Marlois Lara Mardi 11 janvier 2005 Conférence de M. Colon 1848, EN FRANCE, UNE

Marlois Lara Mardi 11 janvier 2005 Conférence de M. Colon 1848, EN FRANCE, UNE REVOLUTION ROMANTIQUE? Introduction: En 1848, il y a bien révolution, en France comme ailleurs en Europe; peut on pour autant parler d’une révolution? L’année 1848 court du 1er janvier au 31 décembre 1848, ce qui inclut aussi bien février que juin; c'est-à-dire tant la «belle» révolution de février que la révolution «hideuse» de juin qui divergent par leurs acteurs, par leurs objectifs comme par leur réception. Le romantisme, ce courant intellectuel qui s’étend à toute l’Europe entre 1800 et 1840 exalte le passé national et s’accompagne d’une revalorisation de la culture et du patrimoine national et populaire, touchant aussi bien la littérature que la peinture, l’architecture ou l’histoire. Cette quasi fascination pour le passé s’explique par la déception d’une génération face à la réalité morne du monde qui l’entoure. En 1848 c’est cette génération qui prend part à la révolution, la génération du «spleen» (Baudelaire), celle qui souffre du «mal du siècle» (Musset). En France, ayant été bercée par les récits des conquêtes glorieuses de Napoléon, elle ne se reconnaît ni dans le manque de consistance de la Monarchie de Juillet, ni dans la société et la morale bourgeoise qui conditionnent la France des années 1840. Elle n’a en général connu ni la Révolution ni l’Empire autrement que par des récits exaltés et rêve de grandeur et d’idéal qui rompraient avec la médiocrité de la société qui lui est proposée. Le romantisme paraît donc facilement pouvoir être à la source des soulèvements de 1848, les révolutions permettant à cette génération en manque de grandeur de s’élever au rang d’actrice de l’histoire et d’espérer fonder un avenir nouveau et plus exaltant; mais à bien des égards cette exaltation justement, si elle peut fournir le terreau d’une révolution, paraît vite devenir une faiblesse dès lors qu’elle se retrouve confrontée à des réalités très éloignées des idéaux romantiques. Problématique: Ainsi, en France, en 1848, le romantisme peut il être plus que la simple caution, quasi littéraire, de révolutions plus complexes? Nous verrons que si la «belle» révolution de février qui débouche sur «l’illusion lyrique» des premiers mois de la Seconde République semble aller dans ce sens l’idéal romantique est vite rattrapé par les réalités sociales et politiques oubliées ou mal évaluées en février. I- L’influence du Romantisme est omniprésente lors de la «belle» révolution de février et dans ses suites immédiates. A) L’exaltation romantique est à la source de «l’esprit de 1848» qui se retrouve dans «l’illusion lyrique» de la Seconde République des premiers mois. En effet, l’influence du romantisme est omniprésente lors de la révolution de février et dans ses suites immédiates; l’exaltation romantique est à la source de «l’esprit de 1848» qui se retrouve dans «l’illusion lyrique» de la Seconde République des premiers mois. . - Le romantisme s’accompagne de la redécouverte de la culture populaire et de sa revalorisation Avec le romantisme la France redécouvre une riche culture populaire, oubliée ou méprisée jusqu’ici, et ce notamment sous l’influence du Globe, journal littéraire prétendant s’élever au dessus de la politique pour éviter la censure (on y trouve des personnalités telles que Leroux ou Ste Beuve) qui, dès 1825 affirme, soutenu par Nodier et Hugo, sa volonté de se mettre à la portée de tous en militant par exemple pour l’invention d’une forme de tragédie populaire, la réévaluation et l’étude de la poésie orale populaire ou l’importation du roman historique à la Walter Scott. Il a pour objectif un 14 juillet littéraire, mais sans décapitation du roi ni Terreur, et Hugo, qui ne nie pas admirer Béranger, chansonnier populaire s’il en est, se voit même qualifié de «Robespierre de la poésie» par un rédacteur. (D’ailleurs Hugo plus tard n’hésitera pas à faire publier des chansons, on en dénombre 12 dans Les Châtiments (1853).) - La vague romantique en Histoire exalte la grandeur du peuple Cette redécouverte du passé populaire s’accompagne d’une vague historique romantique, avec Thierry ou Michelet (même si ces nouveaux historiens n’égalent jamais des romanciers historiques tels que W. Scott: Ivanhoé, Quentin Durward ou le Chateaubrianddes Martyrs). Cette nouvelle histoire, pas toujours exacte, a tendance à exalter le peuple, à lui faire prendre part à la grandeur de la nation. C’est avec elle que se développent à la fois le mythe de la Révolution française et le mythe impérial napoléonien relayés dans des sociétés secrètes ou au travers de pamphlets usant d’images simples faisant du peuple français un grand peuple héroïque apportant au monde les principes de 1789 par ceux qui ont beaucoup perdu en 1815 (en particulier les officiers et les sous-officiers mis en demi solde). De plus le retour des cendres de Napoléon en 1840 a permis de raviver le mythe et la fibre nationale. Ainsi ce n’est pas un hasard si c’est en 1847 que sont publiées trois histoires de la Révolution (Michelet, Louis Blanc et Histoire des girondins de Lamartine) qui vont dans ce sens. - La Seconde République amenée au pouvoir par février parait être le fruit d’une révolution «littéraire» et vit ses premiers mois dans «l’illusion lyrique» La révolution de février qui proclame la République dans un désordre total porte au pouvoir Lamartine, son porte-parole, qui est alors considéré comme le plus grand poète français. Certains vont jusqu’à parler d’une révolution des belles phrases et on entend même dire que le choix du nouveau gouvernement (réunion de deux gouvernements formés dans les locaux du journal des républicains modérés (Le National, Lamartine, Arago, Ledru-Rollin, Marie, Crémieux, Garnier-Pagès) et dans le bureau du journal des démocrates (La Réforme Marrast, Flocon, Louis Blanc et Albert, un ouvrier)).repose sur les suggestions d’un éditeur. Cette constatation est assez parlante pour saisir «l’esprit de 1848», ainsi que «l’illusion lyrique» et la déconnexion d’une révolution imaginée d’avec la réalité. Ce gouvernement vit à l’heure des élans romantiques, il rejette l’idée d’une république fondée sur la terreur et rêve d’une République pacifique, ordonnée et fraternelle (la fraternité étant le grand mot d’ordre de février). B) Elle va de pair avec l’idéal de fraternité, placé entre la liberté et l’égalité qui unifie la nation en oubliant les antagonismes sociaux et politiques. En effet, la révolution de février et les débuts de la Seconde République se placent sous l’idéal de la fraternité qui permet de réconcilier la nation en oubliant les antagonismes sociaux. - Une réconciliation utopique de toutes les classes de la société. Ce sont par exemple les étudiants du quartier latin qui ont déclenché les mouvements de février, l’alliance entre le peuple, les dirigeants, les forces armées, les étudiants… est consacrée (comme en 1830, dans le tableau de Delacroix : La liberté guidant le peuple où tous sont réunis sur les barricades). Les ouvriers applaudissent à la proclamation de la République, les autorités religieuses bénissent les arbres de la liberté, la bourgeoisie est rassurée par le caractère pacifique de la révolution. Février c’est aussi l’exaltation du peuple et de la liberté, des inscriptions apparaissent sur les murs (des «placards de toutes couleurs où vers et prose se disputaient l’attention des passants» nous dit Daniel Stern), en l’honneur de la révolution et du peuple français. - Une union fragile des sensibilités politiques opposées à la Monarchie de Juillet. Cette glorification du peuple, le début de reconnaissance de la condition des ouvriers, l’utopie de l’union des classes ainsi que l’atmosphère pacifique qui se dégage de cette révolution (autant de thèmes relayés auparavant par des écrivains romantiques tels que George Sand (en 1841 dans Le Compagnon du Tour de France : une notable de province tombe amoureuse d’un ouvrier) ou Victor Hugo Melancholia, 1838) favorisent l’union des sensibilités politiques opposées à la Monarchie de Juillet; ainsi pour la première fois des socialistes apparaissent au gouvernement. - Cette fraternité semble effective aux débuts de la Seconde République. Et la fraternité semble effective dans les premiers mois de cette République qui propulse ce mot aux cotés de la liberté et de l’égalité. Après février on voit de grandes manifestations populaires et spontanées, d’après Daniel Stern même les classes les plus pauvres donnent volontairement à la jeune république, des arbres de la liberté continuent d’être plantés, la jeunesse défile de nuit à la lueur des torches, le gouvernement prend des mesures démocratiques et sociales (suffrage universel le 2mars, création des ateliers nationaux, liberté totale de la presse et des réunions publiques 4 mars, ouverture à tous les citoyens de la garde nationale 8mars, suppression de la peine de mort et de l’esclavage dans les colonies) et Lamartine utilise toute son éloquence pour réaliser cette république fraternelle, refusant par exemple le 25 février d’adopter le drapeau rouge lié au souvenir «des proscriptions, des spoliations, des échafauds». Transition: Le peuple se croit donc libre, et l’ambiance euphorique et fraternelle qui règne en février comme pendant les premiers mois de la Seconde république semble bien consacrer cette première révolution comme une révolution romantique et réussie, mais il semble que l’illusion lyrique touche bientôt à ses limites et que le mot de l’ouvrier Marche en interrompant un discours uploads/Histoire/ 1848-une-revolution-romantique.pdf

  • 33
  • 0
  • 0
Afficher les détails des licences
Licence et utilisation
Gratuit pour un usage personnel Attribution requise
Partager
  • Détails
  • Publié le Jui 14, 2022
  • Catégorie History / Histoire
  • Langue French
  • Taille du fichier 0.1022MB