ces produits de « cosmétique » pour mieux les vendre, au détriment des produits d’épargne classiques. Ainsi les livrets d’épargne solidaire et durable ont le vent en poupe, sur le modèle de la Société Générale, de la BPE ou du Crédit Coopératif. Une partie de leurs intérêts est reversée à une association que l’épargnant peut choisir. Ce sont les seuls produits financiers avec le livret A et le livret d’épargne populaire n’étant pas taxés au titre du Plan de Rigueur de 2011. Pourtant ces produits bilanciels sont souvent plus bénéfiques pour la banque que pour le client, puisque le taux élevé n’est finalement accessible que sur une courte période, avant de revenir à un taux très modéré voire faible. Ce sont d’ailleurs les banques en ligne qui en profitent le plus en surfant sur ce modèle pour capter de nouveaux clients (66% d’entre eux seraient devenus clients grâce à ces taux promotionnels). Mais le resteront-ils ? Et augmenteront-ils leurs dépôts au-delà de la période promotionnelle ? Un accent mis sur le « marketing » Pour lutter contre le manque d’attractivité des produits bilanciels, les banquiers vont également se tourner vers de nouveaux placements aux concepts novateurs. Se développe donc actuellement une gamme de produits d’appel aux rémunérations apparemment attractives, à la façon « vente privée », selon des critères souvent illisibles pour le client, liés à la durée, au montant, voire à la domiciliation des revenus dans l’établissement. Ils pourront aussi être indexés sur le nombre de souscripteurs, à l’instar de l’offre lancée en mars 2011 par Monabanq, via son application « faites monter le taux». Généralement efficaces pour conquérir les « chasseurs de primes », il serait étonnant que ces orientations marketing suffisent à attirer durablement les « bons » dépôts des clients, au sens de Bâle III : les produits bilanciels se révèlent effectivement peu attractifs, et plus globalement, l’ensemble des produits d’épargne brille plutôt la plupart du temps par l’absence de transparence et de prise en compte des vrais besoins des clients. Par ailleurs, en se concentrant sur leurs besoins propres, les banques persistent à croire aveuglément dans le mythe de la « fidélité à sa banque ». Elles oublient ainsi une réalité de plus en plus présente, qui impacte fortement et durablement le lien entre une banque et ses clients : la multi-bancarisation. Le « Livret Initiative Durable » de la BPE (Crédit Mutuel) Ce produit est un livret d'épargne ouvert avec 10€ et plafonné à 10 millions d'Euros. Chaque année, l'épargnant a la possibilité de partager tout ou partie des intérêts capitalisés avec des organismes d'utilités publiques, tels la Croix rouge, l'Unicef, Médecins du Monde, la Fondation Abbé Pierre, le Secours Catholique… Il bénéficie en outre du régime fiscal appliqué aux dons. PAGE 3 13 OCTOBRE 2011_#01 Prendre en compte le contexte de multi-bancarisation Lassés par cette guerre des taux, des acteurs bancaires pourraient en effet explorer une troisième voie en pariant sur l’accentuation de la multi-bancarisation et sur l’enjeu de la relation privilégiée avec le client. Cette pratique, adoptée par 24% des Français1, a déjà fait émerger de nouveaux besoins de gestion interbancaire pour les clients : le Money Center de Boursorama sur le modèle de Mint aux Etats-Unis) peut être la version 1.0 d’une « méta- banque » qui permettrait demain de gérer son patrimoine et ses opérations quotidiennes (virements, factures, uploads/Finance/ le-regard-mawenzi-partners-1-nouveaux-enjeux-du-marketing-bancaire.pdf
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- Publié le Jul 24, 2021
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