Jean Allouch lettre pour lettre transcrire,traduire, translittérer L i t t o r
Jean Allouch lettre pour lettre transcrire,traduire, translittérer L i t t o r a l essais en psychanalyse Editions Erès Jean Allouch P s y c h a n a l y s t e En couverture : Thèbes : relief aux danseuses. Détail. lettre pour lettre Jean Allouch lettre pour lettre transcrire, traduire, translittérer. érès Ni dans ce que dit l'analysant, ni dans ce que dit l'analyste il [ n ' J y a autre chose qu'écriture... Lacan, sém. du 20.12.1977. La photo de couverture a été prise par Monsieur Vertut. Elle est extraite de K. Michalowski, l'Art de l'Egypte ancienne, éditions Mazenod, Paris, 1968. Nous remercions Monsieur Mazenod d'avoir bien voulu mettre ce document à notre disposition. © érès, 19 rue Gustave Courbet, Toulouse ISBN 286586-023-X D'abord que, sous prétexte que j'ai défini le signifiant comme ne l'a osé personne, on ne s'imagine pas que le signe ne soit pas mon affaire ! Bien au contraire c'est la première, ce sera aussi la dernière. Mais il y faut ce détour. Lacan, « Radiophonie », in Scilicet, 2/3, p. 65. En introduisant dans la psychanalyse le triptyque transcription, traduction, translittération, ce livre tente de serrer cette « affaire » en donnant sa consistance d'écrit à ce « d é t o u r » . On a tâché de maintenir ce frayage en deçà de ce point de bascule épinglé par Lichtenberg lorsqu'il notait que « Comme le dit magnifiquement Bacon (.Novum Organon, L. 1, 45 apha) "Où l'homme aperçoit un tout petit peu d'ordre, il en suppose immédiatement beaucoup trop" » ( A p h o r i s m e s , p. 233/234 de la traduction française). Introduction pour une clinique psychanalytique de l'écrit «• Dans la psychanalyse tout est faux, hormis les exagérations » Adorno '. Un ami, concerné par la psychanalyse, et pour lequel - sans d'ailleurs que ni lui ni moi ne sachions précisément pourquoi - mon avis importe, me fit un jour confidence d'une question qui le préoccupait : « Comment définissez-vous, disait-il, la santé mentale ? » Il arrive parfois, venant de gens qui ne prétendent à aucune compétence, qui même peuvent se penser comme n'étant pas véritablement dans le coup, certaines remarques ou interrogations que distingue un tout particulier tranchant. C'était, me semblait-il, le cas, et je fis, le fil de la conversation aidant, une réponse qui m'apparut, aussitôt émise, relever de cette sorte d'énoncés dont le locuteur sait, dans le temps même où il les formule, qu'ils en disent plus long que ce qu'il voulait dire d'abord. La santé mentale, telle fut alors la réponse, c'est passer à autre chose. En voilà une définition ! On remarquera d'abord qu'elle nous laissait tous deux gros jean comme devant car, pas plus que moi, cet ami n'ignorait qu'il ne suffit pas de s'imaginer passer à autre chose, ni même de mettre tout en oeuvre afin de conforter cette imagination, pour que ce soit effectivement le cas. Y-a-t-il seulement une chance de pouvoir attribuer un jour ce passer à autre chose à un sujet ? Ne doit-on pas au contraire se rendre au fait que ce qui apparaît comme changement dans une vie n'est que tentative (parfois ultime) où cette vie ne cesse-pas de ne pas passer à autre chose ? En ce sens l'intérêt de 1. Cité par M. Jay, in L'imagination dialectique, Pavot, 1977 p. 131. cette définition de la santé mentale serait de valoir indépendamment de la question de savoir s'il en existe un qui y satisfait ; elle s'avère ainsi n'être pas incompatible avec cet épinglage des humains comme « si nécessairement fous » où Pascal excluait que quiconque puisse en réchapper. Qu'est donc la rencontre du psychiatre et de son fou sinon un essai du premier pour rendre opérant, à l'endroit du second, le vœu qu'il passe à autre chose... que son aliénation ? Qu'on évoque la figure de Pinel (elle se profile toujours derrière celle de Charcot) orchestrant toute une mise en scène, convoquant quelques collègues pour les faire siéger, habillés comme il convient, en un simili tribunal révolution- naire afin d'obtenir d'un qui se croyait l'objet d'un arrêt de mort pour avoir tenu en public des propos d'un douteux patriotisme, et par l'acquittement qui lui serait ainsi (dans les formes) signifié, qu'il renonce à sa croyance délirante, qu'il accepte enfin de changer ce que Pinel ne recule pas à désigner comme « la chaîne vicieuse de ses idées ». Il y a là une remarquable prise en compte du discours même de l'aliéné2. Cependant on rate l'aliénation (de fait le «traitement moral » échoue) en prenant appui, pour la contrer, sur ce qui, chez le fou, subsisterait encore de raison, sur ce qui lui ferait admettre, par exemple, puisqu'un tribunal l'acquitte, qu'il n'a plus qu'à se penser non-coupable et à chasser aussitôt ces délirantes pensées qui faisaient de lui un permanent prostré. Cette façon de pousser l'autre à passer à autre chose s'est retrouvée, quasi telle quelle, dans la psychanalyse. Pourtant le fait que la question de fa santé mentale soit posée comme telle mais néanmoins ailleurs que là où exerce le psychiatre introduit un remarquable décalage, suggère qu'il en est quelques-uns (le cas n'est pas exceptionnel de psychotiques qui sont de ceux-là) pour considérer, au moins comme possible, un autre mode de «s'en sortir». De fait c'est ce qu'a donné à entendre, en certains temps privilégiés, le discours de la psychanalyse. C'est ainsi que celui qui s'adresse à un psychanalyste, quand n'est plus tenable de ne pas passer à autre chose, «sait» (au moins de ce mode de savoir qu'implique toute effectuation) qu'il n'y a pas d'autre voie pour s'en sortir, sinon celle de s'autoriser à davantage s'y engager. S'il est, ici, une chance pour le passer à autre chose, elle ne saurait advenir qu'à en passer, une fois encore, par la chose de l'autre - ce qui équivaut à en rajouter. A cela 2. Ph. Pinel, Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale ou la manie, An IX. Réd. Cercle du livre précieux, Paris, 1965, p. 58 et 233 à 237. souscrit le psychanalyste pour autant qu'il accepte d'abord de réduire sa réponse au monotone « associez » c'est-à-dire en laissant la parole à qui s'adresse à lui, ouvrant ainsi le champ au développement du transfert. Mais, dira-t-on, Pinel n'était pas sans savoir lui aussi qu'il n'était envisageable de passer à autre chose qu'à en passer par la chose de l'autre. N'est-ce pas cela même qu'il mettait en jeu en recommandant de « domestiquer » et même de « dompter » (ce sont ses propres métaphores) l'aliéné ? Il s'ensuit que cette façon de dire n'est pas suffisante et que la question est bien plutôt celle d'une distinction des divers modes de ce passage ; s'il est, en effet, concevable que tous ne sont pas équivalents, encore convient-il de cerner précisément ce qui les différencie. Comme toute question élémentaire, celle-ci est difficile à traiter. Si domestiquer l'aliéné pour l'éloigner de son aliénation apparaît bien comme une façon de l'amener à se produire sur un terrain pour lui autre (celui où chacun est voué à « l'utilité publique » - dernier mot du traité de Pinel), on a cependant l'intuition que ce type de rapport à l'autre diffère sensiblement de celui qui s'institue, pour quelqu'un, à partir du moment où la parole lui est laissée. Pourtant ceci reste en partie confus et tout se passe comme s'il n'était pas possible, dans 'immédiat, avec les mots de tous les jours, d'expliciter les divers modes de ce passage. Ainsi, par exemple, n'est-on pas en mesure de pouvoir simplement les nommer, d'en établir une liste et donc de les compter. Devant cette difficulté, s'en remettra-t-on par exemple à l'opposition de ce qui relèverait de la suggestion et de ce qui s'en dispenserait ? On peut en effet penser la domestication comme une manière de suggestion et se souvenir que ce terme, d'un point de vue notionnel mais aussi bien pratique, a servi un temps à épingler un certain mode d'accès - ou faut-il mieux dire de non-accès ? - à l'altérité. Pourtant, même à considérer le frayage de Freud comme s'inscrivant à rebrousse-poil de cette tentative, on ne saurait tirer de là une quelconque bipartition pour une classification des divers modes de cet accès/non-accès. Il est patent, en effet, que la suggestion fait question dans la psychanalyse elle-même (Freud en témoigne) et ne saurait donc simplement être prise comme ce que la psychanalyse a rejeté pour se constituer. La mise à l'écart de toute opposition par trop réductrice semble accroître la difficulté. Elle offre l'avantage, toutefois, de laisser une place à ce qu'on nomme l'expérience. On qualifiera celle-ci de « clinique » pour autant qu'on saura voir, dans la clinique, une des tentatives majeures de produire une description - sinon une analyse - des divers modes du rapport à Paltérité, des façons à la fois variées et variables dont une certaine altérité ne cesse pas d'être ce à quoi uploads/Geographie/ allouch.pdf
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- Publié le Aoû 15, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
- Langue French
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