VBBLICATIONS DE LA FAC1LTÉ DES LETTRES D'ALGER ANCIEN BULLETIN DE CORRESPONDANC

VBBLICATIONS DE LA FAC1LTÉ DES LETTRES D'ALGER ANCIEN BULLETIN DE CORRESPONDANCE AFRICAINE I" SÉRIE - TOME LXIH t} i f\ O A ETHNOGRAPHIE TRADITIONNELLE DE LA METTIOJA S ■ LE MAL MAGIQUE J. DESPARMET MKOFIfRSKIlH Af.HKfit Ii'abaUF ï ' s* I Ln merveille), du microcasvie humain. Ibn Khalduu.v. ALGER liti|iriDirrir JI'I.RS l'AKBONFI 11. RUI-: LIVINO&ÏONE PAHIS Librairie Orleolallsle PAIX i.BI THNKH 13, Rl'E JACOB (TI'| 193S ir . I i~-~ ETHNOGRAPHIE TRADITIONNELLE DE LA METTIDJA LE MAL MAGIQUE PUBLICATIONS DE LA FACULTÉ DES LETTRES D'ALGER ANCIEN BULLETIN DE CORRESPONDANCE AFRICAINE 1" SÉRIE TOME LXII1 6HJ20/tf3 ETHNOGRAPHIE TRADITIONNELLE DE LA METTIDJA LE MAL MAGIQUE PAR DESPARMET PROFESSEUR AGREGE D ARABE /.es merveilles du microcosme humain. Ibn Khaldouin. ALGER Imprimerie JULES CARBONEL 11, RUE LIVINGSTO.NE PARIS Librairie Orientaliste PAUL GEUTHNER 13, HUE JACOB (VI') 1933 A mon fils Jean-Paul AVANT-PROPOS Si Dieu ne donnait pas la lumière à l'homme, où la trouverait-il ? (Coran, XXIV, 40). Des différents arts que la conquête française a importés dans l'Afrique du Nord, notre médecine est celui que les in digènes ont accepté le plus généralement. Aujourd'hui, nos médecins de colonisation peuvent compter sur une clientèle arabe, les riches citadins fréquentent nos cliniques, les pau vres nos hôpitaux ; et les mauresques soulèvent volontiers la tenture du harem devant nos infirmières visiteuses. Nom bre de jeunes musulmans se préparent à la carrière médicale sous des maîtres européens. Ils ont si bien adopté nos métho des qu'ils les considèrent comme leurs. Certains répètent fiè rement le mot d'Ali ben Abi Thaleb : « Toute science est un bien héréditaire du Vrai-Croyant ; il ne l'apprend pas des au tres, il la leur reprend: c'est un troupeau égaré de son patrimoi ne en possession duquel il doit rentrer (Cf. Roud el Akhiar, p. 9-10). Et l'histoire ici semble leur donner raison. Quand ils se rappellent l'école médicale arabe du Moyen-Age, notre bienfait leur paraît une restitution. L'amour-propre racial ai dant, et la presse nationaliste, il y en a qui voient dans les dispensaires indigènes, que les Français leur ont bâtis, des restaurations, assez mesquines d'ailleurs, des marastans fa buleux de, la grande époque des califes ; et tel docteur en cha- chia, récemment échappé de nos facultés, se croit, en son âme et conscience, un descendant d'Averrhoès plutôt qu'un élève de Pasteur. Ceux-là oublient que leurs pères ont résisté à nos techni ques presque autant que leurs arrière-grands-pères à nos ar mes. J'ai consigné dans mon livre des Moeurs, Coutumes, Institutions des Indigènes (Blida, 1900, p. a^O) l'opinion commune sur ce sujet à l'aube du XXe siècle. Une cure à la française en ce temps-là faisait scandale, comme une excen tricité, et passait pour affaire de snobisme ou d'adulation. e< Comment pouvait-on croire sincèrement à l'efficacité de remèdes sur lesquels le nom d'Allah n'était pas prononcé ? » Notre médecine opératoire surtout effrayait. La cruauté des mécréants se complaisait à profaner les cadavres et à dépecer la chair vive. Des légendes macabres faisaient de nos hôpi taux des salles de torture plus redoutables que la prison ou le cimetière, ee Le musulman, disait-on, doit suivre sa coutu me et craindre les innovations » ; et l'on vantait ee la 'méde cine des ancêtres », les vertus de leurs simples, les carrés magiques de leurs iqqachs, les miracles de leurs marabouts. Nul Indigène alors ne pensait qu'il y ait jamais eu -une autre médecine arabe. Exemple suggestif du danger que court la science d'une élite trop restreinte au sein d'une ignoran ce trop générale : le souvenir même des docteurs de Bagdad et de Cordoue avait péri ! Il a fallu que la Chrétienté vînt ré véler à l'Islam ses gloires passées. A quelle époque la brillante école du Moyen-Age s'est-elle ensevelit1 dans l'oubli ? Nous pouvons le dire grâce à un auteur musulman que nous en avons exhumé lui-même, lbn Khaldoun laisse entendre qu'il a été le témoin de sa déca dence. C'est donc au \IV° siècle, au moment où son influen ce culminait en Europe, qu'elle a disparu en Afrique. 11 n'est pas étonnant, que la mémoire des Maghrébins du XIX* siècle n'en ail gardé aucune trace, car rien n'est moins sen sible que les révolutions intellectuelles et celle-ci a dû s'ache ver il y a un demi-millénaire au bas mot. Dans son premier livre du Kitab el iber (édit. de Boulaq 11. i!<Vi, p. /|ii-i'>), après avoir relaté que le fondateur de la mé thode fut Galien ee qui vécut du temps de Jésus-Christ et mourut en Sicile », l'historien des Beibers ajoute : « 1, Is lam aussi a donné des maîtres dans eel art el qui en mit reculé la limite, lels que Rhazès. El Madjoussi (le Mazdéen Mi Ben Abbas) el Avicenne. Pour sa part, l'Andalousie en a compté plusieurs, dont le plus célèbre esl Avenzoar Mais. «le nos jours, dans les Villes musulmanes, il semble être — 9 ~ tombé en décadence (naqagaj ce qui s'explique par l'arrêt el le fléchissement qui se sont produits dans la densité de la population, car c'est un de ces arts qui répondent aux exi gences de la vie urbaine et de sa mollesse. » Fidèle à sa théorie de la supériorité des nomades sur les sédentaires, il enregistre sans regret la disparition de cette médecine qu'il range parmi les produits de la corruption des villes. Mais il est deux institutions dont nulle société, si rudinientaire soil-elle, ne peut se passer : ee la jurisprudence religieuse pour les âmes et la médecine pour les Corps » (Roud el Akhiar, p. 10). Le nomadisme aura donc aussi sa thérapeu tique. Après nous avoir annoncé la régression du système galénique, lbn Khaldoun nous présente celui qui doit le rem placer. << Il y a, dit-il, une autre espèce de médecine, qui est celle de la population rurale. Elle est fondée en majeure partie sur une expérience écourtée qui ne synthétise qu'un petit nom bre de cas. Elle se transmet comme un héritage par le canal des maîtres d'école (mechaïkh) et des vieilles fem mes (ad.jaïz) de la tribu. Çt il n'est pas rare que ses prescrip tions s'avèrent efficaces, bien qu'elles ne tiennent pas comp te du canon physiologique de l'homme (allusion au ee Ci- non de la médecine » d'Avicenne ?), ni ne se conforment à la syncrasie (classique). Les anciens arabes connaissaient un grand nombre de pratiques relevant de cette médecine el ils ont eu, eux aussi, leurs techniciens fameux, comme El lia nts ben Kallida el d'autres. La médecine (du Prophèle), qui nous a été transmise par les traités de législation religieu se, appartient à la même espèce, car elle n'émane en rien de l'inspiration divine ; elle comprend seulement des procédés qui étaient, d'usage courant chez les Arabes (préislamiquesi. » Là-dessus, notre historien se croit obligé de démontrer que Mahomel, infaillible sur les questions de morale et de théo logie, ne détient pas nécessairement la vérité suprême en ma tière de thérapeutique, ce qui prouve que les partisans de la ee médecine du Prophète » prétendaient lui conférer l'autorité du dogme. Ce passage suggestif du vieil auteur berbère nous reporte à la fin de l'influence romaine sur l'Afrique du Nord. Deux théories médicales sN affrontent au XIVe siècle : l'une, sur vivance de la civilisation payenne, est glorieuse, mais cadu que ; l'Ile se réclame de grands noms, malheureusement la plupart étrangers et mécréants, comme ce e< Madjoussi », ce mage pyrolâtre, que cite noire écrivain. Cette médecine sa vante rentre dans l'ombre, en même temps que les derniers descendants des Latins réfugiés dans les villes ; elle recule avec la culture sédentaire, et, finalement, s'éliminera, com me allogène et inassimilable, au fur et à mesure que l'Islam maghrébin prendra conscience de lui-même. En face d'elle, on nous montre l'éternel empirisme popu laire. Nous le reconnaissons à ce qu'il règne sur les campa gnards du Maghreb comme sur les bédouins de l'Arabie, qu'il se transmet, non par les livres, mais par la voie ora le et qu'il se soucie peu de l'observation, étant, là Comme partout, un produit spontané de l'intuition. Cette science de bonnes femmes, d'ordinaire humble et clandestine, en im pose alors à des gens de haute lignée et de subtile intelligen ce, comme Ibn Khaldoun qui parle de son efficacité. C'est que, dans le Maghreb définitivement islamisé par l'invasion hilalienne, elle trouve un allié dans le vainqueur, elle parti cipe au prestige des Arabes qui la préconisent et peut se pré valoir de l'exemple souverain du Prophète. Elle s'appuye sur Irois forces : l'ignorance croissante, l'orgueil racial et le fa natisme religieux. Il est fatal qu'elle expulse sa concurrente surannée et qu'elle triomphe avec la barbarie, le nomadisme el l'Islam. En effet, six siècles après Ibn Khaldoun, en i83o, nous l'a vons trouvée établie au Maghreb ee de temps immémorial », disaient ses habitants, comme une institution nationale. Et ceux qui en détenaient la tradition, à notre arrivée, se sont rencontrés les mêmes que signalait déjà l'écrivain berbère de son temps uploads/Geographie/ 1932-t-63-1re-serie.pdf

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