THÉORIE DE LA TENTATIVE Avant de parler de la tentative elle-même, disons quelq

THÉORIE DE LA TENTATIVE Avant de parler de la tentative elle-même, disons quelques mots de l'élément matériel de l'infraction : c'est un fait ou un acte ; c'est la manifestation extérieure de la volonté délictueuse sous la forme d'attitudes décrites par la Loi pénale. En règle générale, elle décrit cet élément matériel. Si vous avez déjà perdu pied, prenons quelques exemples : dans le vol, c'est la soustraction de la chose d'autrui (art. 505) ; dans l'escroquerie, c'est l'usage d'un faux nom, d'une fausse qualité, l'emploi de manœuvres frauduleuses pour se faire remettre des fonds, valeurs…. Le fait de commettre une infraction suppose en général la production d'un résultat. Ou en d’autres termes que l’élément matériel soit accompli. Pour faire suite à nos exemples ci-dessus, le résultat du vol, c'est la dépossession de la victime, c'est à dire un préjudice matériel ; le résultat d'un meurtre, c'est la mort de la victime. Un problème se pose, en revanche, lorsque le délinquant, pour une raison indépendante de sa volonté, n'obtient pas le résultat escompté. Entre le projet infractionnel et la réalisation de l'infraction, il y a place, en effet, pour toute une série de situations. La question qui se pose est donc de savoir à partir de quel moment le comportement du délinquant devient punissable : c'est la problématique de la tentative. On oppose généralement la notion de tentative à celle d'infraction consommée. Il est donc nécessaire de commencer par la définition de l'infraction consommée. SECTION I : L'INFRACTION CONSOMMÉE. Une infraction est consommée dès lors que l'acte matériel qui la caractérise a été accompli dans son intégralité. Il faut néanmoins faire une distinction entre les infractions qui exigent, pour être consommées, la production d'un résultat et celles qui ne l'exigent pas. Dans le cas du meurtre ou du vol, par exemple, le résultat est un des éléments constitutifs de l'infraction. Celle-ci n'est consommée que par la réalisation du dommage, C'est ce qu'on appelle les infractions matérielles : c'est le dommage corporel dans le cas du meurtre ; le dommage matériel dans le cas du vol. Dans d'autres cas en revanche, la loi se borne à incriminer un procédé ou un modus operandi. L'infraction est alors consommée même si aucun résultat ne s'est produit. C'est ce qu'on appelle les infractions formelles. Par exemple, l'empoisonnement qui est le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'administration ou l'emploi de substances mortifères (art. 398 du Code pénal). Contrairement au meurtre, l'empoisonnement est réalisé même si la victime n'est pas décédée. La corruption (art. 248 du Code pénal) qui est le fait de proposer de l'argent à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public pour qu'elle fasse quelque chose ou qu'elle s'abstienne de faire quelque chose. L'auteur est punissable même si la victime ne s'est pas laissé corrompre. 1 Cela dit, avant d'en arriver à la consommation de l'infraction, le délinquant passe généralement par plusieurs étapes. Il emprunte ce que les criminologues appellent l'iter criminis, c'est-à-dire le chemin du crime. T out d'abord, l'idée de l'infraction germe dans son esprit. Ensuite, il se prépare matériellement à commettre l'infraction : mise en forme d'un plan d'action, repérages, achat d'une arme... Enfin, il exécute l'acte proprement dit. La question se pose donc de savoir à partir de quel moment les agissements de l'auteur deviennent punissables. S'il est clair, en effet, qu'au stade de l'exécution, l'auteur est toujours punissable, qu'en est-il en revanche pour toutes les phases qui la précèdent ? Concernant tout d'abord l'idée et la résolution criminelle, la réponse est claire : elles ne sont pas punissables. Les actes préparatoires ne sont pas non plus punissables car ils laissent encore la place à un désistement volontaire de la part de l'auteur. C'est donc dans cette zone d'incertitude, comprise entre les actes préparatoires et la consommation de l'infraction que se situe la tentative punissable. SECTION II : LA TENTATIVE. Et il existe plusieurs types de tentative : la tentative punissable, la tentative interrompue et la tentative infructueuse. II.1 : LA TENTATIVE PUNISSABLE. Les conditions de la tentative punissable sont posées pour l'essentiel par l'article 114 du Code pénal : La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d'exécution, elle n'a été suspendue ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. Pour que la tentative soit punissable, il faut donc que trois éléments soient réunis :  une intention coupable ;  un commencement d'exécution ;  une absence de désistement volontaire. II.1.a - L'intention coupable. Cette notion n'appelle aucun commentaire particulier dans la mesure où l'élément moral de l'infraction est le même que dans l'infraction consommée, c'est-à-dire un dol général et un dol spécial. II.1.b - Le commencement d'exécution II.1.a.1) Le problème de la définition : Il existe différentes définitions du commencement d'exécution. II.1.a.1.a) La définition objective : Le commencement d'exécution existe lorsque le délinquant a accompli un acte matériel caractérisant soit un élément constitutif de l’infraction soit une circonstance aggravante. Par exemple, en matière de vol, avoir porté la main sur l'objet qu'on veut soustraire ou avoir commis une effraction, une escalade... 2 Cette théorie a le mérite de circonscrire le commencement d'exécution avec une très grande précision, et de sauvegarder les droits du mis en cause. Mais elle protège mal la société puisqu'elle confère l'impunité à des actes très proches du résultat : le cambrioleur n'encourrait aucune sanction s'il était surpris avec les instruments nécessaires à l'action devant la porte qu'il s'apprête à fracturer. Il pourrait se prévaloir avec cynisme du fait que la police l'a arrêté trop tôt. C'est pourquoi la théorie objective est aujourd'hui abandonnée. La jurisprudence ne l'a d'ailleurs jamais consacrée. II.1.a.1.b) La définition subjective : La théorie subjective envisage le commencement d'exécution en se fondant sur l'état d'esprit du délinquant, plus que sur les actes matériels accomplis : il y a commencement d'exécution quand il est évident que l'individu est irrévocablement décidé à aller jusqu'au bout, quand il existe entre le mal qu'il a commis et le but qu'il s'était fixé, une distance morale si faible que, laissé à lui- même, il l'aurait presque certainement franchie. Cette théorie permet d'élargir au maximum le champ de la tentative, mais on peut lui faire deux reproches : Son manque de certitude : tout repose en effet sur une observation de la psychologie du délinquant. Le risque d'arbitraire : elle pourrait conduire à sanctionner la résolution criminelle comme la tentative; II.1.a.1.c) La définition mixte : Dans ce cas, il n'est tenu compte de l’intention que lorsqu’elle est concrétisée par des actes matériels. Il faut un acte matériel révélateur d’une intention irrévocable. II.1.a.2) Les solutions jurisprudentielles : La définition du commencement d'exécution donnée par la Cour de Cassation est la suivante : caractérisent le commencement d'exécution les actes qui tendent directement et immédiatement à la commission de l'infraction. T entons d'appliquer cette définition aux cas pratiques proposés ci-dessous : Exemple 1 : Quatre individus se rassemblent à proximité d'un bureau de Poste. L'un d'eux est porteur d'une arme apparente, les autres d'une arme cachée. Ils ont tous le visage dissimulé par une cagoule et des cyclomoteurs ont été disposés non loin de là pour assurer leur fuite. Mais au moment où ils s'apprêtent à entrer dans le bureau de Poste, des gardiens de la Paix, alertés par une passante, interviennent. La tentative de vol à main armée est-elle constituée ? Oui La Cour de Cassation (arrêt ALLALOU Omer - 19 juin 1979) a retenue le commencement d'exécution. Exemple 2 : Un individu souscrit un contrat d'assurance automobile prévoyant une garantie contre le vol, mais fournit à sa compagnie un faux certificat de 3 marquage. Quelques temps plus tard, il déclare le vol de son véhicule aux services de Police et à sa compagnie d'assurance. Y-a-t-il tentative d'escroquerie ? Oui Réponse de la chambre criminelle de la Cour de Cassation (arrêt COUSTURES - 22 février 1996) Exemple 3 : Un individu entre en contact avec une jeune femme à la recherche d'un emploi, en se faisant passer pour un médecin. Il la conduit dans son appartement sommairement aménagé pour l'occasion en cabinet médical, et lui demande de se déshabiller pour subir un examen médical préalablement à son embauche. Mais la victime, comprenant le stratagème, s'enfuit. Y-a-t-il tentative d'agression sexuelle ? Oui Réponse de la Cour de Cassation dans un arrêt du 14 juin 1995. Exemple 4 : Une femme de 45 ans, divorcée, directrice de plusieurs agences immobilières à Paris, apprend que sa fille de 23 ans veut quitter le domicile familial pour aller vivre avec son fiancé. Ne pouvant se faire à cette idée, elle décide de supprimer son futur gendre. Elle s'inscrit dans un club de tir où elle fait la connaissance d'un individu qui accepte d'exécuter le contrat. Elle lui remet 40 000 Euros en liquide, le reste de la somme (15 000 euros) devant être versé après le meurtre. L'exécutant en question surveille le futur gendre pendant quelques temps, épie ses allées et venues, uploads/Finance/ q3-theorie-de-la-tentative.pdf

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  • Publié le Mai 18, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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