35 N o v e m b r e 2 0 0 4 L ’ i m p a c t d e s i n v e s t i s s e m e n t s
35 N o v e m b r e 2 0 0 4 L ’ i m p a c t d e s i n v e s t i s s e m e n t s d i r e c t s é t r a n g e r s ( I D E ) Les IDE n’ont cessé d’augmenter depuis le début de la transition des pays d’Europe centrale et orientale vers l’économie de marché. La dynamisation des éco- nomies par l’investissement étran- ger s’observe à trois niveaux : un rattrapage de la productivité dans les PECO, une spécialisation des économies qui reflètent sectoriel- lement ces flux d’IDE et une géo- graphie économique de l’industrie européenne qui se transforme en un jeu mutuellement bénéfique. Reste à se demander si les flux vont se poursuivre et recenser les obstacles que ces pays auront à surmonter pour assurer leur pérennité. par Olivier Louis Chef de la mission économique Elargissement et par Yann Lepape Economiste régional Elargissement de l’UE (1) E n près de quinze ans, les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) ont attiré un flux impor- tant d’investissements directs étrangers (IDE), au point de dépasser, en stock par habitant, le niveau de la plupart des pays émergents. L’attractivité de ce groupe de pays, dont il faut souligner la diversité, résulte sans doute principalement de la perspective de l’adhésion à l’Union européenne, aujourd’hui effective pour huit d’entre eux. Pour les inves- tisseurs, celle-ci garantissait le libre accès de leurs productions sur le mar- ché communautaire, un cadre juri- dique qui se rapprochait progres- sivement du cadre européen grâce à la reprise de l’acquis communautaire et une convergence progressive vers les niveaux de développement des pays de l’Europe à 15. En outre, ces pays disposent de nombreux atouts : une main-d’œuvre éduquée et encore peu coûteuse, leur proximité géogra- phique avec l’Europe développée, le dynamisme de leur consommation sti- mulée par la croissance du revenu des ménages et les prémices d’une spécia- lisation sectorielle en cours de déve- loppement (automobile, pharmacie, textiles et ameublement). De ce fait, les IDE n’ont cessé d’augmenter depuis le début de la transition de ces pays vers l’économie de marché et ont joué un rôle essentiel dans la restruc- turation de leur économie. Reste à se demander si les flux vont se pour- suivre et recenser les obstacles que ces pays auront à surmonter pour assurer leur pérennité. L’essor des IDE au cours de la transition vers l’économie de marché Chaque pays de la région a suivi un rythme propre, au fur et à mesure de son avancement dans la transition insti- Les IDE, un facteur crucial de l’insertion des pays d’Europe centrale et orientale dans l’économie européenne Stock 2002 Flux 2003 M USD /Hab /PIB Me BU 3 889 497 25,0 1 270 CZ 38 450 3 766 64,3 2 747 EST 4 226 3 121 65,9 142 HU 24 416 2 410 38,2 -102 LET 2 723 1 171 32,4 373 LIT 3 981 1 150 28,9 524 POL 45 150 1 182 24,0 4 722 ROU 8 786 406 20,5 1300 SLK 10 225 1 900 43,2 720 SLV 5 074 2 542 23,1 2 048 CHIN 447 892 351 36,2 MEX 154 003 1 495 24,2 TABLEAU I Stock d’lDE entrants dans les PECO (+Chine et Mexique), en M USD, par habitant et en % du PIB et flux 2003 (M €) (1) Olivier Louis est chef de la Mission économique régionale pour l’élargissement à Varsovie et Yann Lepape économiste régional dans cette même unité relevant du service international unifié (DREE et Trésor) du MINEFI. Les opinions exprimées ici n’en- gagent que les auteurs, qui tiennent à remercier Marc Lantéri pour ses contributions régulières sur le sujet ainsi que sa relecture attentive du présent article. D’autres analyses détaillées sur l’Elargissement sont disponibles sur www.dree.org/elargissement. 36 A n n a l e s d e s M i n e s tutionnelle et économique. De façon assez naturelle, les entreprises installées en Allemagne sont les premiers investis- seurs dans la région qui, pour elles, constitue un véritable Hinterland indus- triel (2). Fin 2003, les stocks d’IDE en Europe centrale et orientale étaient estimés à environ 160 Mrds USD, soit un montant de 1500 USD par habitant. En près de 15 ans de transition, les PECO, dans leur ensemble, ont donc rattrapé le niveau des autres zones émergentes. Le tableau I ci-après est néanmoins diffé- rencié selon les pays. En masse, la Pologne (50 Mrds USD), la République tchèque (41 Mrds USD) et la Hongrie (24 Mrds USD) ont attiré plus de 70 % du total. En IDE par habi- tant, trois groupes de pays peuvent être distingués : un premier comprend la République tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Slovénie, la Slovaquie ainsi que les deux pays méditerranéens qui ont été les grands gagnants dans l’accueil en IDE ; le second groupe, avec un niveau autour de la moyenne régionale, inclut la Pologne, la Lettonie et la Lituanie ; et le troisième est constitué de la Roumanie et de la Bulgarie, pays disposant d’un fort potentiel de rattrapage, qui est en train de s’amorcer. Au sein des pays, on observe de fortes disparités. Les investissements se concentrent dans les capitales, avec un effet « sièges sociaux et services asso- ciés » notamment, le long des grand axes européens de transports ou dans les régions frontalières avec des régions riches de l’ex -Union à 15 (la frontière germano-polonaise peut ici être oppo- sée à celle entre l’Autriche et la Hongrie ou le sud-ouest tchèque et la Bavière). L’instauration d’un cadre juridique stable ainsi que l’implémentation de l’acquis communautaire dans la pers- pective de l’adhésion à l’Union euro- péenne ont constitué, en amont, des éléments décisifs de l’attractivité des PECO. On observe, en effet, une rela- tion positive assez nette entre, d’une part, les indicateurs de transition de la BERD et, d’autre part, le stock d’IDE/PIB. On estime que les privatisations ont représenté 40 % environ des flux d’IDE entrants, les grandes privatisations expliquant la variabilité des flux d’une année sur l’autre : en 2002, année record, ils se sont élevés à 22 Mrds €, contre 8 Mrds € estimés l’an dernier. Pour 2004, le consensus se situe autour d’un flux de 12 Mrds € d’IDE entrants. En 2002, en Slovénie, le rachat de LEK (produits pharma- ceutiques) par Novartis pour 900 M € a, par exemple, doublé le flux 2002. Cette même année, la privatisation de SPP (gazier slo- vaque) au profit du consortium GdF-RuhrGas-Gazprom a rapporté 2,7 Mrds USD à l’Etat, soit plus de 60 % des investissements directs étrangers entrants totaux ; en République tchèque, l’allemand RWE a fini de payer la facture de Transgas (4,1 Mrds USD). En Pologne, en 2000, la vente d’un peu moins de 50 % de l’opé- rateur télécom national TPSA à France Telecom pour un montant de 4 Mrds USD a fait monter les IDE à 10 Mrds USD cette année-là. Les facteurs d’attractivité se situent du côté de la demande comme de l’offre : ces pays constituent de nouveaux mar- chés mais constituent également de nouveaux concurrents. Les premiers sont en général à envisager dans une perspective de moyen terme alors que les seconds paraissent plus immédiats. Dans le choix d’une localisation, chaque entrepreneur doit établir un bilan entre des économies (coût direct de la main-d’œuvre essentiellement) et des coûts induits (logistique, investisse- ments initiaux, mais aussi éloignement de ses réseaux de fournisseurs et d’in- formations). Avec le rattrapage économique, la demande dans les PECO croît rapide- ment en quantité et se diversifie (verticalement et horizontalement). En masse, ces mar- chés restent margi- naux à l’échelle européenne : les 75 millions d’individus qui viennent d’entrer dans l’Union (17 % de la popu- lation de l’UE 25) représentaient fin 2003 un PIB de 435 Mrds € environ, soit 4,7 % du PIB de l’UE 25, mais 9,5 % cependant en SPA (standard de pouvoir d’achat). A terme donc, les taux d’équipement d’automobiles, d’ordina- teurs ou de lave-vaisselle, convergeront vers les niveaux moyens de l’Union d’une part, et la demande montera en gamme, d’autre part. Si l’on prend l’exemple de l’automobile, les immatri- culations de voitures neuves d’entrée de gamme représentent plus de 50 % du total en Slovénie contre 25 % en Espagne, l’écart de PIB/habitant par rap- Coût horaire 2002 Pté apparente du travail €* UE15=100 e/Emploi** UE15=100 BU 1,4 6 5,5 10 CZ 4,9 20 14,9 27 EST 3,7 15 11,7 22 HU 5,0 21 17,8 33 LET 2,6 11 9,1 17 LIT 3,1 13 10,6 19 POL 5,2 21 14,7 27 ROU 1,8 7 6,2 11 SLK 3,4 14 11,1 20 SLV 10,5 43 28,6 52 UE15 24,4 100 54,6 100 TABLEAU II Coût horaire de la main d’œuvre (€ et UE15=100) et productivité apparente du travail (€/employé et UE15=100) Le déclin démographique des PECO - la Hongrie ou la République tchèque pourraient perdre 1,4 M d’individus en âge de uploads/Geographie/ ide35-40.pdf
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