REVUE SUISSE DE NUMISMATIQUE PUBLIÉE PAR LE COMITÉ BE LA SOCIÉTÉ SUISSE DE NUMI

REVUE SUISSE DE NUMISMATIQUE PUBLIÉE PAR LE COMITÉ BE LA SOCIÉTÉ SUISSE DE NUMISMATIQUE SOUS LA DIRECTION DE EUG. DEMOLE (Schweizerische Nnmismalisclie Rundschau) TOME XIX <^ p * m m p ^ A GENEVE AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ, ÉCOLE D'HORLOGERIE 1913 Tpi 4C. ATELIERS MONÉTAIRES DES ROIS DE FRANCE ATELIERS PROVENÇAUX MONNAIES DES ROIS DE FRANCE Marseille 1492-1857 — Aix 1481-1786 — Tarascon 1481-1518. Louis XI, dès son avènement au trône, avait convoité la possession de la Provence. Neveu du roi René d'Anjou, qui n'avait pas d'héritier direct, le roi de France comptait sur ce bel héritage, et il fut désappointé lorsque le roi René désigna en 1474 pour son successeur Charles d'Anjou, fils de son frère, le comte du Maine. Louis XI, qui voyait avec peine passer cet héritage en d'autres mains, s'empara des duchés de Bar et d'Anjou, qu'il ne rendit que sur la promesse formelle de la réunion de la Provence à la couronne de France, après la mort de Charles d'Anjou, qui devait régner sous le nom de Charles III. Le roi René mourut le 10 juillet 1480, et son neveu et successeur Charles III. faible et maladif, disparut à son tour le 11 décembre 1481. Louis XI arrivait donc à ses fins : il héritait de cette belle province, dont il fit occuper de suite les villes principales par ses troupes. La Provence, qui avait eu sous ses comtes de nom¬ breux ateliers monétaires, Forcalquier, Tarascon, Saint- Remy, Aix, Nice, Apt, qui battirent ces belles et riches séries provençales que nous connaissons, n'avait plus KEVLE NUM. T. XIX. 14 — 210 — d'ouvertes, lors de l'annexion à la couronne, que les Monnaies d'Aix et de Tarascon. Mais peu après, Marseille, la rivale d'Aix, faisant valoir l'ancienneté de ses droits monétaires, qui dataient de l'origine de la ville, droits vingt fois séculaires et dont elle avait joui jusqu'à et y compris le règne de Charles Ier d'Anjou, demanda et obtint en 1492 la réouverture de son officine. C'est l'histoire succincte de ces trois ateliers que nous allons essayer de retracer, et si leur production, si consi¬ dérable et si variée autrefois, jusque vers la fin du xve siècle pour certains du moins, n'apporte pas une forte contribution à la numismatique des rois de France, l'étude de leur monnayage n'en est pas moins intéres¬ sante en raison des types battus, de leurs légendes, des circonstances dans lesquelles les émissions eurent lieu, circonstances marquées par la lutte de Marseille et d'Aix qui se disputèrent pendant près de trois siècles la possession de l'atelier de Provence. — 211 — Marseille. Différents. Ecu aux armes de la ville. 1492-1504. MA Denier de Charles VIII. Ecu aux armes de la ville. 1524-1538. ft ou Z et écu. 1540-1541. ft seul. 1541-1554. ft Ligue, douzain. 1594. MA en monogramme. 1629, 1787-1841, 1853-1857. I Il est établi que les débuts du monnayage massaliote eurent lieu peu après la fondation de la ville par les Phéniciens, six cents ans environ avant Jésus-Christ, et au ve siècle, déjà très répandu, il jouissait d'une grande faveur, ainsi que l'établissent les nombreuses trouvailles faites dans diverses régions, le midi de la Gaule, les vallées du Rhône et du Pô, en Lombardie, dans le Tessin, les Grisons, le Tyrol, jusqu'aux environs de Bâle. Ce monnayage d'argent et de bronze est représenté par des drachmes et leurs divisions, par des bronzes de divers modules, espèces aux types de la tête de Diane aux cheveux perlés, à celle d'Apollon AAKVAilN ', d'Apol¬ lon à la roue, d'Artémis, d'Artémis avec l'arc et le carquois, de Minerve ; puis à l'époque de la décadence, au premier siècle avant notre ère, par de petits bronzes présentant des tètes casquées, tourelées, ou par une Minerve debout. Ces monnaies portaient au revers pour l'argent un crabe et la lettre M, une tête de bélier, un 1 Consulter à ce sujet l'intéressante notice que M. Imhoof-Blumer vient de faire paraître : Massalia unti Lakt/don. dans Blätter für M unzfr., Dresde 19K1, et dont la Revue suisse île numism. (t. XIX, p. 183) donne l'analyse. — 212 — carré creux, une roue, une roue avec les lettres MA, un lion avec .MASSA, MASSAAIHTQN ; pour le bronze, un taureau cornupète avec MASSAAIIITQN, MASSA, MA, un trépied; puis à l'époque de la décadence, sur les petits bronzes, un dauphin avec trident, un lion, un aigle, deux mains jointes, une galère, un caducée. Dans le courant du siècle qui précède notre ère, la production de l'atelier de Marseille diminue graduellement avec la perte de ses colonies, la diminution de son commerce, la faveur accordée à la monnaie romaine qui se répan¬ dait dans toutes les provinces conquises, pour cesser d'exister à une époque difficile à préciser. Sous les rois de la première race, nous trouvons l'ate¬ lier en activité. Bien que déjà indépendants, les Méro¬ vingiens ne commencèrent à émettre tout d'abord que des espèces aux types de la monnaie romaine, véritables imitations des monnaies du Bas-Empire, sous d'or et tiers de sou ou triens, offrant le buste couronné et le nom de l'empereur avec, au revers, la Victoire ou la croix. 11 sortit de l'atelier de Marseille, avec sa marque particulière: MAS, de ces espèces, aux noms de Justin II, de Maurice Tibère, de Phocas, d'Héraclius Ier ; puis les noms des rois Francs figurèrent sous Clotaire II, Dago¬ bert Ier, Sigebert III, Clovis II, Childéric II, Dagobert II, Clovis III, Childebert III; souvent figure également le nom de la cité : MASI LIA, MA, MAS, MASIL, MAS1LIE CIVITATIS, C. Notons enfin, les deniers d'argent ou saigas, émis par les patriciens de la ville ; l'on connaît de ces deniers battus pour Nemfidius, Antenor, Anse- bertus, Métranus. Sous les derniers Mérovingiens, la Provence fut enva¬ hie par les Sarrasins et Marseille saccagée; Charles Martel la délivra bientôt, et en 752 son fils Pépin qui lui avait succédé, détrôna Childéric III et fonda la dynastie carolingienne. L'atelier paraît avoir été alors en chômage, mais nous le retrouvons en activité pour battre des • — 213 — deniers aux noms de Charlemagne, de Louis Je Débon¬ naire et de Charles le Chauve. Sous ce dernier roi, la Provence fut érigée en comté en faveur de Bozon, son beau-frère, qui se fit bientôt proclamer roi de la Bourgogne Cisjurane; réunie peu après aux possessions de Rodolphe II, roi de la Bourgo¬ gne Transjurane, ces deux provinces formèrent alors le royaume d'Arles. Dans ces diverses situations, la Pro¬ vence eut toujours des comtes particuliers, qui s'étaient rendus pour ainsi dire indépendants, et sous Guillaume II (1008-1018) ces derniers devinrent héréditaires. En 1113, la Provence passa dans la maison de Barcelone, par suite du mariage de Douce, fille de Gerberge comtesse de Provence et de Gilbert de Gévaudan, avec Rairnond Béranger Ier, puis dans celle d'Aragon, lorsque les comtes de Barcelone devinrent rois de cet état ; enfin dans celle d'Anjou, en 1226, à la suite du mariage de Beatrix avec Charles d'Anjou, frère de saint Louis. En 1481, la Pro¬ vence fit retour à la couronne en exécution du testament de Charles III, mort sans héritier direct et qui avait légué son comté au roi de France ; puis, au mois d'octobre 1486, l'annexion définitive fut proclamée par Charles VIII. Ce ne fut que sous les comtes de la maison de Barce¬ lone que l'on vit reparaître le monnayage de Marseille qui avait été interrompu depuis plusieurs siècles, la Provence utilisant les espèces des provinces voisines : les deniers othoniens, puis melgoriens et raimondins. En 1186, l'atelier bat le royal coronat de Marseille àia tête couronnée au droit avec la légende : REX ARAGONE et portant au revers la croix pattée avec PROVINCIA. En 1218, Raimond Béranger IV autorise la ville à battre des gros d'argent, dits gros marseillais, offrant au droit une tête nue de profil avec COMES PVINCIE et au revers CIVITAS MASSIL, entourant un château crénelé. Enfin en 1243, le même comte, devenu maître de la ville, fait émettre des gros d'argent de six deniers royaux, en y — 214 — inscrivant son nom R BE COMES, autour d'un écu aux armes d'Aragon et présentant au revers une grande croix coupant lalégende : P-VI-N-CI-E.Sous Charles Ier d'Anjou (1245-1285), le monnayage des gros marseillais continue, puis l'on revient ensuite (1242) au type du royal coronat avec le nom du comte; enfin en 1257, après une révolte de la cité, Charles Ier vainqueur maintint, mais en le modifiant, le monnayage marseillais : la mon¬ naie devint comtale avec un type particulier se compo¬ sant de gros, de deniers, d'oboles à la tête nue du comte de profil à gauche, avec MASSILIENSIS en légende au revers (Chapitres de paix, 1275). Les habitants de Marseille, qui avaient toujours eu des idées d'indépendance très marquées, s'étaient soumis difficilement à Raimond Béranger; toujours prêts à défendre leurs droits, ils avaient essayé de secouer le joug de Charles Ier et du reste, situés en terres adja¬ centes, ils ne considéraient pas leur ville comme faisant uploads/Geographie/ ateliers-monetaires-des-rois-de-france-ateliers-provencaux-monnaies-des-rois-de-france-marseille-1492-1857-aix-1481-1786-tarascon-1481-1518-a-babut.pdf

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