hellenistic karia AUSONIUS ÉDITIONS ————— Études 28 ———— hellenistic karia edit

hellenistic karia AUSONIUS ÉDITIONS ————— Études 28 ———— hellenistic karia edited by Riet van Bremen & Jan-Mathieu carBon Proceedings of the First International Conference on Hellenistic Karia - Oxford, 29 June - 2 July 2006 Diffusion De BoccarD 11 rue de Médicis F - 75006 Paris — Bordeaux 2010 — AUSONIUS Maison de l’Archéologie F - 33607 Pessac Cedex http://ausonius.u-bordeaux3.fr/EditionsAusonius DIFFUSION DE BOCCARD 11 rue de Médicis 75006 Paris http://www.deboccard.com Directeur des Publications : Jérôme France Secrétaire des Publications : Nathalie tran Graphisme de couverture : Stéphanie vincent © AUSONIUS 2010 ISSN : 1283-2200 ISBN : 978-2-35613-036-5 Achevé d’imprimer sur les presses de l’imprimerie Gráficas Calima, S.A. Avda. Candina, s/n E - 39011 Santander – Cantabria octobre 2010 Illustration de couverture : Double axe carved on one of the walls of the temple of Zeus at Euromos (photo R. van Bremen). la crise Financière Des cités grecques D’asie mineure au ier siècle a.c. et la lettre De cicéron à q. minucius thermus (fam. 13.56) Fabrice Delrieux En 48 a.C., peu après Pharsale 1, Jules César, de passage à Éphèse, annonça aux Grecs de la province d’Asie qu’il mettait fin à la perception de la dîme par les publicains et qu’il leur faisait remise du tribut d’un tiers 2. Pour le remercier, cités, dèmoi et ethnè dressèrent ensemble à Éphèse une statue en l’honneur du ‘descendant d’Arès et Aphrodite, dieu manifeste et commun sauveur du genre humain’ 3. Sans doute au même moment, Alabandiens, Chiotes, Cnidiens, Pergaméniens, Phocéens, Samiens et Tralliens en élevèrent d’autres sur le territoire de leurs cités respectives 4. Loin d’être convenus, ces marques de reconnaissance et leur degré de sincérité étaient proportionnés aux graves difficultés financières dans lesquelles les excès des publicains, mais aussi des magistrats, des trafiquants et des financiers romains avaient plongé la province au cours des années précédentes. À une époque où l’empire finançait d’abord les intérêts de quelques-uns avant ceux de la Res Publica, les richesses de l’Asie constituaient une proie tentante. Malgré son entrée récente dans la province, la Carie en arriva très vite au même stade que les autres régions d’Asie ainsi qu’en témoigne une lettre écrite en 51/50 par Cicéron, gouverneur de Cilicie, à son collègue de la province d’Asie, Q. Minucius Thermus 5. Celui-ci y recommande un ami, Cluvius Puteolanus, inquiet de ne pas recevoir l’argent que lui doivent les cités d’Alabanda, Bargylia, Caunos, Héraclée 6, Mylasa, et un particulier, 1. Sauf avis contraire, les dates données dans cette étude s’entendent a.C. 2. Cic. Fam. 15.15.2 ; Plut. Caes. 48.1 ; App. BC 2.13.92 ; DC 42.6.3. Sur ces mesures, cf. Merola 2001a, 459-72, et Merola 2001b, 72-84. 3. I.Ephesos 251 (= Syll.3 760). 4. Robert 1955, 259 (Alabanda) ; CIG 2215 (Chios) ; I.Knidos 41 (Cnide) ; Eilers 2002, C74 (Pergame) ; Robert 1955, 257 (Phocée) ; Eilers 2002, C53 (Samos) ; Caes. Civ. 3.105.6 (Tralles). Sur les inscriptions en l’honneur de Jules César en Orient, cf. Raubitschek 1954, 65-75. 5. Fam. 13.56.1-3. Sur la date, discutée, de ce courrier, cf. Tyrrell & Purser 1914, no. 231 (peut-être décembre 51), et Shackleton Bailey 1977, no. 131 (début 50). 6. Sans doute du Latmos plutôt que de la Salbakè pour des raisons de vraisemblance géographique (Robert 1954, 153, n. 1 ; Migeotte 1984, 330, n. 256 ; Delrieux & Ferriès 2004a, 59, n. 41). Parmi les partisans d’Héraclée de la Salbakè, cf. Bogaert 1968, 224, Sirago 1977, 54, et Deniaux 1992, 226. 506 FABRICE DELRIEUx La Carie vers 50 a.C. (sont indiquées par une pastille blanche les cités nommées dans Cicéron, Fam. 13.56). LA CRISE FINANCIÈRE DES CITÉS GRECQUES D’ASIE MINEURE 507 Philoclès d’Alabanda. Cette fameuse affaire, à laquelle est lié le nom de Pompée, est pour nous l’occasion de nous intéresser, à travers l’exemple carien (peu étudié jusqu’ici), à l’endettement des provinciaux au milieu du ier siècle et aux moyens employés par ces derniers pour y répondre. La lettre de Cicéron étant au centre de notre réflexion, nous en reproduisons ci-après le texte avec une traduction 7. Cicero Thermo propr. s. 1. Cluuius Puteolanus ualde me opservat ualdeque est mihi familiaris. Is ita sibi persuadet, quod in tua prouincia negotii habeat nisi te prouinciam obtinente meis commendationibus confecerit, id se in perditis et desperatis habiturum. Nunc quoniam mihi ab amico officiosissimo tantum oneris imponitur, ego quoque tibi imponam pro tuis in me summis officiis, ita tamen ut tibi nolim molestus esse. Mulase)ij et ëAlabande)ij pecuniam Cluuio debent. Dixerat mihi Euthydemus, cum Ephesi essem, se curaturum ut ecdici a Mylasinis Romam mitterentur. Id factum non est. Legatos audio missos esse, sed malo ecdicos, ut aliquid confici possit. Qua re peto a te ut et eos et ëAlabande)ij iubeas ecdicos Romam mittere. 2. Praeterea Philocles Alabandensis &upoqçhkaj Cluuio dedit. Eae commissae sunt. Velim cures ut aut de hypothecis decedat easque procuratoribus Cluuii tradat aut pecuniam soluat, praeterea Heracleotae et Bargylietae, qui item debent, aut pecuniam soluant aut fructibus suis satis faciant. 3. Caunii praeterea debent, sed aiunt se depositam pecuniam habuisse. Id uelim cognoscas et, si intellexeris eos neque ex edicto neque ex decreto depositam habuisse, des operam ut usurae Cluuio instituto tuo conseruentur. His de rebus eo magis laboro quod agitur res Cn. Pompei etiam, nostri necessarii, et quod is magis etiam mihi laborare uidetur quam ipse Cluuius ; cui satis factum esse a nobis ualde uolo. His de rebus te uehementer etiam atque etiam rogo. Cicéron salue Thermus, propréteur. 1. Cluvius de Pouzzoles a bien des égards pour moi et il est bien de mes amis. Le voilà qui se persuade, ayant des intérêts dans ta province, que si, grâce à mes recommandations, il n’en vient pas à bout du temps où tu y gouvernes, il n’a plus qu’à les classer au compte des pertes sans recours. Ainsi, puisqu’un ami des plus serviables me charge d’une si lourde responsabilité, à mon tour de t’en charger au nom des services si importants... que tu m’as rendus, – sans pourtant vouloir t’en ennuyer. Les Mylasiens et les Alabandiens doivent de l’argent à Cluvius. Euthydème m’avait dit, quand j’étais à Éphèse, qu’il veillerait à ce que des fondés de pouvoir fussent envoyés à Rome par les Mylasiens 8. Cela n’a pas été fait. On me dit qu’ils ont envoyé des ‘délégués’ ; mais je préfère des fondés de pouvoir, pour qu’on puisse aboutir à quelque chose de sûr. Aussi te demandé-je de leur ordonner, et aussi aux Alabandiens, d’envoyer à Rome des fondés de pouvoir. 2. En outre, Cluvius a des hypothèques sur Philoclès d’Alabanda ; et elles sont exécutoires. Je désirerais que, par tes soins, Philoclès vide les lieux hypothéqués pour les remettre aux intendants de Cluvius ou qu’il solde sa dette ; et puis que les Héracléotes et les Bargyliètes, qui doivent aussi, ou bien soldent la dette, ou bien s’acquittent au moyen de leurs revenus. 3. Et puis les Cauniens doivent : mais ils affirment que la somme a été déposée. Je désirerais que tu t’en informes et, si tu trouves 7. Celle-ci est pour l’essentiel de L.-A. Constans et J. Bayet (Paris, 1962), mais tient compte des ajustements de L. Migeotte (1984, 331, n. 260). 8. Selon J. Ma, dont nous remercions ici la remarque, c’est sans doute en raison de leurs statuts différents que les cités nommées par Cicéron ne sont pas traitées de la même manière. C’est là un sujet que nous traiterons ailleurs. 508 FABRICE DELRIEUx qu’il n’y a eu de dépôt régulier ni conformément à l’édit ni sur décret, que tu t’emploies à ce que, conformément à tes principes, les créances de Cluvius continuent à être assurées. De ces questions je m’inquiète d’autant plus qu’il s’agit des intérêts de Cn. Pompée aussi, qui nous est si cher, et qu’il me paraît s’en inquiéter encore plus que Cluvius : je tiens beaucoup à ce qu’il ait par nous satisfaction. J’insiste encore, vivement, auprès de toi pour le règlement de ces questions. une Pression consiDéraBle Des finances fragilisées Il est un fait que, même en dehors des expéditions militaires d’envergure, l’administration provinciale romaine pouvait se livrer à des prélèvements importants. Ainsi reprocha-t-on à L. Valerius Flaccus, gouverneur d’Asie en 62-61, de s’être emparé des fonds perçus auprès des cités pour l’équipement d’une flotte de guerre apparemment sans objet 9. On l’accusa également d’avoir extorqué de l’argent à certaines villes de la province 10, de s’être approprié une partie de l’or que les Juifs d’Asie destinaient à Jérusalem et dont il avait interdit le transfert 11, ou bien encore d’avoir pris à Tralles les fonds que des cités y avaient déposés pour financer des fêtes et des jeux en l’honneur de son père, gouverneur d’Asie entre 96 et 90 12. Même les Romains résidant en Asie n’échappèrent pas à sa rapacité, à commencer par un certain Falcidius qui, ayant acheté 900 000 sesterces le droit de prélever les impôts de la cité de Tralles, dut verser 50 talents à L. Valerius Flaccus pour la ratification de son achat 13. Ce comportement justifie les nombreuses assignations de uploads/Geographie/ la-crise-financiere-des-cites-grecques-d-x27-asie-mineure-au-ier-siecle-a-c-et-la-lettre-de-ciceron-a-q-minucius-thermus-fam-xiii-56-fabrice-delrieux.pdf

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