Benjamin Griveaux Sean Christian Deux Ans Après Roman Et si vraiment, tout deve
Benjamin Griveaux Sean Christian Deux Ans Après Roman Et si vraiment, tout devenait possible… http://www.deuxansapres.com 1 « Ça a commencé comme ça ». Louis-Ferdinand Céline, Voyage au bout de la nuit « May the Force be with you ». Obi-Wan Kenobi, Star Wars http://www.deuxansapres.com 2 Ces événements se déroulent en France, entre le 15 et le 22 novembre 2009. Chapitre 1 Dimanche 15 novembre 2009, 20h30 Longtemps, Marcelle Bénault s’était couchée de bonne heure. Mais la réussite fulgurante de son mari lui imposait désormais des mondanités quotidiennes. Aussi vivait-elle comme un soulagement que la réception de ce soir se tienne dans son magnifique hôtel particulier hautement sécurisé. Elle aurait la possibilité de s’éclipser tôt pour lire en rêvant l’un de ces magazines de mode dont elle restait friande. Elle tenait avec élégance son rôle d’épouse du plus médiatique patron de France. Serge Bénault était devenu en deux ans l’un des plus puissants hommes d’affaires français, voire européens. Il avait amassé au pas de charge une fortune colossale en vendant des matériels de protection passive ou active pour les collectivités et les particuliers. La logique sécuritaire en vogue avait démultiplié la demande, ce dont Serge Bénault avait su profiter par la grâce de liens opportuns avec les plus hautes instances du pouvoir politique. Homme d’une grande sévérité, capable de trouver des compromis habiles et créatifs, il avait fini par racheter ou pousser à la faillite la plupart de ses concurrents. Sans vendre réellement des armes, il commercialisait une large gamme de produits utiles, allant de la bombe lacrymogène d’autodéfense aux équipements complets anti- émeutes. Le groupe Krücher, qu’il avait fondé, dominait totalement ces marchés. Les actions Krücher se négociaient sur toutes les places financières, et enrichissaient les boursicoteurs. Tout Paris se pressait ce soir dans la voie privée où il résidait. Une longue file de célébrités attendait de passer les barrières, sous l’œil avide des caméras de télévision, dans le périmètre d’observation des dispositifs de surveillance Krücher. On y croisait des animatrices de jeux télévisés en robe longue, et des starlettes à jupe courte. Quelques chanteurs à la mode s’offraient aux flashs des photographes pendant que des acteurs en vue faisaient entendre leur voix aux micros des radios. Les grandes signatures de la presse figuraient en bonne place dans la liste des invités. Les plus jolies journalistes pénétraient dans l’hôtel particulier au bras de leur ministre de mari. Il se murmurait que le Président de la République pourrait honorer la soirée de sa présence. Ses liens d’amitié avec Serge Bénault étaient notoires. Au milieu du gigantesque hall d’entrée trônait, sous une vitrine blindée, le premier modèle jamais fabriqué de la matraque électrique pour femmes imaginée par Serge Bénault. Elle était aux entreprises Krücher ce que l’iMac était pour Apple, l’instrument de la renaissance, une pièce dont chaque collectionneur connaissait la valeur. A côté, une Marcelle Bénault radieuse, parée d’une rivière de diamants que son âge autorisait et d’une robe de couturier sortie de la garde-robe de sa fille, souhaitait la bienvenue à chaque invité d’une voix chaleureuse. La réception se poursuivait en haut du grand escalier de marbre qui s’enroulait de part et d’autre du hall d’entrée. http://www.deuxansapres.com 3 Parmi les serveurs philippins au pas raidi par le poids des plateaux chargés de champagne, déambulait José Nikoster. Ce grand brun à la cinquantaine élégante promenait son ennui devant les nombreuses œuvres d’art moderne dont les murs étaient recouverts. La présence de cet homme qui plaisait aux femmes au milieu d’un tel déballage de richesses en aurait étonné plus d’un. José Nikoster personnifiait dans l’opinion les luttes altermondialistes. Depuis une vingtaine d’années, il se battait au nom des opprimés de la terre, des laissés pour compte de tous les pays, qui en avaient fait leur porte parole. Son éloquence et son charme ténébreux le prédisposaient remarquablement à ce rôle. Il s’était rendu célèbre en introduisant le micro-crédit en Erythrée, et en contribuant à sortir de la pauvreté une centaine de familles d’éleveurs. Bien que ces familles aient replongé dans la misère quelques années après, José Nikoster avait tiré avantage de ses passages télé fort réussis jusqu’à devenir une référence incontournable pour les journalistes. Avec le temps, il avait renforcé sa renommée par des actions plus médiatiques que réellement rebelles, dans des sociétés occidentales auxquelles il offrait régulièrement des diversions cathartiques. Tout le monde y trouvait son compte, à commencer par José Nikoster lui-même, dont la fortune avait grandi au rythme, rapide, de sa consécration médiatique. Il observait d’un regard méprisant les petits canapés prétentieux qu’un serveur intimidé lui proposait. Entre le saumon d’Irlande trop rouge enroulé dans un concombre trop vert, et l’asperge recouverte de deux grains de caviar déposés avec précision, sa main se faisait hésitante. - « Moi je prendrais l’asperge, Monsieur Nikoster », fit derrière lui la voix cassée d’une jeune femme blonde aux cheveux courts, glissée dans un fourreau de soie argentée qui ne devait pas lui laisser une grande liberté de mouvement. - « Votre père sait-il que vous avez déjà goûté en cuisine tous les canapés prévus pour ses invités, Mademoiselle Bénault ? », lui répondit-il sur un ton ironique, ne se tournant vers elle qu’à moitié pour lui laisser observer les fossettes qui avaient contribué à sa célébrité. - « Vous savez Monsieur Nikoster, contrairement à vous je n’ai pas peur de lui ». La fille de Serge Bénault avait hérité de son père le goût de l’affrontement. Nikoster la toisa d’un regard amusé. « Rendez-vous donc utile, jeune fille, et conduisez- moi jusqu’à lui. J’aimerais lui parler ». Elle posa sa main sur son bras, et en l’attirant contre elle entreprit la traversée de l’enfilade de salons qui ressemblaient à autant de galeries d’art. Trois cents paires d’yeux observèrent avec amusement ce couple inattendu progresser à travers la foule. Les conversations des dîners parisiens mentionneraient cette scène pendant au moins une dizaine de jours. Elles évoqueraient également la réaction de Serge Bénault. - « Mon Papounet chéri », minauda la jeune femme en s’appuyant contre le corps musclé de Nikoster, « José te cherchait. Je crois qu’il a des choses à te dire. Je te le laisse, http://www.deuxansapres.com 4 mais ne le garde pas trop longtemps … ». Elle s’éloigna, non sans oublier d’adresser un sourire trop appuyé à Nikoster. - « Vous l’imaginez, José, je n’ai pas rêvé toute ma vie d’avoir pour gendre un play-boy international ayant deux fois l’âge de ma fille », déclara Bénault suffisamment fort pour être entendu de leurs voisins. Sans attendre la réponse de Nikoster, qui ne prévoyait pas d’en faire, il lui fit signe de l’accompagner. Son bureau se trouvait à l’étage supérieur. Les haut-parleurs annonçaient aux invités le début d’une de ces parties de paint-ball qui avaient fait l’originalité, ainsi que la renommée, des soirées de Serge Bénault. A chacune de ses réceptions, on voyait des élégantes endosser avec un frisson des blouses blanches de protection par-dessus leurs robes griffées, et remplacer leurs escarpins par des chaussures protectrices à talons plats. Les femmes se voyaient rassemblées en une équipe unique, opposée à l’équipe des hommes. Serge Bénault, en professionnel de la sécurité et du combat, racontait à qui voulait l’entendre que le paint-ball était le plus fascinant de tous les jeux de société, puisqu’il développait toutes les qualités nécessaires dans le monde moderne : agilité, audace, courage physique et esprit d’équipe. José Nikoster n’oublierait jamais le vacarme des invités à l’annonce du début de la partie de paint-ball. Comme il n’oublierait jamais l’odeur de sueur âcre et incongrue qui régnait dans le bureau de Serge Bénault lorsqu’il y pénétra. Toutes les victimes d’accident s’avèrent capables de décrire avec minutie de nombreux détails, en dépit de la brièveté des faits. Un peu comme si le temps s’était ralenti, comme si leur cerveau s’était mis à fonctionner à une vitesse prodigieuse. Longtemps, il se remémorerait la scène qu’il allait vivre. Longtemps, il serait en mesure de la décomposer en séquences ordonnées, seconde par seconde. D’abord, la silhouette d’un homme cagoulé avait surgi de la pénombre de la pièce, et s’était dressée devant eux, le bras levé. Ensuite, il avait vu la lame que tenait l’inconnu dans sa main droite, une lame courbe et parfaitement aiguisée. Il se souvenait de la crispation réflexe de ses abdominaux, qui lui avait permis d’esquiver le coup en se plaquant au sol. Bénault avait poussé un cri bref. La pointe de l’arme destinée à Nikoster s’était plantée dans la carotide du puissant industriel. Il revoyait le regard effrayé et résigné de Serge Bénault. Son sang s’échappait par pulsations régulières, rapides d’abord puis de plus en plus lentes. L’homme d’affaires, en professionnel averti du close combat, avait tout de suite compris où il avait été touché, à défaut de comprendre pourquoi. Il avait émis quelques grognements modestes pendant qu’il s’affaissait lentement. Ses mains désormais rouges caressaient son cou plus qu’elles ne le pressaient. Les derniers instants de la trépidante vie de Serge Bénault avaient été empreints d’une forme de sérénité. Nikoster n’avait pas uploads/Finance/ livre-griveaux.pdf
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- Publié le Fev 07, 2021
- Catégorie Business / Finance
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