N° 184, décembre 2020 par Pascal Quiry et Yann Le Fur Au sommaire du prochain n

N° 184, décembre 2020 par Pascal Quiry et Yann Le Fur Au sommaire du prochain numéro : Actualités : Dividendes et rachats d’actions au sein du CAC 40 en 2020 Statistique : Les principaux taux d’impôt en France Recherche : Comment les prêteurs contribuent à l’allocation des ressources au sein des entreprises Question/Réponse : Qu’est-ce qu’une cotation directe ? Commentaires LA LETTRE VERNIMMEN.NET C1 - Public Natixis C1 - Public Natixis ACTUALITÉS L’innovation de Danone pour intégrer le coût de son empreinte carbone dans ses comptes sera- t-elle durable ? epuis son passage à une édition annuelle en 2008, l’avant-propos du Vernimmen s’ouvre par des développements prospectifs sur la finance d’entreprise. Cette année, il nous a semblé que la publication en février 2020, par Danone, d’un bénéfice net par action (BNPA ou BPA) sous déduction du coût de son empreinte carbone (qui le réduit de 36 % par rapport au BPA standard), était une innovation de rupture, propre à réconcilier l’analyse financière et l’analyse extra- financière, qui jusqu’à présent se regardaient comme des chiens de faïence. Aussi, à l’occasion de la sortie de la dernière édition du Vernimmen, nous avons organisé une table ronde réunissant Nadia Ben Salem- Nicolas, responsable de la relation investisseurs et de la communication financière pour Danone, côté émetteur, et Pierre Tegner, analyste financier qui suit Danone pour ODDO-BHF, dont voici le compte-rendu. Le Vernimmen : Quelle a été la réaction de tes clients investisseurs sur la publication de cet agrégat ? Est-ce qu’il est passé complètement inaperçu parce qu’il a été publié en février, quand les marchés financiers avaient d’autres sujets de préoccupation, as-tu eu des réactions à ce sujet ? Pierre Tegner : Les relations sont assez limitées entre le monde financier et le monde de l’extra-financier pour la simple et bonne ACTUALITÉS L’innovation de Danone pour intégrer le coût de son empreinte carbone dans ses comptes sera-t-elle durable ? 1-7 GRAPHIQUE DU MOIS Évolution de la solvabilité des entreprises américaines depuis 1990 7-8 RECHERCHE Emprunt bancaire contre emprunt obligataire : lequel est le moins cher ? 8-10 QUESTION ET RÉPONSE Faut-il taxer les dividendes pour financer la transition énergétique ? 10-11 COMMENTAIRES Sur l’actualité financière, postés sur les pages Facebook et LinkedIn du Vernimmen 11-12 FORMATIONS Calendrier 2021 des formations en finance 12 D 2 N° 184, décembre 2020 par Pascal Quiry et Yann Le Fur LA LETTRE VERNIMMEN.NET C1 - Public Natixis C1 - Public Natixis raison que l’analyste financier classique est assez peu sollicité par un investisseur ISR ou ESG. Dans la plupart des cas, les analystes spécialisés sur l’ISR sont sollicités par des investisseurs ISR. En l’occurrence, comme Danone est une entreprise qui fait de l’ISR depuis au moins 20 ans, voire plus, mécaniquement les investisseurs sont quand même sensibilisés à ces questions-là. J’ai eu assez peu de remarques dans la mesure où, en même temps que cet indicateur a été exposé, a été présenté un plan à long terme pour réduire l’empreinte carbone de Danone, s’attaquer à la problématique du plastique, et de la supply chain. Même si ce n’était pas nouveau, cela a suscité énormément d’intérêt, à la fois de la part des investisseurs spécialisés sur l’ISR, et également de la part des investisseurs classiques. Comme cela a été une première, je dirais que le sens critique des investisseurs était assez peu aiguisé au départ, même s’il y en a un qui m’a dit que pour faire 1 € de bénéfice, globalement Danone consomme 36 centimes d’empreinte carbone, ce qui est quand même assez élevé, puisque l’empreinte carbone de l’industrie de l’agroalimentaire en règle générale c’est 20 %. C’est la seule remarque que j’ai eue. Je pense que c’est un indicateur qui doit s’inscrire dans la durée pour que, petit à petit, les investisseurs puissent développer un sens critique et aider Danone à affiner la présentation de ce BPA. Le Vernimmen : Qu’est-ce qui a amené Danone à présenter cet indicateur ? D’où vient l’idée ? On sait que Danone est très engagé dans ces sujets, mais comment cela a- t-il mûri au sein de la société ? Nadia Ben Salem-Nicolas : Je vais mettre les choses en perspective d’abord, pour comprendre les termes du débat et l’origine de cette réflexion chez Danone. J’enfoncerais peut-être des portes ouvertes, mais c’est important de le dire. En tant qu’entreprise agroalimentaire, l’activité de Danone est intrinsèquement liée à l’agriculture. L’agriculture, c’est 60 % de l’empreinte carbone de Danone. Et quand je dis empreinte carbone de Danone, on la mesure sur l’ensemble de notre chaîne de valeur, c’est-à-dire à la fois les émissions directes sur les équipements qui appartiennent à l’entreprise (les tours de séchage, les véhicules et les fours), mais également les émissions indirectes jusqu’aux activités de nos fournisseurs, et donc y compris les fermiers et les producteurs de lait. Après le secteur de l’énergie, l’agriculture est le deuxième émetteur de carbone au niveau mondial. Je crois que c’est à peu près 15 à 16 % des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, donc c’est important. La bonne nouvelle, c’est que l’agriculture peut aussi contribuer à la solution et aider à relever un certain nombre de défis parmi lesquels le réchauffement climatique, et j’arrive à cette idée qui est (je m’en étonne à chaque fois quand j’en parle aux investisseurs) assez peu connue… En fait, le grand public comprend que les vaches émettent du méthane, mais assez peu de gens savent que des sols sains ont la faculté de séquestrer du carbone dans le sol. C’est une idée qui est une réalité scientifique, même si elle est assez peu connue. Il existe aujourd’hui différentes pratiques d’agriculture régénératrices qui peuvent transformer un sol, qui est émetteur en gaz à effet de serre, en un agent rétenteur de carbone, puisque le carbone représente à peu près 60 % de la matière organique dans un sol. Du coup, pour une entreprise comme Danone, le carbone n’est pas qu’un enjeu moral ou un enjeu d’aide générationnelle ; c’est un enjeu éminemment économique. C’est un enjeu de résilience de notre modèle. C’est un enjeu de productivité des fermes. C’est un enjeu du devenir de l’agriculture. Et c’est un critère de préférence pour les consommateurs à l’heure où ceux-ci sont de plus en plus exigeants sur la transparence et la recherche de la naturalité. 3 N° 184, décembre 2020 par Pascal Quiry et Yann Le Fur LA LETTRE VERNIMMEN.NET C1 - Public Natixis C1 - Public Natixis Donc, j’en arrive à votre question. Qu’est-ce qui nous a amenés à prendre cette décision, du mariage du financier et du non-financier d’une certaine façon ? Je dirais que ce mariage s’est fait sous une double impulsion. La première impulsion est quand même celle des investisseurs que l’on sentait plus mûrs pour comprendre que les intérêts économiques étaient, ou sont, de plus en plus étroitement liés aux enjeux environ- nementaux et sociaux, compte tenu de l’avènement de nouveaux risques financiers. Et donc l’accord de Paris est passé par là, des coalitions qui se sont montées, Climate Action 100+, la lettre du CEO de BlackRock qui parle de reshaping of finance sous l’impulsion des enjeux climatiques… Donc, ça c’est le premier enjeu. Et de l’autre côté, la propre démarche d’une entreprise comme Danone qui est engagée autour de 9 objectifs de long terme qui fusionnent des objectifs économiques, sociaux et environnementaux en ligne avec les objectifs de développement durable, une entreprise qui est précurseur dans la lutte contre le réchauffement climatique. Cela fait plus de 10 ans que Danone a des objectifs chiffrés de réduction d’émissions de carbone sur l’ensemble de sa chaîne de valeur, cela fait plus de 10 ans que Danone a mis en place des objectifs environnementaux dans les éléments de rémunération de ses dirigeants, que l’entreprise bénéficie d’une reconnaissance externe hyper forte de ses projets de réduction d’émissions, puisqu’elle fait partie des 8 seules entreprises, sur plus de 8 000 qui ont postulé, à avoir obtenu un score AAA par l’agence de notation CDP. Danone maîtrise tellement bien sa mesure de ses émissions qu’on a pu évaluer, et c’était ça aussi un peu le fait générateur de 2019, qu’on avait atteint notre pic d’émissions en CO², ce qui signifiait que désormais, à partir de fin 2019, la croissance de Danone se ferait avec une réduction de ses émissions en absolu. Croissance d’une activité, croissance de chiffre d’affaires, qui vont avec une réduction des émissions carbone. C’est majeur. Donc on s’est dit : que fait-on de cette information ? Et face à l’urgence climatique, comment peut-on mettre l’innovation en communication financière, faire évoluer nos indicateurs afin de démontrer la création de valeur financière et environnementale ? Parce que dans les marchés, « if you can’t mesure it, it does not exist ». Donc, voilà, on est rentré dans cette réflexion, on s’est posé la question : quel était le bon indicateur ? On est assez vite arrivé à cette définition de BNPA carboné parce que, dans notre industrie, l’évaluation se fait beaucoup en PER. uploads/Finance/ vernimmen-lettre-numero-184.pdf

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  • Publié le Sep 22, 2022
  • Catégorie Business / Finance
  • Langue French
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