Séquence 1 Le langage en scène Sommaire 1. Le genre théâtral p.34 2. Méthodolog
Séquence 1 Le langage en scène Sommaire 1. Le genre théâtral p.34 2. Méthodologie de la lecture analytique p.45 3. Corrigés des exercices p.71 SIMONIN, Le Vray Portrait de monsieur de Molière en habit de Sganarelle, 17e siècle. Objectifs 1. Réviser les notions acquises sur le genre dramatique. 2. Préparer les épreuves orale et écrite du baccalauréat. 33 Séquence 1 Cned – Académie en ligne 34 Séquence 1 Précis d’histoire littéraire 1. Les origines du théâtre Je vous rappelle que le théâtre occidental est né dans la Grèce antique, du culte de Dionysos. Lors des fêtes en l’honneur du dieu, des choristes dégui- sés figuraient ses compagnons, les satyres1 ; ils dansaient autour de l’autel en chantant des cantiques, et donnaient la réplique au coryphée (le chef de chœur). Au VIe siècle avant Jésus-Christ, le coryphée fut remplacé par un véritable acteur, jouant un puis plusieurs rôles. Par la suite un deuxième acteur fut introduit, le protagoniste, puis un troisième ; ainsi se développa l’action dramatique avec un dialogue. Le chœur lui-même fut composé, non plus des satyres, mais de personnages mêlés au drame. On organisa alors des concours dramatiques, particulièrement aux gran- des Dionysies qui se célébraient au printemps. Les concurrents, après une sélection préalable, devaient fournir quatre pièces : une trilogie tra- gique (série de trois œuvres dramatiques dont les sujets font suite les uns aux autres) et un drame satyrique (pièce mi-tragique, mi-bouffonne où, à côté du héros, apparaissent les satyres ainsi que d’autres person- nages du cortège de Dionysos). Trois auteurs tragiques ont marqué les débuts du théâtre : Eschyle, So- phocle et Euripide. La comédie est légèrement postérieure, avec Aristo- phane. Et vers 335 avant Jésus-Christ, dans la Poétique, Aristote codifie le genre en énonçant quelques règles simples. Dès sa naissance, le théâtre a été un art du spectacle (étymologique- ment, « théâtre » vient d’un verbe grec signifiant « regarder »). Le théâtre a connu dans le passé un succès immense, d’autant qu’il exis- tait peu de divertissements. 1. Satyre : dans la mythologie grecque, demi-dieu rustique qu’on représentait avec de pe- tites cornes, des jambes de bouc et une petite queue ; les satyres jouaient de la flûte et exécutaient des danses en l’honneur de Dionysos. A 1 Le genre théâtral Cned – Académie en ligne 35 Séquence 1 2. Rapide historique du théâtre français Au Moyen Âge, le théâtre a été d’abord religieux (ce qui est conforme à ses origines) avec les « Miracles » ou « Mystères » où les principaux per- sonnages étaient les saints, le diable, le Christ ; par ailleurs, la farce s’est développée avec ses procédés comiques et ses jeux de mots grossiers. Le XVIe siècle voit la fin du « Mystère » : il rassemblait des milliers de personnes, ce qui finit par inquiéter les autorités qui l’interdirent. Paral- lèlement, la scène française subit l’influence italienne de la Commedia dell’arte : sur un canevas affiché en coulisses, les acteurs improvisaient le jeu et le dialogue ; les personnages types (Arlequin, Pierrot, Scaramou- che, Polichinelle…) portaient des costumes traditionnels et des masques, hormis les personnages féminins (Colombine, Isabelle…). Au XVIIe siècle, c’est l’apogée du théâtre français et plus précisément du théâtre classique avec Corneille, Racine et Molière. Les doctes ou savants, en particulier l’abbé d’Aubignac2, et l’Académie française ins- taurent de nombreuses règles inspirées d’Aristote, la plus fameuse étant la règle des trois unités : La pièce doit se dérouler en un seul lieu ; Corneille élargit cette notion à une ville entière. L’action doit se dérouler d’abord entre le lever et le coucher du soleil, puis en vingt-quatre heures au plus. L’action doit être unique (exposition, nœud et péripéties, dénouement). À ces trois règles, les classiques en ajoutent d’autres : Le mélange du comique et du tragique est proscrit, d’ailleurs la tragi-co- médie (tragédie qui se termine bien comme Le Cid) est délaissée au pro- fit de la tragédie, genre majeur au XVIIe siècle ; c’est Molière qui amène la comédie à la même notoriété que la tragédie. Elle interdit de représenter la mort violente sur la scène. Il ne s’agit pas de la vraisemblance des événements mais des caractères. Le XVIIIe siècle est une période de crise. Si la comédie est très bien re- présentée avec Marivaux et Beaumarchais, il n’en va pas de même de la tragédie. Aussi Diderot tente-t-il une rénovation en créant le drame bour- geois ou « genre sérieux », pièce en prose visant à la vérité dans le ton, cherchant le mouvement et le pathétique et représentant des conflits de la vie privée avec une intention moralisatrice et une exaltation des va- leurs bourgeoises ; mais ce genre périclite car le discours moral y est trop pesant. Signalons la naissance, à la fin du XVIIIe siècle, du mélodrame, drame populaire caractérisé par l’invraisemblance de l’intrigue et des si- tuations, l’outrance des caractères et du ton. 2. L’abbé d’Aubignac (1604-1676) : théoricien du théâtre français au XVIIe siècle et neveu du cardinal de Richelieu qui avait lui-même fondé l’Académie française en 1635. unité de lieu unité de lieu unité de temps unité de temps unité d’action unité d’action unité de ton unité de ton la bienséance la bienséance la vraisemblance la vraisemblance Cned – Académie en ligne 36 Séquence 1 Au XIXe siècle, le mouvement romantique donne au théâtre un nouvel élan avec l’apparition du drame romantique illustré par Hugo, Vigny et Musset. Ce théâtre d’action accorde une place de choix aux thèmes his- toriques ; il mêle les genres en rejetant les règles classiques, sauf l’unité d’action. Dans la seconde moitié du siècle naît un théâtre symboliste par opposition à un théâtre réaliste bourgeois. C’est aussi l’époque des vaudevilles, comédies complexes (Feydeau, Labiche). Le XXe siècle est marqué par la place croissante du metteur en scène. Au début du siècle Claudel continue dans la voie du symbolisme tandis que Jarry se livre à des provocations (Ubu Roi). Durant l’entre-deux-guerres, de nombreux dramaturges, Cocteau, Anouilh, Giraudoux, retournent aux mythes antiques et tentent de les actualiser. D’autre part, à partir de la seconde guerre mondiale, Sartre et Camus proposent un théâtre de ré- flexion. Après la guerre le sentiment de l’absurde triomphe : Ionesco et Beckett montrent les limites du langage, son vide. Mais le théâtre, de- puis le début du XXe siècle, est en crise car il est concurrencé par d’autres arts du spectacle, en particulier le cinéma, et il survit péniblement. Quelques rappels techniques Étudier un texte théâtral est une gageure : c’est un peu comme étu- dier une partition musicale sans instrument. Rappelons les propos de Molière dans l’avertissement « Au lecteur », en tête de L’Amour médecin : « on sait bien que les comédies3 ne sont faites que pour être jouées ; et je ne conseille de lire celles-ci qu’aux personnes qui ont les yeux pour découvrir dans la lecture tout le jeu du théâtre ». Il faut donc imaginer les décors, les costumes, le physique, le ton, les gestes des acteurs, les différents jeux scéniques possibles. Procédons à quelques rappels techniques en partant d’un extrait du Malade Imaginaire de Molière, comédie-ballet en trois actes et en prose. La scène se déroule dans la chambre d’Argan, le malade imaginaire ; outre ce dernier, sont présentes sa servante Toinette et sa fille Angélique. Argan annonce à sa fille qu’il a l’intention de la marier. Il s’ensuit un quiproquo : Angélique croit qu’il lui a choisi pour époux le jeune homme qu’elle aime, Cléante. Mais son père la détrompe : il a choisi Thomas Diafoirus, neveu et héritier de son médecin, monsieur Purgon ! Angélique est fort déçue. Toinette intervient alors et tente d’amener Argan à renon- cer à son projet ; la discussion devient de plus en plus vive. 3. Ici : pièce de théâtre (langage du XVIIe siècle). B Cned – Académie en ligne 37 Séquence 1 ARGAN. - On dira ce qu’on voudra ; mais je vous dis que je veux qu’elle exécute la parole que j’ai donnée. TOINETTE. - Non ; je suis sûre qu’elle ne le fera pas. ARGAN. - Je l’y forcerai bien. TOINETTE. - Elle ne le fera pas, vous dis-je. 5 ARGAN. - Elle le fera, ou je la mettrai dans un couvent. TOINETTE - Vous ? ARGAN. - Moi. TOINETTE. - Bon. ARGAN. - Comment, bon ? 10 TOINETTE. - Vous ne la mettrez point dans un couvent. ARGAN. - Je ne la mettrai point dans un couvent ? TOINETTE. - Non. ARGAN. - Non ? TOINETTE. - Non. 15 ARGAN. - Ouais ! Voici qui est plaisant ! Je ne mettrai pas ma fille dans un couvent, si je veux ? TOINETTE. - Non, vous dis-je. ARGAN. - Qui m’en empêchera ? TOINETTE. - Vous-même. ARGAN. - Moi ? 20 TOINETTE. - Oui. Vous n’aurez pas ce cœur-là. ARGAN. - Je l’aurai… TOINETTE. - Vous vous moquez. ARGAN. - Je ne me moque point. 25 TOINETTE. - La tendresse paternelle vous prendra. ARGAN. - Elle ne me prendra uploads/Histoire/ al7fr29tepa0009-sequence-01.pdf
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- Publié le Oct 09, 2022
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