Mathieu Tomé Examen final – Philosophie des relations internationales : Jean- J

Mathieu Tomé Examen final – Philosophie des relations internationales : Jean- Jacques Rousseau et Hannah Arendt face à la crise migratoire à la frontière euro-biélorusse Philosophie. Arendt et Rousseau pour comprendre la crise migratoire à la frontière euro-biélorusse EUROPE > BIELORUSSIE > COURRIER INTERNATIONAL – PARIS Publié le 20/11/2021 – 16:45 Depuis une semaine maintenant, environ 4 000 migrants stationnent à la frontière polo- biélorusse. Ces derniers sont principalement des kurdes irakiens et tout porte à croire qu’ils sont utilisés par le Président biélorusse Alexandr Loukachenko dans le but de faire pression sur la frontière euro-biélorusse en réponse aux sanctions financières de l’Union européenne (UE) pour dans le même temps déstabiliser cette dernière. Toutefois, ni la Biélorussie ni les Etats membres de l’UE ne semblent prompts à trouver une solution permettant l’accueil de ces migrants et se renvoient la balle quant à celui-ci. L’Union a d’ores et déjà annoncé prendre des mesures de rétorsion financière pour punir l’initiative du Président Loukachenko là où ce dernier campe sur ses positions profitant de la situation pour s’affirmer stratégiquement en Europe de l’Est. Au-delà de ces considérations géopolitiques, les questions de la frontière de manière générale et de l’accueil des étrangers en situation précaire sont primordiales pour la compréhension des enjeux de la crise migratoire à la frontière euro- biélorusse. Pour ce faire, relire Jean-Jacques Rousseau et Hannah Arendt est vivement conseillé et c’est pour cela que la rédaction du Courrier a pris la décision de le faire. Eclairages d’une situation de relations internationales au regard des lumières – sans jeu de mot douteux – de Rousseau et d’Arendt. Hannah Arendt a été l’une des premières à défendre de façon prononcée les droits des apatrides ou du moins des « sans pays » et à militer en faveur de leur accueil sans distinction étatique. Sa vision des relations internationales se veut alors exclusivement centrée sur les droits humains sans prise en compte véritable des relations géostratégiques et des interactions interétatiques. C’est d’une certaine manière sa vision qui a triomphé au XXème siècle puisque nombre de conventions et de traités internationaux ont consacré le droit à l’existence des migrants fuyant leur pays en dehors de toute considération géopolitique. La Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés ou de façon plus concrète et plus récente le droit européen par l’intermédiaire notamment de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) attestent de cette volonté de faire primer les droits humains sur les droits des Etats. Cela n’empêche tout de même pas le fait que les migrants à la frontière polo-biélorusse semblent ne pas bénéficier de ces engagements internationaux et le propos d’Arendt semble donc toujours d’actualité. D’actualité car, justement, la justification au non accueil de ces migrants en Pologne notamment, mais cela est valable pour l’intégralité des Etats de l’UE – étant donné que l’Union prétend avoir la volonté de traiter les question migratoires à échelle européenne et non à celle des simples Etats –, repose sur le respect de la notion d’Etat-Nation qui voudrait que l’arrivée de ces migrants aille à l’encontre de ses principes puisque leur venue impliquerait la présence d’étrangers, de surcroit clandestins, sur le territoire national. Elle oppose ainsi Etat-Nation protecteur des nationaux et garant d’une certaine préférence nationale – même si la notion n’était pas encore popularisée à son époque – pouvant aller jusqu’à rejeter l’étranger et Etat de droit s’axant autour de la défense des droits et libertés individuels – même si, de nos jours, l’Etat de droit concerne plutôt les problématiques juridiques liées à la hiérarchie des normes et, effectivement, certaines libertés individuelles et collectives. Jean-Jacques Rousseau porte quant à lui une position plus équilibrée car, tout en se positionnant dans une stratégie d’accueil des migrants, il ne rejette pas le cadre national en lui-même en sanctuarisant le rôle de l’Etat et de la communauté nationale. Dans le livre premier de L’Emile, Rousseau rejette en effet ce qui était qualifié au siècle des Lumières de « cosmopolitisme » et qui est un concept qui ne retrouve pas totalement son équivalence aujourd’hui mais que l’on pourrait plus ou moins rapprocher du mondialisme. Dans cette logique, l’on pourrait croire que Rousseau pourrait être un alibi au non-accueil des migrants actuellement à la frontière euro-biélorusse par des gouvernements comme celui de la Pologne par exemple mais Rousseau se veut également le défenseur de l’hospitalité envers les étrangers. Dans ses Rêveries du Promeneur solitaire, il affirme en effet qu’« il faut s’empresser de secourir ceux qui en ont besoin mais dans le commerce de la vie laissons la bienveillance naturelle et l’urbanité faire chacune leur œuvre sans que jamais rien de vénal et de mercantile ose approcher d’une si pure source pour la corrompre ou l’altérer ». Aider un autre humain nécessiteux est l’une des valeurs cardinales de la transmission chez Jean- Jacques Rousseau qui, tout en dénonçant les volontés de généralisation d’un genre humain voulant gommer ses différences et ses cultures propres, s’inscrirait dans une logique d’accueil des migrants à la frontière polo-biélorusse. Rousseau transmet l’idée que la réalité et l’importance des cadres national et patriotique n’empêche pas pour autant la mise en place et le développement du concept d’hospitalité. Les Etats membres de l’UE ne peuvent donc potentiellement utiliser la pensée de Jean-Jacques Rousseau pour justifier leur non-hospitalité vis-à-vis des migrants bloqués à la frontière euro-biélorusse, tout comme il peut être considéré déshonorant pour la Biélorussie au sens de Rousseau de les utiliser comme de vulgaires moyens de pression. Hannah Arendt et Jean-Jacques Rousseau apportent bien des clés à la compréhension de la crise migratoire à la frontière euro-biélorusse par le prisme de questionnements sur la pertinence de l’échelle nationale et de l’accueil des migrants en danger. Là où Arendt est totalement critique de l’Etat-Nation qu’elle perçoit comme un obstacle à l’Etat de droit, Rousseau se veut plus fidèle aux valeurs de nationalité et de patriotisme qui sont selon lui le ciment de valeurs communes et d’un avenir commun et qui serait donc possiblement plus en phase avec les arguments utilisés des côtés européen et biélorusse justifiant le non-accueil des migrants bloqués à la frontière. Toutefois, concernant l’accueil migratoire, aussi bien Rousseau avec son concept d’hospitalité qu’Arendt avec sa défense acharnée des « sans pays » sont favorables à un certain « sauvetage humanitaire » qui consiste en l’accueil inconditionnel des migrants en situation précaire. En somme, malgré des divergences sur la problématique de la Nation, Rousseau et Arendt auraient donné une leçon d’humanisme à la Biélorussie et aux Etats membres de l’UE. Mathieu Tomé uploads/Geographie/ examen-final-rousseau-et-arendt-mathieu-tome.pdf

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