J. F. de Almeida Prado Les relations de Bahia (Brésil) avec le Dahomey In: Revu
J. F. de Almeida Prado Les relations de Bahia (Brésil) avec le Dahomey In: Revue d'histoire des colonies, tome 41, n°143, deuxième trimestre 1954. pp. 167-226. Citer ce document / Cite this document : de Almeida Prado J. F. Les relations de Bahia (Brésil) avec le Dahomey. In: Revue d'histoire des colonies, tome 41, n°143, deuxième trimestre 1954. pp. 167-226. doi : 10.3406/outre.1954.1209 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/outre_0399-1385_1954_num_41_143_1209 42e Annék 1954 REVUE D'HISTOIRE DES COLONIES LES RELATIONS DE BAHIA (BRÉSIL) AVEC LE DAHOMEY1 L'antique Ardra, connue aujourd'hui sous le nom de fut une des premières régions de l'Afrique noire à être explorée par les Portugais. Située non loin de l'antique forteresse de Mina, elle commençait ce demi-cercle de côtes, qui allait devenir un des centres les plus importants de l'ecslavage moderne. Toute une série de facteurs, géographique, politique, s'accumulaient pour faire de cette partie une inépuisable réserve de main d'oeuvre pour la jeune américaine, qui en avait un besoin urgent. Des nations entières, — pourquoi ne pas dire des continents ? — dépendaient du nombre des captifs qui en partiraient pour abattre les forêts, sarcler la terre, semer, planter, fouiller le sable aurifère et le gravier, où se cachent les diamants. Nina Rodrigues a bien vu l'importance du Dahomey pour l'histoire de Bahia. Son livre, Les Africains au Brésil, que nous nous félicitons d'avoir édité, en est la preuve. On y trouve la curieuse dynastie des Chachas d'Ajuda, dont nous allons nous occuper dans ce travail, en tant qu'intermédiaire dans le trafic négrier. Cette dynastie y a joué un rôle important au moment de sa plus grande extension. Malheureusement les 1. Revue de V Institut Historique et Géographique Brésilien, Rio, 1950. Traduction de Roger Bastide. REVUE D'HISTOIRE DES COLONIES 11 — 168 — informations de Nina Rodrigues restent lacunaires et sont de seconde main (il cite des auteurs, qui en répètent d'autres, sans vérifier ses sources), ce qui fait que nous nous disposions à ajouter quelques notes au texte, lorsque des interventions intempestives nous empêchèrent de mettre notre projet à exécution. Reprenant aujourd'hui le travail au point où nous l'avions laissé il y a 14 ans, nous voulons profiter de la Commémoration du IVe Centenaire de Bahia pour publier les notes que nous avions alors préparées, dans l'espoir qu'elles seront utiles à ceux qui s'intéressent au sujet. Après avoir résumé quelques informations, que j'ai déjà utilisées dans le 1er volume de mon Pernambuco et les Capitaineries du Nord, nous allons suivre pas à pas l'histoire du trafic négrier au Dahomey, initié un peu avant la guerre contre les Hollandais (pour n'envoyer au Brésil que quelques rares esclaves), s'interrompant ensuite à plusieurs reprises, s'intensifiant au xvme siècle, rivalisant à cette époque avec le trafic d'Angola et du Congo (qui forme le second de mon Histoire de V Esclavage au Brésil), et continuant jusqu'au décret de la princesse-régente Isabelle, du 13 mai 1888, qui marque la fin de ce trafic. Dans la traite de la côte de Guinée, le rôle principal revint au royaume de Savi, ou Chavi, appelé aussi Ajuda, que les indigènes prononçaient Houéda (avec un H aspiré), du nom de leur tribu dominante. Ce royaume, point stratégique par ses relations avec l'intérieur, constituait le débouché de toute une région, qui prendra le nom de Dahomey après l'invasion des Ardra. La légende nous explique l'origine de ce nom par d'un chef ardréen du nom de Dan, qui accueillait au xvne siècle^ de nombreux Fon, descendants d'un ancien roi Ardra. Comme ces individus ne se montraient jamais contents de leur sort, il eut le malheur de leur demander s'ils ne voudraient pas s'établir sur son ventre. Exécutant alors ce que Dan avait eu l'imprudence de suggérer, le chef Ouebadja le tua, l'enterra et bâtit sa maison sur le cadavre de son hôte : de là la du site, ventre de Dan, ou Dahomey. La dynastie souveraine ainsi fondée, les successeurs connus de cet usurpateur furent : Tacou-Donou, qui régna environ de 1625 à 1650 ; Ouebadja, de 1650 à 1680 ; Acaba, de 1680 à 1708 ; Agadja, de 1708 à 1728 ; Tegbessou, de 1728 à 1760; Adanou- — 169 — zan I, de 1760 à 1774 ; Pengla, de 1774 à 1789 ; Agonglô, de 1789 à 1797 ; Adanouzan II, de 1797 à 1818 ; Guezô, de 1818 à 1858 ; Glêle, de 1858 à 1889 ; Gbehanzin, de 1889 à 1894 et Agoli-Agbô, de 1894 à 1898, le dernier roi avant l'occupation française 1. Les seuls contacts qu'ils eurent avec les Européens furent d'ordre commercial et se bornèrent à la vente des esclaves. Il est vrai que celle-ci, à elle seule, en valait bien d'autres réunies, provoquant l'apparition successivement de factoreries anglaises, françaises, hollandaises, brandebour- geoises, espagnoles, portugaises sur la côte de Guinée. Quelques- unes s'établirent dans la capitale, Savi ; d'autres préférèrent Ajuda, Lagos, Porto-Novo, Badagri, les Popos, soit isolées, soit accouplées, soit enfin trois par trois, mais toujours luttant contre le manque de ports naturels, sur un rivage de sables mouvants. Les deux courants marins qui se croisent dans le golfe de Guinée (l'un, superficiel, venant des Antilles ; l'autre, plus profond, qui monte de la Patagonie, longe le Brésil et dessine finalement une espèce de point d'interrogation sur la Côte dite des Esclaves) comme les vents qui soufflent en tempêtes, d'avril à juin, modifient fréquemment la configuration du littoral et rendent difficiles les conditions du débarquement. Un auteur ancien en décrit les péripéties. Il nous montre les navires obligés de faire ancre à trois lieues du ressac, se posant sur « le banc de sable qui court le long de la côte... que Von passe en canots avec des rameurs professionnels de V endroit ; avant V assaut, ils comptent trois vagues qui déferlent Vune après Vautre et vont se briser sur V arrête du sable ; immédiatement après, ils profitent d'un bref moment de repos pour ramer à toutes forces, avant que ne surgissent trois autres vagues qui, en se brisant sur le banc, risqueraient de faire chavirer V embarcation, ce qui serait dangereux dans cette mer infectée de requins voraces, dont il est difficile d'échapper, surtout les blancs, pour la chair desquels ils montrent une grande dilection ». Un paysage désolé se découvrait ensuite, certainement peu susceptible d'éveiller la cupidité européenne, paysage caractéristique du littoral de la Guinée, plat, sablonneux, pointillé de bouquets d'arbres 1. Andanouzan, ou Andanouzan, étaient plutôt des titres de souverains que des noms propres. De là, la confusion avec des noms de rois du qui doivent être beaucoup plus nombreux que dans la liste ci-dessus. — 170 — rabougris au milieu de lagunes, d'un aspect peu agréable, sous un climat fiévreux, que seul l'indigène peut supporter. Les Portugais débarquèrent dans cette zone agreste au xive et xve siècles à la recherche de l'or, qui ne donna pas grand chose, et des esclaves, qui rendirent beaucoup plus. Cependant, l'exploitation commerciale de la région par les blancs ne devint régulière qu'à partir de 1050, date à laquelle l'anglais Wiburne, de la Royal Ajricaii Society, fonda, sous le nom de fort William, une factorerie à Savi, dans la partie la plus fertile du pays, près de la cour de Ouebadja. Les Français et les Prussiens marchèrent sur ses traces dans la seconde moitié du xvne siècle et les Portugais, seulement à la lin. Avec le temps, ces entrepôts se transformèrent en réduits fortifiés au centre d'un « sarame », c'est-à-dire d'une agglomération de huttes et de jardins, entourés d'une muraille de terre, sur le modèle du fort britannique. Le fort français daterait de 167.1 ; il avait été bâti aux frais de la Compagnie des Indes Orientales^ mais il ne dura pas longtemps. 11 en fut de même pour le fort brandebourgeois, bien que les Prussiens aient élevé une digue importante à Ajuda en 1680, et qu'ils aient vendu d'autres factoreries aux Hollandais sur d'autres points de la cote. Le fort portugais date de la même année : construit, sur l'ordre de D. Pedro II, près du village de Gregré, il dépendait de la Compagnie de Cachou et Cap Vert. 11 se résumait en un groupe de petites maisons à la mode du pays, où les acheteurs d'esclaves s'abritaient momentanément. Quand, au début du xvme siècle, le volume des affaires on éleva les murs du fort pour abriter la marchandise, qui devait servir au trafic. A l'époque, les Portugais craignaient que l'excès des stocks fit baisser abusivement le prix des captifs. On limita donc le nombre des navires à 24 et ils devaient attendre l'époque des moussons trimestrielles. Un règlement de 1725 compléta ces dispositions, limitant le nombre de rouleaux de tabac en corde nécessaires au troc à 3.000, de deux arrobes et demi chacun, pour chaque charge de navire. Le trafic, devait passer par d'innombrables vicissitudes avant la formation des Grandes Compagnies de Pombal. Les luttes contre les Hollandais, en particulier, lui portèrent préjudice ; quand ces derniers s'emparèrent d'Angola, les gens de Bahia se retournèrent vers Mina ; mais lorsque cette ville fut uploads/Geographie/ j-f-de-almeida-prado-les-relations-de-bahia-bresil-avec-le-dahomey-1954.pdf
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- Publié le Jul 13, 2021
- Catégorie Geography / Geogra...
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