Appel d’offres de l’Acsé : Programme d’études 2005-2008 Histoire et mémoires de

Appel d’offres de l’Acsé : Programme d’études 2005-2008 Histoire et mémoires des immigrations en régions Marché n° 2006 33 DED 02 : lot n° 23 Direction Régionale Corse Histoire et mémoires des immigrations en région Corse Synthèse du rapport final - avril 2008 - Jean-Michel Géa, Didier Rey, Pierre Bertoncini - Vannina Marchini, Marco Ambroselli, Yannick Solinas Responsable scientifique : Ph. Pesteil Courriel : ph.pesteil@wanadoo.fr Université de Corse - Pascal Paoli Avenue Jean Nicoli 20250 Corte 2 Présentation Il est commun de dire qu’en neuf millénaires de peuplement, la Corse a vu se succéder de nombreux groupes qui, de façon violente ou pacifique, ont influé sur l’histoire culturelle et sociale de l’île. Les apports de population ne sont pas tous équivalents et bien des zones d’ombre subsistent pour évaluer l’importance, l’impact démographique et l’héritage culturel laissé par les vandales ou les sarrasins par exemple. Des arrivées individuelles aux apports massifs et continus, des distinctions méritent d’être faites. De même les présences ne furent pas toutes définitives : la Corse fut parfois une terre d’asile temporaire ou de travail saisonnier pour des groupes qui aspiraient à retourner chez eux. À l’instar d’autres îles méditerranéennes, on a pu dire qu’elle était à la fois une terre accueillante et ouverte sur l’extérieur tout en étant méfiante de ces apports. Une vision trop schématique ne pourrait que caricaturer cette double tendance qu’il faut savoir faire fonctionner de concert pour appréhender les phénomènes migratoires et ses représentations. Dans une société où l’appartenance à une filiation, repérable et répertoriée par le groupe, à un territoire et à une communauté, est un élément capital dans la reconnaissance d’une identité commune, on conçoit que la position de l’immigré dont le nom, l’ascendance, l’encrage, sont inconnus, n’est pas facile à tenir. Pourtant il n’est pas niable que la Corse a accueilli nombre d’individus d’origine étrangère, qu’ils y ont fait souche en choisissant de demeurer sur un territoire où le hasard et/ou la recherche d’un travail les avaient portés. S’il n’est pas faux de se souvenir que l’on compte encore des taux d’endogamie de plus de 90 % dans certains villages à la fin du XIXe siècle, il est également vrai que de nombreuses familles comptent dans leurs ascendants ou leurs alliés, des individus d’origine continentale, italienne, ou autre. Avant de présenter brièvement le contenu du rapport, il convient de proposer un panorama de la situation de l’immigration sur l’île. Il s’inspire des données recueillies par l’Insee dans son Tableau d’Economie Corse version 2005 et dans l’Atlas des populations immigrées en Corse. Au recensement de 1999 la Corse comptait 26.000 immigrés (20.500 étrangers nés à l’étranger et 5.500 français par acquisition nés à l’étranger) et 25.700 étrangers (20.500 auxquels s’ajoutent 5.200 étrangers nés en France). Cette catégorie représente environ 10% de la population totale plaçant la Corse en seconde position derrière l’Ile de France quant à la proportion d’immigrés. La part des immigrés devenus français représente 21% de l’ensemble soit 21% de cette classe, proportion la plus faible de toutes les régions. Il s’agit d’une population encore majoritairement masculine (57%) même si le pro rata tend à s’équilibrer. Si l’on examine la structure par âge, on peut retenir que la moyenne est de 34 ans pour 41 ans de moyenne régionale. Aux extrémités de la pyramide des âges, les immigrés sont peu nombreux même si le pourcentage progresse rapidement pour les jeunes (13% des moins de 20 ans), et que la part des seniors a tendance à croître avec le temps. Les pics se situent entre 40 et 60 ans pour les hommes, 30 et 45 ans pour les femmes. En conformité avec cette configuration particulière, la part des actifs est plus importante qu’au niveau régional. Les immigrés représentent 12% des actifs de Corse. La part du travail féminin est encore faible (particulièrement chez les marocaines) même si on peut 3 noter une évolution à la hausse. Les emplois occupés sont peu qualifiés majoritairement ouvriers (bâtiment, agriculture) pour les hommes, employés pour les femmes (domaine de la santé, services au particulier et du commerce). Près de 23% des immigrés sont des actifs à la recherche d’un emploi ce qui les situe au- dessus des données régionales. La sensibilité aux aléas dans les professions où ils sont concentrés et la faible qualification des effectifs explique en partie cette particularité, plus sensible encore chez les femmes que chez les hommes. Les ressortissants d’un pays de la Communauté européenne sont moins soumis à cette règle que ceux originaires du Maghreb. Les étrangers de l’Union européenne représentent environ 35% des effectifs. Les portugais sont désormais plus nombreux que les italiens avec plus de 50% du total de cette catégorie. C’est le pays qui a le plus progressé entre le recensement de 1990 et celui de 1999 ; leur présence est plus marquée en Corse du Sud qu’en Haute Corse. Loin derrière viennent les allemands et les espagnols. En ce qui concerne les pays du Maghreb, le Maroc est le pays le plus fortement représenté : il comptabilise à lui seul plus de la moitié des étrangers de l’île. Ceci constitue une particularité de la répartition de l’immigration du Maghreb en Corse vis-à-vis du Continent : les Algériens ne sont que 2% et les tunisiens 8% (plus en Corse du Sud et principalement Ajaccio) de l’ensemble. Leur répartition sur le territoire insulaire répond à deux grands paramètres : la densité de la population et celle du travail, principalement dans les secteurs du bâtiment et de l’agriculture. C’est ainsi que l’immigration se concentre principalement dans les villes, particulièrement Ajaccio et Bastia ainsi qu’en Balagne (Calvi, Ile Rousse), le long de la côte orientale et dans l’extrême Sud. Commune Population (nb. hab.) immigrés (nb. hab.) Part des immigrés dans la pop. (%) Ajaccio 52.851 5.303 10% Bastia 37.880 3.894 10,3% Porto Vecchio 10.310 2.056 19,9% Corte 6.335 300 4,7% Calvi 5.178 1.331 25,7% Biguglia 5.022 415 8,3% (Répartition géographique des immigrés en Corse dans les villes de plus de 5.000 hab. d’après le recensement de 1999.) A noter la présence d’un fort contingent d’étrangers à Calvi dans des emplois classés dans le tertiaire catégorisant les militaires de la Légion étrangère. Autre particularité, l’immigration sub-saharienne et asiatique est encore pour l’heure anecdotique par rapport au Continent. Cette indispensable présentation des principales caractéristiques de l’immigration a permis de dresser le décor pour cette étude qui en reprendra certains aspects. Ceux-ci ont été déterminé tant par la qualification à les traiter de 4 la part des chercheurs participants qu’en tenant compte de ce qui nous est apparu comme des impératifs du terrain. En Corse, d’incontestables phénomènes d’exclusion voisinent avec de non moins évidentes preuves d’intégration ou d’accueil amical ; les textes à suivre en attestent. Jusqu’à présent il existe peu de travaux traitant du phénomène migratoire récent tant dans ses aspects historiques que statistiques. Nos effectifs limités ne nous ont pas permis de réaliser un panorama complet de la question. Nous avons écarté les aspects les plus connus et qui ont fait l’objet du plus grand nombre de publication. Ainsi l’immigration italienne, qui figure parmi la plus ancienne et la plus étudiée, n’est pas abordée de façon spécifique. La partie événementielle soulignera son importance et elle reviendra transversalement dans les éclairages plus précis. Souhaitons que ce travail connaisse une suite tant les thèmes non traités sont essentiels et le sujet soumis à de constantes évolutions. Mais plutôt que de proposer une compilation de travaux et de données déjà publiés nous avons voulu faire œuvre de recherche en ouvrant des pistes encore peu explorées. La présentation historique est composée d’une partie offrant un panorama des diverses immigrations qui se sont succédées dans l’île depuis 1789 puis de plusieurs contributions portant sur des aspects particuliers se rapportant à la présence des immigrés : altérité, manifestation graffitaire xénophobe, transmission linguistique et multilinguisme, expression associative. Elle est suivie par la partie statistique qui comprend les données remontant au recensement de 1851 ; une bibliographie, que nous avons cherché à rendre la plus complète possible en y incluant sites Internet, archives et nomenclature des associations, clôt l’ensemble de l’étude. 5 Première Partie 1.Historique des migrations en Corse depuis 1789 (D. Rey) Située dans le bassin occidental de la Méditerranée, à quelques encablures des côtes sardes (12 kilomètres) et toscanes (80 kilomètres), la Corse se trouve au croisement de deux grands axes historiques d’importance économique et militaire qui jouèrent au cours des siècles un rôle non négligeable dans son histoire, notamment migratoire. Le premier axe, nord-sud, permettait aux puissances médiévales italiennes (Pise puis Gênes) de contrôler en partie les routes menant vers l’Orient ; plus tard, il servit à d’autres puissances (France et Angleterre) pour établir leur suprématie dans la région. Le second, ouest est, de Barcelone à Rome, joua un rôle capital tant dans les prétentions aragonaises – puis espagnoles – que pour les visées pontificales en Méditerranée. Dès lors, de part sa position, il eut été surprenant que l’île échappât aux conquêtes et aux brassages migratoires. Si Pise s’imposa la première en Corse dès uploads/Geographie/ corsica-website-add-links-insee-paomia.pdf

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