DOULEUR ET SOUFFRANCE DANS L’ISLAM Dr. Dalil BOUBAKEUR, Recteur de l’Institut M
DOULEUR ET SOUFFRANCE DANS L’ISLAM Dr. Dalil BOUBAKEUR, Recteur de l’Institut Musulman de la Mosquée de Paris Je remercie Madame Bétermier et son équipe d’avoir organisé cette rencontre entre vous et la culture musulmane qui est une dimension importante de notre pays et j’espère faire de mon mieux pour apporter à votre soif légitime de connaissance ce que je pourrai vous dire de ma religion dans les domaines qui vous occupent, c’est à dire l’abord du malade, les problèmes de l’éthique actuelle qui se posent pour la personne qui souffre, la personne humaine, pour éventuellement aborder les questions d’actualité comme les soins palliatifs, le discours sur la douleur et bien sûr traiter le sujet de la douleur et de la souffrance. Donc merci à tous, merci à toutes. J’avoue que je suis un petit peu embarrassé pour envisager un sujet aussi vaste et je m’en remets à vous... J’imaginais tout d’abord une information brève sur ma religion, sur l’Islam, ce que nous représentons nous, les Musulmans en France, ensuite quelques points d’éthique : les valeurs que nous accordons à la vie, la valeur que nous donnons à la santé, à la maladie, aux soins, aux différents abords modernes de la personne et de l’organisme humain et enfin de vous parler de ce sujet qui nous amène « La souffrance musulmane ». Place de l’Islam en France C’est une communauté de 4 millions de personnes officiellement. Certains disent plus, d’autres moins. Les origines sont très différentes puisqu’il y a plusieurs nationalités ; quarante ou cinquante nationalités sont présentes en France. Pratiquement toutes les tendances de l’Islam sont présentes en France que ce soit dans le domaine de l’orthodoxe sunnite ou dans le domaine du chiisme qui est l’autre grand pendant de la communauté musulmane. Les musulmans ont une histoire en France. Nous, musulmans, nous tenons à rappeler cette histoire qui est l’histoire d’une convivialité qui a commencée au siècle dernier avec la présence française dans beaucoup de pays musulmans. La France connaît les musulmans par son expérience directe des pays musulmans où elle a vécu, où elle a organisé, où elle a pris connaissance de cette religion et les musulmans également connaissent la France : au cours des décennies et depuis l’occupation du Maghreb, il s’est passé beaucoup d’événements auxquels les musulmans ont été associés. Nous nous permettons de rappeler souvent que les musulmans ont fait partie intégrante de l’histoire de France dans les guerres, et qu’après, ils ont participé à l’essor économique des dernières dizaines d’années. Il y a des raisons particulières pour que la communauté musulmane soit en France la première communauté d’Europe en Occident. Les grandes lignes de cette communauté : - près de 2 millions de citoyens français - 800000 de nationalité algérienne - un petit peu moins de nationalité marocaine - des Tunisiens, des Africains, des Moyen-Orientaux - une centaine de milliers de Turcs. Toute cette communauté est hétérogène, le musulman du Maghreb ne comprend pas la langue du Turc et inversement. Le seul ciment est la religion musulmane. La religion musulmane La religion musulmane qu’elle soit en France ou ailleurs est monothéiste, révélée au Prophète Mohammed. Le Prophète est né en 570 à la Mecque, il a reçu la révélation en 610 de l’Archange Gabriel. Le Coran est le livre sacré, le livre saint, la parole de Dieu. Les grands principes de la théologie musulmane, de la vie communautaire, les grands principes qui sont à l’origine de toute la jurisprudence musulmane y figurent. Dans le Coran 114 grands chapitres, les sourates. Le Coran n’est pas la seule source de la pensée musulmane, il y a ce qu’on appelle la « sunna » c’est à dire l’exemple de la vie du Prophète. L’Islam se réfère à ces 2 sources : ce qui est dans le Coran, ce que le Prophète a dit, fait, ou approuvé dans telle ou telle circonstance. Ce sont les deux sources essentielles. Mais il y en a d’autres, c’est ce qu’on appelle les sources des grands savants de l’Islam et en particulier il y a 4 écoles juridiques. Ce sont les 4 écoles orthodoxes, ceux qui les suivent sont les Sunnites, ceux qui ne suivent pas cette voie sont les Chiites. Les Chiites pensent que ce sont les descendants directs du Prophète, c’est à dire Ali et ses descendants, qui doivent diriger la communauté musulmane. L’Islam est une religion monothéiste. C’est une religion qui se réfère aux religions bibliques, à l’évangile, aux prophètes d’Israël, Abraham est le premier Prophète considéré comme musulman. Mais les autres prophètes de la bible sont également nos prophètes, Moïse, Isaac, Jésus et Marie considérés comme fondamentaux dans l’Islam, notamment la Vierge Marie considérée comme la première femme pieuse du monde. La Vierge Marie est pour nous la première femme du monde qui a reçu l’Esprit de Dieu et généré Jésus, lui- même Esprit de Dieu. Jésus est pour l’Islam porteur d’un grand message monothéiste et nous nous inscrivons totalement dans les 3 religions monothéistes : le Judaïsme, le Christianisme, l’Islam. Le message de l’Islam est avant tout un message d’humanisme, de fraternité humaine, un message de tolérance, un message de dialogue, un message d’ouverture. On me dit souvent : « Vous avez ce langage mais quand on voit les musulmans, ce n’est pas toujours ce qu’ils font ! » Je vais au-devant de cette remarque simplement par 2 exemples : Les chrétiens Nestoriens, condamnés vers 428 par le concile d’Ephèse, ont fui vers l’Orient et se sont retrouvés en masse en Arabie. Lorsqu’ils ont entendu parler du Prophète de l’Islam, ils sont venus le voir à Médine en l’an 628 de notre ère et ont engagé un dialogue avec lui. Aucun accord ne s’est fait entre les Nestoriens et le Prophète et ils allaient se séparer lorsque les Nestoriens ont rappelé que c’étaient les Rameaux et ont demandé au Prophète de l’Islam s’il était possible de prier. Il leur a dit : « Je vous donne la moitié de ma mosquée à Médine ». La prière des Rameaux de 628 en Arabie s’est effectuée dans la mosquée même du Prophète. 2ème exemple : un peu plus tard l’entrée à Jérusalem fut une entrée victorieuse, les évêques et les prêtres de Jérusalem ont apporté les clés de la ville au 2ème khalife Omar pour éviter les massacres. Il est arrivé en toute simplicité, on a même été étonné de la simplicité de sa venue et quand on lui a proposé de prier dans l’église du Saint Sépulcre il a refusé : « Non je ne prierai pas dans l’église du Saint Sépulcre étant donné que ce geste pourrait donner à d’autres musulmans l’idée de violer ou de ne pas respecter ce lieu saint » et il a maintenu un respect total des lieux saints. Il est prescrit dans la tradition que le musulman doit respecter les églises, les synagogues, les religieux, les prêtres, les moines... Cela a été une démarche constante dans l’Islam d’avoir un respect absolu vis à vis des représentants des autres cultes. C’est simplement lorsqu’on a voulu chasser le Prophète Mohamed de sa ville natale, qu’on l’a persécuté, qu’on l’a menacé de mort qu’il s’est armé avec ses compagnons pour lutter contre les menaces agressives de ses compatriotes. La civilisation musulmane L’Ecole de Bagdad, à partir de l’année 750, s’est ouverte sur une science importée des Grecs et des Latins. Je vous ai parlé de persécutions de certaines sectes chrétiennes, les Nestoriens en particulier, qui avaient élu domicile à Ephèse, à Antioche, à Alexandrie lieux où toute la science grecque et latine était concentrée, sans parler de ce qu’on appellerait aujourd’hui la Grèce d’Orient c’est à dire la Turquie avec Ephèse, Didime, Pergame etc... Et qui étaient des foyers de mathématiciens, de médecins, de savants, de philosophes. Toute cette science est arrivée à Bagdad. Au départ ce n’était une science ni musulmane ni arabe, les premiers à en bénéficier furent les Iraniens. Avicenne est un iranien. L’école arabo-musulmane a intégré des non musulmans et des non arabes pour se développer sur une base philosophique, héritée des Grecs, en particulier des néo-platoniciens, la médecine s’est développée sur les bases d’Hippocrate qui était extrêmement connu, traduit et véhiculé vers l’Europe plus tard par la voie de l’Espagne. Aristote a été connu de l’Occident par Averroès, la médecine antique a été connue par Avicenne. Cet immense apport de civilisations humaines montre à quel point l’Islam en s’ouvrant aux cultures, à la philosophie, à la science, à lui-même brillé auprès des civilisations et a été capable de transmettre, ce qui est tout à fait dans l’ordre des choses, les sciences vers les civilisations européennes. Voilà un petit panorama de la connaissance musulmane, de ce qu’est l’Islam, de ce qu’est cette riche civilisation qui a appliqué les principes vrais de la religion musulmane, c’est à dire les principes d’ouverture, de connaissance, de tolérance, de dialogue. Jamais en Andalousie il n’y a eu de persécution, ni de juifs, ni de chrétiens, ni d’Espagnols, à cause de la religion. Il y a uploads/Geographie/ douleurs-et-souvrances.pdf
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- Publié le Sep 01, 2022
- Catégorie Geography / Geogra...
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