PROF : LHARTI REDA EMSI-RABAT Cours de l’économie industrielle Introduction 1-
PROF : LHARTI REDA EMSI-RABAT Cours de l’économie industrielle Introduction 1- Qu'est-ce que l'économie industrielle ? L'économie industrielle est un champ de l'économie consacré à la compréhension du fonctionnement d'un marché en fonction de sa structure (pas toujours compétitive). Cette étude dépend de nombreuses variables décrivant le marché, notamment le nombre de vendeurs ou le degré d'intégration verticale (il s'agit d'analyser si l'entreprise produisant le bien étudié possède également l'entreprise qui fournit les biens intermédiaires ou celle qui distribue le bien). En fonction de cette structure, il s'agira d'analyser la stratégie de l'entreprise en termes de prix et de quantités mais aussi en termes de qualité, de discrimination, de dépenses en recherche et développement, de publicité ou d'innovation. Par rapport au cadre de la concurrence parfaite, on ne se place plus dans un cadre d'équilibre général mais dans celui d'un équilibre partiel. On se concentre sur un ou plusieurs marchés mais pas sur l'économie dans sa totalité. Par ailleurs, dès lors qu'on sort du cadre de la concurrence parfaite, l'entreprise n'est plus preneuse de prix ("price taker") et fait face à ce qu'on appellera des interactions stratégiques. Les stratégies des autres firmes du marché (en termes de prix, de quantité,) vont alors impacter ses propres choix. Lors de ce cours nous étudierons principalement les phénomènes de monopole et d'oligopole. Nous aborderons notamment les questions de politique tarifaire. L'objectif sera par exemple de comprendre pourquoi une firme propose autant de tarifs différents. Un autre sujet de l'économie industrielle est d'analyser les phénomènes d'entente ou collusion tacite. La question est alors de savoir pourquoi les opérateurs de téléphonie se sont-ils entendus sur les prix. Enfin nous aborderons aussi les diverses stratégies de barrières à l'entrée, c'est-à-dire les méthodes que l'entreprise peut mettre en place pour empêcher l'entrée de nouveaux concurrents. 2- Un peu d'histoire : Théorie vs Empirique Historiquement, deux "traditions" d'économie industrielle s'opposent et se complètent. La première, appelée tradition d'Harvard, date des années 1920 et est principalement empirique. Elle s'est développée autour d'un modèle "structure procédé performance". La structure du marché (le nombre de vendeurs, le degré de différenciation des produits, la structure des coûts, le degré d'intégration verticale, …) définit les procédés (prix, qualité, R&D, investissement, publicité, ...) qui vont eux-mêmes définir la performance du marché (efficacité, innovation, profit, ...). Cette première vision de l'économie industrielle se construit principalement autour d'études statistiques, sans support théorique. Il s'agit d'identifier au moyen d'une relation (souvent linéaire) l'impact de diverses variables sur le profit. En formalisant, les relations testées sont du type : Πi = f(CRi; BEi; …) Où Πi est une mesure de la profitabilité (de la firme ou du secteur) ; CRi est le taux de concentration (mesure de la compétition dans le secteur, ...) ; et BEi est une mesure des barrières à l'entrée. Ce type de méthodologie pose toutefois de nombreux problèmes. Outre le problème de mesure (il faut être capable de mesurer correctement le taux de concentration ou les barrières à l'entrée), il est apparu que ce type de méthodes identifiait uniquement les corrélations et non les liens de causalité. On peut en effet imaginer que des effets vont dans l'autre sens, c'est-à-dire par exemple de la profitabilité vers les barrières à l'entrée (plus un marché est profitable, plus les firmes vont pouvoir mettre en place des stratégies coûteuses pour empêcher l'entrée de nouveaux concurrents). Ainsi une nouvelle méthodologie s'est développée depuis les années 1970. Elle est appelée "tradition de Chicago". Cette tradition s'appuie sur le besoin d'une théorie rigoureuse analysant les différents liens de causalité liés à l'économie industrielle. Elle utilise ensuite des études plus empiriques pour identifier les différentes théories concurrentes. 3- Qu'est-ce qu'un marché ? On a vu que le "sujet" d'étude de l'économie industrielle était le marché. Avant de commencer cette étude, il est donc nécessaire de définir, de comprendre ce qu'on appellera un marché. Le plus difficile sera en fait de délimiter le marché. On ne souhaite en effet pas se limiter à des entités trop petites. On ne peut pas se restreindre aux biens homogènes (càd identiques). En effet, toutes les firmes proposent des biens ne serait-ce que légèrement différents et pourtant toutes ne possèdent pas un pouvoir de monopole. On a donc besoin d'une définition plus large. On peut donc imaginer définir le marché comme un ensemble de biens substituables. En économie, on dira que deux biens sont substituables si quand le prix de l'un augmente, les quantités demandées de l'autre bien augmente également. Cependant tous les biens sont potentiellement substituables les uns aux autres. L'augmentation du prix de n'importe quel bien, fait que les consommateurs vont se tourner (en partie) vers d'autres biens. Or, on ne veut pas que "notre" marché représente l'économie toute entière. Il faut donc que notre définition du marché ne soit pas trop large. Finalement, la définition du marché dépend en fait de ce qu'on veut en faire. Si on veut étudier la politique énergétique, il faut prendre le marché de l'énergie dans sa globalité : charbon, pétrole, électricité, ... Au contraire si on veut étudier les effets sur la concurrence d'une fusion entre deux producteurs de charbon, on doit uniquement considérer le marché du charbon. Il n'y a donc pas de définition simple du marché. Plusieurs critères utiles ont toutefois été dénis : Tout d'abord, un marché peut être déni comme une chaîne de substituts. En partant d'un bien, on englobe ses substituts, puis les substituts de ces substituts, etc, jusqu'à ce qu'il existe un écart assez important entre les substituts. Cette définition possède toutefois quelques problèmes. Hyundai et Rolls Royce appartiennent en effet à la même chaine de substituts mais peut-on considérer qu'ils appartiennent au même marché ? On peut également définir un marché en fonction de la corrélation entre les prix, comme indicateur de la compétition. Une telle définition possède également quelques défauts : NSTAR (fournisseur d'électricité sur la côte est des États-Unis) et EDF qui distribuent toutes les deux de l'électricité ne sont en aucun cas en compétition mais leurs prix sont fortement corrélés puisque tous les deux liés au prix du fuel. On ignorera dans la suite du cours ces difficultés en supposant que le marché est bien déni et que soit (i) les biens à l'intérieur du marché sont homogènes soit (ii) qu'il s'agit de biens différenciés substituables avec des interactions limitées avec le reste de l'économie. 4- La structure de marché On a vu qu'un des déterminants principaux du fonctionnement d'un marché était la structure de ce même marché. Le tableau suivant résume la terminologie qui sera utilisée dans la suite du cours, en fonction du nombre de vendeurs et d'acheteurs sur le marché. Nombre d’acheteurs Nombre de vendeurs 1 Nombre fini ∞ 1 Monopole bilatéral Enchères Monopole Nombre fini Appel d’offre Oligopole bilatéral Oligopole ∞ Monopsone Oligopole CPP Les structures notées en vert (monopole bilatéral, enchères, appel d'offre) concernent principalement les marchés des biens d'équipement ou de production alors que celle en bleu (monopsone, oligopsone) sont surtout présent sur les marchés agricoles, le marché du travail ou les services à la personne. On se concentrera lors de ce cours sur les structures apparaissant en rouge (monopole et oligopole) qui concernent principalement le marché des biens de consommation. CHAPITRE I : La remise en cause du modèle de concurrence pure L’objectif du chapitre : • Connaître le modèle de concurrence pure. • Comprendre les raisons de sa remise en cause et en tirer les conséquences. Plan du chapitre : • DES HYPOTHÈSES DE MOINS EN MOINS RÉALISTES • CONCURRENCE IMPARFAITE ET CONCURRENCE MONOPOLISTIQUE • L’APPORT DE LA CONCURRENCE MONOPOLISTIQUE AUCOMMERCE INTERNATIONAL 1.1 DES HYPOTHÈSES DE MOINS EN MOINS RÉALISTES Parmi les cinq conditions nécessaires pour que l’on puisse parler de concurrence parfaite, il suffit qu’une seule d’entre elles ne soit pas vérifiée pour que la concurrence devienne imparfaite. Comme nous allons le voir, aucune d’entre elles n’est véritablement en phase avec la réalité industrielle d’aujourd’hui. • L’atomicité est l’une des conditions rarement atteintes. Elle suppose En effet que les PME et les entrepreneurs individuels constituent l’essentiel du monde de l’entreprise, ce qui n’est pas le cas dans un marché mondialisé où cohabitent monopoles et oligopoles. De fait, le libéralisme et la déréglementation ont eu raison de la CPP. Dans tous les milieux industriels – des médias à la distribution –, la réalité de ce début de XXI -ème siècle est celle de la concentration et de la fusion, afin de constituer des pôles industriels suffisamment puissants pour répondre à la mondialisation des marchés. Fusions et concentration pourront s’arrêter au stade des oligopoles ou devenir des monopoles de fait. Dans le cas des oligopoles, la tentation sera grande, pour un certain nombre d’entre eux, de limiter davantage encore la concurrence en constituant des cartels, officiellement interdits, ou en pratiquant des ententes. • La transparence, condition essentielle pour accéder à toutes les informations du marché, et ce gratuitement, permet théoriquement aux consommateurs comme aux autres producteurs de prendre en toute connaissance la bonne décision. Aujourd’hui, si le progrès technique a uploads/Finance/ cours-de-l-x27-economie-industrielle.pdf
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- Publié le Aoû 26, 2021
- Catégorie Business / Finance
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