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^rr'^ ' :^ '-i y ,. ."-ï ^--^ -.Jf ^ ij^' ^ :^ .»ci6^' ^^'^ r mm.— m.. ix I ^v^-- v^^^^^i?^.^^ ."T--; V" v^ % :C ^ - > ^:'--IV % . W.J. y - \ 'l'i'--'/ ^> ESSAI SUR LE MERVEILLEUX dans la littérature française depuis 1800. IMPRIMERIES RÉUNIES 8. A. LAUSANNE. HUBERT MATTHEY ESSAI SUR LE MERVEILLEUX DANS LA LITTÉRATURE FRANÇAISE DEPUIS 1800 pft. Matri uxorique dilectis. INTRODUCTION b 1. Point de vue critique. Comme les jeunes esprits, les jeunes sciences ont des ambitions démesurées ; comme les premiers phi- losophes grecs, qui, selon le poète, Tentaient sur l'univers un fol embrassement, la critique naissante se flatta de codifier la poésie dans son ensemble ; Boileau croyait en fixer les lois éternelles. Au cours du XIX^ siècle, trois grands esprits géné- ralisateurs essayèrent encore de bâtir de vastes syn- thèses : M™e de Staël, qui classe et détermine les groupes de littératures ; Taine, qui cherche à expK- quer les phénomènes littéraires par la triple influence du miheu, de la race et du moment; Brunetière, dont l'effort se concentre dans sa théorie de l'évolu- tion des genres. Mais déjà Sainte-Beuve, voyant avant tout dans les œuvres littéraires des réactifs très sensibles entre les mains du psychologue expert, avait orienté la critique — 8 — vers les études spéciales. Et actuellement, sous l'in- fluence de la méthode historique et linguistique, c'est de préférence dans des travaux de détail que se dé- pense l'ardeur toujours nouvelle de la foule toujours croissante des critiques littéraires. Les uns recherchent Yinédit. Heureux celui qui déniche une correspondance, un manuscrit, un brouil- lon encore inconnu I sa carrière est faite ; au moins a-t-il le pied à l'étrier. D'autres fouillent la biographie des grands hommes ; ils marchent sous la bannière de la critique anecdotique : et la vie est si riche, les hommes sont si faibles, et les femmes si complai- santes, que la matière est inépuisable, en même temps qu'attrayante comme les indiscrétions. D'au- tres enfin sont des chercheurs de sources. Investiga- teurs intrépides, lecteurs infatigables, ils procèdent avec la sérénité de la science à leurs recherches de paternité intellectuelle et exposent leurs résultats dans des textes à deux colonnes, où l'œuvre organi- que et vivante paraît n'être plus qu'un assemblage for- tuit de « membra disjecta ». Préoccupés de l'analyse seule, ils oubhent l'effort créateur qui a synthétisé les éléments, et touchent trop souvent au problème de l'originalité sans avoir tout d'abord sondé celui de l'invention. Certes, ces études sont utiles ; disons plus, elles sont nécessaires. Tout touche à tout ; un fait étabU vaut mieux qu'une idée contestable, et nos bénédic- tins modernes ont amené à pied d'œuvre une quantité — 9 — précieuse de matériaux qui trouveront sans doute leur place dans quelque édifice futur. Mais ces ten- dances ne distraient-elles pas la critique littéraire de son véritable objet ? Ne sont-elles pas des branches gourmandes qui épuisent le tronc ? Ne dérivent-elles pas vers l'histoire la sève qui devrait nourrir l'esthé- tique ? Certes, la plupart de ces critiques se rappor- tent à des littérateurs ; méritent- elles par là même le titre d'études littéraires? Consultons-les donc, ins- truisons-nous de leurs vertus, de leur patience, de leurs méthodes, mais ne nous y confinons pas. Car pour être digne de son nom et pour remplir sa tâche spéciale, la critique littéraire doit en revenir aux problèmes qui touchent à l'art proprement dit. Pour qui se place à ce point de vue, il se pose d'em- blée deux questions capitales. Tout d'abord, celle du rapport de l'œuvre à l'artiste. Il s'agirait de détermi- ner, en partant de l'œuvre, ce qui fait la caractéristi- que de l'écrivain, de dégager les éléments qui se re- trouvent semblables dans ses diverses productions et qui le distinguent des autres auteurs analogues, d'établir en un mot ce qu'on pourrait appeler son « équation personnelle ». (Cf. Taine : Titus Livius, in historia orator.) Voie peu suivie, et pour de multiples raisons : d'abord parce qu'elle n'aboutit que pour les grandes personnaUtés artistiques,— les individualités moins marquées se fondant au creuset de l'analyse sans laisser de traces appréciables; ensuite, parce qu'elle est délicate, ardue, et conduirait pour les gé- — 10 — nies vastes à des formules d'une extrême complexité enfin peut-être aussi, parce que le métier ne nourri- rait pas son homme. L'autre question, c'est celle du rapport de l'œuvre aux autres œuvres semblables, au groupe d'œuvres analogues, de Vœuvre au genre. Il s'agit d'examiner ici la répercussion d'une forme ou d'un cadre litté- raire choisi sur la contexture de l'œuvre, et d'autre part l'influence qu'une matière déterminée exerce sur la forme qui l'exprimera. Il s'agit de déterminer à quelles conditions l'œuvre seraviable, sera capable de traduire l'émotion, de la communiquer, c'est-à-dire de fleurir en beauté. Ce problème est celui des condi- tions du genre et des rapports internes. C'est à des préoccupations de cette dernière caté- gorie que se rattache le présent essai. Il étudiera l'emploi du merveilleux dans la littérature française depuis 1800, en s'attachant spécialement, pour les raisons indiquées au § 3 du chapitre deuxième de la seconde partie, à la narration fictive, dans la prose et dans la poésie. Nos conclusions montreront, je l'es- père, l'intérêt que peut présenter une étude de ce genre. 2. Le merveOleux. Avant d'entrer dans le cours de cette étude, il ne sera pas superflu de s'arrêter quelque temps à la notion du merveilleux. Dans quel sens prendrons- nous ces termes de merveilleux, de fantastique, de — 11 — surnaturel qui reviendront constamment dans les pages qui suivent, puisqu'ils désignent l'objet même de notre recherche ? J'aimerais pouvoir ici m'en tirer comme le fait Jules Janin dans la préface de ses Contes fantas- tiques ; il répond à la question qu'il se pose en con- tant une histoire, et escamote ainsi la difficulté. Mais il y faudrait trente pages et des frais d'imagination. Mieux vaut donc aller droit au but. Remarquons d'abord que l'idée du merveilleux, du fantastique, du surnaturel, est une notion métaphy- sique et se définit par ses contraires, par les concepts de réalité et de nature. Ce n'est du reste que reculer la difficulté d'un pas, car il n'y a pas de mots sur la définition desquels les philosophes soient moins d'ac- cord que sur ceux-là : Quoi capita, tôt sensus. Une discussion sur ce sujet fournirait la matière d'un délicieux dialogue philosophique. Interrogeons les spiritualistes duahstes, penseurs religieux, théosophes et mystiques ; que nous diront- ils ? — Le merveilleux existe. Il marque l'interven- tion du monde des esprits dans l'univers matériel. Il a présidé à la création du monde, agi à l'origine de chacune des phases de son évolution. Il s'est mani- festé, au cours de l'histoire humaine, dans les miracles accomplis par les fondateurs de religions : prophètes juifs, Jésus-Christ, Bouddha. Il est encore présent dans les prières exaucées, dans les extases, dans les guérisons de Lourdes, dans les merveilles des fakirs. — Mais non, dirait le panthéiste ; le merveilleux - 12 - n'est pas fragmentaire et discontinu. Il enveloppe et imprègne l'univers. Le Cosmos est un. Le surnaturel, c'est la nature tout entière, le vrai miracle, c'est la vie, c'est l'Etre. Le surnaturel et la nature se confon- dent comme la matière et l'esprit, dans l'unité mys- térieuse d'une seule substance, dont nous ne distin- guons que quelques attributs. — Billevesées ! s'écrieraient les positivistes. Le merveilleux n'existe pas ; le merveilleux c'est l'inex- pliqué. Le surnaturel n'est qu'une illusion de nos sens, le fruit d'une imagination morbide, l'indice d'une tare pathologique ou psychologique, le signe d'un détraquement de l'appareil nerveux ou d'une perturbation dans son fonctionnement. Et les sceptiques de sourire. — Que savons-nous ? Nous ignorons ce qu'est l'âme, ce qu'est le corps; leur existence même reste pour nous un problème ; comment connaîtrions-nous leurs rapports ? Le mer- veilleux, c'est l'inexplicable , et nos esprits imparfaits nous forceront toujours à vivre dans l'inexplicable. Le surnaturel existe-t-il objectivement? Peut-être... s'il y a une réalité objective... » A qui entendre ? Et quel parti choisir ? D'ailleurs, est-il bien nécessaire que nous choisissions? Pour peu que ces quatre races d'esprits soient également réparties dans l'espèce humaine, en nous inféodant à une secte nous allons fatalement nous ahéner les trois quarts de nos juges, les trois quarts de nos lec- teurs, les trois quarts de nos auteurs ; oui, nous allons exclure de notre recherche les trois quarts de sa ma- — 13 — tière légitime. La large sympathie n'est-elle pas la qualité essentielle du critique, et son premier devoir n'est-il pas de tout comprendre et de résoudre les contradictions en s'élevant au-dessus d'elles ? Essayons donc, et posons la définition suivante : Nous appellerons merveilleux, fantastiques et sur- naturels les phénomènes à la fois exceptionnels et inexpliqués, les faits réels ou les représentations illu- soires qui nous frappent par leur caractère de rareté et qui nous paraissent en contradiction avec l'en- semble des lois connues uploads/Geographie/ essai-sur-le-merveilleux-dans-la-litterature-francaise-depuis-1800.pdf
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- Publié le Nov 19, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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