Pierre-Cyrille Hautcœur La crise de 1929 ~ OéCDu""rte 9 bis, rue AbeL-HoveLacqu

Pierre-Cyrille Hautcœur La crise de 1929 ~ OéCDu""rte 9 bis, rue AbeL-HoveLacque 75013 Paris Remerciements. Ce livre a été rédigé au cours d'un séjour au Centra de Estudios Avanzados en Ciencias Sociales de la Funda- cion Juan March que je remercie - en particulier son directeur Ignacio Sanchez Cuenca - pour son hospitalité chaleureuse et stimulante. Je remercie aussi tous les collègues avec lesquels j'ai discuté de la période couverte par ce livre au cours des ans ou qui ont répondu à des questions spécifiques lors de la prépara- tion de cet ouvrage, en particulier J.-Ch. Asselain, P. Baubeau, B. Blancheton, M. Bordo, S. Broadberry, B. Eichengreen, M. Lescure, D. Lévy, M. Lévy-Leboyer, K. Mouré, T. Piketty, A. Ritschl, A. Riva, P. Sicsic, M. Spoerer, A. Straus. Je remercie également Pascal Combemale, Guiomar Hautcceur, Claire Lemercier et Claire Zaie pour leurs lectures attentives du manus- crit. Les discussions avec mes étudiants de master de l'univer- sité Paris-l, de l'EHESS et de l'École d'économie de Paris ont aussi contribué à clarifier et améliorer nombre de passages. Toutes les erreurs ou obscurités restent bien sûr de mon seul fait. Si vous désirez être tenu régulièrement informé des parutions de la collection « Repères., il vous suffit de vous abonner gratuitement à notre lettre d'information mensuelle par courriel, à partir de notre site http://www.collectlonreperes.com. où vous retrouverez l'ensemble de notre catalogue. ISBN: 978-2-7071-5906-9 G ..a Ce logo a pour objet d'alerter le lecteur sur la menace que repréa " sente pour l'avenir du livre, tout particulièrement dans le @~ domaine des sciences humaines et sociales, le développement massif du photocopillage. Nous rappelons donc qu'en applica- tion des articles L. 122-10 à L. 122-12 du code de la propriété intellectuelle, toute photocopie à usage collectif, intégrale ou partielle, du présent ouvrage est interdite sans autorisation du Centre français d'exploitation du droit de copie (CFC, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris). Toute autre forme de reproduction, intégrale ou partielle, est également interdite sans autorisation de l'éditeur. © Éditions La Découverte, Paris, 2009. Introduction Au milieu de 1929, le monde semble installé dans une période de prospérité. Après des années de tensions politiques entre grandes nations à la suite du règlement difficile de la Première Guerre mondiale, la paix paraît rétablie durablement. En août, l'Allemagne ratifie le plan Young, qui réduit les réparations de guerre et prévoit l'évacuation de la Rhénanie par les troupes françaises tout en donnant des garanties internationales de paie- ment aux Alliés. Le 5 septembre, Aristide Briand propose à l'Assemblée de la Société des Nations la constitution des États-Unis d'Europe. À cette date, la récession, qui a déjà commencé dans certains pays (en particulier en Allemagne, au Brésil ou au Canada), n'inquiète pas: nombre d'hommes politiques et d'économistes croient qu'une nouvelle ère de croissance permanente a commencé, dans laquelle les crises sérieuses sont exclues. C'est le krach boursier qui frappe les esprits : du Black Thllrsday au Black TlIesday (24 et 29 octobre), la Bourse de New York connaît un véritable effondrement et les hommes d'affaires ruinés volent, dit-on (à tort), des gratte-ciel de Wall Street. L'économie bascule dans la récession: la production d'automobiles s'effondre, les usines ferment, les queues s'allongent aux bureaux d'embauche et de bienfaisance. En un an, la produc- tion industrielle mondiale baisse de 12 % et le commerce inter- national recule pour la première fois depuis le début de la décennie. Chaque mois, de nouveaux pays entrent en récession. Surtout, la reprise, qui plusieurs fois pointe un nez timide, tarde à se manifester. Un deuxième grand choc a lieu en 1931 : une crise financière internationale partie d'Europe centrale renverse en quelques 4 LA CRISE DE 1929 les mots de la crise La crise est le moment où la conjoncture se retourne à la baisse. Elle est particu- lièrement aiguë et visible sur les marchés financiers, où on la qualifie de krach quand les cours baissent brutalement. La récession est un ralentissement de la croissance ou une période limitée (un ou deux ans au maximum) de recul de la production, au cours de laquelle le chômage augmente parfois fortement. Une dépression consiste en une baisse durable de la production et un chômage élevé et prolongé. Des mécanismes récessifs cumulatifs y sont à l'œuvre, qui empê- chent une reprise. La déffation est une baisse soutenue des valeurs nominales d'une économie (quantité de monnaie, prix, valeur de la production). mois le système d'étalon-or jusque dans le pays qui en était à la fois le symbole et le défenseur intransigeant depuis deux siècles: la Grande-Bretagne. Elle aggrave la dépression, qui ne touche finalement son point bas qu'en 1933. À cette date, la production industrielle mondiale est en recul de plus de 40 0/0 et le chômage atteint des niveaux jamais envisagés jusque-là (5,6 millions de chômeurs en Allemagne, 12 millions aux États-Unis, soit dans les deux cas environ 25 % de la population active) ; la crise devient forte même dans des pays initialement moins atteints, comme l'Espagne ou la France, notamment dans l'industrie. La dévaluation de la livre provoque une véritable débandade et l'abandon de la plupart des efforts de coopération internatio- nale : chaque pays recherche individuellement une solution à ses difficultés, ce qui conduit à des politiques variées d'autarcie (Allemagne), de repli impérial (Grande-Bretagne, France), de protectionnisme (États-Unis), de substitution de la production nationale aux importations (Brésil), politiques qui n'ont en commun que le fait de contribuer à la chute des échanges inter- nationaux et à une recrudescence des tensions internationales. Pour lutter contre la crise, les gouvernements mettent en œuvre des politiques variées et parfois contradictoires, dont les inspira- tions vont du corporatisme au socialisme en passant par la rigueur budgétaire et l'expansion monétaire ... ou l'inverse. Certains pays connaissent une reprise forte, comme le Japon ou l'Allemagne, tandis que dans d'autres, comme les États-Unis, mais aussi la France, la Belgique ou la Suisse, le PNB de 1939 est à peine supérieur à celui de 1929. Le chômage demeure jusqu'à la guerre très élevé dans de nombreux pays. 1 NTRODUCTION 5 Graphique 1. Production industrielle, production de produits primaires et commerce international, 1926-1938 (1929 = 100) 130,----------------------------------------- 120t-----------------------------------~/~,---- , ' , ' 110 t-----------------------------------~,-'~~~',-- 100t-----~~~~~------------~7f~-------- 90+-~~~----~~----------~----~--~~ 80+---------------~~----~~~---------- 70+-------------------~~-------------------- Production industrielle Production de produits primaires Commerce international Source: Société des Nations. Des Interprétations multiples Les contemporains perçoivent déjà la crise comme exception- nelle. Dès 1934, L. Robbins lui donne l'appellation qui est restée dominante en anglais: the Great Depression. E. Varga suggère son ampleur par l'accumulation des qualificatifs dans La Crise écono- mique, sociale et politique [1934]*. Beaucoup y voient en effet une combinaison de la brutalité des crises financières classiques - qui duraient peu - et de l'autre « grande dépression », celle de l'Angleterre des années 1873-1896 (selon une datation * Les références entre crochets renvoient à la bibliographie en fin d'ouvrage. 6 LA CRISE DE 1929 habituelle) - qui fut plutôt une longue stagnation sans recul aigu de la production ni chômage massif. Cette dépression inégalée par son ampleur comme par sa durée représente depuis quatre-vingts ans un défi pour les sciences sociales et particulièrement la science économique. Son origine, ses causes immédiates ou plus profondes, ses méca- nismes de transmission entre secteurs comme entre pays, les modalités de la reprise, le rôle positif ou négatif des différentes politiques essayées, rien ou presque ne fait l'objet d'un accord général de la part des observateurs contemporains ou des analystes postérieurs. Nombre d'analyses se limitent à la crise américaine. De fait, les États-Unis sont au cœur de la crise, qui y est d'une gravité exceptionnelle. Les politiques menées par Roosevelt exercent une influence planétaire. Mais la crise y a-t-elle son origine ou ne le croit-on que parce que les États-Unis sont le symbole de la prospérité apparemment inaltérable des années 1920 (le taux de croissance y atteint près de 5 % par an pendant cette décennie) ? En réalité, nombre de pays entrent en récession avant les États-Unis: c'est le cas, dès 1928, de l'Allemagne, de la Pologne, mais aussi de l'Argentine, du Canada, de l'Australie et du Brésil, ce qui rend indispensable d'envisager la dimension internationale du phénomène. La crise financière est aussi réputée être au cœur de la dépres- sion. Le krach boursier, les faillites bancaires en chaîne, les défauts de paiement de nombreux pays sur leur dette interna- tionale, l'effondrement de l'étalon-or enfin scandent l'histoire de la décennie. Pourtant, les crises financières sont fréquentes depuis des siècles, et ne débouchent pas toujours, loin s'en faut, sur des crises économiques graves. Plus encore, la profondeur et la durée de la dépression donnent aux contemporains l'impression que les mécanismes habituels de rétablissement propres aux économies de marché sont bloqués. Le capitalisme n'est-il plus ce qu'il était? Ou les marxistes qui annoncent la crise finale ont-ils raison? Il est aisé a posteriori de tourner de telles interrogations en dérision, mais le rétablissement du capi- talisme et sa victoire finale sur le communisme soviétique ne vont alors pas de soi, et les conditions qui les permettent sont toujours uploads/Geographie/ crise-1929.pdf

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