Brève réflexion sur l’institution des programmes budgétaires au Niger Le Consei

Brève réflexion sur l’institution des programmes budgétaires au Niger Le Conseil des Ministres de l’UEMOA a un introduit, en 2009, un changement qualitatif dans la gestion des politiques budgétaires et comptables des Etats membres à travers l’adoption « d’un paquet de directives » dites « de deuxième génération ». Il s’agit, pour cette instance communautaire, d’engager une dynamique de modernisation sans précédent de la gestion publique en mettant la performance au cœur de l’action de l’Etat. L’Etat du Niger a tenté d’intégrer ces nouveaux instruments dans son droit budgétaire et comptable à travers d’une part, la Loi n°2012-09 du 26 mars 2012 portant loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et d’autre part, les quatre décrets signés le 1er mars 2013 et relatifs au règlement général de la comptabilité publique, à la nomenclature budgétaire de l’Etat, au Plan comptable de l’Etat et au Tableau des opérations financières de l’Etat. Il s’inscrit, ainsi, dans un système largement partagé par de nombreux Etats marqué par le passage du « budget de moyen » orienté vers « la continuité des services publics, la permanence des actions » au « budget de résultat », voire de performances. Ce « corridor » est certainement un passage obligé pour nos Etats dont la gestion est caractérisée par une certaine “pagaille financière“ et une absence de lisibilité de nombre de politiques publiques sectorielles. Aussi, dans un contexte marqué par la rareté des ressources publiques, la nécessité d’explorer de nouvelles pistes permettant d’améliorer les méthodes de gestion des finances publiques, s’impose-t-elle à tous les Etats soucieux du bien-être de leurs populations. Cette brève réflexion vise à saisir les aspects novateurs de la réforme tirés des directives de l’UEMOA, notamment la directive n° 06/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009 portant Lois de finances au sein de l’UEMOA transposée au Niger par la Loi organique n° 2012-09 du 26 mars 2012 relative aux lois de finances. L’adoption de cette loi a pour conséquence immédiate « un changement de comportement dans l’élaboration des demandes de crédits. Ainsi, tout crédit demandé doit concourir à la poursuite d’un objectif donné dans le cadre d’un programme. Sa formulation sur une période triennale permet d’avoir une vision plus claire entre les objectifs poursuivis et les moyens mis en œuvre pour les atteindre ». Cette réforme, fruit d’un bilan dressé par l’UEMOA, vient ainsi mettre un point tout particulier sur la gestion budgétaire au Niger. L’article 12 de la LOLF de 2012 dispose, en effet, que « les crédits ouverts par les lois de finances sont affectés à une institution constitutionnelle ou à un ministère. Ils sont spécialisés par programme et par dotation ». Cette répartition des crédits budgétaires est une nouveauté par rapport à la répartition en vigueur sous l’empire de la loi n° 2003-11 du 1er avril 2003, portant loi organique relative aux lois de finances qui dispose en substance que les crédits ouverts par les lois de finances sont affectés à un service ou à un ensemble de services. Ils sont spécialisés par chapitre, groupant les dépenses selon leur nature ou leur destination. Pour le Professeur A. Dioukhané, « le nouveau budget par programmes fondé sur le triptyque objectifs, résultats, et évaluation, rompt radicalement avec le système de moyens ». Les Page 1 sur 18 crédits budgétaires, c’est-à-dire, l’autorisation de dépenser un certain montant pour un certain objet pendant un certain temps pour paraphraser Gaston Jèze, sont regroupés sur des programmes ministériels et non plus sur des chapitres. De ce fait, « Le programme est devenu la nouvelle méthode de présentation et de vote des crédits et devient, par la même occasion, l’enveloppe de spécialisation des crédits ». Ainsi, le programme se présente comme l’unité de spécialisation de droit commun des crédits budgétaires. Il est défini comme un regroupement de crédits destinés à mettre en œuvre une action ou un ensemble cohérent d’actions représentatif d’une politique publique clairement définie dans une perspective de moyen terme et qui relèvent d’un seul ministère. Ce choix de spécialisation se veut porteur de développement et d’efficacité dans la répartition des crédits à travers les politiques publiques clairement définies. « La politique publique est ainsi le concept essentiel qui permet de formuler le programme. Elle est un ensemble d’actions conduites par les institutions et les administrations publiques, ou par le biais de financements publics, afin de faire évoluer une situation donnée. La politique publique poursuit ainsi un but précis, ou objectif, qui constitue sa véritable justification. La détermination de l’objectif est, dans cette approche, le préalable à la définition du programme ». Le droit budgétaire nigérien s’inscrit dès lors dans une dynamique constructive et porteuse d’avenir quant à ses finalités contemporaines. Il est important de souligner que tous les crédits budgétaires ne sont pas répartis en programme. En effet, les crédits destinés à couvrir des dépenses spécifiques auxquelles ne peuvent être directement associés des objectifs de politiques publiques ou des critères de performance sont répartis en dotation. Aux termes des dispositions de l’article 15 de la LOLF, font l’objet de dotations : les crédits destinés aux pouvoirs publics pour chacune des institutions constitutionnelles, les crédits globaux pour des dépenses accidentelles et imprévisibles, les crédits destinés à couvrir les défauts de remboursement ou appels en garantie intervenus sur les comptes d’avances, de prêts, d’avals et de garanties, les dépenses du service de la dette publique. Partant de l’idée selon laquelle, recourir à un nouveau critère revient à lui reconnaitre la capacité à compenser les imperfections du précèdent et à porter un jugement négatif sur celui- ci, l’on est en droit de s’interroger sur l’apport du programme dans la conception, l’adoption, l’exécution et le contrôle du budget au Niger. En d’autres termes, quelles sont l’ampleur et la pertinence du changement ainsi apporté à notre droit budgétaire par la notion de programme ? Peut-on s’attendre à une certaine efficacité dans la gestion de nos finances publiques ? Quoi qu’il en soit, l’on peut noter que cette réforme est de nature à garantir la maîtrise de la dépense publique et l’accroissement de son utilité face aux besoins pressants des citoyens. En effet, il apparait clairement que désormais, « l’analyse de l’efficacité des crédits utilisés et des résultats obtenus pour chaque programme sera placée au cœur du débat sur l’allocation des crédits ». La réforme fait, ainsi, entrer le Niger dans une nouvelle ère caractérisée par le passage d’une logique exclusivement juridique centrée sur le respect des textes et des procédures budgétaires, à une logique managériale basée sur l’efficacité, l’efficience et la qualité des interventions de la puissance publique. Cette logique passe par une véritable mutation des Page 2 sur 18 processus de gestion des administrations, d’une culture de moyens et de procédures à une culture d’objectifs et de responsabilité. Il ne s’agit pas d’une simple amélioration de la procédure budgétaire, mais plutôt d’un changement total de perspective. En effet, avant l’avènement de la réforme, « le Gouvernement demandait au Parlement des autorisations de dépenser sans justifier les objectifs de la dépense. Aujourd’hui, le Gouvernement sollicite des autorisations de dépenses sur la base de programmes, c’est-à-dire, de politiques publiques, auxquels sont associés des objectifs et des indicateurs qui permettront, après exécution, d’en mesurer le degré de réalisation ». L’Assemblée nationale ne se prononcera plus uniquement sur les crédits mais également sur les stratégies ministérielles et la finalité de leur autorisation. C’est pourquoi, nous allons tenter de montrer que le programme budgétaire est désormais la clé de voûte du système budgétaire nigérien (I) avant de mettre l’accent sur les acteurs, chevilles ouvrières du programme, qui constituent l’élément principal d’une approche managériale (II). 1. Le Programme, la clé de voûte du droit budgétaire nigérien Un vent nouveau souffle désormais sur l’utilisation des crédits budgétaires au Niger. A la faveur de la transposition de la Directive n° 06/2009, il est apparu nécessaire d’introduire, en matière budgétaire, la notion de programme. Comme l’a écrit Michel VIRALLY, le recours à l’instrument que constitue le programme devient pratiquement nécessaire dès le moment où une institution éprouve le besoin de planifier son action dans le temps, c’est-à-dire de se fixer des objectifs précis et de déterminer par quels moyens et de quelle façon les atteindre. Lorsqu’on passe d’un mode de budgétisation en lignes, fondé sur des moyens (inputs), à un système budgétaire informé par les résultats (outputs), on parle d’un budget-programme. Dans ce contexte, le budget-programme vise à mettre en avant, non seulement les moyens liés à l’activité des pouvoirs publics, mais également à justifier la répartition des allocations en fonction d’objectifs prédéfinis. La pratique du budget-programme doit induire à la fois un dispositif de programmation pluriannuelle servant de socle à budgétisation (A) et une nouvelle architecture budgétaire centrée sur les politiques publiques (B) 1. La programmation pluriannuelle, socle de la budgétisation : La programmation qui permet de placer le budget dans une perspective pluriannuelle est au cœur du système de gestion tracé par la LOLF de 2012. Cette programmation entendue au double sens de cadrage des programmes de dépenses et planification des actions à moyen terme, devient une tache uploads/Finance/breve-reflexion-sur-l-x27-institution-des-programmes-budgetaires-au-niger.pdf

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  • Publié le Nov 24, 2021
  • Catégorie Business / Finance
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