3,00 € Première édition. No 11994 Samedi 28 et Dimanche 29 Décembre 2019 www.li

3,00 € Première édition. No 11994 Samedi 28 et Dimanche 29 Décembre 2019 www.liberation.fr IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCE Allemagne 3,70 €, Andorre 3,70 €, Autriche 4,20 €, Belgique 3,00 €, Canada 6,70 $, Danemark 42 Kr, DOM 3,80 €, Espagne 3,70 €, Etats-Unis 7,50 $, Finlande 4,00 €, Grande-Bretagne 3,00 £, Grèce 4,00 €, Irlande 3,80 €, Israël 35 ILS, Italie 3,70 €, Luxembourg 3,00 €, Maroc 33 Dh, Norvège 45 Kr, Pays-Bas 3,70 €, Portugal (cont.) 4,00 €, Slovénie 4,10 €, Suède 40 Kr, Suisse 4,70 FS, TOM 600 CFP, Tunisie 8,00 DT, Zone CFA 3 200 CFA. Cahier d’actu n La «drôle de guerre» des retraites n Des jeux de société féministes n L’huître de la baie du Mont-saint-Michel 24 pages centrales Manifestation contre la réforme des retraites à Paris, le 17 décembre Photo Corentin Fohlen UN AN D’ÉVÉNEMENTS EN 24 PAGES Edouard Philippe à Matignon, le 25 novembre. Photo jacques witt. REA Samedi 28 et dimanche 29 décembre 2019 Crise sociale la vacance de Monsieur philippe Alors que la grève contre la réforme des retraites ne connaît pas de trêve pendant les fêtes, le gouvernement est aux abonnés absents. PAGES 2-3 2 u Libération Samedi 28 et Dimanche 29 Décembre 2019 Rétro 2019 éditorial éditorial Par Luc Le Vaillant son reflet dans l’eau trouble où scintillent les émergentes «sardines», mouvement ­ de dépassement des clivages anciens, qu’il équeuterait bien d’un coup de patte, comme il l’a fait pour les Cinq Etoiles de Grillo. Côté Moyen-Orient, les ren- versements sont plus san- glants. Le Turc Erdogan en re- montre au Syrien Al-Assad, question cynisme tranchant. L’autoritaire musulman tru- cide les Kurdes que Trump a abandonnés, charmante fa- çon de les remercier de leurs bons et loyaux services dans la lutte contre l’Etat islami- que. Se sentant foireux, le shé- rif américain a compensé vite fait, avant de se carapater, en faisant tuer le calife de l’EI, Al-Baghdadi. En Algérie aussi, l’incertitude règne. La rue a démantibulé pacifiquement le subclaquant Bouteflika, sans pour autant se débarrasser de son clan, ni des généraux. Pour ce qui est du siphonnage des chefferies, l’Amérique du Sud est la reine des gargouilles aspirantes. Là plus qu’ailleurs, la rue n’est plus forcément un lieu réservé à la gauche. Comme les palais et leurs ­ marquent des points, canicule de juillet aidant. En décembre, à l’heure du bas- culement dans une nouvelle décennie, la France vieillis- sante est «dans» la rue pour sa retraite, en une bataille assez classique entre le libéralisme anticolbertiste et le social des avantages acquis. Plus pertur- bant, le pays est particulière- ment «à» la rue dans son rap- port au climat (très ou trop chaud ?), à la nourriture (bon vivant pompette ou absti- nent ?), à la séduction (Tinder ou #MeToo ?), à la consomma- tion (drones Amazon ou jardi- niers locavores ?), à l’expres- sion (free speech ou politiquement correct ?). ­ Toutes ces querelles sont de plus en plus agressives, même s’il ne faut pas mésestimer la part de posture. Et cela fait que les gilets jaunes se laissent déborder par les black blocs et les débatteurs gourmés par les twittos hystéros. Chacun cher- che à annihiler son tourmen- teur, à disqualifier son cou­ - pable, à fracasser son détesté. Conséquence de la séquence, le cher et vieux pays de De Gaulle approche du point de ru(e) pture. Sans qu’on puisse savoir si la carriole ca- hotante, pavoisée de tricolore, continuera son cahin-caha de fier-à-bras gaulois et réfrac- taire ou si le véhicule propre et décarboné conduira à l’écha- faud reconverti en chaise élec- trique drapée de bleu-blanc- rouge les autorités variées qui n’en exercent plus beaucoup. Il est d’ailleurs tout à fait envi- sageable que les deux hypo- thèses coexistent, tant la délé- gation n’est plus de saison et tant le participatif s’impose via les groupes WhatsApp, les pétitions en ligne ou ­ les cagnottes salvatrices. A l’étranger, question lisibilité des augures, on n’est pas plus avancé. Ça grince et ça grogne, ça avance et ça régresse à la fois. Les illibéraux font leur miel de l’angoisse ambiante, même s’ils se font souvent ­ claquer le beignet. Moqué pour son incompétence sup- posée et détesté pour ses in- conséquences isolationnistes, Trump survit et sadise la pla- nète. Il pourrait même glaner une incroyable réélection. Johnson l’ébouriffé a mis en plis la réaffirmation conserva- trice du désir british d’en finir avec l’Europe. Lassée et ­ contrariée, l’UE, elle, devrait se souvenir qu’il ne sert à rien de baffer la souveraineté po- pulaire, sauf à se voir souffle- ter en retour par des bulletins de vote entêtés. En Italie, ­ Salvini a manqué son putsch. Mais le Raminagrobis caresse 2019 a été une année profuse et confuse, réactive et rebelle, manifestante et preneuse à revers, déboussolée en ses appartenances comme égarée en ses espoirs. ­ En résumé, 2019 a été une ­ année totalement à la rue. La polysémie de l’intitulé est bienvenue. 2019 fut grosse de révoltes esquissées, inabouties ou réversibles, qu’elles soient arpenteuses du macadam, ré- seauteuses radicales ou féroce- ment sociétales. 2019 est des- cendue sur le pavé contre des puissances de différents types, contre des nuisances ­ variées et pour des espérances cha- marrées. A travers le monde, les pouvoirs en place, réels ou symboliques, en ont pris pour leur grade. Même les Gafa ont senti le vent du boulet. Mais personne n’est certain de ce qui suivra. Il est fort possible que le nouveau monde promis n’advienne pas ou sombre plus vite que l’ancien, le turn-over des responsables de tous sec- teurs étant bloqué en mode ­ essorage. La macronie et ses ministres lessivés par divers conflits d’intérêts peuvent en témoigner. En tout cas, la tourneboule gé- nérale est forte qui voit les évi- dences se faire éborgner par les LBD aveuglants des remi- ses en cause systémiques, an- thropologiques et métaphysi- ques. On ne sait plus trop si le peuple ronchonneur veut une démocratie intégrale ou des potentats populistes. On se gratte la tête pour décider si ce flirt avec les hommes forts est la réponse inconsciente à la montée au pinacle des ­ femmes pulvérisantes. On a bien compris que, si les droi- tes numérotaient leurs abattis pour mieux abattre leur jeu et quelques conquêtes sociales, les gauches étaient tellement fragmentées qu’elles ne savent plus où elles habitent. Au sein de ce camp du progrès en voie d’émiettement, les te- nants d’une laïcité émancipée se bastonnent avec les ser- vants des religions et autres exigeurs de respect. Les dé- fenseurs de la liberté de créa- tion percutent les accusateurs des déviances très masculines des artistes. Surtout, les opti- mistes, tenants d’une crois- sance maintenue même si re- verdie, se castagnent avec les pessimistes, collapsologues et autres Cassandre, qui lll Libération Samedi 28 et Dimanche 29 Décembre 2019 www.liberation.fr f facebook.com/liberation t @libe u 3 A Paris le 5 décembre, lors de la première journée de mobilisation contre la réforme des retraites. Photo Cyril Zannettacci. VU coulisses patro­ nales ne sont plus un refuge pour la droite. Au Venezuela, Guaidó, le libéral conquérant, se révèle moins gendre idéal que prévu. Mais pas au point de redorer le blason de Maduro, indigne successeur de Chávez. En Boli- vie, c’est Morales qui est de sortie quand, au Chili, c’est l’héritage Pinochet qui est re- fusé. Heureusement, Lula sort de prison pour en ­ remontrer à Bolsonaro. Rien n’est clair, rien n’est simple, tout bouge à toute vitesse, ­ entre élections et procès, ­ manifestations et ré- pressions, lynchages et relégi- timations. Seul Hongkong semble lutter à l’unisson, tel un étudiant à parapluie bra- vant les chars de Pékin, trente ans après ­ Tiananmen. En 2019, deux femmes ont tenu le haut du pavé. Adèle Haenel, actrice de 30 ans, a vi- trifié le cinéma français en faisant état d’abus passés de la part d’un réalisateur quand elle était adolescente. Galatée a médiatiquement égorgé Pygmalion. Elle a mis le feu à un ordre masculin ancien, tout en triomphant en égérie éprise d’un film tourné par une femme, Cécile Sciamma. Greta Thunberg, elle, est la mauvaise conscience du monde développé. Cette Sué- doise de 16 ans s’impose en Antigone à nattes, refusant d’enterrer la planète mori- bonde sous les murailles fossi- lisées de Thèbes surchauffée. Elle est la figure grondeuse d’une génération de millen- nials furieux de l’irresponsabi- lité hédoniste et dispendieuse des baby-boomers. Quant à ces derniers, à Paris et ailleurs, ils remontent les rues pour sauver leurs retraites. Pen- sions que vont finir par ­ refuser de payer Greta et les siens. A l’aube d’un siècle qui aura bientôt 20 ans et qui ne lais- sera dire à personne que c’est le plus bel âge de la vie.• 2019 À LA RUE lll A la rue, se débattant face à des gilets jaunes qui étaient, eux, dans la rue, Emmanuel Macron dégaina l’idée d’un grand débat national pour raccommoder le pays tout autant que pour retrouver un peu d’espace politique. Se uploads/Geographie/ journal-libe-du-samedi-28-et-dimanche-29-decembre-2019-pdf.pdf

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