L’apport du français aux autres langues – Extrait du site www.dixel.fr / Dossie
L’apport du français aux autres langues – Extrait du site www.dixel.fr / Dossiers thématiques mensuels L'apport du français aux autres langues Le français, comme les autres langues, a constitué son vocabulaire en héritant largement de mots du latin mais également en empruntant à d'autres langues de sa famille comme l'occitan, l'italien, l'espagnol… et aussi à l'allemand, au russe, au japonais… Mais sait-on que ces langues (excepté le latin !) ont elles aussi emprunté au français à différentes périodes de l'histoire ? Un mot comme rendez-vous, par exemple, que le rendez-vous soit d'affaires ou amoureux, est passé non seulement dans toutes les langues européennes, tel quel (sauf en espagnol : rendibu), mais également en arabe, en japonais et en persan. Charme, routine, cocarde, cabaret, restaurant ont connu pareille fortune à l'étranger. Et le chinois a emprunté wei au français ouais « allo ? » (lorsque l'on décroche le téléphone) ou encore ka-lem-bourg « vaudeville » à calembour. Parmi les gallicismes — ces mots français ou d'origine française que l'on trouve dans d'autres langues —, certains sont faciles à reconnaître, comme ceux qui viennent d'être cités ; d'autres sont plus dissimulés parce qu'anciens dans la langue emprunteuse, comme le français potage qui se cache derrière l'anglais porridge ou le vieux français tailloir derrière l'allemand Teller « assiette ». 1. LES CIRCONSTANCES HISTORIQUES L'emprunt est souvent un « emprunt de nécessité » quand la langue emprunteuse ne connaît pas la réalité à laquelle le mot renvoie. Le mode d'habitation des Inuits, l'igloo, n'étant pas un habitat traditionnel français, il était normal d'emprunter ce mot à la langue inuit. Mais l'emprunt peut être également un « emprunt de luxe » quand la langue donneuse jouit d'un prestige économique, politique, culturel, ce qui est le cas pour le français. Les principales périodes de l'histoire de la France propices à ces emprunts sont celles pendant lesquelles la France et le français jouissaient d'un grand prestige. Le Moyen Âge ◆ la poésie des troubadours du sud de la France, en occitan, et des trouvères du Nord, en français, diffusent l'amour courtois, la fin'amor, qui exalte avec finesse et subtilité les sentiments. Ce rayonnement culturel touchera d'un côté l'Italie, de l'autre l'Allemagne. C'est en effet à cette époque que l'italien emprunte mangiare au français manger, mot et attitude plus délicats aux yeux du poète Dante que manicare « mâcher », jugé trop expressif, et pourtant… de même origine que manger (le latin manducare). L'italien et l'allemand connaissent le français aventure depuis le XIIe siècle : avventura, en italien ; Abenteuer, en allemand. D'autres emprunts auront lieu au XIIIe siècle, période de l’apogée française dans tout le Moyen Âge occidental. ◆ la conquête de l'Angleterre par les Normands En 1066, Guillaume le Conquérant, duc de Normandie, soumet l'Angleterre et en devient roi. Il entraîne à sa suite ses chevaliers originaires des régions de l'ouest de la France. Au XIIe L’apport du français aux autres langues – Extrait du site www.dixel.fr / Dossiers thématiques mensuels 2 siècle, l'influence de l'Île-de-France, siège de la royauté, est grandissante ; Aliénor d'Aquitaine apporte également ses possessions du Sud-Ouest où l'on parle gascon ; au XIIIe siècle, une partie de la Picardie devient anglaise. Normand, angevin, picard, ces dialectes d'oïl, à côté du gascon, sont à la base de l'anglo-normand, variété de français parlé en Angleterre. Il sera d'usage courant à la cour d'Angleterre jusqu'au début du XVe siècle et dans les couches dirigeantes de la société. Le prestige du français, surtout écrit, durera jusqu'au XVIIIe siècle dans le domaine juridique ; l'anglais y sera toutefois imposé définitivement au début du XVIe siècle. Ces nombreux et divers apports expliquent pourquoi 60 % du vocabulaire anglais était d'origine française jusqu'au XVIIIe siècle et il en reste toujours aujourd'hui, environ 33 %. L'anglais est donc la langue qui a le plus emprunté au français. X DES EMPRUNTS CACHÉS L'anglais est une terre d'élection pour les gallicismes « cachés ». Entrés à date ancienne dans la langue, ils ne se remarquent pas aisément. Citons pour exemple to catch « prendre, attraper » et to chase « poursuivre, chasser », qui remontent à deux formes dialectales différentes du français chasser ; to search « chercher » à une forme de chercher ; eager « avide » à aigre ; car « voiture » à une forme normande ou picarde de char… Le tourisme passe pour avoir été inventé par les Anglais. Mais, si l'on examine les mots anglais liés au voyage, on se rend compte que certains d'entre eux sont d'origine française : l'anglais voyage est notre voyage, to travel « voyager » vient de travailler, journey est le français journée, trip est issu d'un ancien français treper « bouger », tour est le français tour. Le règne de François Ier (1515-1547) Son règne est marqué par sa victoire dans le Milanais qui met provisoirement fin aux campagnes d'Italie menées par la France dès le XIVe siècle. Dans le conflit religieux qui oppose catholiques et protestants, le roi prend parti pour les catholiques, ce qui provoque la fuite et l'exil des huguenots, principalement dans les pays germaniques favorables au protestantisme. Les rapports conflictuels entre l'Italie et la France n'empêcheront pas les deux langues de s'influencer réciproquement. C'est à cette époque que batterie (d'artillerie) passe en italien, tout comme avant-garde (de l'armée). L'arrivée des huguenots en Allemagne apporte elle aussi sa moisson de gallicismes. Les velléités d'accession au trône d'empereur germanique de François Ier et le rapprochement qu'il tente avec les princes allemands favorisent l'entrée dans le vocabulaire allemand de mots comme Kamerad « camarade », Dragoner « dragon (soldat) », Grenadier, Courage… Le siècle de Louis XIV (1643-1715) La France du « Roi-Soleil » tient un rôle prépondérant en Europe, tant politique que culturel. Le règne de Louis XIV est marqué par l'essor de la vie artistique et littéraire, par l'épanouissement du classicisme français, que symbolise le château de Versailles. Le très grand prestige de la France à l'étranger se mesure aux nombreuses copies du château que les souverains européens font construire (le Peterhof à Saint-Pétersbourg, Schönbrunn en Autriche, le palais de Wilanów en Pologne, le château de Sanssouci — un mot français — en Allemagne…). En polonais, on dit d'ailleurs par plaisanterie de quelqu'un ou de quelque chose d'extrêmement chic : « c'est, il est wersal »… Versailles ; le mot arcade est emprunté par l'allemand. À la même époque, Colbert réorganise l'armée, la dotant de moyens en rapport avec les ambitions politiques du souverain. De nombreux mots de ce domaine seront L’apport du français aux autres langues – Extrait du site www.dixel.fr / Dossiers thématiques mensuels 3 empruntés par l'allemand (Korporal « caporal » ; Biwak « bivouac »), mais aussi par l'italien qui emprunte bivouac et gendarme. Les danses sont à l'honneur à Versailles — en témoigne Le Bourgeois gentilhomme de Molière avec son maître de ballet. On trouve aujourd'hui en anglais le vocabulaire de la danse intact, comme dans cette phrase (réellement anglaise !) tirée du journal New Yorker de 1975 : His passé leg in a multiple pirouette sweeps through rond de jambe en l'air into the opening battement of a series of grands jetés en tournant. Les Lumières et la Révolution (XVIIIe siècle) Le siècle de Voltaire, Diderot, Rousseau est celui de la raison, de la liberté d'opinion et de conscience. Les idées des Encyclopédistes, mettant en cause la légitimité du pouvoir royal, appellent la Révolution de 1789. Elles influencent certains souverains de l'époque comme Catherine II de Russie ou Frédéric le Grand de Prusse, à la cour duquel séjourne Voltaire ; le mariage de Louis XV avec Marie Leszczyńska, fille du roi de Pologne, lie les deux pays (on compte 3 500 mots polonais d'origine française). Toutes les cours d'Europe parlent le français, qui est alors à l'apogée de son prestige. Les emprunts sont donc nombreux : civisme passe en italien, amateur en allemand et en anglais, amour-propre en anglais encore… Le système métrique, imposé par la Révolution à une France dont chaque province possède ses propres mesures, est repris par la plupart des pays européens (italien etto « 100 grammes » est le français hecto ; l'allemand Meter est le français mètre…). De la fin du XVIIIe au XXIe siècle Le temps de l'Empire et de Napoléon Ier — en bulgare, un napoleonki est un caleçon long — est l'ère de l'industrialisation et de l'essor économique de la France. C'est aussi le temps de la présence française en Asie (Cochinchine, Annam, Tonkin, c'est-à-dire l'actuel Viêtnam), au Moyen-Orient (Syrie, Liban et dans une moindre part Égypte et Soudan), en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne. Les domaines d'emprunts se précisent, se fixent et s'imposent. L'art de vivre (les Allemands emploient le proverbe « [bien] vivre comme Dieu en France »), le luxe, le raffinement, la mode et la haute couture, la liberté (et le libertinage) dépassent les frontières de l'Europe et du continent. Pourquoi dire en anglais lover « amoureux, amoureuse » alors que l'on peut dire amie ou fiancée uploads/Histoire/ apports-du-francais-aux-autres-langues 1 .pdf
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- Publié le Fev 20, 2022
- Catégorie History / Histoire
- Langue French
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