HGGSP 4 : IDENTIFIER, PROTÉGER ET VALORISER LE PATRIMOINE : ENJEUX GÉOPOLITIQUE

HGGSP 4 : IDENTIFIER, PROTÉGER ET VALORISER LE PATRIMOINE : ENJEUX GÉOPOLITIQUES AXE 2 PATRIMOINE, LA CONSERVATION ENTRE TENSIONS ET CONCURRENCES Introduction : « Ce que nous croyons indestructible peut être atteint » déclare Emmanuel Macron le soir de l’incendie de Notre-Dame. Avril 2019, Notre Dame de Paris, août 2015, la cité antique de Palmyre, deux monuments détruits par le feu et par la guerre. Ils rappellent la fragilité du patrimoine et posent la question de leur conservation. Paris, Venise, Tombouctou : trois villes marquées par une richesse patrimoniale importante. Dans ces espaces où le patrimoine est remarquable et remarqué, il est aussi souvent en danger. Sa conservation engendre des tensions, répond à des enjeux opposés : économiques, culturels, environnementaux, géopolitiques. Problématique : Comment la question de la préservation et de la gestion du patrimoine entre-t-elle en concurrence avec des enjeux économiques, politiques et géopolitiques ? I. Paris entre protection et nouvel urbanisme. A. Paris, ville musée ? Un patrimoine riche : Longtemps capitale des Rois de France, Paris est dotée de monuments majeurs symbolisant le pouvoir politique autour du Louvre. Au XIXe s, durant le Second Empire, la ville est profondément transformée sous l’impulsion du Baron Haussmann qui met en place un vaste plan de modernisation de la ville voulu par Napoléon III : construction de monuments, de gares, percement et élargissement d‘avenues, aménagement de parcs et de jardins ou bien encore construction d’un système d’égouts, d’adduction d’eau et de gaz. Cette modernisation de la ville aboutit à la création d’un ensemble homogène, enrichi de nombreux monuments liés aux Expositions Universelles dont l’emblème est la Tour Eiffel. Mais en même temps, ce programme entraîne la destruction de nombreux quartiers anciens. Dès 1897, est créée une Commission du Vieux Paris visant à défendre le patrimoine ancien de Paris. Le patrimoine urbain, atout économique : Surnommée la « Ville Lumière », Paris est devenue l’atout principal de l’attractivité touristique de la France. L’inscription des rives de la Seine sur la liste du Patrimoine Mondial de l’Humanité en 1991 renforce l’image internationale de Paris. En 2019, ce sont plus de 22 millions de touristes étrangers qui sont venus à Paris et qui ont dépensé près de 15 milliards d’€. Le monument le plus visité est la cathédrale Notre-Dame de Paris qui accueille 14 millions de visiteurs. Son incendie en 2019 a suscité l’émotion dans le monde entier, ce qui témoigne de l’attractivité de Paris. Le dossier de candidature de la ville de Paris pour l’organisation des Jeux Olympiques de 2024 s’est largement appuyé sur l’image patrimoniale exceptionnelle de la capitale. Une législation protectrice Pour protéger la richesse patrimoniale de la capitale, la France a mis en place une législation protectrice de développement de l’urbanisme. Paris, comme toutes les autres villes françaises, dispose d’un plan local d’urbanisme (PLU) qui organise le développement urbain. En 1962, André Malraux, alors ministre des Affaires Culturelles met en place un code qui permet de préserver des quartiers entiers. C’est le plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV). Le quartier du Marais ainsi qu’une partie du 7e arrondissement sont depuis protégés. Mais cette législation entraîne de nombreux conflits d’usage. C’est le cas de la pergola en acier réalisée par l’architecte Eric Dhondt devant le musée Picasso qui a été démontée au bout de quelques semaines sous la pression d’une association citoyenne Vivre le Marais en 2014. B. Un équilibre urbanistique fragile. Les grands projets des années 70-80 : Après la Seconde Guerre Mondiale, la ville de Paris est transformée par des grands projets visant à moderniser la ville. Dans les années 60, le quartier des affaires de la Défense sort de terre à la limite de la ville de Paris. De 1969 à 1979, Les Halles Baltard sont détruites et l’ensemble du quartier est transformé : un ensemble comprenant gare RER et un immense centre commercial est construit sous terre alors qu’en surface un parc est créé. A proximité, le centre d’art contemporain de Beaubourg devenu Centre Georges Pompidou sort de terre. En 1973, la Tour Montparnasse et son quartier sont inaugurés. La plupart de ces grands projets urbanistiques suscite une forte méfiance et un rejet de la part des populations, incarné par la mobilisation contre la destruction des pavillons Baltard en 1973. Dans les années 80, sous la présidence de François Mitterrand, les projets urbanistiques se poursuivent, essentiellement dans le domaine culturel : Pyramide du Louvre, colonnes de Buren, Musée du Quai Branly sous Jacques Chirac. Les grands projets, symbole du dynamisme urbain : Paris est une ville mondiale, ce qui signifie qu’elle entre en concurrence avec des métropoles comme Londres New York ou encore Tokyo. Dans cette lutte, les projets architecturaux d’envergure occupent une place centrale. La métropolisation aboutit à une concentration des activités et de la population, donc à une hausse forte de la valeur du m2 et donc à une course à la verticalité marquée par la construction de buildings. Si la ville de Paris est relativement épargnée par ce phénomène, la modification des PLU depuis 2010 change progressivement la donne. La construction de la BNF (Bibliothèque François Mitterrand), celle du Tribunal de Paris ou plus récemment la construction des tours Duo répondent à la même logique : des constructions plus hautes (mais pas trop), des architectes mondialement reconnus, des projets éloignés du cœur historique. Le projet de construction de la Tour Triangle a cristallisé les tensions autour de ces grands projets : d’une hauteur de 180 mètres, la tour a été retardée plusieurs fois par des recours d’associations et de riverains. Finalement, les travaux ont débuté en 2022. Des enjeux multiples : La protection du patrimoine parisien est soumise à de nombreux enjeux, incarnés autour des projets d’aménagement des berges de la Seine. La piétonnisation des voies sur berge a été combattue par une partie des citoyens et a suscité des débats vifs. C’est aussi le cas de la restauration de Notre-Dame de Paris, et plus particulièrement de la reconstruction de la flèche. Créée par Viollet-Le-Duc au XIXe siècle, la flèche a divisé les Français entre restauration et création d’une nouvelle flèche moderne. L’autre débat majeur est celui de la privatisation du patrimoine. En 2017, la ville de Paris signe un bail de 50 ans qui donne au milliardaire François Pinault la possibilité de créer un musée pour sa collection d’art contemporain en échange de la rénovation de la Bourse du Commerce. Cette collaboration a permis la restauration et la mise en valeur d’un monument. Mais elle attribue la gestion et l’exploitation d’un monument public à un groupe privé. II. La question patrimoniale au Mali. A. Le riche patrimoine du territoire malien. Un patrimoine exceptionnel : Entre le XIe et XVIIe siècles, la région du Mali voit l’émergence d’Empires puissants et riches, qui s’appuient sur les mines d’or et le commerce transsaharien pour dominer la région du Sahel. A son apogée aux XIVe et XVe siècles, l’Empire malien développe autour de sa capitale Tombouctou un centre culturel et intellectuel majeur. Trois grandes mosquées et une université coranique se développent dans lesquelles des centaines de milliers de manuscrits sont conservées : religion, droit, mathématiques. Ces manuscrits sont parmi les plus anciens du monde arabo-musulman. Les villes de Gao et de Djenné sont aussi des foyers de diffusion majeurs de l’Islam. Un patrimoine malien devenu mondial : Le travail de préservation et de conservation du patrimoine malien débute dès les années 60 avec l’inventaire et la collecte des manuscrits dont le nombre est estimé à 300 000 regroupés dans 200 bibliothèques privées. Les premiers lieux maliens inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco sont les villes anciennes de Djenné et de Tombouctou, classées en 1988, comme foyers de diffusion de l’Islam. Les symboles de ces villes sont les mosquées anciennes qui sont bâties en banco. Il s’agit de terre crue soutenue par des poutres en bois visibles et qui sont régulièrement consolidées. L’année suivante, ce sont les falaises de Bandiagara, situées en pays dogon. En 2004, le tombeau des Askia situé à Gao est à son tour inscrit sur la liste de l’Unesco. Il s’agit d’un ensemble funéraire des empereurs songhaï (songhoy) datant de la fin du XVe s. B. Un patrimoine mis en danger par l’instabilité géopolitique. Un espace de forte conflictualité À partir des années 2000, le Mali s’enfonce dans une crise politique et militaire importante. Il est notamment déchiré entre le Nord et le Sud. Au nord du Mali, se trouvent de nombreux groupes indépendantistes (MNLA : mouvement national de libération de l’Azawad, rébellion touareg) ainsi que les groupes djihadistes. Parmi eux, on trouve AQMI (Al Qaïda au Maghreb islamique) et le groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM), deux mouvements armés salafistes qui se disputent la région avec les autorités. En mars 2012, alors que les troupes djihadistes occupent le Nord du Mali et avancent vers la capitale Bamako, un coup d’état militaire renverse le président malien. En 2013, l’armée française intervient pour stopper l’avancée des rebelles (opération Serval) alors que débute la MINUSMA, action uploads/Geographie/ axe-2-patrimoine-preservation-entre-tensions-et-concurrences.pdf

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