94 No 3 1972 La moisson et la vendange de l'Apocalypse (14,14-20). La significa
94 No 3 1972 La moisson et la vendange de l'Apocalypse (14,14-20). La signification chrétienne de la révélation johannique (suite) André FEUILLET p. 225 - 250 https://www.nrt.be/en/articles/la-moisson-et-la-vendange-de-l-apocalypse-14-14-20-la- signification-chretienne-de-la-revelation-johannique-suite-1264 Tous droits réservés. © Nouvelle revue théologique 2021 La moisson et la vendange de l'Apocalypse (14. 14-20) LA SIGNIFICATION CHRÉTIENNE I1IÎ LA RÉVÉLATION JOHAXNIQUE (suite) IV. — La cuve foulée en dehors de la ville (14i 20) et le Christ Juge, vainqueur de la Bête (19, 11-16) Un détail mystérieux du tableau de la vendange â'A? 14, 17-20 : la cuve foulée en dehors de la ville, a une particulière importance pour une interprétation exacte de l'ensemble de la scène : il ne s'ex- plique bien en effet que comme une référence à la Passion du Christ prolongée par la souffrance des martyrs chrétiens. Cette double ré- férence à la Passion du Christ et aux martyrs chrétiens ressort davantage encore de la description du Christ Juge, vainqueur de la Bête, de 19, 11-16, puisque d'après 19, 15 c'est le Christ lui-même qui foule la cuve. Il est normal d'étudier ensemble ces deux données de 14, 20 et de 19, 11-16. La ville en dehors de laquelle la cuve est foulée {14, 20) n'est pas nommée par l'auteur, mais elle se laisse deviner sans trop de peine- En effet au début du- chapitre il a été question de Sion. Auparavant, au chapitre 11 (v. 2), la ville est sans aucun doute possible Jérusalem ; le v. 8 précise : « la grande ville qui est appelée spirituellement Sodome et Egypte, là où leur Seigneur fut crucifié ». Ce n'est que plus loin, aux chapitres 16, 17 et 18, que Babylone (Rome) est appelée la grande ville {16, 19 ; 17, 18 ; 18, 16, 18, 19, 20) ou bien la ville forte {18, 10). Aussi presque tous les exégètes s'accordent- ila pour identifier la ville de 14, 20 avec Jérusalem, et on ne peut que leur donner raison. 226 A. WîWfft II est beaucoup plus difficile de les suivre quand ils soutiennent que si la cuve est foulée en dehors de Jérusalem, c'est en raison de la tradition biblique et Juive qui situe le jugement des nations aux portes de Jérusalem afl. Car aucun des parallèles allégués n'est propre- ment convaincant ; aucun ne nous offre cette localisation précise : « en dehors de la ville ». f î 4, 12 place le jugement des nations dans la vallée de Josaphat40, Za H, 4 au mont des Oliviers, 4 Esdras 13, 35 et Baruch syriaque 40, 1 sur le mont Sion. Quelques commen- tateurs se rendent bien compte que de tels rapprochements ne sont guère probants : aussi croient-ils devoir aiouter que les exécutions capitales se faisaient régulièrement hors de l'enceinte de la ville, et que ce fut le cas pour Jésus lui-même, ainsi que le souligne He 13, 12 41. C'est en effet à la Passion du Christ que nous fait avant tout songer l'expression « en dehors de la ville », et les commentateurs n'auraient pas manqué de s'en apercevoir s'ils n'avaient été égarés par leur conviction insuffisamment fondée que la vendange sym- bolique de l'Apocalypse est le jugement des ennemis de Dieu. Plusieurs données convergentes plaident en faveur de ce rapprochement avec la Passion. L'Epître aux Hébreux rappelle que Jésus a souffert « en dehors de la porte », et il exhorte en conséquence les chrétiens à « sortir à sa rencontre42 en dehors du camp en portant son op- probre » (.13, 12-13), tant il est vrai que le sort des disciples est commandé par celui du Maître. Le quatrième évangile nous atteste en effet (19, 20) que le Golgotha était situé en dehors de l'enceinte de Jérusalem. On sait que dans les Actes des Apôtres le récit de la mort du premier martyr, Etienne, évoque à plusieurs reprises la Passion de Jésus, notamment telle que saint Luc la rapporte ; qu'Etienne ait été poussé « en dehors de la ville » avant d'être lapidé (7, 58), ce n'est là. qu'un trait de ressemblance de plus entre sa mort violente et celle de son Maître is. Au début de son ministère public, à Nazareth, Jésus dans le troisième évangile expérimente une véritable préfiguration de sa Passion : ses compatriotes le rejettent, le poussent « en dehors de 1a ville » et cherchent à le tuer {4, 28- 39. Les textes parallèles que nous allons indiquer sont cités par presque tous les commentateurs ; ci. par ex. LOHMIÎYIÎR, commentaire, p. 129 ; Ai.l.o, commentaire, p. 246. 40. Lohmeyer rapproche de Jl 4, 12 Hénoch éthiopien 53, 1, mais ce dernier passage parle seulement d'une vallée protonde sans l'identifier et ne se rap- porte pas au jugement des nations. 41. Cf. SwETE, commentaire, p. 192 ; BRÙTSCH, commentaire, p. 253, 42. Cela signifie que les chrétiens doivent «. quitter définitivement toute attache avec le judaïsme et se considérer comme exilés du monde » : C. SPICQ, L'Etre aux Hébreux (Bible de Jérusalem), 2° éd., Paris, 1957, p. 92, note a. 43. Cf. R. B, RACKAM, Thé Acts of thé Aposîles, London, 1951, p.. 103, note 2; Les Actes des Apôtres de la Bible de férMalfm, 2* éd., Paris, 1952, p. 84, note 2. LA MOISSON ICI' LA VffiTDAKGB DE L'APOCALYPSB (14, 14-20) 227 29) 44. La tradition chrétienne de la mort de Jésus « en dehors de la ville» était si bien établie que Matthieu et Luc^ récrivant la para- bole des vignerons homicides de Marc, font tuer le fils du proprié- taire «en dehors de la vigne» {Mt 21, 39 ; Le 20, 15), alors que dans le second évangile (Me 12, 8) le meurtre précède l'exclusion de la vigne40. . Cette donnée chrétienne si ferme : la mort de Jésus en dehors de la ville est autrement éclairante dans la recherche du sens â'Ap 14, 20 qne les textes vête rote stamentair es et juifs habituellement allégués. Elle confirme pleinement ce que plus haut nous avons cherché à établir : la vendange symbolique de l'Apocalypse se réfère aux martyrs chrétiens, et non pas au châtiment des ennemis de Dieu- Ils sont mis à mort en dehors de la ville comme Jésus l'avait été le premier, conformément au principe évangélique si fortement en- seigné par Jésus et que rappelle He 13, 12-13 : le destin des disciples se calque sur celui du Maître. Les souffrances des chrétiens persé- cutés, comme déjà celles d'Etienne, imitent et prolongent la Passion du Christ. La même idée avait déjà. été exprimée sous une autre forme en Ap 11, 8-13, passage que nous retrouverons plus loin. II est intéressant de constater que, comme dans l'Apocalypse le Fils de l'homme préside à la moisson et à la vendange symboliques, de môme dans les Actes c'est le Fils de l'homme qui préside au mirtyre d'Etienne lapidé en dehors de la ville. Certains auteurs ont pensé que s'il se îiënt debout (Ac 7, 56), alors que le passage paral- lèle de la Passion, la déclaration du Christ aux Sanhédrites sur le Fils de l'homme, noua le montre au contraire assis {Le 22, 69}, c'est que dans les Actes il s'apprête à. intervenir en faveur de son fidèle serviteur4G. L. Cerfaux écrit : « Le jugement humain et terrestre a une contrepartie céleste. Pendant que les disciples prennent le parti du Christ sur terre, dans le ciel, devant le tribunal où les anges sont les assesseurs de Dieu {Le 12, 9), le Christ confesse les siens. Cette confession les introduit au ciel » ". Nous devons passer maintenant au tableau de 19, 14-16. Il nous fait contempler le Christ Juge qui s'apprête à triompher définitive- ment de la Bête, du Faux Prophète et de tous ceux qui les ont suivis : « Alors i'e vis le ciel ouvert et voici un cheval blanc ; celui 44. Cf. P. G. Voss, Die Chrisfologie der Lnkaniscncn Schriffen în Grand- .••:iigen, Paris-Bruges, 1965, p. 136-160. 45. Cf. W, GimNDMAîîM", Dos Evangeli'um nach Matthâus, Berlin, 1968, p. 462 : « Die Ausfûhrung ihrer Absicht passt Matthâus mit Lukas der geschichtiîchen Situation an». 46. Cf. C. S. C. Wir.r.iAMS, Thé Acts of thé Aposîles, London, 1957, p. 112- 47. Témoins du Christ, dans Recueil L. Cerfaux; tome II, Gemblonx, 1954, p. 169-170. 228 A. ÏE;UILLKT qui le monte s'appelle fidèle et vrai. Il juge et fait la guerre avec justice. Ses yeux sont une flamme ardente ; il a sur sa tête plusieurs diadèmes ; il porte inscrit sur lui un nom qu'il est seul à connaître ; le manteau qui l'enveloppe est baigné de sang, et son nom est le Verbe de Dieu. Les armées du ciel le suivaient sur des chevaux blancs, vêtues de fin lin, blanc et pur. De sa bouche sort -une épée acérée pour en frapper les nations. C'est lui qui les paîtra avec un sceptre de fer. Il foule la cuve du vin du courroux de la colère de Dieu Tout-Puissant. Sur son manteau et sur sa cuisse uploads/Geographie/ la-moisson-et-la-vendange-de-l-apocalypse-14-14-20-la-signification-chretienne-de-la-revelation-johannique-suite.pdf
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- Publié le Oct 20, 2022
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