22 | Traitements & Matériaux 422 Mai - Juin 2013 Dossier : Préparation et trait

22 | Traitements & Matériaux 422 Mai - Juin 2013 Dossier : Préparation et traitement de surface I l en va du mot nettoyage comme d’un certain nombre de mots de la langue française de nous apparaître aussi fami- lier qu’insaisissable. La notion de net- toyage, acte de la vie courante, nous échappe lorsque nous devons la définir dans le détail, surtout dans le cas d’appli- cations industrielles. Déjà, plusieurs opéra- tions peuvent être distinguées quant à l’état de surface recherché, directement liées au niveau de « propreté » souhaité. Cela peut aller d’une simple opération de dépollution à un décapage en profondeur, tout dépend de la marge de manœuvre existante au niveau de la conservation de l’intégrité de la surface et de l’adhérence des pollutions [5]. La tech- nique utilisée dépend bien évidemment de la surface et de ses caractéristiques, mais aussi d’autres considérations importantes dans l’utilisation d’un procédé. Elles peuvent être aussi bien économiques (coût de traitement, de mise en place du procédé, d’exploitation) qu’environnementales (rejets engendrés ou encore dangerosité, protections à utiliser…). Le choix du procédé se fera donc en prenant en compte tous ces éléments et la technique fi nalement retenue ne sera pas forcément la plus performante sur la base du seul critère d’enlèvement des salissures. Pour faire le tri dans la multitude de techniques disponibles sur le marché, le cercle de Sinner [1] est une représentation de l’effi cacité d’un nettoyage comme une combinaison de quatre principaux facteurs agissant sur la qualité du nettoyage, à savoir la température, le temps, la chimie et la mécanique (fi gure 1). On le voit bien, tout nettoyage est le résul- tat d’une conjugaison de moyens, principe qu’il convient de toujours garder à l’es- prit lorsque l’on met en place ou cherche à conduire une installation industrielle. Il apparaît alors que, si la température et la durée du nettoyage sont des paramètres plutôt faciles à piloter, il est beaucoup plus difficile d’agir sur la chimie ou sur la néces- saire action mécanique. La chimie asso- ciée au nettoyage est assez complexe et on trouvera des développements intéres- sants dans de nombreux ouvrages. Il n’en reste pas moins qu’elle ne peut à elle seule résoudre tous les problèmes (films très adhérents, résidus de produits de polis- sage...) et qu’il faut également tenir compte d’une tendance forte de réduction des rejets dans l’environnement. Plus d’action méca- nique, signifie en général moins de besoin en chimie, et c’est là que les ultrasons de puissance interviennent. Il est en effet très fréquent de rencontrer des dispositifs ultra- sonores pour la préparation de surface, pour l’étape de nettoyage ou de dégraissage, où ils peuvent avantageusement remplacer les procédés électro-cathodiques en évitant les problèmes dus au relargage d’hydrogène. Ultrasons de puissance D’abord, de quoi parle-t-on quand on parle d’ultrasons de puissance ? Il s’agit en pre- mier lieu d’une vibration mécanique qui dans notre cas va être transmise à un liquide. Il n’y a pas de différence physique entre un son et un ultrason, si ce n’est la limite de l’audibilité humaine aux environs de 16 kHz. La propagation des ondes dans le liquide se fait uniquement de manière longitudinale, c’est-à-dire dans l’axe de l’émetteur que l’on appelle « transduc- teur » car il traduit un courant alternatif en vibrations mécaniques, le plus souvent au moyen de céramiques piézoélectriques. Les ondes acoustiques sont régies par les mêmes lois physiques que les ondes élec- tromagnétiques. On considère une onde acoustique comme le déplacement d’une perturbation infiniment petite par rap- port aux conditions régnant dans le milieu non perturbé. Les particules sont animées d’un mouvement de va-et-vient de part et Les ultrasons de puissance pour le nettoyage Jean-Yves Hihn, professeur à l’Université de Franche-Comté et directeur adjoint de l’institut UTinAM, UMR 6213 CnRs /Université de Franche-Comté Rémy Viennet, maître de conférences à l’Université de Franche-Comté, institut UTinAM, UMR 6213 CnRs /Université de Franche-Comté L’utilisation des dispositifs ultrasonores pour la préparation de surface est fréquente que ce soit pour le nettoyage ou le dégraissage. FiGuRe 1 : Cercle de Sinner. Traitements & Matériaux 422 Mai - Juin 2013 | 23 Ultrasons d’autre de leurs positions d’équilibre. Elles induisent des zones de compression et de dépression se déplaçant au sein du milieu élastique (figure 2). Or, la propagation de l’onde ultrasonore n’est pas libre, et elle va rapidement ren- contrer un obstacle sous la forme de la sur- face de la pièce à nettoyer, de la cuve ou même encore de la surface du bain qui fait office de réflecteur. Un système d’ondes stationnaires s’établit alors, sorte d’aller- retour entre l’émetteur et le réflecteur, un peu sur le modèle de soldats marchant au pas sur un pont ! Entre les deux, la répar- tition des nœuds et des ventres de pres- sions va se stabiliser, concentrant ainsi les effets des ondes dans les liquides. Certains points ne verront pas ou peu de variation alors que d’autres au contraire seront sou- mis à des différences très importantes. Localement, on va même créer des dépres- sions relatives tellement basses qu’on observera une rupture des forces de cohé- sion des liquides et la création de « vides » répartis dans le liquide suivant la distribu- tion de l’énergie acoustique et la présence de nucléi. Ces vides vont se combler par la désorption des gaz dissous et la vaporisa- tion du solvant et des molécules volatiles environnantes. Le cycle d’après voit le phé- nomène inverse lors du cycle de compres- sion, avec le retour des gaz vers le liquide et la condensation des solvants. Ces cycles ne sont cependant pas équilibrés, et la bulle de cavitation grossit jusqu’à ce que sa taille critique la conduise à imploser brutalement sur elle-même, générant des phénomènes mécaniques, thermiques et chimiques du fait des très hautes tempé- ratures et pressions atteintes pendant l’ef- fondrement (figure 3). Concentration d’énergie Tout l’intérêt des ultrasons se situe dans cette concentration d’énergie, car en met- tant en œuvre des puissances globalement raisonnables, on arrive à des libérations locales d’énergie très importantes ! Le prin- cipe du nettoyage par ultrasons est alors très simple : des transducteurs vibrant entre 20 à 400 kHz sont fixés sur le bac de net- toyage, et la propagation de l’onde ultra- sonore va agiter la solution de nettoyage. En plus du flux convectif généré par l’ab- sorption de l’onde dans le liquide, le phé- nomène de cavitation lié aux variations locales de pression va agir sur les conta- minants adhérant aux substrats comme les métaux, les plastiques, les verres... Des mil- lions de très fines bulles, parfaitement dis- tribuées dans tout le bac de nettoyage vont grossir, puis imploser violemment, péné- trant ainsi dans chaque orifice des pièces devant être nettoyées, détachant les salis- sures en quelques secondes. Cette action peut pénétrer dans les trous non débouchants, dans les fissures, comme dans tous les recoins généralement peu accessibles aux solutions classiques. La cavitation associée aux ondes de chocs et aux micro-jets vont provoquer un décolle- ment des salissures par action mécanique similaire aux jets à haute pression. On assi- mile cette action à un micro-décapage car l’énergie peut être suffisante pour décro- cher de la matière de la surface en plus des pollutions. C’est cet effet des ultrasons qui est prépondérant dans la majorité des pro- cédés de nettoyage les utilisant. Lorsqu’ils FiGuRe 2 : Propagation longitudinale d’une onde ultrasonore. FiGuRe 3 : Cycle de vie d’une bulle de cavitation. Lorsque l’implosion de la bulle de cavitation se produit à proximité immédiate d’une paroi, soit cette dernière est impactée par l’onde de choc et subit des effets mécaniques importants, soit elle induit une déformation de l’implosion qui devient asymétrique. Ce sont alors des micro-jets très puissants (avec des vitesses de l’ordre de 100 m/s) qui viennent augmenter l’agitation à la paroi. 24 | Traitements & Matériaux 422 Mai - Juin 2013 Dossier : Préparation et traitement de surface sont associés au nettoyage chimique, ces micro-jets permettent en plus d’amener les principes actifs du bain au plus près de la surface et ainsi d’en accélérer l’action [5]. Lors de l’implosion des bulles de cavitation, l’onde de choc est tellement violente qu’elle peut rompre des liaisons et provoquer des scissions, en général homolytiques, dans les molécules du bain [6]. Dans le cas où la solution irradiée est de l’eau et en fonction des gaz dissous présents, il y a apparition de radicaux hydroxyles et d’hydrogène. Ces radicaux ayant une durée de vie très courte, il va y avoir recombi- naison entre ces espèces, l’eau ou encore l’oxygène dissous pour former de nouveaux composés plus ou moins stables, dont des espèces oxydantes comme le peroxyde d’hy- drogène [4]. Celles-ci vont alors avoir une action oxydante sur les surfaces immergées dans le bain irradié. Cet effet chimique n’est pas forcément recherché car son exploitation est difficile dans le cadre du nettoyage, mais il peut être à l’origine de l’apparition de phéno- mènes d’oxydation indésirables. C’est un paramètre dont il faut tenir compte dans la conception d’un procédé complet, cou- uploads/Finance/ les-ultrasons-de-puissance-pour-le-nettoyage.pdf

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  • Publié le Fev 28, 2022
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