Le Journal de l’Afrique N°30, mars 2017 Sommaire Editorial : L ’Afrique doit s’
Le Journal de l’Afrique N°30, mars 2017 Sommaire Editorial : L ’Afrique doit s’ouvrir aux Africains Par Carlos Silenou & Olivier A. Ndenkop République démocratique du Congo Etienne Tshisekedi : « Opposant historique » ou l’Histoire à l’envers Par Olivier A. Ndenkop Le Bénin suspend le visa pour les ressortissants de 30 pays africains La colonisation : Œuvre négative et crime contre l’humanité Par Chems Eddine Chitour Oui, la colonisation est un crime contre l’humanité Par Bruno Guigue Brèves Nigeria: la Chine va financer le rail Lagos-Kano Cameroun : journaux cherchent vendeurs La longue tradition des annulations de dettes en Mésopotamie et en Egypte du 3e au 1er millénaire avant J-C Par Eric Toussaint Editorial : L ’Afrique doit s’ouvrir aux Africains Lors de la 18ème session ordinaire de l’Union africaine en janvier 2012, les dirigeants du continents avait annoncé une batterie de mesures à prendre afin de « réduire la pauvreté, créer des emplois, intégrer le continent dans l’économie mondiale […]». Ils étaient même allés plus loin pour annoncer un libre échange entre pays du continent à l’horizon 2017. Nous sommes en 2017, mais le libre-échange promis relève encore du mythe. En attendant, ils s’empressent de signer et de mettre en application les Accords de partenariat économique avec l’Union européenne (APE) Dans sa fable intitulée Les enfants désunis du laboureur, Esope écrit : « Autant l'union fait la force, autant la discorde expose à une prompte défaite ». Vieux de plus de deux millénaires, ces propos du fabuliste, sans doute inspirés par son vécu dans la Grèce antique, correspondent à l’Histoire contemporaine de l’Afrique. La désunion du continent a eu pour conséquences sa marginalisation à l’extérieur et son cloisonnement à l’intérieur… A l’extérieur de ses frontières, l’Afrique est considérée comme un grand enfant. Pas de place permanente au Conseil de sécurité de l’ONU, malgré son milliard 300 millions d’habitants. Baignant sans identité dans la culture de l’Autre, utilisant dans certains cas une monnaie émise et contrôlée par un colon parti pour mieux rester, le continent fait figure de figurant dans les relations internationales. A l’intérieur du continent, des barbelés invisibles sont érigés. Aujourd’hui encore, pour partir d’une capitale africaine à une autre, il faut passer par l’Europe ou l’Amérique, faute de vols directs entre pays de la même sous- région ! Selon les chiffres de l’Union africaine, le commerce intra-africain atteint à peine 15% contre 40% en Amérique du nord et 60% entre les pays européens. En d’autres termes, les Africains s’échangent moins de 15% de biens et services qu’ils produisent. Ils produisent ce qu’ils ne consomment pas et consomment ce qu’ils ne produisent pas. Si cette situation s’explique par l’offensive des multinationales étrangères, il ne fait l’ombre d’aucun doute qu’au-delà des discours volontaristes, une volonté d’ouverture de l’Afrique aux Africains fait défaut aux dirigeants du continent. La nature ayant horreur du vide, les biens et services venus d’ailleurs s’installent confortablement dans les salons, les plats mais aussi dans le cerveau des Africains. Et pourtant, l’intégration du continent, adossée sur des réformes adéquates permettrait aux Africains de se rencontrer, de se connaitre et surtout de s’adopter. En s’ouvrant, l’Afrique développera son industrie touristique, boostera la consommation intra-africaine qui est le seul moyen efficace de lutter contre le chômage et la pauvreté. En s’ouvrant à elle-même, l’Afrique s’unira parce que les citoyens des différents pays s’accepteront, réaliseront des projets communs, et pourront facilement se mettre ensemble pour se défendre et défendre le continent. Et unie, l’Afrique, forte de ses deux milliards d’habitants attendus en 2050 devient intouchable, et incontournable dans les relations internationales. En ouvrant ses frontières aux ressortissants de 30 pays du continent, le Bénin lance un appel aux Africain(e)s Carlos Silenou & Olivier A. Ndenkop République démocratique du Congo Etienne Tshisekedi : «Opposant historique» ou l’Histoire à l’envers Paix à son âme ! Le président de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) est mort le 1er février 2017 à Bruxelles. La presse internationale a consacré des éditions et émissions spéciales à l’illustre disparu présenté à l’unisson comme « l’opposant historique » du Congo. Comme si ce douloureux décès les avait tous plongés dans une amnésie collective, nos grands journalistes et leurs experts de circonstance ont oublié de nous parler de la période où Tshisekedi, premier docteur en droit de son pays, était devenu l’un des principaux maîtres à penser et exécutant zélé du dictateur sanguinaire Joseph-Désiré Mobutu qui en fera son Premier ministre. Durant ses 84 ans sur terre, Tshisekedi a dit non à tout, à tous, sauf aux capitalo- impérialistes qui pillent son pays et tuent ses compatriotes. Par Olivier Atemsing Ndenkop Etienne T shisekedi et Mobutu, accord parfait. Photo DR Requiem médiatique Etienne T shisekedi est du bon côté de l’Histoire écrite par les médias internationaux. Après son décès, la presse mainstream n’y est pas allée de mains mortes pour rendre hommage à cet « homme exceptionnel ». Celui que le quotidien belge Le Soir présente comme une « figure incontournable de l’histoire moderne de la République Démocratique du Congo » a reçu tous les honneurs du petit monde politico-médiatique et son sulfureux parcours fait de collaboration avec la dictature de Mobutu, de justification éhontée de la pendaison de trois ministres et d’un sénateur en 1966, du refus obstiné d’appliquer l’alternance à la tête de « son » parti l’UDPS en s’y maintenant contre vents et marées jusqu’à sa mort est devenu un … «long combat pour la démocratie » ! Dans la taxinomie classique, politologues et autres spécialistes nous présentaient le paysage politique comme constitué de deux acteurs : d’une part des dirigeants que sont les hommes et femmes qui exercent le pouvoir et, d’autre part, des opposants, c’est-à-dire des hommes et femmes à la conquête du pouvoir. Il est vrai que ces dernières années, les groupes de pression représentant la « société civile » sont venus brouiller la classification classique. Leurs faits d’armes ont d’ailleurs fait les choux gras de la presse au point où d’aucuns ont vu l’arrivée des organisations de la société civile comme un signe d’espoir face à la désaffection des citoyens vis-à-vis de la politique partisane. Depuis le décès du président de l’UDPS, nous devons ajouter une troisième variable au binôme Dirigeant-Opposant. Cette nouvelle variable ? « Opposant historique ». Comme s’ils s’étaient passé le mot, les grands journaux qui arrosent le monde n’ont cessé de nous présenter Etienne T shisekedi comme « opposant historique ». Morceaux choisis « Etienne T shisekedi, l’opposant historique congolais est mort à l’âge de 84 ans à Bruxelles », annonce le journal belge Le Soir. http://www.lesoir.be/1431056/article/actualite/monde/2017-02-01/l- opposant-historique-congolais-etienne-tshisekedi-est-mort-bruxelles. Sur son site internet, la Radio T élévision belge francophone (RTBF) nous apprend que « Etienne Tshisekedi, figure incontournable de l’histoire moderne de la République démocratique du Congo, est né à Luluabourg (Kananga) en 1932 durant la période coloniale belge », https://www.rtbf.be/info/monde/detail_rdcongo-l-opposant-politique- etienne-tshisekedi-est-decede?id=9519278 Pour la chaîne de télévision France 24, Étienne T shisekedi est un « Personnage extrêmement populaire en RD Congo, symbole de la résistance et opposant historique aux dirigeants en place à Kinshasa » (Étienne T shisekedi, mort mercredi 1er février en Belgique à l'âge de 84 ans ). Dans un entretien accordé à la RTBF, Colette Braeckman fait un portrait trop flatteur du disparu. Pour la journaliste belge, Etienne T shisekedi est « le premier à oser dire 'non' au président Mobutu, à vaincre la peur de la dictature. » Pourtant Colette Braeckman décrit elle–même le tracé de Tshisekedi d’une façon plus réaliste sur son blog. http://blog.lesoir.be/colette-braeckman/2017/02/04/le-dernier-baobab-du- congo-a-disparu/ Autant dire que Colette Braeckman connait bien la vérité derrière le mythe. Or dans l’interview accordée à la RTBF, elle apporte de l’eau au moulin de ce mythe, qu’elle décrit d’ailleurs très bien : « Parmi certains jeunes il faisait presque l'objet d'un culte parce que c'était un vieux monsieur qui vivait simplement dans sa petite maison de Limete ». Pour Colette Braeckman, « c’est le président Kabila qui sort gagnant » de la disparition d’Etienne T shisekedi. Quel danger le vieux président de l’UDPS représentait-il pour un Kabila qui, conformément aux dispositions de l’Accord du 31 décembre, ne peut plus se présenter à la présidentielle prévue cette année ? Mystère. A travers un communiqué largement repris par la presse, Didier Reynders a présenté « ses plus sincères condoléances à la famille et au peuple congolais ». Le ministre des Affaires étrangères de la Belgique (pays ayant colonisé le Congo) voit en T shisekedi, « une figure politique marquante de la République Démocratique du Congo durant plusieurs décennies » Louis Michel, député européen, nous apprend qu’Etienne T shisekedi est une « personnalité hors norme, un homme de convictions […]. Sa connaissance de l'être humain, sa popularité, sa sémantique percutante faisaient de lui un adversaire politique qui suscitait l'adhésion. Doté d'une intelligence supérieure, cet optimiste de la volonté, ce tribun, dont la popularité ne s'est jamais démentie, forçait le respect. Jouant un rôle clé dans les négociations actuelles, il était appelé à de hautes fonctions dans le gouvernement de la transition », conclut l’ancien uploads/Geographie/ le-journal-de-l-x27-afrique-n030-l-x27-afrique-doit-s-x27-ouvrir-aux-africains.pdf
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- Publié le Sep 08, 2022
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