LE GROUPE DE DEFENSE NBC AU KOSOVO par le lieutenant-colonel KOVALEVSKY, comman

LE GROUPE DE DEFENSE NBC AU KOSOVO par le lieutenant-colonel KOVALEVSKY, commandant en second du GDNBC P résent dès l’engagement de la force au Kosovo en mai 1999, au travers d’un module Guépard 1000 (1/1/2), le Groupe de Défense NBC s’est retrouvé rapidement à devoir gérer des risques NBC particuliers : les risques NBC d’origine industrielle. Des éléments projetés de l’armée française avaient déjà été confrontés à une situation de cet ordre à Dakar face à un événement impliquant un wagon d’ammoniac. Mais au Kosovo, un tissu industriel de conception ancienne, laissé à l’abandon pendant les années de guerre civile, donne une ampleur toute autre à ces risques NBC émergents. Dans la tache qui lui est impartie de prévenir et de gérer tout incident NBC et de restaurer la capacité de la force si besoin est, le module du GDNBC(1) doit évaluer la réalité et l’intensité du danger, concevoir des plans de réponse face à l’événement et les actions de réduction de risques dans son domaine mais surtout convaincre que la manœuvre, l’action reste possible face à ce danger NBC pernicieux que l’héritage de nombreuses années tournées face au pacte de Varsovie rend particulièrement incapacitant. L’ESPACE DU COMBATTANT AU KOSOVO : UN ENVIRONNEMENT SUBURBAIN ET INDUSTRIEL A RISQUES. Une opération de maîtrise de la violence, de rétablissement de la paix et de sécurisation des populations limite immanquablement la liberté d’action et en particulier celle de l’implantation de la force. Quelles que soient les nationalités, les choix d’implantation des unités obéissent à des compromis. La périphérie des agglomérations reste le terrain privilégié des zones de déploiement, bien évidemment s’y retrouvent les zones industrielles : Camp Monteith (US) s’étend à quelques centaines de mètres d’une usine de batteries au Cadmium-Nickel, Feldlager " Progress " (GE) occupe le cœur d’une usine chimique, l’état-major de la Brigade Nord trône à 800 mètres du MIP (Mitrovica Industrial Park). Province industrielle, le Kosovo voyait toute son économie liée au Kombinat TREPCA. A partir d’une extraction minière à forte activité, avait été développée toute une industrie de valorisation et de transformation dont la conception, sur le mode soviétique, date des années cinquante. Déjà obsolètes avant l’éclatement de la Yougoslavie, les installations industrielles ont été laissées à l’abandon pendant la guerre civile, bon nombre ont été dévastées. Des quantités importantes de produits chimiques restent dans des conditions de stockages déplorables. Des paratonnerres radioactifs gisent à terre. Afin de satisfaire ses besoins d’urgence, la population n’hésite pas à faire de la récupération dans les installations abandonnées. Tout est réuni pour que l’accident survienne : mélanges de produits incompatibles à toxicité élevée, installations électriques dangereuses, infiltrations d’eau importantes, volonté, même sans compétence, de relancer l’activité industrielle en mode dégradé. Dans ce contexte le module du GDNBC, inclus au BATGEN(2) mais pour emploi aux ordres de G3 2D(3) de l’état-major de la brigade, doit évaluer le risque et proposer les mesures à adopter en cas d’émergence de la menace. EVALUER LA MENACE : NI ANGELISME, NI CATASTROPHISME. Etablir un inventaire des plus exhaustifs est une tâche essentielle et difficile. Un produit même en faible quantité peut réagir avec d’autres composés de façon irréversible avec des conséquences dramatiques. Il convient de séparer les réactifs susceptibles d’interagir de manière violente ou toxique pour l’individu. L’étiquetage des composés sous leur nom commercial serbe rend l’exercice plus ardu. La cartographie de tous les produits présents reste la première action à entreprendre. Elle demande une sensibilisation aux notions de chimie et de physico-chimie et prend en compte particulièrement la toxicité potentielle, les quantités et les conditions de stockage. Engagée peu après l’installation de la Brigade française à Mitrovica, cette action permet d’évaluer la menace et de définir les mesures de précaution à adopter par la force projetée. L’exemple donné par le Guépard 1000 du GDNBC dans la zone d’action de la Brigade Nord ne sera suivi qu’à partir de mai 2001 par les autres brigades multinationales. (1) Groupe de Défense Nucléaire Biologique et Chimique. (2) Bataillon du Génie. (3) Gestion de l’espace terrestre. 1 Supplément à Objectif Doctrine 35 ❖LES CAHIERS DU RETEX N° 10 AVERTISSEMENT AU LECTEUR En plus de deux articles liés au sujet d’OBJECTIF-DOCTRINE (la défense NRBC), ce 10è numéro des Cahiers du RETEX vous propose exceptionnellement deux articles sur le contrôle des foules. En effet, la rédaction a souhaité publier rapidement ces deux «libres réflexions» sur ce sujet important qu’est le contrôle des foules. 2 Supplément à Objectif Doctrine 35 ❖LES CAHIERS DU RETEX N° 10 A partir de cette cartographie le risque pour la force peut être évalué. A chaque produit s’associe un périmètre de danger à l’intérieur duquel les effets de protection adéquats doivent être revêtus et pour lequel la population devra être évacuée ou confinée en fonction de la volatilité du toxique. L’exemple de l’acide cyanhydrique, découvert dans une usine de Mitrovica, illustre toute ambiguïté possible pouvant naître lors de l’évaluation de la menace. L’acide cyanhydrique, connu également sous les noms d’acide prussique ou, tristement célèbre depuis 1944, de Xylon B est un toxique très puissant (dose létale : 3 mg/m3) dont le seul nom fait frémir et a focalisé les craintes. Mais il peut s’agir également d’un intermédiaire de synthèse dissous dans un solvant organique ou aqueux dont la toxicité instantanée est beaucoup plus faible (dose létale : 1930 mg/m3). L’examen du contenant montre qu’il ne peut s’agir d’un composé gazeux (Xylon B) mais que le produit est un liquide. La menace peut être alors ramenée à son juste niveau qui n’est pas celle de l’agent de guerre non persistant détenu par les forces de l’ex-PAVA mais celle d’un produit industriel, toxique et dangereux certes, mais dans une proximité immédiate exclusivement. PREVENIR ET REAGIR FACE A L’EVENEMENT : DES POSTURES A ADAPTER EN FONCTION DE LA CONJONCTURE. Si à chaque produit correspondent des mesures de protection et de prévention adaptées (type de protection respiratoire et corporelle, nécessité d’exclusion ou de confinement), il est nécessaire de définir des postures générales de façon à simplifier le processus de réaction pour l’ensemble des troupes tout en conservant des procédures ciblées pour les équipes d’intervention in situ (équipes NBC et pompiers) : l’incendie d’un transformateur au pyralène nécessitera le port de l’ANP pour les unités en zone sous le vent mais celui d’un appareil respiratoire isolant pour ceux (équipes NBC et pompiers) qui ont à évoluer à proximité immédiate du sinistre. Le niveau de protection retenu ou d’évacuation s’appuie sur la définition d’un seuil d’exposition tolérable. D’autre part, la prise en compte de l’image de l’action de la force et des nécessités de communication peuvent obliger à conduire des actions que l’aspect purement technique ne nécessite pas. La rupture d’une canalisation sur un réservoir d’acide sulfurique de plus de 1000 tonnes provoquant son déversement dans la rivière Stinica, toute proche, n’appelle techniquement aucune action à conduire si ce n’est l’information des populations de l’acidification temporaire de la rivière. Mais déverser de la chaux au débouché des effluents de l’usine, en amont de la rivière témoigne de la prise en charge de l’événement ; Cette action favorise l’image de la force dans sa mission de sécurisation. Afin de ne pas annuler cet effet positif, il convient de protéger ceux qui manipulent la chaux contre les risques de brulures et intoxication respiratoire. REDUIRE LES RISQUES : DES ACTIONS COMBINEES AVEC L’UNMIK (4), KFOR MAIN (5) ET LE KPC (6) Lorsque que la paix est rétablie, que la violence est maîtrisée, une phase de normalisation intervient. La vie reprend ses droits, en particulier la vie économique. Les acteurs sont alors nombreux : UNMIK, J9, ACM, représentants régionaux et locaux des différentes ethnies en présence. Le respect de l’environnement devient alors un sujet de controverse pour lequel le module Guépard 1000 est concerné au titre des risques d’origine industrielle. Concourir à un environnement plus sain et réduire les risques représentent alors la préoccupation de la grande majorité des acteurs internationaux et parfois celle des parties prenantes locales. Tous s’accordent à dire, chacun ayant ses raisons propres, que le stockage dans des fûts en mauvais état, dans " l’usine de batterie " de Mitrovica, d’un propergol explosif et vraisemblablement cancérigène n’est pas accep- table. Mais que faire ? Il appartiendra au détachement NBC de concevoir l’action. Après avoir refroidi, avec précaution, les fûts en chambre froide afin de se placer au-dessous du seuil d’explosivité, transvaser le produit en container étanches en vue de son évacuation. Après avoir agréé le concept technique, il appartiendra à l’UNMIK de financer l’opération et de la conduire en faisant appel à une société civile allemande qui préconise l’utilisation d’azote liquide pour le refroidissement mais qui se contentera de la chambre froide du commissariat de l’Armée de terre, faute de moyens. Ce type d’action, dans la mesure où il s’inscrit en phase de normalisation ne peut être conduit en cavalier seul par la force et demande immanquablement l’agréement et le concours de l’autorité légitime et des partenaires locaux. Le confinement sur le site de Prvitnel des matières radioactives trouvées sur l’AOR de la uploads/Finance/ les-cahiers-du-retex-supplement-a-doctrine-nr-10.pdf

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  • Publié le Mai 16, 2022
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