Quand le spectacle frappe à la porte du spectateur. Étude esthétique et poétiqu

Quand le spectacle frappe à la porte du spectateur. Étude esthétique et poétique de la participation du spectateur dans Knock : Théâtre de ville de la troupe du Tenjô Sajiki Jean-Philippe MARTIN Sous la direction de Jean-Pierre GIRAUD Université Jean Moulin Lyon 3 Faculté des langues Mémoire de Master 2 mention LCE spécialité JAPONAIS Numéro d'étudiant : 3042176 Année universitaire 2008-2009 2 Figure 1 (Carte du spectacle remise aux spectateurs) Figure 2 (Ticket du spectacle : recto.) Figure 3 (Ticket du spectacle : verso) 3 Nos remerciements vont tout d'abord à Monsieur Jean-Pierre Giraud pour sa confiance et ses encouragements tout au long de ce travail. A Madame Bernadette Bost pour ses conseils et sa disponibilité, Nous remercions Olivier Malosse pour nous avoir initié à l'univers de Terayama, A Marie-Noëlle Beauvieux, Mizuho Nakajima, Catherine Branda pour leur soutien matériel et moral, 4 Ainsi qu'à Yeji. 5 Notes Liminaires -Les noms et termes japonais sont transcrits selon le système Hepburn révisé, les noms communs en italique. Le noms propres japonais sont dans l'ordre nom, prénom comme d'usage. -Notes sur la prononciation des termes japonais en transcription : ●Les « u » sont prononcés « ou » ●Les « e » sont prononcés « é » ●Les accents circonflexes indiquent un allongement de la voyelle. ●Tous les « h » sont aspirés. ●Les « j » sont prononcés « dj » ●Les « r » sont prononcés entre le « r » et le « l » français. ●Les doubles consonnes « tt » indique une suspension de la prononciation comme entre le « a » et le « t » de « atchoum ». ●Lorsqu'un nom comprend une apostrophe, comme « den'en » de « den'en ni shisu » cela indique qu'on lit d'abord le « den » et ensuite le « en ». ●Le « n » se prononce toujours comme dans « Yen ». ●Les noms japonais ne connaissant pas l'article, on ne verra jamais d'élision entre l'article et le mot qu'il détermine. -Les mots japonais sont généralement d'abord indiqués par leur prononciation (romaji) suivit des caractères japonais et de leur traduction française entre parenthèses. -Sauf indication contraire les traductions du japonais et de l'anglais sont de l'auteur. 6 Figure 4 (Photo de Terayama Shûji) 7 Sommaire Introduction......................................................................p.9 I. Proposition de nouveaux modèles...........................p.15 I.1. Bases théoriques d'une esthétique..................................................p.16 Rapide précis historique de l'évolution du théâtre au Japon Dadaïsme, surréalisme et autres influences esthétiques marquantes Terayama magicien I.2. Quelques caractéristiques du théâtre détournées...........................p.28 Le texte L'acteur Le metteur en scène Spectacle éclaté, spectacle total II. Vers une participation du spectateur......................p.44 II.1. Le travail du spectateur de théâtre................................................p.45 II.2. De nouveaux outils d'analyse pour une approche de Knock........p.54 Théorie de la performance Postdramatique Une œuvre ouverte ? II.3. Poétique de la réception dans Knock............................................p.61 Immixtion dans l'intimité du spectateur Aliénation des repères et changements de points de vue 8 Introduction “19 avril, 13h. entrée est de la gare de Shinjuku, devant Nikô près du pont de fer à l’intérieur de l’agence immobilière “Sankei”. Un homme échangeant des cartes est assis à une table, sur une chaise empruntée là. Il a un chapeau mou de couleur noire, un bandeau de pirate sur l'œil et un attaché-case sur les genoux. Cet homme est l’échangeur de carte.” 9 C'est avec ce passage obligé pour tous les spectateurs que commencera shigai-geki nokku (Knock: Théâtre de ville)1, spectacle qui fera de la mégalopole Tokyoïte une gigantesque aire de jeu pour la troupe du (Tenjô Sajiki) de Terayama Shûji. Il est pourtant important de clarifier très vite une situation sinon inextricable. Nous ferons dans ce mémoire maintes fois référence à l'œuvre de Terayama Shûji, alors qu'il ne s'agit pas à première vue de son spectacle. Terayama est pourtant la figure la plus célèbre parmi celles représentées au sein des nombreux participants à l'événement, mais ce n'est pas sous ce nom que nous est parvenu cette œuvre. Le maître à bord de ce projet a semble-t-il été 幻一馬Maboroshi Kazuma, chef de file d'un temps, dont le nom est associé à la kôsei 構成 (composition) et enshutsu 演出 (mise en scène) de Knock. De toute façon, qu'il s'agisse de la manière dont le titre principal nous est parvenu ou du créateur du Tenjô Sajiki, l'influence de Terayama sur sa propre troupe ne pourrait être niée. Nous verrons qu'il existe quelques différences, pourtant, avec les thèmes récurrents de la plupart de ses propres œuvres. Il est vrai qu'il ne semble pas s'être soucié de l'organisation de ce travail collectif, mais qu'il y a surtout participé comme un auteur, metteur en scène parmi d'autres. Cela nous donne en fait une occasion de parler de l'organisation de cette troupe. Selon les dires de Catherine Muller2, l'organisation semblait être assez lâche pour que de nouvelles têtes s'invitent à l'occasion d'un projet, ne restant d'ordinaire que pour ce seul projet. De plus, nous savons que le recrutement des acteurs se faisait surtout par les envies esthétiques de Terayama. Il demandait ainsi aux membres du Tenjô Sajiki de cultiver leur différence, leurs particularités physiques, même disgracieuses. Ce nom de troupe fait bien sûr référence au film « Les enfants du paradis » de 1 Nous abrégerons le plus souvent ce titre en Knock 2 Nous utiliserons beaucoup dans ce mémoire le travail de Catherine Muller, Entre mythe et modernité : l'acteur dans le théâtre de Shûji Terayama, Paris III, Mémoire de DEA Études théâtrales, 1997. Un excellent travail qui a, de surcroît, le mérite de témoigner d'une expérience de vie de la troupe sans commune mesure pour une étrangère, étant resté 3 ans avec celle-ci en tant qu'actrice. 10 Marcel Carné, faisant finalement autant référence aux spectateurs populaires du poulailler, « le public préféré de Prévert, celui qui réagit, celui qui participe »1 qu'aux envies, on le voit déjà orientées, projetées dans ce médium. Le film Buraikan 無頼漢 (Hors-la-loi)2 dont il écrit le scénario n'est ainsi pas sans rappeler le film de Carné, tout en lui ajoutant quelques thèmes récurrents à l'œuvre de Terayama tel que son rapport conflictuel à la mère. Il nous semble qu'il y expose d'ailleurs maintes idées sur sa conception du théâtre. Nous le voyons, l'œuvre de Terayama est protéiforme. Car en plus d'être scénariste, auteur et metteur en scène, Terayama est récompensé à Arles pour son travail photographique, est auteur de pièces radiophoniques, se fait connaître très tôt grâce à ses talents pour la poésie, recevant en 1954, le prix Poésie nouvelle du magazine Tanka kenkyû (Recherche sur les tanka)3. On retrouve d'ailleurs une place toujours aménagée pour la poésie dans un grand nombre de ses œuvres cinématographiques comme Den'en ni shisu 田園に死 す (Cache-cache pastoral). Nous l'avons déjà dit Terayama se sert souvent des mêmes thèmes dans son oeuvre, réexploités sous diverses formes. Parmi ceux-ci on notera un très profond intérêt pour la révolte de la jeunesse, une réflexion conflictuelle à la mère et donc aux femmes en général, la construction d'un passé ésotérique constitué d'anciennes croyances et d'anciens rites japonais provenant pour la plupart des paysages lyriques de son enfance à Aomori. C'est dans cette région que le petit Terayama grandit. Victime indirecte de la guerre, son père y survit, mais meurt de dysenterie un mois après la reddition. Il est abandonné par sa mère qui part travailler dans une base militaire américaine et recueilli par un parent éloigné qui tient un cinéma à Misawa, autre ville de la préfecture de Aomori, il dévorera le cinéma surtout 1 Carole Aurouet, Jacques Prévert, portrait d'une vie, Paris, Ramsay, 2007 2 Réal. 篠田正浩 Shinoda Masahiro, 1970 3 短歌 forme de poésie japonaise courte composée de cinq vers de 5,7,5,7,7 mores. 11 américain de cette époque. Il ne semble pas nécessaire d'insister sur la forme traumatique prise par cet abandon tant elle paraît claire. En 1954, il est reçu dans la prestigieuse université de Waseda à Tôkyô, mais une violente néphrite le condamne à rester à l'hôpital pendant trois ans, temps qu'il emploiera surtout à lire, écrire et qui le conditionnera peut-être à se révolter et à profiter pleinement de sa sortie comme en témoigne le titre d'une de ses œuvres les plus précoces Sho wo suteyo, machi he deyô 書を捨てよ、町へ出よう (Jetons les livres et sortons dans la rue). Il est vrai qu'à partir de cette libération et même s'il sera en fait malade toute sa vie, son envie de vivre et de créer n'en sera que démultipliée. Le spectacle que nous étudions ici semble être d'ailleurs encore doté de cette même rage, de cette envie de vivre qui caractérise le titre cité plus haut, avec de plus une envie de prendre en compte la ville et ses habitants, de frapper à leur porte et de s'inviter dans leur vie. Ce n'est pourtant qu'en 1967 que Terayama crée sa troupe.1 Ayant découvert Le théâtre et son double un peu plus tôt, le recueil d'essais d'Artaud n'ayant paru en japonais qu'en 1966. Il n'y pas de contradiction dans le fait que la première pièce dont il est l'auteur date de 1960 uploads/Geographie/ etude-esthetique-et-poetique-de-la-participation-du-spectateur-dans-knock-theatre-de-ville-de-la-troupe-du-tenjo-sajiki.pdf

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